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Laurent Lestarquit, José Ángel Ávila Rodríguez and team

Signaux radio pour une meilleure navigation par satellite

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Centre National d'Etudes Spatiales (CNES)
La radionavigation et la localisation basées dans l'espace ont connu d'importants progrès ces dernières années. Elles s'apprêtent aujourd'hui à connaître une nouvelle avancée grâce à Galileo, le système mondial de navigation par satellite (GNSS) mis au point par les Européens. La technologie de signalisation élaborée par l'équipe d'ingénieurs européens aide non seulement Galileo à apporter une plus grande précision et à dissiper le rapport signal-écho parasite, mais elle incite aussi la navigation par satellite et ses fonctionnalités à passer à la vitesse supérieure.

Lauréats du Prix de l’inventeur européen 2017

Dirigée par l'ingénieur français Laurent Lestarquit et son collègue espagnol José Ángel Ávila Rodríguez, une équipe européenne dont font également partie l'Allemand Günter Hein et le Belge Lionel Ries, a une spécialisation unique : envoyer des signaux clairs depuis l'espace. Plus de 50 satellites de navigation et de positionnement actuellement en orbite, notamment ceux du système américain de positionnement par satellite (GPS), du système mondial de radionavigation par satellite russe (GLONASS) et plus récemment du système européen Galileo, émettent une cacophonie virtuelle de radiofréquences en direction de la Terre. L'équipe cherche à garantir l'absence d'interférence entre tous les signaux pour que les usagers, comme les développeurs, puissent profiter de la technologie de positionnement prochaine génération qu'offre Galileo.

La contribution de l'équipe aux technologies de modulation et de signal à étalement de spectre constitue l'un des composants essentiels du système européen commun de positionnement par satellites. Elle a permis l'émission de signaux renforçant la précision, économisant l'énergie des satellites et assurant l'interopérabilité avec le GLONASS et l'actuel GPS ainsi que ses éventuelles mises à jour.

Galileo sera opérationnel en 2020. Il sera alors le GNSS le plus avancé et le plus précis au monde, atteignant une précision de positionnement horizontal et vertical d'un mètre pour les signaux standards, et de quelques centimètres lors de l'utilisation de signaux haut de gamme et de techniques de positionnement précises. Galileo permettra aussi d'obtenir de meilleurs services de positionnement à des latitudes élevées, de faire avancer les fonctions de recherche et sauvetage (SAR) mondiales et d'accéder à de nombreuses autres possibilités.

Bénéfices pour la société

En plus des améliorations initiales de précision de navigation et de positionnement, Galileo fera bénéficier ses usagers d'un concept innovant conçu pour fonctionner avec les technologies naissantes telles que la conduite autonome, l'optimisation des déplacements, la communication entre machines ou encore l'Internet des choses.

Il est fort probable que le GNSS ait prochainement une influence directe sur les transports, en permettant d'augmenter l'économie de temps et de carburant ainsi qu'améliorer la sécurité. Il se peut que Galileo soit intégré aux systèmes de péage des routes nationales. Il pourrait également soutenir l'agriculture intelligente pour permettre une meilleure exploitation des terres disponibles et un arpentage plus précis.

Dans un futur plus lointain, les villes européennes modernes « intelligentes » utiliseront probablement les informations de Galileo pour une gestion et une planification urbaine plus efficace. Les compagnies de navigation ont déjà adopté des solutions axées sur le GNSS pour leur logistique multimodale, afin de mieux suivre et organiser leurs expéditions. Certains problèmes internationaux urgents tels que le changement climatique, les préoccupations environnementales ou les catastrophes naturelles pourraient également voir apparaître des solutions innovantes grâce au système de positionnement par satellites.

Galileo peut enrichir un tel éventail d'applications publiques, privées et de recherches car il est spécifiquement conçu pour un usage civil, contrairement au GLONASS et au GPS qui sont à l'origine conçus pour le domaine militaire. Si le système dispose d'un signal sécurisé pour des applications stratégiques et sécuritaires, les autres signaux sont eux accessibles au public. Il permet ainsi aux Européens et à tout autre usager d'avoir accès à un système indépendant de navigation par satellite.

Avantages économiques

L'objectif de Galileo est d'accroître la part de l'Europe sur le marché mondial du GNSS. On estime que d'ici à 2020, ce marché générera un chiffre d'affaires annuel de 350 milliards d'euros. En 2015, un rapport de l'Agence du GNSS européen estime que le marché aval du GNSS mondial (soit le prix fort de détail des appareils équipés de jeux de puces GNSS) connaîtra un taux de croissance annuel de 7 % sur cette période, dépassant le PIB mondial.

Les technologies GNSS encouragent les entreprises, qu'il s'agisse des grands fabricants de téléphones et d'appareils mobiles que des petites entreprises spécialisées en positionnement mondial. D'après l'AZO, une agence aidant à la création de start-ups, 119 start-ups ont mis en place ou exploitent des signaux Galileo dans la région de Bavière en Allemagne. Elles emploient environ 1 600 personnes dans la haute technologie et produisent un chiffre d'affaires combiné d'environ 130 millions d'euros.

Avec un total de 30 satellites prévus (dont six de rechange), Galileo sera entièrement opérationnel en 2020. Il devrait alors générer des retombées économiques importantes, avec des investissements dans la R&D aérospatiale générant un rendement social d'environ 70 %. Autrement dit, pour 100 millions d'euros investis en recherche et développement, le PIB devrait augmenter sur le long terme de 70 millions d'euros dans d'autres secteurs.

Une fois opérationnel, Galileo devrait avoir un impact économique de 90 milliards d'euros sur les 20 prochaines années.

Comment ça marche ?

Lestarquit a mis au point une technique de modulation brevetée appelée la modulation Alternative Binary Offset Carrier (Alt-BOC), qui convertit efficacement quatre signaux en un seul signal puissant : deux signaux très précis pour le service ouvert (SO) de Galileo (canal gratuit pour une utilisation civile) et deux signaux pour le service de la sécurité des personnes (SOL), service payant conçu pour des applications telles que l'aviation où la vie de personnes peut dépendre de l'intégrité du signal. L'Alt-BOC permet non seulement une précision extrêmement élevée pour les récepteurs spécialisés, mais elle aide aussi à économiser l'énergie des satellites.

L'équipe a également développé une technique innovante d'étalement de spectre appelée Composite Binary Offset Carrier (CBOC), qui crée une seule forme nouvelle de signal. Ce signal va permettre aux récepteurs haut de gamme de calculer des positions de manière précise. Il est aussi compatible avec des appareils plus anciens et de moins bonne qualité, ainsi qu'avec d'autres signaux GNSS. Le brevet du CBOC propose un nouveau concept qui permet de combiner en une seule fréquence un CBOC ouvert avec les signaux sécurisés du service public réglementé (PRS). Les signaux du PRS sont destinés à des autorités civiles telles que la police, les gardes-côtes et les douanes. Le PRS est crypté et comprend des mécanismes anti-brouillage.

Inventeurs

Laurent Lestarquit, inventeur de la modulation Alt-BOC et co-inventeur du signal CBOC, s'est intéressé à la technologie GNSS alors qu'elle était un domaine émergent encore non enseigné à l'université. En 1996, un an après le lancement du GPS par les américains, il sort diplômé de l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE-SUPAERO). En plus de son travail concernant l'Alt-BOC et le CBOC, Laurent Lestarquit a contribué au développement du signal PRS. Il a aussi fait partie de la délégation française du GPS et des négociations Galileo qui ont permis de définir les paramètres de compatibilité des deux systèmes. Les recherches en navigation de Lestarquit ne s'arrêtent pas à sa carrière. En effet, il a participé à des compétitions d'orientation de haut niveau en utilisant des techniques traditionnelles de navigation, sans GNSS. Il a aussi été co-pilote dans la course internationale tout-terrain Camel Trophy.

Ávila Rodríguez a obtenu son doctorat en génie aérospatial à l'Université allemande fédérale des forces armées de Munich. Au cours des 15 dernières années, il a occupé des postes d'ingénieur en GNSS, il a travaillé en tant que conseiller principal et a été directeur ou membre de nombreux programmes liés au GNSS. Ávila Rodríguez est co-auteur de plus de 60 articles scientifiques dans le domaine de la navigation par satellite. Il occupe depuis 2015 le poste d'ingénieur principal en sécurité et évolutions du signal à l'Agence spatiale européenne (ASE). Son travail dans le domaine du GNSS lui a valu de nombreux prix.

Les principaux membres du Galileo Signal Task Force et les co-inventeurs du brevet CBOC ont soutenu José Ángel Ávila Rodríguez et Laurent Lestarquit dans leur recherche. Jean-Luc Issler (France) a ainsi aidé à composer l'équipe mais aussi à développer l'une des autres bandes de fréquence utilisée par Galileo. Quant à Günter Hein, académicien allemand, il a mis au point et enseigné la technologie de navigation et la conception, au cours de sa carrière qui s'étale sur plus de 40 ans. Enfin, le franco-belge Lionel Ries est l'auteur ou le co-auteur de 25 brevets et d'environ 100 articles de recherche, la plupart ayant trait à la navigation par satellite.

Le saviez-vous ?

Le positionnement mondial avec des satellites a d'innombrables applications. L'une des plus originales vient étayer les théories d'Einstein sur la relativité restreinte et la relativité générale. La relativité restreinte suppose que plus un objet se déplace vite, plus lentement le temps passe sur l'objet par rapport à un corps se déplaçant plus lentement. La relativité générale considère la gravité comme une courbure dans l'espace-temps, où plus de corps importants courbent le temps et l'espace autour d'eux.

Ces deux théories peuvent être mesurées grâce à la technologie GNSS. L'évolution rapide des satellites de positionnement équipés d'horloges atomiques montre un décalage temporel relatif d'environ 7 microsecondes de plus (millionième d'une seconde) par jour dû à leur vitesse en orbite d'environ 14 000 km/hr. Cependant, en poussant le temps dans une autre direction, la réduction de la force gravitationnelle réduite (une courbure espace-temps moins importante) a pour effet de faire tourner les horloges à 40 et quelques microsecondes plus vite que sur Terre.

Les horloges atomiques de Galileo s'adaptent à ces principes et à d'autres phénomènes de décalage temporel tels que l'effet Sagnac qui est provoqué par la rotation de la Terre. Ainsi, les horloges de Galileo réduisent légèrement leur vitesse et se synchronisent toutes les 100 minutes environ. Dans tous les cas, il est intéressant de savoir que la technologie utilisée par notre appareil GNSS contribue à démontrer la véracité des théories d'Einstein. Renseignez-vous sur les autres moyens  qui permettent de soutenir les découvertes scientifiques et l'industrie par l'intermédiaire des technologies spatiales et satellitaires.

Inventors revisited

En 2020, l'OEB a repris contact avec d'anciens finalistes et lauréats pour connaître leurs points de vue sur les tendances de l'innovation et de la propriété intellectuelle : un regard unique sur la recherche et les inventions nouvelles à la pointe de la technologie.

Laurent Lestarquit, Lionel Ries, José Ángel Ávila Rodríguez, Jean-Luc Issler and Günter Hein
Toucher les étoiles

Cette équipe paneuropéenne a développé les signaux radio qui font de Galileo le système de navigation par satellite le plus précis au monde. Aujourd'hui, 1,5 milliard d'utilisateurs de par le monde profitent des 22 satellites opérationnels en orbite. Ce réseau a même aidé à fair face à la pandémie.

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Talk innovation 

Dans deux entretiens séparés, l'équipe Galileo présente le rôle des satellites pour le suivi de la pandémie et l'importance de l'autonomie spatiale en Europe.

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