T 1106/92 13-10-1994
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Matériel polyvalent et membrane ou forme pour supporter des produits de panification ou analogues au cours du processus de fermentation et de cuisson de la pâte
Nouveauté (oui)
Activité inventive (oui)
I. Le requérant (demandeur) a formé un recours, reçu le 24. août 1992, contre la décision de la division d'examen, remise à la poste le 26 juin 1992, relative au rejet de la demande de brevet européen n° 87 400 378.3 publiée sous le n° 0 235 037.
La taxe de recours a été acquittée le 24 août 1992.
Le mémoire exposant les motifs du recours accompagné d'une revendication 1 amendée a été déposé par télécopie le 23 octobre 1992 et confirmé par courrier reçu le 26. octobre 1992.
La division d'examen était parvenue à la conclusion que la revendication 1 du dernier jeu de 23 revendications remises avec la lettre du 7 novembre 1991 ne satisfaisait pas aux conditions de clarté (article 84 CBE) et à celles de nouveauté (article 54 CBE) prévues par la CBE, eu égard au document suivant :
(D1) : FR-A-2 097 608.
II. La nouvelle revendication 1 qui accompagnait le mémoire et les revendications 14 et 15 déposées le 8. novembre 1991 qui font l'objet de l'unique requête au moment de la présente décision s'énoncent comme suit :
"1. Membrane ou forme antiadhérente destinée à supporter des pièces de panification ou analogue au cours du processus de fermentation et de cuisson de la pâte, cette membrane étant constituée en au moins un élastomère de silicone ou de résine de silicone associé à une trame de renfort, caractérisée en ce que :
- elle est autoportante ;
- elle possède une configuration générale et des dimensions prédéterminées de manière telle qu'elle puisse reposer de façon amovible et interchangeable sur un plateau de support unique ; et
- elle est préformée pour présenter une multiplicité d'empreintes en creux indépendantes dudit support et ayant toutes formes souhaitables en correspondance avec les formes individuelles de panification ou analogue devant être soumises au processus de fermentation et de cuisson."
"14. Utilisation des membranes selon l'une quelconque des revendications 1 à 13 dans le domaine de la boulangerie et/ou la pâtisserie."
"15. Matériel polyvalent pour supporter des produits de panification ou analogue au cours du processus de fermentation et de cuisson de la pâte, caractérisé en ce qu'il comporte :
- un plateau (1) à rebords latéraux (4), et
- au moins une membrane ou forme (2) anti-adhérente constituée selon l'une quelconque des revendications 1 à 13."
III. Dans son mémoire exposant les motifs du recours le requérant a en outre notamment fait valoir :
- que la correspondance des formes des empreintes en creux de la membrane selon l'invention avec celles des pièces devant être disposées dans ces empreintes est une caractéristique essentielle de ladite membrane,
- que la membrane décrite dans D1 n'a pas de tenue mécanique et doit être soutenue pour former des augets contrairement à la membrane revendiquée dans la revendication 1 qui est autoportante,
- que la membrane selon l'invention peut être préformée de manière indépendante de son support et former des empreintes diverses à contours fermés alors que la membrane et son râtelier support connus de D1 sont réciproquement adaptés et indissociables,
- que l'agencement revendiqué n'est suggéré dans aucun des documents cités au cours de la procédure, et
- que de ce fait l'objet de la demande était nouveau et inventif.
IV. Le requérant a requis notamment l'annulation de la décision attaquée et la délivrance d'un brevet sur la base de la revendication 1 déposée par télécopie le 23. octobre 1992, des revendications 2 à 23 remises avec la lettre du 7 novembre 1991 et de la description et des dessins de la demande telle qu'elle a été déposée.
1. Recevabilité du recours
Le recours est conforme aux exigences des articles 106 à 108 CBE et à celles de la règle 64 CBE ; il est recevable.
2. Interprétation et clarté de la revendication 1
2.1. La revendication 1 accompagnant le mémoire de recours a été reformulée de telle sorte qu'il apparaît clairement que la membrane objet de l'invention est préformée aux formes désirées pour les produits de panification. L'objection de clarté soulevée par la première instance n'a donc plus de raison d'être.
2.2. En ce qui concerne la caractéristique "autoportante" figurant en début de la partie caractérisante de la revendication 1, elle doit être interprétée d'une part en liaison avec la suite de la revendication d'où il ressort que la membrane conserve des formes indépendantes du plateau sur lequel elle ne fait que reposer et d'autre part à la lumière de la description où il apparait clairement que la membrane est raidie après le préformage (cf. le fascicule de la demande : par exemple colonne 4, ligne 22 ou colonne 10, lignes 25) de manière à pouvoir supporter seule les produits de panification durant la fermentation et la cuisson (cf. colonne 1, ligne 11 ; colonne 4, lignes 35 à 37 ou colonne 8, lignes 49 à 52).
L'indication que les membranes selon l'invention sont à la fois "préformées" et "autoportantes" (cf. colonne 7, lignes 53 à 56 du fascicule) doit donc être interprétée comme signifiant qu'elles sont aptes à conserver leur forme sans aucun maintien externe aussi bien lorsqu'elles sont vides (préformées) que lorsqu'elles contiennent et supportent seules des produits de panification (autoportantes) en étant simplement posée sur le fond plat d'un plateau.
3. Nouveauté
3.1. Selon une jurisprudence constante des Chambres de recours de l'OEB, l'enseignement technique contenu dans un document antérieur doit être considéré dans son intégralité (cf. notamment la décision T 56/87, JO OEB 1990, 188).
3.2. Le fait que les galbes de la couche du premier mode de réalisation décrit dans D1 soient raidis par la vulcanisation et que les crêtes entre les berceaux soient rigidifiés par des tringles (3)(cf. D1 : page 3, lignes 10 à 12 et page 4, ligne 36 à page 5, ligne 3) pourrait laisser penser à prime abord que cette couche est autoportante.
Toutefois, compte tenu de ce qui précède (cf. section 3.1), il n'est pas permis d'ignorer l'existence du râtelier, ni l'adaptation de la couche à ce râtelier dont les traverses (10) sont destinées à supporter les tringles (3) de la couche, ce qui permet de douter de "l'autoportance" de cette dernière au sens de l'invention (cf. section 2.2).
Il faut remarquer en outre que dans tous les autres modes de réalisation décrits dans D1, il est également prévu pendant leur utilisation de maintenir en forme les toiles préformées à l'aide de supports additionnels.
Par conséquent, pris dans son intégralité, l'enseignement de D1 ne suggère ni que les couches décrites puissent être autoportantes au sens de l'invention puisque l'appui d'un support additionnel (traverses de râtelier, parois de moule ou structure métallique) est recherché, ni qu'elles soient préformées de manière indépendante de la structure dudit support puisque les augets formés par les couches sont prévus pour s'encastrer dans les formes du support et réciproquement.
3.3. Comme par ailleurs aucun des autres documents cités dans le rapport de recherche ne décrit une couche présentant en combinaison toutes les caractéristiques de la membrane selon l'invention, celle-ci doit être reconnue comme étant nouvelle au sens de l'article 54 de la CBE au même titre que l'objet des revendications 14 et 15 pour lequel le raisonnement qui précède reste valable.
4. Etat de la technique le plus proche
4.1. L'état de la technique le plus proche est par définition celui qui se rapporte à une utilisation identique ou similaire et qui requiert le minimum de modifications structurelles et fonctionnelles pour s'identifier à l'invention (cf. décision T 606/89 non publiée).
4.2. En l'occurrence, c'est donc avec raison que la première instance a retenu comme état de la technique le plus proche la couche du premier mode de réalisation décrit dans D1 car sa fonction est identique à celle de la forme anti-adhérente selon l'invention, elle est elle aussi composée d'une trame de renfort enduite d'un élastomère de silicone et sa configuration générale ainsi que ses dimensions sont également prédéterminées de manière à pouvoir reposer de façon amovible et interchangeable sur un support unique.
4.3. Toutefois, comme indiqué dans la section 3.2 ci-dessus, la membrane qui fait l'objet de la revendication 1 diffère de cet état de la technique le plus pertinent en ce qu'elle est autoportante au sens de l'invention, en ce qu'elle est conçue de manière à pouvoir simplement reposer sur le fond plat d'un plateau unique et non pas devoir être suspendue sur un râtelier et en ce que ses empreintes en creux sont indépendantes de son support.
5. Problème et solution
Si l'on considère que l'homme du métier prend pour point de départ la couche du premier mode de réalisation décrit dans D1 et si l'on tient compte des différences entre la membrane selon l'invention et ladite couche telles que citées dans la section 4.3 ci-dessus, le problème objectif qui se pose à l'homme de l'art apparait consister dans l'amélioration de la couche selon D1 de manière qu'elle puisse être adaptée aux diverses formes des pièces de panification sans pour autant nécessiter une multitude de supports correspondants (cf. en particulier le fascicule de la demande, colonne 2, lignes 21 à 60).
La Chambre est convaincue que la solution préconisée dans la revendication 1 et qui consiste à rendre la membrane autoportante et à l'adapter à un support simplifié en forme de plateau permet d'atteindre effectivement le résultat recherché.
6. Activité inventive
6.1. Il y a lieu de déterminer si, partant du premier mode de réalisation décrit dans D1 avec l'intention d'améliorer ce matériel de manière à pouvoir l'utiliser de manière satisfaisante et économique pour les diverses pièces de panification, l'homme du métier aurait trouvé dans l'état de la technique des indications qui lui auraient permis d'escompter un perfectionnement ou un avantage quelconque en cherchant dans la direction conduisant à l'invention (cf. T 2/83, JO OEB 1984, 265) et qui l'auraient orienté vers la solution décrite dans la revendication 1.
6.2. Parmi tous les documents autres que D1 cités dans le rapport de recherche, les documents :
D2 : FR-A-2 480 081 et
D7 : EP-A-0 045 945
décrivent un matériel dans lequel le plateau joue un rôle prépondérant de support et de maintien d'une couche souple et non préformée qui épouse étroitement les formes du support (cf. D2 : page 2, ligne 28 - "support et maintien" - page 3, ligne 17 - "en contact" - et ligne 28 "tapisser" ; et D7 : page 5, lignes 9 à 14 ; page 7, lignes 11 à 19 et figure 2).
Ces indications ne vont donc pas dans le sens d'une rigidification de la couche elle-même de manière à la rendre autoportante au sens de l'invention, ni dans celui d'une simplification et d'une uniformisation du support. Elles n'incitent donc pas l'homme du métier à abandonner le matériel selon D1 pour s'orienter vers une solution conforme à l'invention.
Dans les deux autres documents :
D3 : FR-A-2 446 070 et
D4 : GB-A-2 154 860
retenus au cours de la recherche, l'homme du métier retrouvera cette tendance générale à l'utilisation d'une couche souple déformable maintenue sur un support adéquat (cf. D3 : page 2, ligne 26 à page 3, ligne 8 et D4 : page 1, lignes 29 à 57) qui aura plutôt tendance à l'orienter dans une direction l'éloignant de l'idée inventive de la demande.
Enfin, les documents :
D5 : US-A-4 009 859 et
D6 : US-A-2 640 445
cités dans le rapport de recherche au titre de l'arrière- plan technologique concernent des plats à cuire ou rôtir en tôle métallique n'ayant structurellement aucun rapport avec le type de matériel décrit dans D1 et de ce fait ne pouvant ni intéresser a priori l'homme du métier ni lui fournir un quelconque indice susceptible de l'orienter vers l'invention.
Par conséquent, en admettant même que l'homme du métier sans raison particulière consulte l'un quelconque des documents D2 à D7, il n'y trouvera aucune information pouvant lui suggérer d'améliorer conformément à l'invention la couche et le support du premier mode de réalisation de D1 pour aboutir à l'objet de la revendication 1.
6.3. La même argumentation vaut également pour l'utilisation et pour le matériel revendiqués respectivement dans les revendications 14 et 15 de la demande faisant l'objet du recours.
6.4. Pour les raisons qui précèdent, la Chambre est arrivée à la conclusion que l'objet des revendications 1, 14 et 15 de la demande telle que déposée ne découle pas manifestement et logiquement de ces différents états de la technique qu'ils soient considérés isolément ou en combinaison et que cet objet implique une activité inventive au sens de l'article 56 de la CBE.
En conséquence, l'objet des revendications 1 à 23 satisfait aux conditions de brevetabilité de la CBE.
7. La Chambre entend encore souligner qu'une décision de la Division d'examen ne doit pas nécessairement être signée par les membres de celle-ci mais simplement revêtue du sceau de l'Office (cf. la règle 70(2) CBE) comme en l'espèce. Par ailleurs, même une appréciation manifestement erronée du libellé d'une revendication ainsi que de l'état de la technique ne peuvent être considérés comme constitutifs d'un vice substantiel de procédure, alors qu'au surplus le remboursement de la taxe de recours n'a pas été sollicité.
Enfin dès lors qu'il a été fait droit à la requête principale implicite de délivrance du brevet, il n'y a pas matière à prendre partie sur les requêtes accessoires telles que figurant à la page 14 du mémoire exposant les motifs du recours.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de délivrer un brevet sur la base des documents suivants :
Revendications :
- revendication l produite par télécopie du 23. octobre 1992,
- revendications 2 à 23 produites avec lettre du 7. novembre 1991,
Description :
- description de la demande telle que déposée qu'il convient d'adapter aux revendications ci-dessus et
Dessins :
- figures 1 à 14 de la demande telle que déposée.