T 0628/91 14-09-1992
Téléchargement et informations complémentaires:
Mécanisme de commande d'un disjoncteur équipé d'un système accumulateur d'énergie
I. Par décision datée du 29 avril 1991 la division d'examen a rejeté la demande de brevet européen n° 86 402 268.6.
II. La décision de rejet est basée sur les pièces suivantes de la demande:
- Description : pages 1 et 2 reçues le 16 mars 1990 ; pages 3-9 dans leur version d'origine,
- Revendications 1-8 reçues le 16 mars 1990,
- Figures 1 à 7 dans leur version d'origine.
III. La demande a été rejetée pour le motif que la revendication 1 enfreint l'article 123(2) de la CBE.
IV. Les documents suivants, mentionnés dans la demande de brevet, sont cités dans la présente décision :
D1= US-A-3 084 238
D2= FR-A-2 558 986
V. Le requérant (déposant) a formé un recours contre cette décision et, dans son mémoire de recours, a formulé les requêtes suivantes :
- Requête principale : annulation de la décision attaquée et maintien de la demande dans la version telle que rejetée,
- Première requête subsidiaire : poursuite de la procédure de délivrance sur la base d'un jeu de revendications modifiées joint au mémoire de recours,
- Seconde requête subsidiaire : poursuite de la procédure de délivrance sur la base des revendications dans leur version d'origine.
VI. Le texte de la revendication 1 selon la requête principale est le suivant :
"Mécanisme de commande pour un disjoncteur électrique multipolaire de calibres élevés ayant une paire de contacts (10, 12) séparables par pôle et comprenant :
- un dispositif à genouillère (16) associé à un crochet de déclenchement (18) et à un ressort d'ouverture (40) pour déplacer le contact mobile (12) en position d'ouverture, l'armement du ressort d'ouverture (40) s'effectuant automatiquement lors de la manoeuvre de fermeture,
- un système accumulateur d'énergie (64) à dispositif élastique (71) comprenant au moins un ressort de fermeture (72) pour déplacer le contact mobile (12) vers la position de fermeture, et une liaison télescopique (90) ayant deux éléments à mouvement relatif entre lesquels est inséré ledit ressort de fermeture (72),
- un levier d'actionnement manuel et/ou un moteur électrique coopérant avec des moyens de commande (62, 66) pour l'armement du ressort de fermeture (72),
- et une chaîne cinématique de transmission agencée entre le système accumulateur d'énergie (64) et le dispositif à genouillère (16), caractérisé en ce que le système accumulateur (64) comporte un organe amovible de blocage (100) susceptible de verrouiller ladite liaison télescopique (90) lors du rapprochement des deux éléments de compression du ressort (72) en fin de course d'armement, la rupture de la chaîne cinématique avec le dispositif à genouillère (16) autorisant le retrait du sous-ensemble formé par la liaison télescopique (90) et le ressort de fermeture (72) dans l'état comprimé."
VII. Les arguments de la division d'examen reposent essentiellement sur le fait que le texte de la revendication 1 présente des différences inadmissibles par rapport à celui de la revendication 1 d'origine parce qu'il n'y est plus fait mention de la came de réarmement et du cliquet de fermeture.
La division d'examen note que la mention de la liaison télescopique (90) a été introduite dans le préambule de la revendication 1 de la requête principale alors qu'elle figurait dans la partie caractérisante de la revendication 1 reçue le 27 octobre 1989.
VIII. Les arguments du requérant peuvent être résumés comme suit :
- Le terme "moyens de commande" constitue une généralisation des termes supprimés mais définit aussi une caractéristique commune à l'état de la technique et au mode de réalisation décrit dans la demande. La décision de la chambre de recours technique T 52/82 (JO 1983, 416) admet également une telle modification.
- Il est exact qu'un seul mode de réalisation a été décrit dans la demande, mais il l'a été à titre d'exemple non limitatif,
- les caractéristiques supprimées concernant la came de réarmement sont connues en soi d'après le document D2 et ne sont ni présentées comme essentielles dans l'exposé de l'invention ni indispensables pour résoudre le problème posé.
1. Le recours est recevable.
2. Admissibilité des amendements
2.1. Dans sa notification du 1er février 1990, la division d'examen déclare que les enseignements du document D1 constituent l'art antérieur le plus proche et que ce document devait être mentionné dans la description. Ce document divulgue un mécanisme pour disjoncteur, équipé d'un accumulateur d'énergie comprenant un ressort 30 de fermeture pour déplacer un contact 12 mobile vers la position de fermeture, et une liaison télescopique ayant deux éléments 45a, 90 à mouvement relatif entre lesquels est inséré le ressort 30. Dans sa réponse reçue le 16 mars 1990, le requérant a admis le document D1 comme art antérieur le plus proche. Dans ces conditions, en transférant la caractéristique "liaison télescopique" de la partie caractérisante de la revendication 1 dans le préambule de cette revendication, il est clair que le requérant n'a fait que se conformer aux prescriptions de la règle 29(1)a) CBE et qu'il ne peut maintenant lui être fait grief d'une modification dictée par la division d'examen.
2.2. La division d'examen a conclu que la revendication 1 selon la requête principale n'était pas acceptable au vu de l'article 123(2) CBE pour la raison que les caractéristiques constituées par la came de réarmement 62 et le cliquet de fermeture 66 ne figurent pas dans cette revendication alors qu'elles sont nécessaires au fonctionnement du dispositif. La chambre observe cependant que, ces deux caractéristiques en étroite relation fonctionnelle ont été exprimées, dans le préambule de la revendication, par le terme général "moyens de commande". Il ne s'agit donc pas d'une suppression de caractéristiques mais du remplacement d'une caractéristique structurelle par une caractéristique fonctionnelle et donc plus générale.
Le document D1 ne divulgue pas de mécanisme de réarmement comportant une came collaborant avec un cliquet de fermeture. Dans ces conditions, on ne saurait critiquer le fait que la revendication 1 de la requête principale a été modifiée en remplaçant dans son préambule une caractéristique spécifique non divulguée par l'art antérieur le plus proche par un terme approprié de caractère plus général et commun à l'invention et à cet art antérieur. De plus, une telle généralisation est en accord avec la jurisprudence des chambres de recours sur l'article 123(2) CBE.
La question de savoir si les termes précis "came" et "cliquet" doivent être réintroduits dans la partie caractérisante de cette revendication est examinée au paragraphe suivant.
2.3. Selon la jurisprudence des chambres de recours il n'est pas possible, sans enfreindre l'article 123(2) CBE, de supprimer, dans une revendication indépendante, une caractéristique présentée comme essentielle dans la demande. Dans le cas présent, la came 62 et le cliquet 66 ont été remplacés par une caractéristique fonctionnelle. Il s'agit donc de savoir si cette came et ce cliquet sont des caractéristiques essentielles pour l'invention, auquel cas lesdits came et cliquet devraient figurer expressis verbis dans la partie caractérisante de la revendication 1 selon la requête principale.
Il ne peut être décidé objectivement qu'une caractéristique est essentielle dans une invention que lorsqu'il a été établit clairement que cette caractéristique est indispensable pour la solution du problème à la base de l'invention. La description d'origine présente le problème à résoudre, lequel vise à réaliser,pour toute une gamme de disjoncteurs comportant un mécanisme standard pour la commande des contacts, un système accumulateur d'énergie à ressorts de fermeture adaptables selon la force de manoeuvre exigée par le type d'appareils.
La chambre constate que l'ensemble liaison télescopique- ressort peut être démonté et remplacé sans avoir à intervenir sur les moyens de commande définis dans la description et comprenant notamment la came 62 et le cliquet 66. Le problème posé est donc effectivement résolu par les moyens techniques énumérés dans la partie caractérisante de la revendication 1. L'opération de remplacement du ressort de fermeture 72 exige bien l'utilisation des moyens de commande pour assurer la compression initiale de ce ressort. Cependant, la chambre ne voit pas en quoi il pourrait être soutenu que ces moyens de commande doivent être d'un type particulier et, dans le cas particulier de la présente demande, être constitués impérativement d'une came et d'un cliquet de fermeture. Ce qui importe pour la solution du problème est que le ressort soit tout d'abord comprimé, par quelque moyen que ce soit, afin que l'on puisse placer l'organe de blocage 100 qui verrouille la liaison télescopique et interdit la détente du ressort. Lorsque ce verrouillage est effectué, il n'y a plus aucune liaison mécanique avec le dispositif à genouillère et, en particulier, l'ensemble constitué par la liaison télescopique 90 et le ressort 72 est totalement désolidarisé de la came 62 et du cliquet de fermeture 66. Toutes les opérations sur cet ensemble peuvent alors être exécutées quel que soit le type (came, cliquet de fermeture ou autres éléments mécaniques à la disposition de l'homme du métier) des moyens de commande utilisés pour la compression du ressort.
Le fait que la description ne présente qu'un exemple de réalisation impliquant une came et un cliquet de fermeture ne signifie pas que cette came et ce cliquet sont les seuls moyens qui pourraient assurer la compression du ressort. Le problème tel que présenté dans la description ne réside pas dans la recherche d'une solution spécifique pour comprimer le ressort. Par conséquent, eu égard au problème posé dans la demande, la chambre est d'avis que la came 62 et le cliquet de fermeture 66 ne constituent pas des caractéristiques essentielles, c'est-à-dire indispensables pour la solution de ce problème.
La chambre ne relève enfin aucun passage de la description d'origine qui stipule que la came 62 et le cliquet 66 sont des caractéristiques essentielles de l'invention. La division d'examen a fait valoir que l'introduction de la description d'origine mentionnait la came et le cliquet pour la présentation de l'invention, ce qui tendrait à prouver que ces éléments sont nécessaires au fonctionnement. Cet argument n'est pas pertinent, étant donné que ce mode de présentation de l'invention est d'usage courant et est en accord avec les prescriptions de l'article 84 et de la règle 27(1)c) puisqu'il ne fait que reprendre in extenso le libellé de la revendication 1 d'origine, laquelle mentionnait l'utilisation de la came 62 et du cliquet 66.
2.4. La chambre remarque également que le mécanisme 14 est défini dans la description par l'expression "mécanisme 14 de commande" (colonne 2, ligne 63) et la came 62 ainsi que le cliquet 66 sont bien décrits comme faisant partie intégrante de ce mécanisme de commande et sont ainsi, sans ambiguïtés, des moyens de commande (voir figures 4 et 5). Puisque la fonction de commande fait explicitement partie de la demande telle que déposée, le fait d'introduire cette fonction dans la revendication 1, donc dans la définition de la protection, est supporté par la description (article 84 CBE) telle que déposée et n'ajoute aucune information nouvelle.
2.5. La chambre est d'avis que, pour l'homme du métier, les moyens revendiqués pour effectuer l'interchangibilité de l'ensemble liaison téléscopique-ressort, peuvent être mis en oeuvre dans tout disjoncteur munis de moyens de commande différents d'une came et d'un cliquet ou même n'incluant ni came ni cliquet. La suppression de la mention de la came et du cliquet dans la partie caractérisante de la revendication 1 de la requête principale et son remplacement par une caractéristique fonctionnelle plus générale, constituent donc une extension admissible de la protection et n'enfreingnant pas l'article 123(2) CBE.
2.6. La division d'examen n'a pas pris position en ce qui concerne la brevetabilité de la demande selon l'article 52(1) CBE. Compte tenu de ce fait, et pour que la requérante ne soit pas privée d'une instance de recours, la chambre fait usage du pouvoir qui lui est conféré par l'article 111(1) CBE pour renvoyer l'affaire à la division d'examen en vue de poursuivre l'examen quant au fond.
2.7. Dans la mesure ou la division d'examen estimera que l'objet de la revendication 1 de la requête principale implique une activité inventive au vu de l'art antérieur, la chambre attire son attention sur le fait qu'il serait souhaitable d'inviter le requérant à préciser dans cette revendication que ce sont les moyens de commande qui entraînent la rupture de la chaîne cinématique avec le dispositif à genouillère. Cette information était présente dans la revendication 1 d'origine et son absence dans la requête principale introduit un défaut de clarté (article 84 CBE).
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision de la division d'examen est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'examen pour poursuite de la procédure d'examen quant au fond sur la base de la requête principale, compte tenu des observations formulées au paragraphe 2.7 de la présente décision.