T 0285/07 02-12-2009
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Procédé d'établissement préalable de développements pour un changement de vitesse de vélo et dispositif apte à faire la sélection de développements qui en découlent
Recevabilité du recours (oui)
Nouveaux motifs d'opposition - non admis
Activité inventive (oui)
I. La requérante (opposante) a formé un recours contre la décision intermédiaire de la division d'opposition de maintenir le brevet nº 0 727 348 sous forme modifiée.
II. La division d´opposition a notamment estimé que:
- les modifications introduites dans la revendication 1 du brevet ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande telle que déposée;
- l'objet des revendications du brevet dans sa forme modifiée était nouveau et ne découlait pas à l'évidence de l'état de la technique représenté, entre autres, par les documents suivants:
E2: DE-U-90 07 698;
E8: FR-A-1 499 803;
D3: WO-A-91/15393.
III. Une procédure orale s'est tenue devant la Chambre le 2 décembre 2009.
La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen en cause.
L'intimée a demandé le rejet du recours comme irrecevable ou si le recours était recevable, comme non fondé.
IV. Le libellé de la revendication 1 de procédé et de la revendication 5 de dispositif, telles qu'elles ont été maintenues par la division d'opposition et en utilisant la numérotation de leurs caractéristiques telle que proposée par l'opposante dans son mémoire exposant les motifs de recours, est le suivant:
Revendication 1:
1.1 "Procédé visant d'établir un ensemble de développements comme préalable à la réalisation d'une transmission variable à chaîne, notamment une transmission variable a chaîne pour un vélo, ladite transmission étant équipée d'une commande unique permettant, pendant que la transmission variable à chaîne est en mode de travail, de sélectionner à partir de cet ensemble de développements un développement approprie, la transmission comprenant un train de n plateaux menants commandé par un premier câble de commande (44) et un train de m pignons menés commandé par un deuxième câble de commande (46), lesdits plateaux et pignons étant reliés par une chaîne, conduisant à une totalité de n x m développements potentiels,
1.2 selon lequel procédé, on retient parmi cette totalité de ces n x m développements potentiels un ensemble réduit de développements croissants ou décroissants choisis parmi l'ensemble des développements utiles,
1.3 duquel tous les développements sensiblement de même valeur que l'un des développements retenus et/ou tous les développements conduisant à un désalignement exagéré de la chaîne ont déjà été supprimés,
1.4 et puis on établit selon cet ensemble réduit des développements choisis un programme mécanique apte à être incorporé dans la commande unique pour assurer que toute sélection de développement se fait parmi les développements choisis,
caractérisé en ce que
1.5 ladite étape d'établissement du programme mécanique comprend la fourniture d'un barillet à raccorder à une poignée tournante de ladite commande unique et la réalisation sur ledit barillet de deux pistes pour actionner lesdits premier et deuxième câbles de commande pour sélectionner un développement quelconque parmi lesdits développements choisis,
1.6 on choisit librement chacun des développements retenus préalablement parmi l'ensemble des développements utiles, sans qu'aucune contrainte dans ce choix soit imposée par les moyens d'exécution de la commande unique du fait du choix même des autres développements concurremment retenus,
1.7 tandis que le nombre de développements que la commande unique puisse sélectionner selon un programme mécanique quelconque n'est nullement limité par la façon selon laquelle la commande a été, soit conçue, soit réalisée, sauf par la capacité des moyens qui portent le programme mécanique, cette capacité ayant été choisie librement et sans qu'aucune contrainte soit imposée pour raison de mode de réalisation de la commande unique."
Revendication 5:
5.1 "Dispositif de sélection de développements apte à servir en tant que transmission variable à chaîne, telle que découle du procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, notamment pour un vélo, ce dispositif comprenant un train de n plateaux menants, un train de m pignons menés, reliés par une chaîne, des moyens dérailleurs associés aux plateaux et des moyens dérailleurs associés aux pignons, un premier câble de commande des moyens dérailleurs associés aux plateaux et un second câble de commande des moyens dérailleurs associés aux pignons, lesdits moyens dérailleurs évoluant entre deux positions extrêmes et comprenant des moyens de rappel élastique de l'une des positions extrêmes vers l'autre,
5.2 le dispositif comprenant également une commande unique comportant une poignée (18) rotative et une partie fixe (12) en vue d'une liaison, notamment avec un vélo, et lié aux moyens de dérailleurs afin de permettre la sélection d'un développement approprié à partir de l'ensemble réduit,
caractérisé en ce que
5.3 la poignée (18) est liée avec un barillet (16) afin d'être, et solidarisée en translation avec celui-ci, et agencée pour être déplacé en rotation suite à tout maniement de la poignée,
5.4 le barillet (16) comprenant deux pistes (30, 32), dont chacune reçoit un ergot parmi deux fixés respectivement aux extrémités des premier (44) et second (46) câbles de commande, lesdites pistes (30, 32) ayant des profils pour assurer un positionnement avec une tolérance plus ou moins suffisante pour exagérer le mouvement et revenir précis des câbles correspondant aux couples plateau/pignon des développements successifs choisis, ainsi que des moyens d'indexation pour chacun de ces développements,
5.5 les deux pistes (30, 32) s'étendant sur le pourtour du barillet (16) de façon qu'au moins une de ces deux pistes effectue plus d'un tour complet autour dudit pourtour sans être jointive
5.6 et telles que les points d'indexation correspondants aux développements successifs se suivent en progression continue le long de chaque piste (30, 32)
5.7 et permettant, au moins pour l'un des développements choisis, un déplacement simultané des ergots des premier et second câbles (44, 46) de commande."
V. Au soutien de son action, la requérante (opposante) a développé pour l'essentiel les arguments suivants:
La requête de la titulaire du brevet quant à l'irrecevabilité du recours doit être rejetée.
La caractéristique 1.5 introduite dans la revendication 1 telle que délivrée s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée. Cette caractéristique comporte l'expression "établissement du programme mécanique". Or, le concept de "programme mécanique" ne se retrouve pas dans la demande telle que déposée à l'origine, ni ne découle de manière évidente du contenu de cette dernière. Le fait que l'objection de défaut de divulgation de ce concept n'ait pas été soulevée au cours de la procédure d'opposition ne s'oppose en rien à ce que cette objection soit formulée au stade du recours étant donné que le concept objecté fait partie des modifications introduites dans la procédure d'opposition en liaison avec la caractéristique 1.5. De plus, l'étape du procédé consistant en l'établissement du programme mécanique par la seule fourniture d'un barillet n'a également pas été divulgué en tant que telle dans la demande d'origine. L'expression utilisée pour définir cette étape a un sens très large et n'exclue pas que d'autres caractéristiques peuvent participer à l'établissement du programme mécanique revendiqué. La caractéristique 1.5 représente donc une généralisation inacceptable de la divulgation d'origine. Par conséquent, il faut conclure que les modifications effectuées dans la revendication 1 du brevet au cours de la procédure d'opposition ne remplissent pas les exigences de l'article 123 (2) de la CBE.
Le procédé selon la revendication 1 n'implique pas une activité inventive par rapport au contenu du document D3. Comme mentionné à partir du paragraphe [0040] du fascicule de brevet, ce document représente l'art antérieur le plus proche et a servi à délimiter la revendication 1 dans la forme en deux parties. Il décrit aux pages 14-17 en liaison avec les figures 8 à 10 un procédé comprenant non seulement l'ensemble des caractéristiques 1.1 à 1.4 du préambule de la revendication 1, mais également une étape d'établissement du programme mécanique comprenant la fourniture d'un barillet 80 à raccorder à une poignée tournante de ladite commande unique (voir page 14, deuxième paragraphe) et la réalisation sur ledit barillet de deux pistes 81,82 pour actionner des premier C1 et deuxième C2 câbles de commande pour sélectionner un développement quelconque parmi lesdits développements choisis (caractéristique 1.5). Les caractéristiques 1.6 et 1.7, dont la formulation est plutôt inusitée pour définir une protection recherchée, se lisent comme une sorte de mode d'emploi pour choisir les développements retenus et ne limitent en rien le procédé revendiqué. La caractéristique 1.6 n'est qu'une conséquence directe de l'utilisation d'un barillet et de la géométrie des deux pistes comme moyen d'exécution du programme mécanique. Elle ressort à l'évidence du document D3 et ne contient aucune limitation ayant une quelconque signification technique pour l'homme du métier. La caractéristique 1.7, dont la clarté semble plus que douteuse, ne contient que des banalités relevant de l'évidence.
L'objet de la revendication 5 n'implique pas une activité inventive par rapport au contenu des documents D3 et E8. Le document D3 montre aux figures 8 à 10 un dispositif de sélection de développements comprenant une commande unique comportant une poignée rotative (page 14, deuxième paragraphe) et une partie fixe (table fixe 60) en vue d'une liaison avec un vélo. Ce dispositif est lié à des moyens dérailleurs associés à des plateaux P1-P3 et à des moyens dérailleurs associés à des pignons R1-R7. Il comprend un premier câble C2 de commande des moyens dérailleurs associés aux plateaux et un second câble C1 de commande des moyens dérailleurs associés aux pignons. La poignée est liée avec un barillet 80 de telle sorte qu'il soit entraîné en rotation suite à tout maniement de la poignée. Le barillet 80 comprend deux pistes 81,82 dont chacune reçoit un ergot 71A,72A fixé respectivement aux extrémités des premier C1 et second C2 câbles de commande. Lesdites pistes ont des profils adéquats pour assurer un positionnement des câbles correspondant aux couples plateau/pignon des développements successifs choisis et présentent des moyens d'indexation 83 pour chacun de ces développements. Les points d'indexation 83 correspondants aux développements successifs se suivent en progression continue le long de chaque piste. Ces pistes permettent, au moins pour l'un des développements choisis, un déplacement simultané des ergots des premier et second câbles de commande. Ce dispositif comprend donc non seulement l'ensemble des caractéristiques du préambule mais aussi les caractéristiques 5.3, 5.4, 5.6 et 5.7 de la revendication 5.
Le dispositif selon la revendication 5 ne se distingue du dispositif connu du document D3 que par le fait qu'au moins une de ces deux pistes effectue plus d'un tour complet autour du pourtour du barillet sans être jointive (caractéristique 5.5).
Une telle caractéristique est connue en soi du document E8 qui montre une commande d'un câble 6 actionnant des moyens dérailleurs d'un vélo et qui comporte une poignée munie d'un barillet (manchon 30) dont la piste (rainure hélicoïdale 301) reçoit un ergot 28 fixé à l'extrémité du câble. Cette piste 301 effectue plus d'un tour complet autour du pourtour du barillet sans être jointive (voir figure 1).
Si l'homme du métier devait constater que les pistes 81,82 du dispositif selon le document D3 ne présente pas une extension suffisante pour commander un nombre important de pignons ou des plateaux, il lui suffit de s'inspirer de l'enseignement du document E8 et d'opérer avec un barillet ayant des pistes qui effectuent plus d'un tour complet autour du pourtour du barillet, sans être jointives. L'homme du métier arrive ainsi d'une manière évidente à une dispositif présentant l'ensemble des caractéristiques de la revendication 5.
VI. Selon l'intimée (titulaire du brevet), le recours de la requérante ne serait pas recevable. L'intimée estime que, dans la mesure où la requérante fonde principalement son recours que sur la question de la brevetabilité de l'objet de la revendication indépendante 5 et que cette question n'a pas été examinée par la division d'opposition dans sa décision en raison d'un défaut d'argumentation à l'encontre de cette revendication indépendante non seulement dans l'acte d'opposition mais aussi par la suite de la procédure, le recours ne saurait être recevable. De plus, selon l'intimée le mémoire exposant les motifs de recours est défectueux en ce qu'il n'indique pas les raisons pour lesquelles la décision de la division d'opposition ne serait pas correcte.
Sur les questions de fond, l'intimée estime que la caractéristique 1.5 introduite dans la revendication 1 telle que délivrée, ressort au moins de manière implicite de la description et des figures de la demande telle que déposée.
L'intimée a également réfuté les arguments de la requérante sur la question de l'activité inventive et fait valoir que l'objet des revendications 1 et 5 respectives implique une activité inventive.
1. Recevabilité du recours
La décision de la division d'opposition n'a pas fait droit aux prétentions de la requérante qui a sollicité la révocation du brevet dans son intégralité. La revendication 5 telle que délivrée contient le renvoi "dispositif ... apte à servir en tant que transmission variable à chaîne, telle que découle du procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4". Ce renvoi ne modifie certes pas la nature de la revendication indépendante 5 qui appartient à une catégorie différente de celle de la revendication 1 de procédé; il introduit cependant une limitation au dispositif revendiqué en ce qu'il exige une aptitude du dispositif à l'exécution du procédé auquel il est fait référence. En ce sens, la revendication 5 est, d'une certaine manière, liée à la revendication 1 (bien qu'il ne s'agisse pas d'une relation de dépendance dans le sens de la règle 29 (4) de la CBE 1973). Si la revendication 1 était rejetée pour défaut de brevetabilité de son objet, la revendication 5 n'aurait, en raison de cette référence à la revendication 1, pu être maintenue dans la forme telle que délivrée. Il était donc implicite que la validité de la revendication 5 était, de prime abord, également mise en cause dans l'acte d'opposition (voir point 11 de la décision G 9/91, JO OEB 1993, 408). Il faut aussi noter que la requérante a présenté dans sa lettre en date du 12 juillet 2005 une argumentation sommaire et dans sa lettre du 12 septembre 2006 une argumentation plus détaillée à l'encontre de la brevetabilité de l'objet de la revendication 5. D'autre part, comme l'a indiqué la division d'opposition au point 14.3 de sa décision, la caractéristique 1.5, qui a été introduite dans la revendication 1 modifiée au cours de la procédure orale devant la division d'opposition, est également contenue dans la revendication de dispositif 5 telle que délivrée. Enfin, la division d'opposition a décidé sur la brevetabilité de la revendication 5 (voir point 18 de la décision). En conséquence, la Chambre juge que la requérante, en formant recours, peut poser la question de la brevetabilité de la revendication 5. Le recours est donc recevable.
2. De l'admissibilité de nouveaux motifs de recours invoqué par la requérante
Dans son mémoire exposant les motifs du recours, la requérante a estimé que les caractéristiques 1.6 et 1.7 de la revendication 1 s'étendaient au-delà du contenu de la demande telle que déposée (article 100 c) de la CBE) et que ces caractéristiques n'étaient pas claires, l'homme du métier étant, pour cette raison, incapable de mettre en oeuvre le procédé revendiqué (article 100 b) de la CBE).
L'acte d'opposition de la requérante était fondé uniquement sur le motif que son objet n'était pas brevetable pour défaut de nouveau ou d'activité inventive (article 100 a) de la CBE). Aucune objection n'a été soulevée au motif que l'objet du brevet s'étendait au-delà du contenu de la demande telle que déposée (article 100 c) de la CBE) ou que le brevet n'exposait pas l'invention de manière suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'effectuer (article 100 b) de la CBE). Selon les principes exposés dans l'avis G 10/91 de la Grande Chambre de recours (JO OEB 1993, 420) de nouveaux motifs d'opposition ne peuvent être pris en considération au stade de la procédure de recours qu'avec le consentement de la titulaire de brevet. Cette dernière n'a pas donné son accord à leur introduction dans la procédure (point II. de la lettre de l'intimée en date du 30 octobre 2009). La Chambre n'est donc pas compétente pour examiner ces nouveaux motifs relatifs aux caractéristiques 1.6 et 1.7 de la revendication 1 telle que maintenue sous la forme modifiée.
3. De l'admissibilité des modifications introduites dans la revendication 1 telle que délivrée
3.1 La requérante a soutenu que la caractéristique 1.5, qui a été ajoutée dans la revendication 1 modifiée au cours de la procédure d'opposition, et notamment le concept de "programme mécanique" déjà présent dans le préambule de la revendication, ne découlerait pas de la demande telle que déposée (article 123(2) de la CBE).
En ce qui concerne cette objection, la Chambre partage le point de vue de la requérante quand elle considère que les étapes du procédé selon le préambule de la revendication 1 (caractéristiques 1.1 à 1.4) sont connues de l'état de la technique et qu'elles consistent essentiellement à retenir de manière abstraite un ensemble réduit de développements choisis parmi une totalité de n x m développements potentiels, ce choix conduisant à l'établissement d'un "programme mécanique" apte à être incorporé dans la commande unique.
Ces étapes sont en effet décrites dans le document D3, qui est cité dans le fascicule de brevet et a servi à délimiter la revendication 1 dans sa forme en deux parties. Comme l'a avancé la requérante, elles sont aussi connues du document E2, qui divulgue un procédé visant à établir un programme mécanique similaire, ce programme étant matérialisé sous la forme d'un élément mécanique, en l'occurrence un changement de vitesses à coulisses (voir figure 1c: "Kulissenscheiben").
Partant de cet état de la technique, l'étape d'établissement du programme mécanique selon la caractéristique 1.5 de la revendication l est la réalisation concrète du programme mécanique défini dans le préambule de la revendication. Elle consiste en la fourniture d'un barillet comprenant, sur son pourtour, deux pistes dont le tracé correspond au programme mécanique permettant de sélectionner un développement parmi les développements choisis. Si l'on considère le passage de la colonne 12, lignes 11-15 de la demande telle que déposée à l'origine EP-A1-0 727 348 (dénommée par la suite la demande A1) il ne fait pas de doute qu'un tel élément mécanique ait été divulgué dans la demande originale.
Bien que l'expression "programme mécanique" objectée par la requérante ne se retrouve pas de manière explicite dans la demande A1, la Chambre juge que l'introduction de cette expression aussi bien dans le préambule que dans la caractéristique 1.5 de la revendication 1 ne s'étend au-delà du contenu de la demande originale.
En effet, selon la décision T 52/82 (JO OEB 1983, 416), une revendication modifiée ne renferme pas d'élément s'étendant au-delà du contenu de la demande originale, si le préambule de la revendication a été modifié en remplaçant par un terme générique approprié, apte à définir une caractéristique commune tant à l'état de la technique le plus proche décrit dans la demande telle que déposée qu'à l'invention faisant l'objet de la demande, un terme spécifique à l'invention qui n'était pas apte à définir cette caractéristique commune de l'état de la technique. Le cas présent relève d'une situation analogue. En l'occurrence, le terme générique "programme mécanique" est apte à définir à la fois le changement de vitesses à coulisses du document E2, ou le cylindre 80 à rainures du document D3 - deux documents faisant partie de l'état de la technique -, ou encore le barillet de la caractéristique 1.5. Le barillet est alors à considérer comme une forme spécifique à l'invention du "programme mécanique" de l'état de la technique. Il est évident que cette forme spécifique représente une limitation par rapport au "programme mécanique".
Il ne fait pas de doute non plus, que l'établissement du "programme mécanique" par la "fourniture d'un barillet..." ait été également divulgué dans la demande telle que déposée à l'origine puisque un changement de barillet avec ses deux pistes suffit à établir un nouveau programme mécanique pour lequel les développements sélectionnés sont, pour ainsi dire, reprogrammés (voir A1: colonne 14, lignes 1 à 15). La caractéristique 1.5 est donc suffisante en soi pour permettre, à elle seule, de concrétiser le programme mécanique, ou en d'autres termes, le barillet avec ses deux pistes apporte une solution complète à la réalisation du programme mécanique.
3.2 Il n'a pas été contesté par la requérante que l'introduction, au cours de la procédure d'opposition, de la caractéristique 1.5 dans la revendication 1 ne fait que limiter la protection conférée par la revendication 1 telle que délivrée (article 123(3) de la CBE) et la Chambre juge qu'aucune objection valide n'existe sur ce point.
3.3 La Chambre conclut de ce qui précède que les modifications effectuées dans la revendication 1 ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée et qu'elles sont conformes aux dispositions de l´article 123 (2) et (3) de la CBE.
4. Activité inventive
4.1 Revendication 1 de procédé
4.1.1 La Chambre s'accorde avec la requérante pour considérer que le document D3 représente l'art antérieure le plus proche et a servi à délimiter la revendication 1 dans la forme en deux parties. Ce document décrit aux pages 14-17 en liaison avec les figures 8 à 10 un procédé comprenant l'ensemble des caractéristiques 1.1 à 1.4 du préambule de la revendication 1.
En ce qui concerne la caractéristique 1.5, le document D3 montre également que l'établissement du programme mécanique comprend la fourniture d'un barillet 80 (page 14, cinquième paragraphe) à raccorder à une poignée tournante de ladite commande unique (page 14, deuxième paragraphe) et la réalisation sur ledit barillet de deux pistes 81,82 pour actionner lesdits premier et deuxième câbles de commande et sélectionner les développements choisis (page 14, deux derniers paragraphes).
4.1.2 La requérante a estimé que la caractéristique 1.6 n'est qu'une conséquence directe de l'utilisation du barillet 80 et de la géométrie des deux pistes 81,82 comme moyen d'exécution du programme mécanique et qu'elle ressort à l'évidence du document D3.
La Chambre ne peut suivre la requérante sur ce point. La caractéristique 1.6 impose que les moyens d'exécution de la commande ne doivent pas s'opposer au libre choix des développements préalablement retenus parmi l'ensemble des développements utiles.
Selon le procédé du document D3, la commande unique opère par actions élémentaires AE1, chacune de ces actions consistant à faire tourner le barillet de 90º autour de la tige filetée 64 (page 15, troisième paragraphe). Comme les pistes 81,82 du barillet s'étendent sur le pourtour du barillet de manière à être jointives après un tour complet (voir D3: figure 10), quatre actions élémentaires AE1 provoquent une rotation complète du barillet 80 et permettent de parcourir un cycle complet consignant le déplacement des dérailleurs. Toute nouvelle action élémentaire ultérieure provoque ensuite le déroulement du même cycle de déplacement des dérailleurs à partir de cette position (page 17, sixième et septième paragraphes). Ces cycles se répètent pour chacun des plateaux P1-P3 (voir figures 6A à 6K). La commande unique selon le procédé du document D3 impose donc que les développements retenus en liaison avec le premier plateau (cycle consignant le choix des pignons R1-R4 en liaison avec premier plateau P1) contraignent le choix des développements à retenir en liaison avec les plateaux suivants (répétition du même cycle de consigne R3-R6 pour second plateau P2). Par conséquent, la caractéristique 1.6 n'est pas divulguée dans le procédé selon le document D3 de l'état de la technique.
Les paragraphes [0097] à [0099] et la figure 2B du fascicule de brevet montre que les moyens d'exécution de la commande unique selon l'invention n'imposent pas, quant au choix des développements retenus, les contraintes qu'auraient imposées les moyens d'exécution de la commande unique selon le document D3 (voir paragraphes [0056] du fascicule de brevet). Le fait de concevoir une commande unique qui n'imposerait pas ces contraintes (caractéristique 1.6) ne découle pas à l'évidence du document D3.
4.2 Revendication 5 de dispositif
4.2.1 La Chambre s'accorde avec la requérante pour considérer que le document D3 décrit en liaison avec les figures 8 à 10 un dispositif représentant l'art antérieur le plus proche. Ce document a servi à délimiter la revendication 5 dans la forme en deux parties (voir paragraphes [0040] à [0058] du fascicule de brevet).
4.2.2 La requérante a estimé que la caractéristique 5.3 est divulguée dans le document D3. La caractéristique 5.3 exige que la poignée soit solidarisée en translation avec le barillet. Au vu de la figure 9 du document D3, on ne voit pas comment une poignée de manoeuvre rotative puisse ainsi être solidarisée avec le barillet, sans qu'elle interfère avec la tige filetée 64 et la table 60, qui sont toutes deux fixés sur le cadre ou le guidon du vélo (D3: page 14, paragraphes 2 à 4). Une telle caractéristique n'est pas réalisable dans la pratique sans remettre en question le principe opératoire du dispositif de commande des figures 8-10 du document D3. Si une telle poignée tournante était solidarisée en translation avec le barillet 80 du document D3, il faudrait que cette dernière soit, comme le barillet lui-même, déplaçable en translation le long de la tige filetée 64, qui, elle, est fixe. Compte-tenu des exigences opératoires de ce type de commande (page 14 de D3, deuxième paragraphe: "la commande s'effectuant alors directement en tournant la poignée dans un sens ou dans l'autre") une telle possibilité n'aurait pas été retenue par l'homme du métier. De plus, si, comme l'a laissé entendre la requérante, le barillet 80 du document D3 était la poignée tournante, on se demande comment il pourrait être empoigné par l'utilisateur.
4.2.3 La requérante a combiné les documents D3 et E8 pour tenter de démontrer l'évidence du dispositif selon la revendication 5.
Le principe opératoire du dispositif de sélection selon le document D3 repose sur la combinaison d'un mouvement de translation avec un mouvement de rotation du barillet 80 sur la tige filetée 64 pour la commande des deux câbles C1,C2.
Le document E8 décrit un manchon rotatif 30 pourvu d'une rainure hélicoïdale 301 s'étendant sur plus d'un tour complet de son pourtour. Le manchon selon E8 fait office de poignée d'actionnement et est, pour cette raison, placé à l'extrémité du guidon du vélo (page 2, colonne de gauche, septième paragraphe). Il ne commande qu'un seul câble du dérailleur associé aux pignons (voir figure 1).
Compte-tenu des différences de principe de fonctionnement et d'actionnement des dispositifs selon ces deux documents, l'homme du métier partant du dispositif selon les figures 8 à 10 du document D3 n'a a priori aucune raison de prendre en considération le dispositif de sélection selon le document E8, si ce n'est en réinventant chacun de ces deux dispositifs. Une telle combinaison ne peut être inspirée que par la connaissance rétrospective de l'invention.
4.3 Il ressort de ce qui précède que l'objet des revendications 1 et 5 présente l'activité inventive requise (article 56 de la CBE).
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.