T 2208/16 16-03-2021
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Navire pourvu d'une zone de transfert d'un produit liquide potentiellement dangereux
possibilité d'exécuter l'invention (oui)
clarté (oui)
extension de l'objet de la demande (non)
nouveauté (oui)
activité inventive (oui)
I. La Division d'Opposition a décidé le maintien du brevet européen No. 2 597 025 sous forme modifiée selon la requête subsidiaire 1bis. Un recours a été formé contre cette décision par l'Opposante dans les délais et la forme prévus à l'article 108 CBE.
II. Une procédure orale a eu lieu le 16 mars 2021. La Requérante (Opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet. L'Intimée (Titulaire) a demandé le rejet du recours, c'est-à-dire le maintien du brevet sous forme modifiée selon la décision contestée (requête principale) ou, à défaut, sur la base des requêtes subsidiaires 1 à 3 déposées le 23 mars 2017.
III. La revendication 1 (requête principale) du brevet a le libellé suivant :
"Navire (1), par exemple fonctionnant au gaz naturel, et pourvu d'au moins une unité d'alimentation mobile (3), navire qui est équipé d'un pont (4) dont au moins une partie (2) constitue une zone de transfert d'un produit liquide potentiellement dangereux entre ladite au moins une unité d'alimentation mobile (3) et un autre moyen de stockage et/ou d'utilisation (M) de ce liquide au sein dudit navire, à l'aide d'une station de transfert (5) comprenant au moins une tuyauterie (T) de transfert et une robinetterie (R), caractérisée par le fait que ladite zone (2) comporte au moins une aire (2) de réception de ladite au moins une unité (3) d'alimentation mobile, que ledit pont (4) présente, en dessous de son sol (40), au moins un espace de stockage (E) de ladite station de transfert (5), conformé pour être recouvert d'au moins une trappe amovible (53) s'étendant dans le plan dudit sol (40), et en ce qu'il n'existe aucune station de transfert en saillie du pont dans la zone de transfert."
IV. La Requérante a présenté les arguments suivants:
L'objet de la revendication 1 s'étend au-delà du contenu de la demande telle que déposée, notamment les caractéristiques (a) (c'est-à-dire "le navire est pourvu d'au moins une unité d'alimentation mobile (3)") et M7+(b) (c'est-à-dire "l'espace de stockage est conformé pour être recouvert d'au moins une trappe amovible (53) s'étendant dans le plan dudit sol").
Selon la caractéristique (a) l'unité d'alimentation mobile est constamment et invariablement présente sur le navire, au moins la plupart du temps. Cela n'est pas divulgué dans la demande telle que déposée (voir demande publiée (désignée par EP-A dans la suite) ou passages correspondants dans le fascicule du brevet (désigné par EP-B)), car la description mentionne "une aire 20 de réception d'au moins une unité d'alimentation mobile en liquide potentiellement dangereux" (voir EP-B, paragraphe [0016]), cette unité d'alimentation mobile formant par exemple la remorque d'un camion-citerne (EP-B, paragraphe [0017]), ce qui n'implique pas une présence permanente de l'unité d'alimentation mobile dans l'aire de réception. Alternativement, la description illustre un exemple spécifique (EP-B, paragraphes [0018]-[0023]; figure 2) concernant une configuration avec une disposition particulière des citernes sur le pont du navire, cet exemple impliquant des détails (indissolublement liées à la caractéristique (a)) qui ont été omis dans la revendication 1, parvenant ainsi à une généralisation (intermédiaire) inadmissible du contenu de la demande initiale.
Quant à la caractéristique M7+(b), elle représente une limitation par rapport à la caractéristique "apte à être recouvert d'au moins une trappe amovible" (voir EP-B, [0011]) qui ne peut pas être déduite de la description, car le paragraphe [0034] (EP-B) (cité par la Titulaire) décrit un exemple spécifique contenant des caractéristiques (indissolublement liées à la caractéristique M7+(b)) qui ont été omises dans la revendication 1. Par conséquent une généralisation (intermédiaire) inadmissible en résulte.
L'objet de la revendication 1 n'est pas clair, comme la caractéristique (a) implique une présence permanente à bord du navire de l'unité d'alimentation mobile, alors que cette unité constitue un objet bien distinct, différent et séparé du navire, sans aucune relation structurelle avec ce dernier. De ce fait il n'est pas clair quelle est l'étendue de l'objet de la revendication 1, ainsi que de la protection conférée par cet objet, puisque les limitations impliquées par ladite caractéristique (a) ne sont pas claires.
En plus, il y a une contradiction entre les caractéristiques (a) et (c) (c'est-à-dire "il n'existe aucune station de transfert en saillie du pont dans la zone de transfert"). En fait, la caractéristique (a) entraîne (au vu de la description de EP-B; [0029], figure 3) que lors du transfert du produit liquide entre l'unité d'alimentation mobile et le moyen de stockage (au sein du navire) la station de transfert comporte des tuyaux flexibles connectés à l'unité d'alimentation mobile et donc est en saillie du pont dans la zone de transfert.
L'objet de la revendication 1 n'est pas divulgué de manière suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier puisse exécuter l'invention. En effet, la caractéristique (c) n'est pas remplie lors de l'utilisation de la station de transfert, et la présence des citernes sur le pont du navire pendant une période de temps prolongée ne permet pas de résoudre le problème technique de l'invention dans toute l'étendue de l'objet tel que défini par la revendication 1. En particulier, l'homme du métier ne peut pas mettre en ½uvre simultanément les caractéristiques (a) et (c).
L'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau à l'égard de D25 (WO-A1-2011/124748), qui divulgue l'ensemble des caractéristiques revendiquées, et en l'espèce les caractéristiques M3 (c'est-à-dire "au moins une partie (2) (du pont) constitue une zone de transfert d'un produit liquide potentiellement dangereux"), M6 (c'est-à-dire "ledit pont (4) présente, en dessous de son sol (4), au moins un espace de stockage de ladite station de transfert (5)"), M7+(b) (c'est-à-dire "l'espace de stockage est conformé pour être recouvert d'au moins une trappe amovible (53), s'étendant dans le plan dudit sol (40)") et (c) (voir ci-dessus).
La caractéristique M3 est divulguée par D25, car ce document montre que l'unité d'alimentation mobile ou réservoir 5a,b (D25, figure 1-3) est agencée dans une ouverture ou cavité formée sur le pont du navire, ladite unité étant montée sur le réservoir fixe 4 du navire, la partie supérieure et inférieure de cette unité étant disposées respectivement au-dessus et au-dessous du sol du pont (D25, figures 1-3). Evidemment, une zone de transfert est constituée par la partie du pont comprenant ladite ouverture, le transfert du produit liquide contenu dans ladite unité d'alimentation mobile vers le réservoir fixe ayant lieu dans cette zone. La caractéristique M6 est connue de D25, car la station de transfert 51 est visiblement aménagée dans un espace situé au-dessous du pont (voir figures 1 à 3). Les caractéristiques M7+(b) et (c) sont également montrées dans D25, puisque ladite ouverture ou cavité formée dans le pont du navire peut être recouverte par une trappe amovible et que dans sa position de non-utilisation la station de transfert 51 n'est pas en saillie du pont.
L'objet de la revendication 1 n'est pas inventif au vu de D1 (EP-A1-2 088 075) et des connaissances générales de l'homme du métier ou de D1 et D24 (WO-A2-2011/ 063962). Le navire selon D1 diffère de l'objet de la revendication 1 seulement par la caractéristique (a) (voir ci-dessus). La caractéristique (c) est connue de D1, car en considérant la figure 2 on voit que les ouvertures ou trappes 68 ("hatches 68") permettent l'accès aux passages 42 (situés sous le pont) comprenant la station de transfert, et en particulier les conduits ou tuyaux 50 (transportant un liquide potentiellement dangereux) ainsi que des valves, des ventilateurs, des détecteurs de gaz et des extincteurs d'incendie, ces passages étant accessibles au personnel pour la manutention desdits conduits. Afin de réduire le temps nécessaire pour le ravitaillement en produit liquide du navire, l'homme du métier envisagerait le positionnement d'unités d'alimentation mobiles (telles que des citernes généralement connues) dans les aires de réceptions présentes sur le pont 30 du navire (voir figure 6; mode de réalisation concernant un navire transporteur de pétrole) et envisagerait de manière évidente leur connexion avec la station de transfert susmentionnée utilisant lesdites ouvertures 68 ayant des trappes amovibles. L'homme du métier parviendrait ainsi de manière évidente à l'objet de la revendication 1, son incitation et sa motivation provenant uniquement de ses connaissances générales et résultant directement du problème technique mentionné, posé par l'état de la technique, notamment la réduction de la durée du temps de ravitaillement.
Même dans l'hypothèse où la caractéristique (c) ne serait pas connue de D1, cette caractéristique serait au moins évidemment suggérée par D1, comme l'homme du métier reconnaîtrait que lesdits passages 42 avec les ouvertures ou trappes 68 (permettant l'accès au passage 42 et auxdits conduits 50) sont aptes à accueillir et loger la station de transfert, les trappes 68 permettant les passages des tuyaux connectant la station de transfert avec l'unité d'alimentation mobile située dans l'aire de réception constituée sur le pont à côté des trappes 68. En l'espèce, l'homme du métier n'utiliserait pas les connexions déjà existantes ("shore connections 48") sur le pont du navire de D1 pour connecter l'unité d'alimentation mobile aux conduits 50 de produit liquide, car cela constituerait une connexion très longue, qui augmenterait l'encombrement du pont et le risque d'un accident.
De manière analogue l'objet de la revendication 1 est rendu évident par D1 et D24. L'homme du métier partant de D1 serait confronté au problème de réduire la durée du temps de ravitaillement et D24 lui propose et suggère d'utiliser des unités d'alimentation mobiles, qui peuvent être disposées sur le pont du navire, à côté des trappes 68. Tel que détaillé ci-dessus, il serait évident pour l'homme du métier de connecter lesdites unités d'alimentation mobiles directement au conduit 50 à travers les trappes 68. De cette manière l'homme du métier arriverait à l'objet de la revendication 1 sans devoir exercer une activité inventive.
L'objet de la revendication 1 n'implique pas une activité inventive vis-à-vis de D24 et D1. D24 divulgue toutes les caractéristiques revendiquées, à l'exception de la caractéristique (c) (c'est-à-dire "il n'existe aucune station de transfert en saillie du pont dans la zone de transfert"). Le navire divulgué par D24 présente le problème relatif à la corrosion des conduits et des tuyaux installés sur le pont du navire, afin de connecter les unités d'alimentation mobiles disposées sur le pont au réservoir fixe du navire ou à des moyen d'utilisation (par exemple le moteur de propulsion du navire) à bord du navire. L'homme du métier trouverait évidemment dans D1 la solution à ce problème, D1 proposant de disposer les conduits et les connexions transportant ledit produit liquide dans des passages (voir passages 42 dans D1) agencés sous le pont du navire, incluant la station de transfert. En particulier, l'homme du métier n'utiliserait pas de conduits ou connexions déjà existants, installés sur le pont du navire et prévus pour le ravitaillement en produit liquide à l'aide d'installations situées sur le quai du port (à l'extérieur du navire) (voir connexions 48 dans D1). En fait, ces connexions étant agencés au centre du navire (voir D1), cela comporterait une augmentation de l'encombrement et des risques qui en résulteraient.
V. L'Intimée a présenté les arguments suivants:
L'objet de la revendication 1 ne s'étend pas au-delà du contenu de EP-A, puisque les caractéristiques contestées sont divulguées dans EP-A (voir paragraphes correspondants dans EP-B: [0014], [0016]-[0018], [0033], [0034]).
L'objet de la revendication 1 est clair, comme le fait que l'unité d'alimentation mobile ne soit présente que temporairement sur le navire n'entraîne pas un manque de clarté. Il n'y a aussi pas de contradictions dans l'objet de la revendication, car elle revendique un produit et non pas une méthode, de sorte que les périodes d'utilisation et de non-utilisation de la station de transfert n'y doivent pas être détaillées.
L'objet de la revendication 1 est divulgué de manière suffisamment claire et complète, de sorte que l'homme du métier puisse la mettre en ½uvre. En effet, aucune station de transfert n'est en saillie du pont, ladite station étant en période d'utilisation seulement raccordée à des tuyaux flexibles lors du transfert du produit liquide (voir EP-B, [0029]).
L'objet de la revendication 1 est nouveau par rapport à D25, car pour le moins ce document ne divulgue pas les caractéristiques M3, M6, M7+(b) et (c).
L'objet de la revendication 1 est inventif au regard de D1 et des connaissances générales de l'homme du métier ou de D1 et D24 (ou D24 et D1). En particulier, il n'est jamais prévu dans D1 que le navire accueille une unité d'alimentation mobile. Dans D1 il est seulement question de "shore connections 48" ("connexions à terre"), de sorte que le ravitaillement de ce navire est effectué traditionnellement, en connectant ces "shore connections 48" à une réserve située à terre. En tout état de cause l'homme du métier ne disposera pas les tuyaux 48 et les tuyaux 52 (connectant les conduits 50 logés dans la tranchée sous le pont au "shore connections 48") sous le pont, dans la mesure où D1 lui dicte exactement le contraire (voir D1, [0019]).
1. Le recours est recevable.
2. L'objet de la revendication 1 ne s'étend pas au-delà du contenu de la demande telle que déposée (article 123(2) CBE), comme les caractéristiques (a) (c'est-à-dire "le navire est pourvu d'au moins une unité d'alimentation mobile (3)) et M7+(b) (c'est-à-dire "l'espace de stockage est conformé pour être recouvert d'au moins une trappe amovible (53) s'étendant dans le plan dudit sol") sont divulguées dans EP-A.
En fait, la caractéristique (a) résulte par exemple du paragraphe [0013] de EP-A conjointement à la figure 2, ce paragraphe spécifiant que "la figure 2 est une vue en perspective de la zone de transfert d'un navire transportant des unités d'alimentation mobiles". Contrairement à l'avis de l'Opposante, ladite caractéristique (a) ne requiert nullement la présence permanente de l'unité d'alimentation mobile à bord du navire, s'agissant d'une unité d'alimentation qui est mobile et non pas fixe.
La caractéristique M7+(b) est divulguée dans EP-A (voir paragraphe [0010]), indiquant que l'espace de stockage est "apte à être recouvert d'au moins une trappe amovible s'étendant dans le plan dudit sol". Dans le contexte technique de la revendication 1 il ressort que les termes "apte à" et "conformé pour" sont parfaitement équivalents.
Pour les raisons illustrées ci-dessus les caractéristiques (a) et M7+(b) ressortent respectivement dans leur généralité directement et sans ambiguïté desdits paragraphes [0013] et [0010] de EP-A, aucune généralisation intermédiaire, tel que allégué par l'Opposante, ne peut donc subsister.
3. L'objet de la revendication 1 n'enfreint pas l'article 84 CBE, car le libellé de la revendication est suffisamment clair.
La caractéristique (a) (voir ci-dessus) implique clairement et sans ambiguïtés que l'objet de la revendication comprend à la fois un navire et une unité d'alimentation mobile, autrement dit une combinaison ou un ensemble formé de deux objets différents. De ce fait la caractéristique (a) est clairement limitative et elle restreint l'objet de la revendication, indépendamment de la question concernant la présence permanente ou temporaire de l'unité d'alimentation mobile à bord du navire. De plus, il ressort clairement du contexte technique de la revendication 1, de l'emploi du terme "pourvu" (signifiant "équipé") et de la nature "mobile" de l'unité d'alimentation, que l'objet de la revendication n'exige pas une présence permanente de ladite unité à bord du navire.
Il n'y a également aucune contradiction entre les caractéristiques (a) et (c) (c'est-à-dire "il n'existe aucune station de transfert en saillie du pont dans la zone de transfert"), puisque l'homme du métier à la lecture de la revendication 1 (et de la description) comprendrait (voir discussion ci-dessus) que la caractéristique (a) n'implique pas une présence permanente desdites unités d'alimentation mobile sur le pont du navire, et en conséquence que la caractéristique (c) se rapporte forcément à la situation dans laquelle aucun ravitaillement n'a lieu, c'est-à-dire lorsque lesdites unités mobiles ne sont pas connectées à la station de transfert. Pour l'homme du métier cela implique nécessairement que toutes les installations constituant la station de transfert, montées fixement ou de façon mobile sur le navire, sont abritées entièrement au-dessous du pont du navire en période de non-utilisation.
Il s'ensuit que dans ce sens il n'y a également aucune contradiction entre l'objet de la revendication 1 et la description (voir EP-B, [0029]) décrivant les tuyaux flexibles formant raccord entre l'unité mobile et la station de transfert en période d'utilisation, ces tuyaux appartenant à la station de transfert d'après EP-B (voir [0029]).
Quant à la question concernant la clarté de l'étendue de la protection conférée par l'objet de la revendication 1 (article 69 CBE), force est de constater que la discussion et la détermination de l'étendue de la protection ne s'impose pas dans le cas présent. En effet, aucune objection n'a été soulevée par l'Opposante au motif de l'article 123(3) CBE, comme il est évident que la caractéristique (a) ayant un effet limitatif, elle ne peut entraîner aucun élargissement de la protection.
4. L'objet de la revendication 1 conjointement à la description de EP-B divulguent l'invention de manière suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier puisse la mettre en ½uvre (article 83 CBE).
Pour les raisons indiquées ci-dessus il n'y a aucune contradiction entre les caractéristiques (a) et (c) de la revendication, puisque l'homme du métier comprendrait à la lecture de la revendication 1 et de la description de EP-B, que les caractéristiques (a) et (c) ne peuvent être remplies simultanément que dans une période de non-utilisation de la station de transfert.
Quant à l'objection concernant l'étendue de l'objet de la revendication 1 étant trop large par rapport au problème technique résolu par l'invention, force est de constater que ces objections sont infondées, car aucun autre mode de réalisation (ou produit) différent et distinct (pour lequel aucune solution au problème technique posé n'aurait été fournie par EP-B) étant compris dans l'objet de la revendication, n'a été identifié par l'Opposante.
De plus, l'Opposante allègue uniquement que le problème technique mentionné dans le brevet (EP-B, [0009], [0010]) est résolu par l'invention seulement dans un état de non-utilisation de la station de transfert, aucune solution n'étant proposée lors de l'utilisation de la station de transfert pendant le ravitaillement du réservoir du navire par les unités d'alimentation mobiles.
Or, cette argumentation est sans objet, comme il est manifeste que le problème technique de l'invention (notamment pallier aux difficultés causées par "la présence de cette station de transfert, lorsqu'il s'agit de connecter les unités d'alimentation mobiles dans ladite zone," qui "est particulièrement gênante, car elle contribue à augmenter le risque d'incident, et elle gêne les personnes et les véhicules lors de leur déplacement") ne se pose pas dans les périodes d'utilisation de la station de transfert. En fait, dans ces circonstances le pont du navire est complètement occupé et encombré par le stationnement desdites unités d'alimentation mobiles (voir figure 2, EP-B), tel que en aucun cas une circulation sans entraves des véhicules sur le pont du navire ne serait possible.
De surcroît, même dans l'hypothèse (quod non) où ledit problème se poserait effectivement, il serait pourtant en principe légitime et conforme à l'article 83 CBE, qu'une invention propose une solution à un problème technique résultant dans des circonstances spécifiées, sans que pour autant une solution ne soit proposée au même problème technique résultant dans des circonstances complètement différentes.
5. L'objet de la revendication 1 est nouveau (article 54 CBE) à l'égard de D25, au moins les caractéristiques M7+(b) et (c) n'étant pas connues de D25.
En effet, D25 ne divulgue pas (explicitement ou implicitement) que l'ouverture ou cavité dans laquelle l'unité d'alimentation mobile (réservoir 5a,b) est logée, est apte à ou conformée pour être recouverte d'une trappe amovible. Cela du fait qu'il ne ressort pas (clairement et sans ambiguïtés) de D25 que ladite cavité ou ouverture a été conçue et prédisposée pour être recouverte par une trappe, afin d'obtenir un effet technique prédéterminé. Puisque le réservoir mobile 5a est positionné de façon presque permanente et continue sur le réservoir fixe 4 du navire (sauf que lorsqu'il est remplacé par un autre réservoir 5b pour le ravitaillement; voir par exemple revendication 1), les conclusions précédentes sont confirmées.
Quant à la caractéristique (c), elle n'est pas divulguée par D25, puisque la description et les figures (schématiques) de D25 n'excluent pas du tout qu'une station de transfert en saillie du pont dans la zone de transfert ne soit prévue.
6. L'objet de la revendication 1 implique une activité inventive (article 56 CBE) à l'égard de D1 et des connaissances générales de l'homme du métier, ou de D1 considéré conjointement avec D24 ou D25, ou de D24 considéré conjointement avec D1.
D1 ne montre pas les caractéristiques (a) et (c) de la revendication 1, comme le navire de D1 n'est pas pourvu d'une unité d'alimentation mobile et la station de transfert comprend des "connexions à terre" 48, 52 ("shore connections") disposées en saillie du pont dans la zone de transfert.
D1 divulgue un navire transporteur de pétrole qui est pourvu de "connexions à terre" 48, 52 ("shore connections") pour son ravitaillement, notamment en raccordant les "connexions à terre" 48, 52 avec des installations situées sur le quai du port (à l'extérieur du navire) pour transférer le pétrole dans des larges réservoirs 34, 36 à bord dudit pétrolier.
D24 montre par contre un navire transporteur de barges 2 ("Leichter") (complètement différent de D1), chaque barge comprenant un réservoir rempli de GNL (gaz naturel liquéfié), aucun transfert important de produit liquide n'ayant lieu entre les barges et le navire transporteur, car le navire de D24 n'est pas pourvu de larges réservoirs tel que le pétrolier selon D1. En fait, les barges sont prédisposées pour arriver à leur destination avec leur charge de produit liquide et elles sont déchargées du navire transporteur dans le port d'arrivée (D24, revendication 1). Cela dans le but d'éviter le transfert (au moyen de conduits) de grandes quantités de produit liquide entre le navire et les installations à terre (D24, page 1, quatrième paragraphe).
Par conséquent une combinaison de D1 et D24 n'aurait aucun sens pour l'homme du métier (de sorte qu'il n'arriverait pas à l'objet revendiqué), le transfert de larges quantités de produit liquide entre le navire transporteur et les barges n'étant envisagé ou suggéré ni par D1 ni par D24, et de surcroît il est incompréhensible comment cela pourrait conduire à une réduction de la durée du temps de ravitaillement, tel que allégué par l'Opposante.
De manière analogue, l'homme du métier n'envisagerait pas d'augmenter la capacité de stockage du navire transporteur de pétrole connu de D1 en ajoutant des barges selon D24 sur le pont du navire, car cela nécessiterait des modifications très importantes et substantielles concernant la structure et la stabilité (statique et dynamique) du navire, altérant complètement la configuration et la nature elle-même du navire.
Enfin, même dans l'hypothèse où l'homme du métier combinerait D1 et D24, cela ne conduirait pas à l'objet de la revendication 1, puisque la caractéristique (c) n'est pas connue de D1 (voir ci-dessus) ou de D24, D24 ne divulguant manifestement pas la position et la configuration spécifique de la station de transfert raccordant les tuyauteries sur le pont du navire transporteur et les réservoirs situés sur les barges (disposées sur le pont).
L'homme du métier ne combinerait pas D1 et D25, car D25 divulgue un navire très différent de celui de D1. En particulier D25 montre un navire ayant un système de propulsion et une centrale électrique ou système de puissance ("power plant") alimentés par GNL, le ravitaillement du réservoir fixe 4 se faisant par remplacement du réservoir mobile 5a,b, disposé et monté sur le réservoir fixe 4. La quantité de produit liquide transférée selon cette méthode (servant uniquement à la propulsion et au propre fonctionnement des systèmes de puissance du navire) n'est aucunement comparable aux très larges quantités de pétrole transférées pour le ravitaillement du navire transporteur de pétrole selon D1, et ni D1 ni D25 ne suggèrent d'appliquer cette méthode à un navire transporteur de pétrole qui utilise un système de ravitaillement complètement différent (voir ci-dessus). De plus, la combinaison de ces documents ne conduirait pas à l'objet revendiqué, car la caractéristique (c) n'est pas dérivable de ces documents (voir ci-dessus).
L'objet de la revendication 1 n'est pas rendu évident par la combinaison de D1 et des connaissances générales de l'homme du métier. L'homme du métier n'envisagerait pas de disposer des unités d'alimentation mobiles sur le pont d'un navire transporteur de pétrole selon D1, car cela serait contraire à l'enseignement technique de D1, qui comporte une structure et des installations techniques (telles que des valves, des tuyaux ou conduits, des éléments de branchement ou de raccord, des pompes, des ventilations etc.) adaptées spécifiquement pour le ravitaillement à l'aide d'installations prévues à terre, en l'espèce comportant des moyens de "connexions à terre 48, 52" (D1, [0019]) connectant les conduits 50 du navire auxdites installations. De plus, l'agencement de plusieurs unités d'alimentation mobiles sur le pont du navire pourrait rendre nécessaire de renforcer les structures constituant le pont du navire et de revisiter la stabilité du navire. Enfin, il n' y a aucun élément de preuve fourni par l'Opposante, que les modifications nécessaires apportées au navire selon D1 conduiraient effectivement à une réduction de la durée du temps de ravitaillement. En particulier, D24 et D25 ne concernent pas le transfert de très larges quantités en produit liquide entre les unités d'alimentation mobiles et le réservoir fixe du navire.
L'homme du métier prenant D24 comme point de départ n'arriverait pas au vu de D1 de manière évidente à l'objet de la revendication 1. D24 ne divulgue pas les caractéristiques M7+(b) et (c), comme le positionnement et la configuration de la station de transfert sur le pont du navire transporteur ne sont pas décrits ou illustrés suffisamment en détail, les dessins étant purement schématiques.
Dans le but de résoudre le problème de la corrosion (mentionné par l'Opposante) des conduits ou tuyaux sur le pont du navire selon D24, l'homme du métier pourrait appliquer l'enseignement de D1 qui propose d'enterrer les conduits dans les passages 42 aménagés sous le pont du navire (D1, [0010]). Toutefois, D1 n'enseigne pas d'enterrer les "connexions à terre" 48,52 (D1, [0019]), qui sont nécessaires pour raccorder les réservoirs de produit liquide 34, 36 aux installations de ravitaillement prévues à terre, et D1 n'enseigne pas non plus de loger la station de transfert, comprenant les connexions à terre 48, 52, dans un espace de stockage au-dessous du sol du pont, apte (ou conformé) pour être recouvert d'au moins une trappe amovible s'étendant dans le plan dudit sol (voir caractéristique M7+(b)). Par conséquent la combinaison de D24 et de D1 ne conduirait pas de manière évidente aux caractéristiques M7+(b) et (c), qui ne sont pas connues de D24.
7. Compte tenu des conclusions précédentes la question concernant la recevabilité de D24 et D25 est sans objet.
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté.