2.4.4 Revendications portant sur des programmes d'ordinateur
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Après l'abandon de l'approche de la contribution à l'état de la technique, une chambre de recours s'est prononcée, dans l'affaire T 424/03, sur la question de savoir si une revendication relative à un programme sur un moyen déchiffrable par ordinateur échappe à l'exclusion de la brevetabilité. Dans la décision T 424/03, la chambre a étendu le raisonnement appliqué dans la décision T 258/03 pour constater qu'une revendication relative à un programme (en l'occurrence à des "instructions exécutables par ordinateur") sur un support déchiffrable par ordinateur échappe elle aussi nécessairement à l'exclusion de la brevetabilité visée à l'art. 52(2) CBE (voir G 3/08 date: 2010-05-12, JO 2011, 10 ; point 10.7 des motifs).
La décision T 424/03 du 23 février 2006 avait pour objet une demande divulguant une méthode destinée à fournir des formats presse-papiers étendus pour le transfert de données entre formats. Le presse-papiers est un espace de stockage utilisé pour les opérations informatiques classiques consistant à "couper", "copier" et "coller". La revendication 1 se rapportait à une méthode mise en œuvre dans un système informatique. Un système informatique comprenant une mémoire (presse-papiers) constitue un moyen technique et la méthode revendiquée présente donc un caractère technique, conformément à la jurisprudence constante. La chambre a en outre tenu à souligner qu'une méthode mise en œuvre dans un système informatique constitue une séquence d'étapes effectivement accomplies et obtenant un effet, et non une séquence d'instructions exécutables par ordinateur (c'est-à-dire un programme d'ordinateur), qui ne peuvent atteindre un tel effet que si elles sont chargées dans un ordinateur, et exploitées sur ce dernier. La chambre a donc considéré que la catégorie de revendication d'une méthode mise en œuvre par ordinateur doit être distinguée de celle d'un programme d'ordinateur. Même si une méthode, en particulier une méthode d'exploitation d'un ordinateur, peut être mise en œuvre à l'aide d'un programme d'ordinateur, une revendication portant sur une méthode de ce type ne revendique pas un programme d'ordinateur dans la catégorie d'un programme d'ordinateur. En l'espèce, la revendication 1 ne pouvait donc pas se rapporter à un programme d'ordinateur en tant que tel.
La chambre a également considéré que les étapes de méthode revendiquées contribuaient au caractère technique de l'invention. Ces étapes résolvent un problème technique par des moyens techniques en ce que des structures de données fonctionnelles (formats presse-papier) sont utilisées indépendamment de tout contenu cognitif (cf. T 1194/97, JO 2000, 525) afin d'améliorer le fonctionnement interne d'un système informatique, en vue de faciliter l'échange de données entre différents programmes d'applications. Les étapes revendiquées dotent ainsi un ordinateur universel d'une nouvelle fonctionnalité : l'ordinateur aide l'utilisateur pour le transfert de données externes aux fichiers dans les fichiers.
Dans la même affaire, la revendication 5 se rapportait à un support lisible par ordinateur qui présente des instructions exécutables par ordinateur (c'est-à-dire un programme d'ordinateur) permettant au système informatique de mettre en œuvre la méthode revendiquée. La chambre a estimé que l'objet de la revendication 5 présentait un caractère technique, puisqu'il se rapportait à un support lisible par ordinateur, c'est-à-dire à un produit technique faisant intervenir un support (cf. décision précitée T 258/03, JO 2004, 575). Les instructions exécutables par ordinateur pouvaient en outre produire l'effet technique supplémentaire précité, qui consistait à améliorer le fonctionnement interne de l'ordinateur et qui allait au-delà de l'interaction élémentaire entre un matériel et un logiciel de traitement de données (T 1173/97, JO 1999, 609). Le programme d'ordinateur enregistré sur le support n'a donc pas été considéré comme un programme d'ordinateur en tant que tel, et contribue donc également au caractère technique de l'objet revendiqué.