T 1762/16 (Alimentation de deux inducteurs / Groupe Brandt) 15-09-2021
Téléchargement et informations complémentaires:
Procédé d'alimentation en puissance de deux inducteurs et appareil de cuisson mettant en oeuvre ledit procédé
I. Le recours de l'opposante fait suite à la décision de la division d'opposition de rejeter l'opposition contre le brevet européen 2 200 398.
II. La division d'opposition a estimé que les motifs soulevés à l'encontre du brevet selon l'article 100(a) CBE, pour défaut de nouveauté et d'activité inventive, ne s'opposaient pas au maintien du brevet tel que délivré. La division d'opposition n'a, en outre, pas admis le motif d'opposition selon l'article 100(c) CBE, d'extension de l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle que déposée, invoqué tardivement par l'opposante.
III. Concrètement, la division d'opposition a considéré que l'objet des revendications indépendantes 1 et 13 telles que délivrées était nouveau (article 54 CBE) compte tenu de l'enseignement du document :
A2 : EP-A-1 951 003.
IV. Elle a également jugé que l'objet de la revendication 1 telle que délivrée impliquait une activité inventive (article 56 CBE) compte tenu de l'enseignement de A2, retenu au titre d'état de la technique le plus proche de l'objet revendiqué. Cette conclusion s'appliquait aussi bien, que ce document soit considéré seul, ou bien à la lumière des connaissances générales de la personne du métier telles que, par exemple, reproduites dans
A13 : EP-A-286 044.
V. La division d'opposition a notamment retenu que la caractéristique distinctive de l'invention vis-à-vis de A2, relative à une alimentation en alternance des inducteurs, garantissait que chacun des inducteurs puisse bénéficier de phases de repos, limitant ainsi la surchauffe des circuits et donc une usure prématurée de ceux-ci.
VI. De même, la division d'opposition a estimé que le procédé revendiqué était inventif compte tenu du document
A4 : WO-A-2008/078868
et des connaissances générales ou de l'enseignement des documents
A5 : US-A-4 871 961, ou
A6 : JP-A-2008 287923.
VII. La requérante a demandé l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet.
VIII. À l'appui de son recours, la requérante a réitéré les objections selon lesquelles :
- l'objet de la revendication 1 telle que délivrée est dépourvu de nouveauté (article 54 CBE) compte tenu de l'enseignement du documents A2 ;
- l'objet de la revendication 1 ne démontre pas l'existence d'une activité inventive (article 56 CBE) compte tenu de A2, ou bien encore de A4, susceptibles d'être retenus, respectivement, comme points de départ de l'analyse problème/solution. De même, la requérante fait valoir que l'objet de la revendication indépendante 13 n'est pas nouveau compte tenu de A2 ou de A3 (EP-A-926 926).
IX. La requérante conteste tout particulièrement les raisons retenues par la division d'opposition relatives à l'effet des phases de repos sur la surchauffe des composants électroniques des onduleurs. La requérante s'appuie, notamment, sur les résultats d'une simulation qu'elle a commandée (déclaration "Pastore") qui démontre, selon elle, que l'effet retenu par la division d'opposition est en réalité inexistant, voir même, que les mesures envisagées sont contreproductives en ce qui concerne l'échauffement au niveau de la jonction des commutateurs IGBT.
X. Dans la réponse au mémoire de recours, l'intimée a demandé, à titre principal, le rejet du recours et le maintien du brevet tel que délivré.
À titre subsidiaire, l'intimée a alors requis le maintien du brevet sous une forme modifiée selon l'une des requêtes subsidiaires 1, 2, ou 3.
XI. En substance, l'intimée souligne que le procédé décrit dans A2, qui ne reproduit pas de phase d'alimentation en alternance, dissuade, en réalité, la personne du métier d'y recourir. Les phases d'alimentation T2 prévues dans A2 se caractérisent, en effet, en ce qu'un seul inducteur est actif. L'intimée fait, en outre, part de ses réserves quant au modèle retenu dans la cadre de la simulation mise en avant par la requérante (déclaration "Pastore"), mais retient néanmoins que celle-ci démontre bien l'existence de fortes variations de température au niveau des jonctions IGBT lors des phases de repos des inducteurs.
XII. La revendication 1 selon la requête principale de l'intimée, c'est-à-dire du brevet tel que délivré, s'énonce comme suit:
Procédé d'alimentation en puissance à des valeurs de puissance de consigne (P1d, P2d) de deux inducteurs (I1, I2) montés en parallèle sur une même phase de puissance d'une alimentation électrique et alimentés respectivement par deux onduleurs (31, 32) commandés par un même générateur de fréquence (34), caractérisé en ce qu'il comprend une étape d'alimentation en puissance, cyclique sur des périodes prédéterminées (Tprog), ladite étape d'alimentation en puissance comportant, sur chaque période prédéterminée (Tprog), une phase d'alimentation mixte composée d'une phase d'alimentation en parallèle desdits deux inducteurs (I1, I2) dans laquelle lesdits deux inducteurs (I1, I2) sont alimentés respectivement par lesdits deux onduleurs (31, 32) commandés à une même fréquence de travail (FT), et d'une phase d'alimentation en alternance desdits deux inducteurs (I1, I2) dans laquelle lesdits deux inducteurs (I1, I2) sont alimentés en alternance.
XIII. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 correspond à la revendication 2 du brevet. Elle diffère donc de la revendication 1 de la requête principale en ce qu'elle intègre, à la suite du texte de la revendication 1 telle que délivrée, reproduite ci-dessus, la formulation suivante :
... en ce qu'une première durée (Np) de ladite phase d'alimentation en parallèle, une seconde durée (Nalt) de ladite phase d'alimentation en alternance et des puissances instantanées d'alimentation (P1p, P2p, Palt) desdits inducteurs (I1, I2) pendant lesdites phases d'alimentation en parallèle et en alternance sont déterminées de sorte que les puissances moyennes (P1m, P2m) délivrées sur ladite période prédéterminée (Tprog) par lesdits inducteurs (I1, I2) associés respectivement à des récipients à chauffer soient sensiblement égales respectivement auxdites valeurs de puissance de consigne (P1d, P2d) associées respectivement auxdits deux inducteurs (I1, I2).
XIV. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1bis diffère de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 en que la référence aux "puissances moyennes (P1m, P2m) délivrées sur ladite période prédéterminée (Tprog)" est remplacée par la référence aux "puissances moyennes (P1m, P2m) délivrées sur ladite phase d'alimentation mixte".
XV. La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 correspond à la fusion des revendications 1 et 3 du brevet. Elle diffère donc de la revendication 1 de la requête principale en ce qu'elle intègre, à la suite du texte de la revendication 1 telle que délivrée, reproduite ci-dessus, la formulation suivante :
... et en ce que dans ladite phase d'alimentation en parallèle, la somme des puissances instantanées d'alimentation (P1p, P2p) desdits inducteurs (I1, I2) est sensiblement égale à la puissance maximale délivrée par ladite phase de puissance de l'alimentation électrique, et en ce qu'une durée (Np) de ladite phase d'alimentation en parallèle est déterminée en fonction d'une durée (Nprog) de ladite période prédéterminée (Tprog), d'une puissance instantanée d'alimentation (Palt) dans ladite phase d'alimentation en alternance, desdites puissances de consigne (P1d, P2d) pour lesdits deux inducteurs (I1, I2) et des puissances instantanées d'alimentation (P1p, P2p) de chaque inducteur (I1, I2) pendant ladite phase d'alimentation en parallèle.
XVI. La revendication 1 de la requête subsidiaire 3 correspond à la fusion des revendications 1 et 4 du brevet. La revendication 1 diffère donc de la revendication 1 de la requête principale en ce qu'elle intègre, à la suite du texte de la revendication 1 telle que délivrée, reproduite ci-dessus, la formulation suivante :
... et en ce que, la puissance instantanée admise par chaque inducteur (I1, I2) alimenté par un onduleur (31, 32) étant comprise entre une puissance minimale continue (PminCont) et une puissance maximale continue (PmaxCont), ladite phase d'alimentation mixte est mise en ½uvre au moins lorsque la somme desdites valeurs de puissance de consigne (P1d, P2d) est supérieure à ladite puissance maximale continue (PmaxCont) et au moins une des valeurs de puissance de consigne (P1d, P2d) est inférieure à une valeur de seuil prédéterminée (Vs), supérieure ou égale à la valeur de ladite puissance minimale continue (PminCont).
XVII. La revendication 1 de la requête subsidiaire 4 diffère de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1bis en ce qu'elle intègre les caractéristiques supplémentaires selon lesquelles :
... la durée (Nprog) de la période prédéterminée (Tprog) est égale à la somme de ladite première durée (Np) de ladite phase d'alimentation en parallèle et de ladite seconde durée (Nalt) de ladite phase d'alimentation en alternance.
Requête principale - nouveauté (article 54 CBE)
1. A2 décrit un procédé d'alimentation en puissance à des valeurs de puissance de consigne de deux inducteurs montés en parallèle sur une même phase de puissance d'une alimentation électrique. Un circuit de commande comprenant deux onduleurs permet de coordonner l'activation des inducteurs. Le procédé selon A2 prévoit une période de commande T constituée d'une première période T1, au cours de laquelle les deux inducteurs sont activés simultanément à une même fréquence de travail, suivie d'une seconde période T2, au cours de laquelle seul l'un des deux inducteurs est actif et alimenté à une fréquence différente de la fréquence de travail utilisée précédemment (cf. A2 paragraphe [0051]). Les puissances instantanées délivrées sont sélectionnées de manière à approcher la fréquence de consigne requise pour chaque inducteur. Le procédé d'alimentation prévoit, selon un mode préféré, une répétition cyclique de la séquence ainsi décrite, chaque période T1 précédant la période T2.
2. À l'inverse, il est également envisagé d'inverser la séquence d'activation, la période d'activation T2 d'un seul inducteur précédant alors la période d'activation simultanée T1 des deux inducteurs. Selon un mode particulier de réalisation, les périodes T1 et T2 peuvent également alterner au cours de cycles consécutifs. La séquence d'activation résultante correspondant alors à une succession au cours de deux cycles successifs des périodes T1, T2, T2, T1 (cf. A2 paragraphe [0057]).
3. A2 prévoit également la possibilité d'inclure, au cours de chaque cycle T, une troisième période T3 de repos au cours de laquelle les deux inducteurs sont inactifs.
4. l'argumentation mise en avant par la requérante pour démontrer l'absence de nouveauté du procédé revendiqué se fonde sur l'absence de toute précision quant à l'inducteur effectivement activé au cours de chaque période T2. Il en résulte, selon elle, que l'inducteur activé au cours des périodes T2 de deux cycles successifs peut varier. Combiné au scénario évoqué au paragraphe [0057], prévoyant une inversion des séquences d'activation (T1, T2), on obtient alors un mode mixte d'alimentation qui voit se succéder une période d'alimentation (2*T1) en parallèle des deux inducteurs, une première période T2, au cours de laquelle seul un premier inducteur est alimenté, et une seconde période T2 au cours de laquelle seul le second inducteur est alimenté. Le motif d'alimentation alors retenu correspond au mode mixte de la revendication où une période d'alimentation en parallèle des deux inducteurs précède une période d'alimentation en alternance de ceux-ci.
5. L'argumentation de la requérante ne saurait convaincre.
Si le scénario évoqué conduit effectivement à reconnaître l'existence de cycles tels que définis dans la revendication 1, celui-ci se heurte au contenu effectif du paragraphe [0051] de A2.
6. En effet, celui-ci est muet quant à l'inducteur qui est mis hors circuit, ou quant à celui qui demeure actif au cours des périodes T2. Rien ne vient donc étayer l'hypothèse d'un changement de l'inducteur activé au cours des phases T2 de périodes programme successives.
7. La requérante, tout en reconnaissant que cette information ne pouvait se déduire directement du paragraphe [0051], a souligné que le nombre de possibilités résultant d'une combinaison des possibilités prévues respectivement aux paragraphes [0051] et [0057] était limité à quatre, correspondant au changement, ou non, des inducteurs au cours des phases T2 de cycles successifs et à une inversion périodique, ou non, des périodes d'activation T1 - T2. Ce nombre limité de combinaisons devait conduire la chambre à reconnaître la divulgation de chacune de celles-ci.
8. En l'occurrence, la chambre ne peut accepter l'argument dans la mesure où il repose sur l'hypothèse que ce ne serait pas toujours le même inducteur qui serait actif au cours des phases T2 de cycles successifs. Or, rien dans la demande ne supporte ce point de vue. Celle-ci suggère, au contraire, que c'est, selon toute vraisemblance, l'inducteur qui est destiné à fournir la puissance la plus élevée qui est activé au cours des phases T2 successives (cf. paragraphe [0053]).
9. En complément de son argumentation, la requérante a souligné que l'inversion des cycles T1, T2, évoquée au paragraphe [0057], n'aurait aucune signification technique, si l'on admettait que c'était toujours le même inducteur qui était activé au cours des périodes T2 de cycles successifs. En effet, en l'absence d'un tel changement, le schéma d'activation évoqué au paragraphe [0057] serait équivalent à celui du mode principal, au cours duquel les deux inducteurs sont alimentés simultanément au cours d'une première phase suivi d'une période au cours de laquelle seul l'un des deux inducteurs est alimenté.
10. Cet argument ne prend cependant pas en compte les effets résultant du doublement des périodes considérées. L'alimentation ainsi obtenue est en effet identique à celle qui résulterait d'un doublement de l'échelle temps. La succession de périodes programme T = T1+T2 et T = T2+T1, lorsque le même inducteur est activé au cours des phases T2, est équivalente à celle qui résulterait d'une période programme Tprog = 2*T (2*T = 2*T1 + 2*T2).
11. Un tel schéma d'activation conduit, cependant, à une réduction d'un facteur deux des sauts de tension perçus par le réseau pour une durée d'alimentation donnée. Il permet donc ainsi de s'adapter aux exigences de la norme Flicker. Par conséquent, l'argument qui vise à démontrer que les périodes T2 de cycles consécutifs ne peuvent correspondre à l'activation d'un seul et même inducteur, parce qu'un tel mode, dans le contexte d'une inversion des cycles T1, T2, n'aurait aucun intérêt, n'est pas convaincant.
12. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 est nouveau compte tenu de A2.
Requête principale - activité inventive (article 56 CBE)
13. Le document A2 relève du même domaine technique que l'invention. Au même titre que la demande en instance, le procédé de A2 vise à éviter les problèmes de bruits résultant de l'alimentation simultanée de deux inducteurs à des fréquences différentes ([0018]). Le procédé divulgué dans A2 prévoit une coordination des phases d'alimentation des deux inducteurs, ceux-ci étant commandés simultanément au cours d'une première période T1 à une même fréquence de travail, suivie d'une seconde période T2 au cours de laquelle seul l'un des deux inducteurs est activé. Les durées T1 et T2 sont sélectionnées de manière à ce que la puissance moyenne délivrée par chaque inducteur corresponde à une puissance de consigne [0036].
14. Il en résulte que A2 constitue un point de départ de l'analyse problème-solution réaliste.
15. Le procédé revendiqué se distingue du procédé connu de A2 en ce que celui-ci prévoit une étape d'alimentation en alternance au cours de laquelle les deux inducteurs sont alimentés en alternance. Selon A2, en effet, seul un des inducteurs est activé au cours de la seconde fraction T2 d'un cycle complet.
16. L'existence d'une période de repos pour chaque couple inducteur/onduleur conformément à l'invention permet de limiter l'échauffement des composants électroniques et donc de prévenir une usure prématurée de ceux-ci (cf. paragraphe [0027] du brevet).
17. L'existence de cet effet est contesté par la requérante, qui estime que l'effet résultant de la caractéristique distinctive est, en réalité, insignifiant, voire même contraire à l'effet recherché mis en avant par l'intimée. Ce point de vue se fonde sur le résultat d'une simulation produite à l'appui du recours (déclaration "Pastore").
18. La déclaration "Pastore" est une déclaration sous serment produite par un expert en électronique de puissance et disposant d'une longue expérience dans le domaine des dispositifs de chauffage par induction au sein du groupe Whirlpool (requérante). La déclaration comprend une première partie, consacrée à la méthodologie et aux moyens mis en ½uvre pour réaliser la simulation. Elle est suivie d'une partie consacrée aux résultats comparatifs où sont présentés, sous forme graphique, l'évolution des profils de température au niveau des jonctions IGBT pour le dispositif de A2, lorsque se succèdent les cycles T1, T2, et pour celui de l'invention. Les résultats les plus pertinents en termes de température maximale et de température moyenne au niveau des jonctions IGBT sont également résumés sous forme de tableau récapitulatif.
19. En l'occurrence, la simulation réalisée tend à démontrer que l'existence de périodes de repos est sans incidence sur les températures maximales observées au niveau de la jonctions IGBT de chaque inducteur. De même, la simulation semble établir l'absence de différence significative quant à la température moyenne au cours d'un cycle de chaque jonction.
20. Même si, selon le mode principale de réalisation divulgué dans A2, l'un des inducteurs demeure constamment actif au cours des périodes successives T1, T2, il n'en va pas de même du mode de réalisation particulier dans lequel une période de repos général T3 est prévue au cours de chaque cycle d'alimentation. Même si la simulation n'intègre pas le procédé de A2 prévoyant une succession des périodes T1, T2, T3, elle n'en démontre pas moins l'influence qu'une période de repos exerce sur le profil de température de l'onduleur correspondant.
21. Appliqué au procédé d'alimentation constitué d'une succession de périodes T1, T2, T3 de A2, la déclaration "Pastore" établit également que cette séquence d'alimentation permet à chaque couple inducteur/onduleur de bénéficier de périodes de relaxation que la séquence principale T1, T2 ne permet pas. En effet, l'existence d'une période T3 conduira, pour l'inducteur qui aura été actif au cours des périodes précédentes T1, T2, à une baisse de température de la jonction sensiblement équivalente à celle observée à la figure 5 de la déclaration "Pastore" entre les abscisses 4,5 et 5 pour le procédé revendiqué. Ceci, en vertu du principe selon lequel les mêmes causes produisent les mêmes effets.
22. Cette analyse est contestée par l'intimée qui souligne, en premier lieu, que la simulation ne tient pas compte des capacités calorifiques des composants utilisés et ne rend donc pas compte du comportement thermique réel du circuit. En outre, de manière plus fondamentale, la simulation ne s'est attachée qu'aux effets thermiques résultant du phénomène de conduction, sans se préoccuper des aspects liés à la commutation au sein des onduleurs. En l'occurrence, c'est précisément cet aspect, insignifiant sur une période programme Tprog, qui serait responsable, sur des périodes d'alimentation sensiblement plus longues de l'ordre de quelques secondes et pour des fréquences de commutation de l'ordre de 25 kHz, d'un échauffement préjudiciable des composants électroniques conduisant à leur usure prématurée.
23. Les profils de température continus et réguliers obtenus dans le cadre de la simulation "Pastore", suggèrent une certaine inertie du système et donc la prise en compte de la capacité calorifique des composants électroniques. Même s'il est probable que les paramètres retenus au titre des hypothèses de calcul dans le cadre de la simulation s'écartent des valeurs réelles, la simulation effectuée donne une idée réaliste du comportement thermique du circuit. À cet égard, la nécessité de produire une puissance de consigne (puissance moyenne sur une période Tprog) combinée à l'existence d'une période de repos conduit à recourir à des puissances instantanées fournies plus élevées et donc à des pertes thermiques elles-aussi plus élevées. Cette appréciation purement qualitative des phénomènes en cause apparaît néanmoins tout à fait conforme aux résultats de la simulation.
24. L'aspect lié au phénomène de commutation n'est pas pris en compte dans l'étude Pastore. Même si la demande n'en fait pas davantage état, l'effet d'échauffement, désormais mis en avant pas l'intimée, résultant de la commutation aux fréquences effectivement mises en ½uvre (de l'ordre de 25 kHz) sur des périodes dépassant substantiellement la durée des périodes programme Tprog, apparaît plausible.
25. Il n'en demeure pas moins que les périodes de repos T3 prévues dans A2 auront le même effet que celles qui résultent, dans le cadre de l'invention, de l'existence des phases d'alimentation en alternance. L'effet lié à l'existence de périodes de repos est en effet indépendant de la cause de l'échauffement, que celui-ci résulte de phénomènes de conduction, observables à l'échelle des cycles de programmation, ou bien de la répétition sur des périodes sensiblement plus longues des opérations de commutation.
26. Par conséquent, aucun effet technique ne résulte de la caractéristique distinctive comparé au mode de réalisation selon A2 dans lequel chaque cycle intègre une période T3 de repos des deux inducteurs. En l'absence d'un tel effet, le procédé revendiqué ne résulte pas d'une activité inventive (cf. G 1/19 Pedestrian simulation, OJ EPO 2021 A77, motifs, points 33, 80; T 72/95 Ionizing liquid/IBBOTT, motifs, point 5.4).
Requête subsidiaire 1 - activité inventive
27. Les différents procédés divulgués dans A2 visent à coordonner les puissances produites par les inducteurs de manière à ce que les puissances moyennes délivrées au cours des périodes programme soient sensiblement égales aux puissances de consigne sélectionnées pour chacun d'eux (cf. A2 paragraphe [0036]).
28. Le procédé de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 se distingue du mode de réalisation particulier de A2 prévoyant une succession de périodes T1, T2 et T3 en ce que celui-ci prévoit une étape d'alimentation en alternance au cours de laquelle chacun des deux inducteurs est alimenté en alternance et donc, concrètement, en ce que la première période d'alimentation en parallèle est suivie d'une seconde période d'alimentation en alternance des inducteurs.
29. La précision dans la revendication 1 selon laquelle la première période d'alimentation en parallèle est suivie d'une seconde période d'alimentation en alternance des inducteurs ne fait que concrétiser le procédé défini par la revendication 1 de la requête principale sans apporter de contribution technique supplémentaire.
30. Il en résulte que le procédé revendiqué ne produit aucun effet technique comparé au procédé d'alimentation de A2 dans lequel se succèdent les périodes T1, T2 et T3. Lors de la mise en ½uvre du procédé revendiqué, chaque jonction IGBT atteindra des températures maximale et moyenne similaires à celles du procédé selon A2 et verra son profil de température baisser de façon sensible au cours de périodes d'inactivité telles qu'elles résultent de la phase d'alternance, comme cela est le cas au cours de la période T3 prévue dans A2.
31. L'analyse développée ci-dessus en relation avec la requête principale s'applique à la revendication 1 de la requête subsidiaire 1.
32. L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 n'est pas inventif au sens de l'article 56 CBE.
Requête subsidiaire 1bis - recevabilité
33. La requête subsidiaire 1bis a été déposée au cours de la procédure orale devant la chambre après que la chambre ait annoncé que l'objet de la requête subsidiaire 1 n'était pas brevetable. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1bis diffère de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 en que la référence à "ladite période prédéterminée Tprog" est remplacée par la référence à "ladite phase d'alimentation mixte".
34. La modification vise à exclure une période de repos au cours de laquelle les deux inducteurs seraient inactifs.
35. La modification apportée n'affecte, cependant, en rien l'analyse de la chambre développée ci-dessus en relation avec la requête principale. La revendication 1 selon la requête 1bis définit la "phase d'alimentation mixte" comme une phase d'alimentation composée d'une phase d'alimentation en parallèle desdits deux inducteurs dans laquelle lesdits deux inducteurs sont alimentés respectivement par lesdits deux onduleurs commandés à une même fréquence de travail, et d'une phase d'alimentation en alternance desdits deux inducteurs dans laquelle lesdits deux inducteurs sont alimentés en alternance.
36. La définition retenue requiert de la phase d'alternance que les deux inducteurs soient alimentés en alternance au cours de celle-ci, sans exiger de quelconques conditions supplémentaires quant au nombre d'alternances requises, la régularité des profils d'alternance (durée relative d'activation des inducteurs I1 ou I2) ou l'existence ou non de phases de repos entre ou après les périodes d'alimentation des inducteurs.
37. Donc, contrairement à l'intention déclarée de l'intimée, la formulation retenue ne suffit pas à exclure l'existence de périodes de repos au cours de laquelle les deux inducteurs seraient inactifs.
38. En outre, même si l'intimée était parvenue à préciser son intention, et donc à s'écarter du mode de réalisation de A2 prévoyant une succession des phases T1, T2 et T3, cela n'aurait en rien affecté le constat établi ci-dessus selon lequel l'existence d'une phase d'alternance, et donc d'une phase de repos pour chaque inducteur, ne produit aucun effet technique comparé au procédé de A2. L'analyse effectuée ci-dessus a établi, sur la base de la déclaration "Pastore" et des procédés divulgués dans A2, qu'aucune contribution de nature technique ne pouvait être reconnue dans l'existence, pour chaque couple inducteur/onduleur d'une période de repos, comparé au procédé de A2. Ce constat découle de l'existence, selon le procédé revendiqué, d'une période de repos pour chaque couple inducteur/onduleur et ne dépend donc pas de l'existence d'une période de repos commune aux deux couples considérés.
39. La modification entreprise ne permet donc pas davantage d'établir l'existence d'un effet technique par rapport au mode de réalisation de A2 où se succèdent les phases T1, T2 et T3. La modification entreprise ne saurait donc, de prime abord, affecter l'analyse développée ci-dessus en relation avec la revendication 1 de la requête subsidiaire 1.
40. Dans le cadre du pouvoir d'appréciation que lui confère l'article 13 RPCR 2020, la chambre conclut que la requête subsidiaire 1bis n'est pas recevable.
Requêtes subsidiaires 2 et 3 - recevabilité
41. Les requêtes subsidiaires 2 et 3 ont été déposées avec la réponse au mémoire de recours. La revendication 1 de ces deux requêtes correspond, respectivement, à la fusion des revendications 1 et 3, et 1 et 4, du brevet tel que délivré.
42. La recevabilité des requêtes subsidiaires 2 et 3 relève des dispositions du règlement de procédure dans sa version de 2007 (RPCR 2007) alors en vigueur au moment du dépôt du ces requêtes en juillet 2016. Un des principe directeur de la procédure de recours, avant même l'introduction du nouveau règlement de procédure dans sa version de 2020, consistait déjà à éviter que les parties n'utilisent cette procédure pour y développer une affaire totalement nouvelle (voir décision T 356/08, point 2; voir également "Le traitement des moyens présentés tardivement dans les procédures devant les chambres de recours de l'Office européen des brevets", B. Günzel, Edition spéciale, JO OEB 2/2007, 30, points 5 et 7). La notion de convergence des requêtes, critère généralement invoqué pour juger de la recevabilité de requêtes nouvelles, traduit cette exigence.
43. Le constat selon lequel les requêtes subsidiaires 2 et 3 ont été déposées avec la réponse au mémoire de recours et ne relèvent donc pas des dispositions de l'article 13(1) RPCR 2007 applicables à des requêtes tardives ne fait nullement obstacle à ce que la chambre décide, dans le cadre du pouvoir d'appréciation que lui reconnaît l'article 12(4) RPCR 2007 de ne pas admettre ces requêtes. En effet, en l'absence de convergence des requêtes présentées, leur prise en compte au stade du recours, alors que celles-ci ne font pas l'objet de la décision contestée, conduirait la chambre et la partie adverse à aborder des aspects nouveaux, a priori sans rapport avec les arguments retenus dans la décision contestée, ceci en contradiction avec le principe rappelé ci-dessus.
44. Les requêtes subsidiaires 2 et 3 ne sont pas admises dans la procédure de recours.
Requête subsidiaire 4 - recevabilité
45. La requête subsidiaire 4 a été présentée au cours de la procédure orale devant la chambre après que celle-ci eût déclaré les requêtes subsidiaires 2 et 3 irrecevables. La recevabilité de cette requête relève des dispositions du règlement de procédure entré en vigueur le 1er janvier 2020 (RPCR 2020).
46. La requête subsidiaire 4 a été déposée à un stade particulièrement tardif de la procédure de recours. La requête constitue une modification des moyens invoqués au sens de l'article 12(4) RPCR 2020. Son admission dans la procédure de recours relève de l'appréciation de la chambre. Celle-ci "... exerce son pouvoir d'appréciation en tenant compte, entre autres, de la complexité de la modification, de la pertinence de la modification pour traiter les questions ayant conduit à la décision attaquée, et du principe de l'économie de la procédure" ).
47. En l'occurrence, la caractéristique supplémentaire définie ci-dessus par rapport à la revendication 1 de la requête subsidiaire 1bis ne suffit pas à exclure l'existence d'une période de repos des deux inducteurs comme le prétend l'intimée. Indépendamment des aspects nouveaux susceptibles de résulter de son introduction dans la procédure de recours (e.g. article 84 CBE), la caractéristique en question ne saurait, de prime abord, permettre de remédier à l'absence d'activité inventive du procédé revendiqué. La modification entreprise ne permet pas, notamment, d'exclure que la phase d'alimentation en alternance puisse inclure une période de repos commune aux deux inducteurs et que, même si cela avait été le cas, cette précision ne suffirait pas à établir l'existence d'un quelconque effet technique comparé au procédé de A2.
48. Par conséquent, la requête subsidiaire 4 n'est pas recevable en vertu du principe d'économie de la procédure.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision contestée est annulée.
2. Le brevet est révoqué.