Pilar Granado, Pablo Sosa Domínguez et Luis Chimeno

Le gaspillage alimentaire est un grand problème mondial : on jette plus de 59 millions de tonnes de nourriture en Europe seulement, ce qui représente 132 kg par habitant et une perte d'environ 132 milliards d'EUR pour le marché. À l'échelle mondiale, près d'un cinquième des aliments disponibles pour les consommateurs sont gaspillés, principalement en raison de préoccupations de sécurité, tandis que les maladies d'origine alimentaire affectent chaque année plus de 200 000 personnes dans l'UE. Au-delà des conséquences financières, le gaspillage alimentaire représente plus de 8 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Pilar Granado, Pablo Sosa Domínguez et Luis Chimeno se sont rencontrés à l'université et ont créé ensemble Oscillum afin d’apporter une solution à ce problème. Leurs étiquettes biodégradables intelligentes permettent aux fournisseurs et aux consommateurs de surveiller en temps réel la fraîcheur d'aliments périssables. On peut également utiliser cette technologie sur les fruits pour indiquer s'ils sont murs, et ainsi éviter que les consommateurs ne les manipulent trop et ne les abîme.  

 Les étiquettes alimentaires garantissent la sécurité des personnes, mais les mentions « À consommer jusqu'au » et « À consommer de préférence avant le » sont souvent mal comprises et causent involontairement un sentiment d'insécurité chez les consommateurs engendrant un gaspillage inutile. Les indicateurs de fraîcheur qui existent actuellement présentent des inconvénients. Par exemple, les systèmes temps-température partent du principe que toute rupture de la chaîne du froid implique de devoir jeter le produit, ce qui n'est pas toujours le cas. La technologie d'Oscillum utilise des indicateurs intelligents (molécules) à l'intérieur de l'étiquette. Alors que les bactéries se multiplient, elles génèrent des composés qui interagissent avec l'indicateur sur l'étiquette et la font changer de couleur. Ce changement de couleur indique l'état de fraîcheur de l'aliment après son ouverture. 

Quand un dilemme culinaire donne vie à une découverte technologique 

Les trois amis ont vécu ensemble lors de leurs études à la Universidad Miguel Hernández de Elche d'Alicante, en Espagne. Un dimanche matin, Pablo veut cuisiner, mais ne trouve dans le frigo qu'un morceau de viande douteux qui attend d'être cuisiné depuis un petit moment. Ses colocataires lui déconseillent de manger cette viande, mais il la prépare quand même et ne tombe pas malade. Luis Chimeno explique : « Cela nous a fait réfléchir au nombre de fois où les gens, y compris nous-mêmes, jetions de la nourriture en nous basant uniquement sur son apparence. On s'est alors mis à imaginer des moyens simples et intuitifs pour déterminer si un produit est encore bon.  »  

 Ils ont entamé le développement d’un concept d’étiquetage intelligent, mais leur parcours entrepreneurial a été marqué par de nombreux défis, notamment la mise à l’échelle pour une application industrielle et les contraintes techniques liées à l’impression de ces étiquettes. L'équipe a beaucoup appris en participant à des programmes d'accélération pour les entreprises et à des concours, tout en s'associant à des sociétés d'impression expérimentées qui ont pu les aider à donner vie à leur concept. Oscillum a officiellement été lancée en 2019, avec seulement 6 000 EUR de capital autofinancé. 

 Aujourd'hui, l'entreprise continue de se développer et collabore avec de nouveaux partenaires pour étendre sa gamme d'étiquettes intelligentes. « Oscillum offre aujourd'hui des solutions d'emballage à la fois intelligentes et actives. On ne fait pas que surveiller ce qu'il se passe avec le produit, on peut aussi à présent agir sur ce dernier", explique Luis Chimeno. 

 Cap sur les objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies 

L'étiquetage intelligence d'Oscillum contribue à l'ODD 2 (faim "zéro") en permettant de réduire le gaspillage alimentaire inutile. En évitant les maladies d'origine alimentaire, il favorise également l'ODD 3 (bonne santé et bien-être). Sa conception biodégradable et la réduction des déchets participent à l'ODD 12 (consommation et production responsables), alors que la réduction des émissions liées à l'alimentation contribue à l'ODD 13 (lutte contre les changements climatiques).