T 0866/00 (Dérivés du titane/ATOFINA) 30-09-2003
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Composés métallo-organiques insaturés dérivés du titane et leur procédé de préparation
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 97 401 908.5, publiée sous le numéro EP-A-0 825 169, a été rejetée par décision de la division d'examen du 12 avril 2000 au motif qu'elle ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 83 CBE.
Les quatre revendications telles que déposées et servant de base à la décision s'énonçaient comme suit :
"1. Composé métallo-organique insaturé dérivé du titane, représenté par la formule (I) :
FORMULE (I)
dans laquelle R représente un radical tertiobutyle, tertioamyle ou 2-éthylhexyle."
"2. Procédé de fabrication d'un composé de formule (I) tel que défini à la revendication 1, caractérisé par le fait que l'on fait réagir l'acide méthacrylique avec un tétraalcoxytitane Ti(OR)4, où R = isopropyle ou tertiobutyle, pour obtenir un composé (I) correspondant, ou avec Ti(OR)(OtAm)3, où R = isopropyle ou tertiobutyle et tAm = tertioamyle, pour obtenir un composé (I) avec R = tertioamyle, les composés (I) avec R = isopropyle ou tertiobutyle représentant par ailleurs des produits intermédiaires de synthèse que l'on peut faire réagir avec l'alcool tertioamylique ou avec le 2-éthylhexanol, pour obtenir un composé (I) dans lequel R représente respectivement tertioamyle ou 2-éthylhexyle."
"3. Procédé selon la revendication 2, caractérisé par le fait que l'on fait réagir l'acide méthacrylique avec Ti(OR)4 ou Ti(OR)(OtAm)3 avec R = isopropyle ou tertiobutyle et tAm = tertioamyle dans des conditions stoechiométriques, à une température de 40 - 80°C, sous une pression de 13,3-66,7 kPa (100 - 500 mmHg), l'acide méthacrylique étant ajouté à Ti(OR)4 ou Ti(OR)(OtAm)3, le cas échéant dans un solvant tel que le toluène, l'alcool ROH ou l'azéotrope ROH-solvant libéré par la réaction étant progressivement distillé, et lorsque l'on veut obtenir le composé de formule (I) avec R = tertioamyle ou 2-éthyl hexyle à partir des intermédiaires de synthèse, on poursuit la réaction en introduisant dans le milieu l'alcool tertio-amylique ou le 2-éthylhexanol à raison d'environ 3 moles pour 1 mole de composé intermédiaire (I) sous une pression de 13,3 - 66,7 kPa (100 - 500 mmHg) et à une température de 40 - 80°C, en distillant l'isopropanol ou le tertiobutanol libéré par la réaction."
"4. Procédé selon la revendication 3, caractérisé par le fait que l'on obtient Ti(OR)(OtAm)3 (R = isopropyle ou tertiobutyle et tAm = tertioamyle) en faisant réagir Ti(OR)4 avec de l'alcool tertioamylique à raison de 3 moles de ce dernier pour 1 mole de Ti(OR)4, sous une pression de 13,3 - 66,7 kPa (100 - 500 mmHg), à une température de 40 - 80°C, en distillant l'isopropanol ou le tertiobutanol libéré par la réaction."
II. Étant donné que les composés revendiqués sont décrits comme étant applicables en tant qu'intermédiaires dans la fabrication de peintures marines et que la description ne mentionne pas la façon dont on peut arriver à ces peintures marines à partir des composés revendiqués, la Division d'examen était d'avis que l'invention ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 83 CBE.
La division d'examen a motivé son rejet sur la base du principe posé dans la décision T 939/92 (JO OEB 1996, 309), à savoir que n'est pas constitutive d'une invention brevetable la réalisation d'un nouveau composé dont une utilisation, non évidente, n'a pas été avancée. En outre la Division d'examen faisait référence aux directives concernant l'examen à l'OEB C, II, 4.1, 4.9 et 4.10.
III. La Requérante a fait valoir que l'invention concernait trois monomères et leur préparation. Étant donné que les monomères étaient totalement définis et leur préparation était parfaitement décrite, la condition de l'article 83 CBE était remplie.
En outre, la Requérante a contesté que l'article 83 CBE requiert que l'homme du métier sache comment il doit utiliser les composés revendiqués.
IV. La Requérante a conclu à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de l'affaire devant la division d'examen afin de poursuivre la procédure.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Article 83 CBE
2.1. Dans le cas présent, il n'a jamais été contesté que les composés revendiqués sont suffisamment définis et que les procédés pour préparer ces composés sont décrits d'une façon telle qu'un homme du métier puisse les préparer sans qu'il ait à fournir un effort inventif allant au-delà des compétences ordinaires. La Chambre n'a aucune raison de mettre cela en doute.
2.2. La seule raison pour laquelle la Division d'examen considérait que l'exigence de l'article 83 CBE n'était pas remplie se basait sur le fait que la seule indication d'une utilisation des composés revendiqués se trouvait à la page 2, lignes 4 et 5, de la demande publiée, disant "Ces nouveaux composés sont applicables à la fabrication de nouveaux polymères qui peuvent notamment entrer dans la formulation de peintures, en particulier de peintures marines".
Selon la Division d'examen, une invention satisfait aux exigences de l'article 83 CBE si l'homme du métier non seulement est en mesure de préparer les composés revendiqués, mais sait aussi comment il doit les utiliser.
La Chambre ne partage pas ces considérations. Selon la Chambre l'article 83 CBE requiert seulement que l'invention doit être suffisamment exposée. Étant donné que l'invention revendiquée dans la présente demande de brevet est restreinte aux trois monomères et à leur préparation, elle ne concerne ni la préparation de résines pour peintures marines ni l'utilisation des composés revendiqués dans la préparation de telles résines. Dans ces conditions, l'objection selon l'article 83 CBE portant sur l'absence d'indications détaillées concernant l'utilisation des trois monomères revendiqués dans la préparation de peintures marines, laquelle utilisation montre une application industrielle au sens de l'article 57 CBE, ne peut prospérer (voir Teschemacher, Münchner Gemeinschaftskommentar, 7. Lieferung, mai 1985, Cologne, article 83, point 63).
2.3. La Chambre ne peut suivre la position de la division d'examen selon laquelle la décision T 939/92 serait pertinente dans le cas présent en ce qu'il ressortirait, selon la division d'examen, de cette décision que n'est pas constitutive d'une invention brevetable la réalisation d'un nouveau composé dont une utilisation, non évidente, n'a pas été avancée.
Cette décision en effet ne concerne pas les exigences de l'article 83 CBE. Plutôt, de cette décision il ressort qu'un problème technique ne pourrait être pris en considération dans l'examen de l'activité inventive que si l'on pouvait estimer que le problème technique a été effectivement résolu.
Étant donné que, dans le cas présent, le problème technique à la base de l'invention était la réalisation de nouveaux monomères utilisables dans la préparation de peintures marines et, étant donné qu'il n'a jamais été contesté que ce problème technique a été résolu, la décision T 939/92 n'est pas pertinente.
2.4. En ce qui concerne les références aux directives concernant l'examen à l'OEB, il est à noter qu'aux termes de l'article 23(3) CBE, "dans leurs décisions, les membres des chambres ne sont liés par aucune instruction et ne doivent se conformer qu'aux seules dispositions de la Convention". Les chambres de recours de l'OEB ne sont donc pas liées par les Directives relatives à l'examen, qui doivent être considérées comme des instructions du Président de l'OEB.
La Chambre estime néanmoins que les passages des Directives cités par la requérante concernent tous les exigences de l'article 83 CBE et, par conséquent, que ces passages ne sont pas pertinents dans le cas présent pour les raisons citées ci-dessus aux points 2.1 et 2.2.
3. Dans la décision contestée, la division d'examen est uniquement parvenue à la conclusion que la demande de brevet ne remplissait les conditions énoncées à l'article 83 et ne s'est pas prononcée sur les exigences de l'application industrielle (article 57 CBE), de nouveauté (article 54 CBE) et d'activité inventive (article 56 CBE). La Chambre, pour ne pas priver le requérant de la possibilité de bénéficier de deux instances pour apprécier les questions en suspens, juge approprié, dans ces circonstances, de faire usage du pouvoir d'appréciation que lui confère l'article 111(1) CBE (cf. deuxième phrase, deuxième possibilité) et de renvoyer l'affaire à la première instance pour suite à donner.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la division d'examen afin de poursuivre la procédure.