T 1377/15 02-06-2016
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DETERMINATION DE DESCRIPTEUR DANS UN CONTENU MULTIMEDIA
I. Le recours formé le 13 avril 2015 est dirigé contre la « décision de la division d'examen en date du 16 février 2015, décision rejetant la requête principale », ladite requête principale ayant été soumise le 26 janvier 2015.
II. Dans le mémoire exposant les motifs du recours reçu le 23 juin 2015, la demanderesse a demandé la délivrance d'un brevet européen sur la base de la requête principale ou, subsidiairement, sur la base de l'une des deux requêtes auxiliaires déposées avec le mémoire exposant les motifs du recours. La tenue d'une procédure orale a aussi été requise.
III. Le document en date du 16 février 2015 est intitulé « Notification selon la règle 71(3) CBE ». Par cette notification, la division d'examen avait informé la demanderesse qu'elle envisageait de délivrer un brevet européen sur la base de la requête auxiliaire n**(o) 1 et avait donné les raisons pour lesquelles elle considérait que l'objet de la requête principale n'impliquait pas d'activité inventive.
À la fin de cette notification étaient mentionnées les pièces jointes suivantes:
- Texte dans lequel il est envisagé de délivrer le
brevet (27 pages)
- Formulaire OEB 2056
- Formulaire OEB 2906 .
Le titre figurant en haut de la première page du formulaire OEB 2906 (ci-après : « le formulaire 2906 ») est « Requête principale ». Nulle part dans ce formulaire, pas plus que dans la notification elle-même ou dans les deux autres annexes, le terme « décision » n'est employé. Dans le formulaire 2906, la division d'examen a exposé les raisons pour lesquelles elle
considère que la requête principale, soumise le 26 janvier 2015, ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 52(1) CBE.
Ladite notification, à laquelle étaient jointes les trois pièces susmentionnées, a été envoyée à la suite de la procédure orale qui s'est tenue devant la division d'examen le 28 janvier 2015 en l'absence de la demanderesse. Il convient de constater que celle-ci, dans son mémoire du 26 janvier 2015, avait écrit que cette procédure orale « devrait permettre la délivrance de la présente demande, sur la base d'une des requêtes présentement déposées ». Selon le procès-verbal de cette procédure orale (cf. point 3), la division d'examen a conclu que:
« - la requête principale ne satisfait pas aux exigences de l'article 56 CBE (cf. décision pour le refus);
- la première requête auxiliaire satisfait aux exigences des articles 54 et 56 CBE et pourrait former la base pour la délivrance d'un brevet. »
[mise en gras ajoutée par la chambre]
IV. Dans une notification établie conformément à l'article 15(1) du règlement de procédure des chambres de recours, annexée à la citation à la procédure orale devant avoir lieu le 2 juin 2016, la chambre a exprimé l'avis provisoire que le recours n'avait aucune chance de succès étant donné qu'il ne satisfaisait manifestement pas aux exigences de l'article 106 CBE. Les raisons présentées aux points 4 à 11 de cette notification de la chambre sont reproduites verbatim ci-dessous:
4. Il convient, d'abord, de noter que, conformément à
l'article 106(1) CBE, seules sont susceptibles de recours les « décisions » des divisions d'examen. Selon l'article 106(2) CBE, une décision qui ne met pas fin à une procédure à l'égard d'une des parties ne peut faire l'objet d'un recours qu'avec la décision finale, à moins que ladite décision ne prévoie un recours indépendant.
Afin de pouvoir juger si le présent recours est dirigé ou non contre une décision au sens de l'article 106 CBE, il y a lieu, d'abord, d'observer que c'est le contenu et non pas la forme d'un document qui détermine s'il s'agit d'une décision ou d'une notification (cf. J 8/81, JO OEB 1982, 10).
La « décision rejetant la requête principale » sur le
formulaire 2906
5. En ce qui concerne le document attaqué par le recours, c'est-à-dire la « décision rejetant la requête principale » sur le formulaire 2906, force est de constater que le formulaire est une « pièce jointe » à la notification et donc une partie intégrale de celle-ci. En conséquence, la nature légale du document attaqué doit être déterminée en tenant compte de
l'ensemble des pièces constituant la notification, c'est-à-dire la notification elle-même, le formulaire 2906 et les deux autres documents joints (le texte envisagé du brevet et le formulaire OEB 2056).
Dans la notification elle-même, les passages pertinents sont les suivants (la chambre a supprimé les soulignements et impressions en caractères gras dans l'original et à mis en gras les passages les plus pertinents):
2. Invitation
Vous êtes invité à accomplir les actes suivants dans un délai non reconductible de quatre mois à compter de la signification de la présente notification :
2.2 SOIT, en cas de désaccord, présenter une requête motivée en modification ou en correction concernant le texte notifié ci-dessus, ou requérir le maintien de la dernière version du texte que vous aviez soumise (règle 71(6) CBE).
4. Procédure ultérieure
4.2 Dans le cas prévu au point 2.2 ci-dessus
Si la présente notification selon la règle 71(3) CBE se fonde sur une requête subsidiaire et si vous répondez dans le délai imparti que vous maintenez la requête principale ou une requête d'un rang supérieur qui n'est pas admissible, la demande sera rejetée (art. 97(2) CBE).
Ces passages de la notification, notamment au point 4.2, indiquent clairement que le formulaire 2906 ne constitue pas une décision de rejet de la demande sur la base de la requête principale. En effet, le texte au point 4.2 donne expressément la possibilité au requérant de maintenir la requête principale,
signalant que, dans ce cas, la demande sera rejetée. Ceci implique que, au stade de la notification (avec ses pièces jointes), la demande n'est pas (encore) rejetée.
Le formulaire 2906 intitulé « Requête principale » ne rejette pas la demande; il donne seulement les raisons pour lesquelles la requête principale est jugée non admissible par la division d'examen: voir, à cet égard, le « Chapitre V - Phase finale de l'examen » de la Partie C des « Directives relatives à l'examen
pratiqué à l'OEB ». À la page V-2 de ces Directives, qui concerne le point "1.1 Texte soumis pour approbation", on peut y lire ce qui suit (mises en gras faites par la chambre):
Si une requête principale et des requêtes subsidiaires ont été présentées au cours de la procédure d'examen (cf. C-IV, 1 et E-IX, 3) et que l'une de ces requêtes est admissible, la notification émise au titre de la règle 71(3) doit être établie sur la base de la (première) requête admissible et préciser les raisons pour lesquelles les requêtes qui précèdent dans l'ordre de préférence ne sont pas admissibles (cf. également H-III, 3).
Ces conclusions ne sont remises en question ni par le fait que le texte du formulaire 2906 soit rédigé d'une manière similaire aux motifs d'une décision, ni par le contenu du procès-verbal de la procédure orale qui s'est tenue le 28 janvier 2015. Comme indiqué au point 2 ci-dessus, il a été conclu par la division d'examen que
- « la requête principale ne satisfait pas aux exigences de l'article 56 CBE (cf. décision pour le refus) ;
- la première requête auxiliaire satisfait aux exigences des articles 54 et 56 CBE et pourrait former la base pour la délivrance d'un brevet. » [mise en gras ajoutée par la chambre]
À la lumière de la notification, il ne fait aucun doute que l'expression « cf. décision pour le refus » employée dans le procès-verbal en relation avec la requête principale, ne doit pas être prise au pied de la lettre, mais comme faisant référence aux raisons (exposées dans le formulaire 2906) pour lesquelles la requête principale a été jugée non admissible par
la division d'examen.
La chambre observe également que même si le formulaire 2906 était considéré comme décision, une telle décision ne serait pas finale et, puisque aucun recours indépendant n'était prévu dans la notification (pièces jointes inclues), ne serait pas susceptible de recours conformément à l'article 106(2) CBE.
La notification dans son ensemble, pièces jointes inclues
6. Compte tenu de ce qui précède, il convient de se poser la question de savoir si le recours, s'il ne peut pas être dirigé avec succès contre le formulaire, pourrait toutefois être reconnu comme recevable parce que la notification, dans son ensemble, devrait être traitée comme une décision au sens de l'article 106(1) CBE.
Or, une notification selon la règle 71(3) CBE, dans sa
globalité, n'a pas le caractère d'une « décision ». Cette règle prévoit : « Avant de prendre la décision de délivrer le brevet européen, la division d'examen notifie au demandeur le texte dans lequel elle envisage de délivrer le brevet européen, ainsi que les données bibliographiques pertinentes » [mise en italique faite par la chambre]. Une telle notification n'a donc
pas pour but de mettre un terme à la procédure d'examen, mais constitue plutôt un acte préparatoire (d'une éventuelle décision ultérieure de délivrance d'un brevet européen) ne pouvant pas faire l'objet d'un recours: cf. les décisions dans les affaires T 1181/04 (JO OEB 2005, 312, point 1 des motifs) et T 1226/07 (point 1 des motifs).
7. La chambre de recours statuant dans l'affaire T 1181/04 a néanmoins soulevé (au point 2 des motifs) ce qui suit: « Il est toutefois possible d'aboutir à une conclusion différente si le requérant parvient à faire valoir de façon convaincante, en se référant au contenu objectif de la notification tel qu'il a pu le comprendre, que le document qui lui a été envoyé n'était pas, en dépit de son titre, une notification normale selon la règle 51(4) CBE [1973], mais plutôt une décision mettant fin à la procédure. »
8. Or, la notification en question dans l'affaire T 1181/04 se fondait sur la règle 51 CBE 1973, telle qu'en vigueur à l'époque, qui a entre-temps subi des modifications et, dans la CBE 2000, a été renumérotée règle 71. À la différence de la notification dans cette affaire, il ressort sans équivoque du libellé de la notification de la division d'examen dans le cas
présent (cf. notamment le point 4.2 de la notification,
reproduit ci-dessus), qu'il s'agit d'une notification normale selon la règle 71(3) CBE, c'est-à-dire d'un acte préparatoire ne pas mettant fin à la procédure.
9. Dans le mémoire de recours, le requérant maintient la requête principale du 26 janvier 2015 et demande qu'il soit fait droit à celle-ci. Si le requérant avait adressé cette requête directement à la division d'examen en réponse à la notification selon la règle 71(3) CBE, la division d'examen, conformément à la règle 71(6) CBE, aurait été amenée à reprendre la procédure d'examen ce qui, comme indiqué au point 4.2 de la notification, l'aurait conduit à rejeter la demande selon l'article 97(2) CBE, ce rejet constituant une décision susceptible de recours selon l'article 106(1) CBE. Ce sera d'ailleurs la procédure à suivre par la division d'examen si la chambre rejette le recours comme irrecevable ou, le cas échéant, le requérant retire son recours: cf. T 1226/07, au point 2.1 des motifs, dont on peut conclure, à juste titre, que le présent recours constitue la réponse selon la règle 71(6) CBE requise au point 2 de la notification. Le recours contre la notification du 16 février 2015 ayant été formé le 13 avril 2015 et le mémoire exposant les motifs du recours ayant été présenté le 23 juin 2015, le délai de quatre mois imparti au point 2 de la notification a été respecté.
10. Plus généralement, en ce qui concerne la procédure à suivre après que la division d'examen ait notifié au demandeur le texte dans lequel elle envisage de délivrer le brevet européen (notification au titre de la règle 71(3) CBE), la chambre attire l'attention du requérant sur le « Chapitre V - Phase finale de l'examen » de la Partie C des « Directives relatives
à l'examen pratiqué à l'OEB ».
11. A la lumière des explications présentées ci-dessus, il est clair que les conséquences du désaccord du requérant avec le texte proposé pour délivrance dans le cas présent ne peuvent pas être les mêmes que celles dans l'affaire T 1181/04 car les dispositions de la CBE 1973, notamment les règles 51(4) et 51(8), en vigueur à l'époque étaient différentes. Dans l'affaire T 1181/04, la notification combinait diverses phases de la procédure, avec pour conséquence de passer sous silence
l'une des options qui aurait dû s'offrir au requérant, à savoir la possibilité d'exprimer son désaccord et d'obtenir ensuite une décision susceptible de recours, contenant un rejet motivé des requêtes qui précédaient dans l'ordre de préférence (cf. point 2.2 des motifs, avant-dernier paragraphe).
Au contraire, dans la présente affaire, le libellé de la notification selon la règle 71(3) CBE propose expressément cette option au requérant. Partant de cela, les principes énoncés dans T 1181/04 selon lesquels la notification au titre de la règle 51(4) CBE 1973 pouvait exceptionnellement être reconnue en tant que décision susceptible de recours ne s'appliquent pas.
V. Par une lettre datée du 25 mai 2016, la demanderesse a informé la chambre qu'elle ne se présenterait pas à la procédure orale du 2 juin 2016.
VI. La procédure orale s'est tenue le 2 juin 2016 en l'absence de la demanderesse. À la fin de la procédure orale, le Président de la chambre a annoncé la décision de la chambre.
1. Dans la notification établie conformément à l'article 15(1) du règlement de procédure des chambres de recours, annexée à la citation à la procédure orale devant avoir lieu le 2 juin 2016, la chambre a exprimé l'avis provisoire que le recours n'avait aucune chance de succès étant donné qu'il ne satisfaisait manifestement pas aux exigences de l'article 106 CBE pour les raisons présentées aux points 4 à 11 de cette notification et reproduites au point IV ci-dessus.
2. La demanderesse n'a pas répondu sur le fond à la notification de la chambre et n'est pas venue à la procédure orale du 2 juin 2016 qui s'est dûment tenue.
3. Dans ces circonstances, la chambre ne voit aucune raison de changer son avis provisoire présenté dans la notification susmentionnée. Par conséquent, la chambre maintient les raisons données dans cette notification, lesquelles conduisent à la conclusion que le recours ne satisfait manifestement pas aux exigences de l'article 106 CBE.
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté comme irrecevable.