T 2277/17 19-03-2021
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Système de montage de patin de frein à disque
Nouveauté - (oui),
Activité inventive - (oui),
Preuves produites tardivement - recevable (non),
I. Le recours a été formé par le titulaire du brevet (requérant) contre la décision intermédiaire de la division d'opposition constatant que, sur la base de la requête subsidiaire 2bis (alors au dossier), le brevet en litige (ci-après « le brevet ») remplissait les conditions de la CBE.
II. Une procédure orale par visioconférence s'est tenue devant la Chambre de recours le 19 mars 2021.
III. Le requérant (titulaire) a demandé l'annulation de la décision attaquée et le maintien du brevet tel que délivré, ou, à titre subsidiaire, sur la base de l'une quelconque des requêtes subsidiaires 1 à 9 déposées avec les motifs du recours. Il a en outre demandé que le document E12 ne soit pas admis dans la procédure.
L'intimé (opposante) a requis le rejet du recours et demandé que le document E12 soit admis dans la procédure.
IV. La revendication 1 selon la requête principale s'énonce comme suit :
« Dispositif de montage d'un patin de frein dans des logements d'une chape d'un frein à disque, ledit patin de frein (19) comprenant à deux de ses extrémités deux oreilles de montage (10, 10') et chaque oreille susceptible d'être montée dans un logement (11,11') d'une chape (2) d'un frein à disque, le dispositif comportant pour chaque oreille du patin, un premier ressort (5) de forme linéaire ou lamellaire, destiné à prendre appui, d'une part, sous une face inférieure (12) de l'oreille et, d'autre part, sur la face inférieure (27) du logement de la chape de façon à écarter la face inférieure (12) de l'oreille de la face inférieure (27) du logement, caractérisé en ce que ledit ressort comporte:
- une première branche d'appui (51) placée contre la face inférieure (12) de l'oreille du patin,
- une deuxième branche de glissement (52) destinée à être en contact avec la face inférieure (27) du logement, cette branche ayant une forme courbe, étant située parallèlement à un plan perpendiculaire au plan de l'oreille et ayant une surface convexe destinée à glisser sur ladite face inférieure du logement,
- une troisième branche (53) et une quatrième branche (54) reliée entre elles et permettant de reliée la première branche à la deuxième branche pour les écarter l'une de l'autre. »
V. Les documents ci-après sont pertinents pour la décision :
E7: |US 4,460,067 A |
E12:|JP 2007-177930 A|
VI. Les arguments du requérant peuvent se résumer comme suit :
Nouveauté par rapport à E7
La revendication 1 du brevet délivré définit un dispositif de montage destiné à monter un patin de frein. Les ressorts de ce dispositif doivent avoir une résistance et une rigidité capables de séparer la face inférieure respective des oreilles du patin de frein de la surface inférieure du logement de la chape de frein pendant toute la durée de vie du patin de frein. L'homme du métier comprendrait que le ressort doit être dimensionné pour supporter ces efforts quelle que soit l'orientation du frein.
E7 ne divulgue pas un dispositif de montage selon la revendication. Pour la division d'opposition et l'intimé, le ressort de vibration 38 des modes de réalisation des figures 3 à 4 ou des figures 10 à 13 est un dispositif de montage selon la revendication 1. Toutefois, ce ressort est un indicateur d'usure qui vibre au contact du disque de frein au moment où le patin de frein est usé. Ce ressort ne devrait exercer aucune force susceptible de perturber le fonctionnement normal du frein ou de rayer inutilement le disque de frein. Ni les dessins ni la description ne divulguent que le ressort de vibration 38 est fait du même matériau que les ressorts anti-vibration 56 ou qu'il peut exercer les forces requises par le dispositif de montage de la revendication 1. Les dimensions du ressort de vibration 38 par rapport au ressort anti-vibration 56 ne peuvent pas être déduites des dessins, car les épaisseurs ont été exagérées afin de permettre aux sections transversales d'être hachurées comme requis dans les brevets américains.
L'objet de la revendication 1 est donc nouveau par rapport à E7.
Admission de E12
E12 a été déposé par l'intimé avec la réponse aux motifs du recours et a donc été déposé tardivement. Il est décrit comme divulguant un ressort « présentant toutes les caractéristiques de la revendication 1, de manière similaire à E7 » et n'est donc pas plus pertinent que E7.
De plus, l'intimé n'a fait aucun effort pour commenter en détail la divulgation de E12, de sorte qu'il incombe au requérant et à la chambre de recours d'étudier le document et de déterminer sa pertinence éventuelle.
E12 ne devrait donc pas être admis dans la procédure.
Activité inventive par rapport à E7
L'homme du métier n'aurait pas rendu plus rigide le ressort de vibration 38 dans le frein de E7. Cela ne servirait à rien et pourrait faire passer la fréquence de vibration hors de la plage audible, la rendant ainsi inappropriée comme indicateur d'usure. Le frein d'E7 disposait déjà d'un dispositif de montage dans les ressorts anti-vibration 56 et l'homme du métier n'aurait donc aucune raison de modifier le ressort indicateur d'usure pour que celui-ci devienne un dispositif de montage.
La colonne 10, lignes 3 à 5, divulgue que les ressorts de vibration et les ressorts anti-vibration peuvent être réalisés en une seule pièce, qui ne glisserait alors pas sur le patin de frein. Toutefois, elle ne décrit pas qu'un ressort de vibration séparé serait réalisé à partir du même matériau que les ressorts anti-vibration. Les dimensions du ressort de vibration 38 ne sont pas non plus suffisantes pour qu'il fonctionne comme un ressort du dispositif de montage selon la revendication 1 même s'il était réalisé dans le même matériau que le ressort anti-vibration.
Il n'était donc pas évident pour l'homme du métier de parvenir à l'objet de la revendication 1.
VII. Les arguments de l'intimé peuvent se résumer comme suit :
Nouveauté par rapport à E7
La revendication ne définit pas un frein à disque complet, mais uniquement le dispositif de montage en tant que tel. Celui-ci a des ressorts appropriés pour séparer les surfaces inférieures des oreilles d'un patin de frein des surfaces inférieures du logement d'une chape de frein. Ce qui est plus bas, plus haut ou en dessous dépend de la position de la chape de frein. Les positions dans la revendication doivent donc être comprises en référence à l'axe de rotation du disque.
Ni la revendication ni le fascicule de brevet ne définissent la rigidité du ressort ou les forces que le ressort devrait être capable de supporter. Ces dernières dépendent du frein spécifique et de la position de la chape par rapport à l'axe de rotation du disque de frein. Dans les positions courantes des patins de frein de 9 ou 10 heures, le ressort n'a pas besoin de résister à la force de gravité sur le patin de frein, mais simplement à de petites forces dues au frottement entre le patin de frein et le logement de la chape ou aux forces parasites dues aux vibrations. De plus, tel que défini dans la revendication 2 du brevet, le dispositif de montage peut comporter un second ressort qui absorberait les efforts latéraux. Ce second ressort est soumis à des forces fortement réduites par rapport à celles du premier ressort. Selon le paragraphe [0051] du brevet, ce ressort est similaire aux ressorts définis dans la revendication 1. Cela indique que les ressorts n'ont pas besoin d'être particulièrement rigides.
Les figures de E7 sont précises, ce qui indique qu'elles sont dessinées à l'échelle. L'épaisseur des ressorts 38 est comparable à celle des ressorts anti-vibration 56 et à la colonne 10, lignes 3 à 5, décrits comme pouvant être fabriqués dans le même matériau. Les ressorts 38 ont donc la rigidité requise pour séparer les surfaces radialement internes des oreilles d'un patin de frein d'une surface inférieure du logement d'une chape de frein. Le fait que les patins de frein soient guidés latéralement par les parois latérales du logement de la chape de frein n'enlève rien à ce fait.
L'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré n'est donc pas nouveau.
Admission de E12
E12 est plus précis sur les forces que le ressort peut exercer. Il est donc très pertinent pour l'examen de la nouveauté de la revendication 1 du brevet tel que délivré et devrait être admis dans la procédure.
Activité inventive par rapport à E7
L'objet de la revendication 1 diffère du ressort 38 des freins de E7 uniquement par la rigidité du ressort.
La colonne 10, lignes 3 à 5, divulgue que le ressort anti-vibration peut être formé d'un seul tenant avec le ressort de vibration. Au vu de cet enseignement, il serait évident pour l'homme du métier de fabriquer les ressorts 38 dans la même feuille de métal que les ressorts anti-vibration 56 afin de simplifier la production. Le ressort en résultant serait suffisamment rigide pour séparer les surfaces radialement internes des oreilles d'un patin de frein de la surface inférieure du logement d'une chape de frein.
L'homme du métier parviendrait ainsi au dispositif de montage selon la revendication 1 sans faire preuve d'activité inventive.
1. Nouveauté par rapport à E7
La revendication 1 du brevet tel que délivré définit un dispositif de montage pour des patins de frein dans un logement d'une chape de frein à disque. Il comprend un ressort pour chaque oreille du patin de frein destiné à prendre appui sous une face inférieure de l'oreille et sur la face inférieure du logement de la chape de frein, de manière à séparer la face inférieure de l'oreille de la face inférieure du logement.
La partie « inférieure » dépend de la position de la chape de frein par rapport à l'axe de rotation du disque de frein. L'homme du métier comprendrait donc que tous les termes définissant des positions relatives ont pour référence l'axe de rotation du disque. Par exemple, l'expression « face inférieure de l'oreille » serait comprise comme une surface radialement intérieure de l'oreille.
1.1 E7 divulgue des ressorts de vibration 38 sur les figures 3 à 4 et 10 à 13 qui ressemblent aux modes de réalisation du dispositif de montage du brevet. Ces ressorts sont des indicateurs d'usure qui se mettent à vibrer lorsque le patin de frein est usé et que la pointe de la partie vibrante 48 du ressort entre en contact avec le disque de frein (voir colonne 5, lignes 16 à 22).
1.2 L'intimé a souligné à juste titre que ni la revendication ni la description du brevet ne définissent la rigidité des ressorts ou leur force de sollicitation. Cependant, une certaine force est nécessaire pour séparer la face inférieure de l'oreille d'un patin de frein de la face inférieure du logement d'une chape de frein et, par conséquent, le ressort d'un dispositif de montage nécessite une certaine raideur. Étant donné que la position de la chape de frein n'est pas définie dans la revendication, l'homme du métier comprendrait que la revendication porte sur un dispositif de montage suffisamment rigide pour toutes les positions de la chape de frein. Il est exact que le brevet en litige décrit que le dispositif de montage peut avoir un second ressort de positionnement sur les côtés latéraux du patin de frein, qui, selon le paragraphe [0051] du brevet, est similaire aux ressorts de la revendication 1. Cependant, cela signifie seulement que les seconds ressorts ont des propriétés similaires aux ressorts définis dans la revendication 1. Aucune information supplémentaire n'est fournie sur la rigidité absolue requise des ressorts de la revendication 1.
Il s'agit donc d'apprécier si l'indicateur d'usure 38 de E7 est apte à séparer un patin de frein de la surface inférieure du logement d'une chape de frein, en particulier s'il est suffisamment rigide à cet effet.
1.3 E7 ne définit pas explicitement la rigidité absolue des ressorts. Par conséquent, toute information concernant la rigidité du ressort de vibration 38 ne peut être obtenue qu'en tenant compte des informations implicites dérivées de la rigidité relative des divers ressorts décrits dans E7.
1.4 Comme décrit dans la colonne 5, lignes 26 à 32, les parties pliées 42 et 46 du ressort 38 assouplissent le contact entre la partie vibrante et le disque de frein, de sorte que ce dernier est peu susceptible d'être rayé. Par conséquent, le ressort 38 est explicitement décrit comme étant relativement souple.
1.5 L'intimé soutient que sur les figures de E7, l'épaisseur du ressort de vibration 38 et du ressort anti-vibration 56 est représentée comme étant la même et en déduit que la rigidité des deux ressorts est la même. Cependant, les dessins des documents de brevet sont généralement schématiques, de sorte que les dimensions spécifiques du ressort de vibration, en particulier son épaisseur, ne peuvent être déduites exclusivement du dessin. De plus, la rigidité d'un ressort dépend non seulement de ses dimensions, mais également des propriétés de son matériau. Par conséquent, les figures ne donnent pas d'informations claires et dépourvues d'ambiguïté sur la rigidité du ressort 38.
1.6 Il est exact que la colonne 10, lignes 3 à 5 de E7 divulgue que les ressorts anti-vibration 56 et les ressorts de vibration 38 peuvent être formés d'un seul tenant et que cela pourrait impliquer que les deux ressorts sont constitués à partir du même matériau. Cependant, comme indiqué ci-dessus, les propriétés, notamment la rigidité d'un ressort, ne dépendent pas exclusivement de son matériau, mais également de sa dimension et de sa forme. Par conséquent, aucune conclusion sur la rigidité du ressort de vibration 38 ne peut être tirée du fait qu'il peut être formé d'un seul tenant avec le ressort anti-vibration 56.
1.7 De plus, les patins de frein dans les freins de E7 sont guidés latéralement par les parois latérales du logement de la chape de frein avec les ressorts anti-vibration 56 positionnés entre le logement et le patin de frein. Le ressort de vibration 38 n'a donc pas non plus besoin de supporter le patin de frein contre un mouvement latéral. Cela n'étaye pas l'hypothèse de l'intimé selon laquelle le ressort 38 a une rigidité telle qu'il convient comme ressort d'un dispositif de montage d'un patin de frein.
1.8 Puisque la seule divulgation concernant indirectement la rigidité du ressort de vibration le décrit comme étant plutôt souple, E7 ne divulgue pas directement et sans ambiguïté que le ressort de vibration 38 est suffisamment rigide pour séparer la face inférieure d'une oreille d'un patin de frein de la surface inférieure du logement d'une chape d'un frein à disque comme requis par la revendication 1.
1.9 Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1 est nouveau (article 54(2) CBE).
2. Admission de E12
L'intimé a déposé le document E12 avec sa réponse aux motifs du recours. Cette réponse contenait une seule phrase décrivant le contenu de E12. La phrase se référait aux figures 4(a) à 4(c) et aux paragraphes [0039] à [0042] et indiquait que le ressort 21 était orienté de manière périphérique et présentait toutes les caractéristiques de la revendication 1, de manière similaire à E7. La divulgation de E12 n'a pas été davantage discutée. Il n'a pas non plus été expliqué pourquoi E12 était plus pertinent que E7 ou pourquoi le document n'avait été déposé qu'à ce stade de la procédure. L'objection selon laquelle l'objet de la revendication 1 manque de nouveauté au regard de E12 n'est donc pas suffisamment motivée et ne constitue dès lors pas le fondement du recours de l'intimé au titre de l'article 12(1)b) RPCR 2007.
Si le document E12 était admis dans la procédure, l'objection soulevée en ce qui concerne l'absence de nouveauté fondée sur E12 ne serait étayée que lors de la procédure orale. Cette objection constitue donc une modification de la cause de l'intimé et son admission est laissée à l'appréciation de la chambre de recours conformément à l'article 13(1) RPCR 2007 (voir la disposition transitoire de l'article 25(3) RPCR 2020).
L'intimé a attendu le dernier moment possible pour étayer son objection, à savoir lors de la procédure orale. La chambre de recours, ainsi que le requérant, seraient ainsi confrontés aux informations concernant la pertinence du document et son contenu technique pour la première fois au cours de la procédure orale. Cela irait à l'encontre du principe de l'économie de la procédure et E12 n'a donc pas été admis dans la procédure.
3. Activité inventive par rapport à E7
L'objet de la revendication 1 diffère du ressort de vibration 38 dans les freins de E7 au moins en ce qu'il est destiné à prendre appui, d'une part, sous une face inférieure de l'oreille [d'un patin de frein] et, d'autre part, sur la face inférieure du logement de la chape d'un frein à disque, de manière à séparer la face inférieure de l'oreille de la face inférieure du logement.
L'intimé a soutenu que l'homme du métier fabriquerait le ressort de vibration 38, qui sert d'indicateur d'usure, à partir de la même feuille de métal que le ressort anti-vibration 56 afin de faciliter la production. Cela serait évident au vu de la divulgation de la colonne 10, lignes 3 à 5, qui décrit que le ressort anti-vibration peut être formé d'un seul tenant avec le ressort de vibration. Le ressort en résultant serait suffisamment rigide pour séparer la surface inférieure de l'oreille du patin de frein de la surface inférieure du logement de la chape de frein.
Cependant, E7 n'indique pas que le ressort de vibration 38, s'il est fait du même matériau que le ressort anti-vibration 56, aurait la rigidité requise par le dispositif de montage de la revendication 1.
En outre, à la colonne 5, lignes 26 à 32, il est décrit que la partie vibrante 48 du ressort de vibration 38 ne risque pas de rayer le rotor de disque [de frein], car elle est retenue par les première et seconde parties pliées 42 et 46 pour assouplir le contact entre les deux membres. Un ressort à faible rigidité est ainsi qualifié d'avantageux. Rendre le ressort de vibration plus rigide irait à l'encontre de cet enseignement explicite. L'homme du métier n'aurait aucune raison de le faire, d'autant plus que le frein de E7 comporte déjà des ressorts anti-vibration 56 avec des parties de ressort 54 qui remplissent la fonction du dispositif de montage revendiqué. Par conséquent, l'homme du métier ne serait pas incité à rendre le ressort de vibration 38 si rigide qu'il deviendrait un ressort d'un dispositif de montage selon la revendication 1.
L'objet de la revendication 1 implique par conséquent une activité inventive.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. Le brevet est maintenu tel que délivré.