Information
Cette décision n'est disponible qu'en Anglais.
T 0127/20 12-04-2022
Téléchargement et informations complémentaires:
PLANCHE DE GLISSE EQUIPÉ D'UN DISPOSITIF AMORTISSEUR
I. La requérante (opposante) a formé un recours contre la décision de la division d'opposition de l'Office européen des brevets par laquelle l'opposition formée à l'égard du brevet européen n° 2965790 a été rejetée.
II. L'opposition était fondée sur les motifs d'opposition selon l'article 100 (a) CBE combiné avec l'article 52(1), 54(1) et 56 CBE pour manque de nouveauté et d'activité inventive et selon l'article 100(b) CBE pour insuffisance de l'exposé.
III. La division d'opposition avait estimé qu'aucun de ces motifs n'avait été suffisamment étayé pour que l'acte d'opposition satisfasse aux exigences de la règle 76(2)c) CBE, et avait rejeté l'opposition comme irrecevable, conformément aux dispositions de la règle 77(1) CBE.
IV. La requérante demande l'admission de tous les motifs d'opposition, que la chambre interprète comme l'annulation de la décision attaquée et la reconnaissance de l'opposition comme recevable. Le remboursement de la taxe de recours et la correction du procès verbal de la procédure orale devant la division d'opposition sont également requis.
V. L'intimée requiert le rejet du recours et donc le maintien de la décision.
VI. La requérante a argumenté de la façon suivante :
- La division d'opposition a de manière erronée interprété l'objection de manque de suffisance, comme un manque de clarté. Le motif de suffisance était donc suffisamment étayé et recevable.
- Concernant le manque de nouveauté, la division d'opposition aurait du considérer toute la famille du document E1 publié après la demande du présent brevet.
- L'acte d'opposition faisait expressément référence aux documents D1 à D4 utilisés lors de la procédure d'examen comme point de départ pour l'activité inventive.
VII. L'intimée a argumenté de la façon suivante :
- Le motif d'insuffisance de l'acte d'opposition était uniquement basé sur des arguments de clarté et donc non recevable.
- E1 est un droit national non opposable au brevet européen, l'objection de manque de nouveauté basé sur E1 n'est donc pas recevable.
- Concernant l'activité inventive, la procédure d'opposition n'est pas basée automatiquement sur les documents de la procédure d'examen.
1. Le recours est recevable
2. La question critique de ce recours concerne la recevabilité de l'opposition et notamment la conformité de l'acte d'opposition à la troisième condition énoncée à la règle 76(2)c) CBE en rapport avec la nécessité d'indiquer des faits, preuves et arguments à l'appui des motifs invoqués.
3. D'après la jurisprudence constante l'irrecevabilité n'est applicable qu'à l'acte d'opposition dans son ensemble. Si un opposant demande la révocation d'un brevet dans son intégralité, il suffit d'étayer un ou plusieurs motif(s) d'opposition à l'encontre d'au moins une revendication, pour qu'il soit satisfait aux exigences de la règle 76(2)c) CBE. En outre la question de savoir si les conditions de la règle 76(2)c) CBE sont remplies, doit être examinée à l'expiration du délai d'opposition de neuf mois (règle 77(1) CBE) (Jurisprudence des Chambres de Recours (JCR), 9éme édition 2019; IV.C.2.2.8.a).
4. Dans la présente affaire l'acte d'opposition mentionne expressément les motifs de manque de nouveauté en relation avec l'article 100(a) et 54 CBE, le manque d'activité inventive, en relation avec l'article 100(a) et 56 CBE et l'insuffisance de l'exposé en relation avec l'article 100(b) et 83 CBE. La division d'opposition a conclu qu'aucun de ces motifs n'avait été suffisamment étayé dans l'acte d'opposition (point 1.3 de la décision).
5. La Chambre ne constate aucune erreur dans le raisonnement de la division. Sur chacun de ces motifs, la Chambre arrive en fait à la même conclusion.
6. Motif de suffisance de l'exposé - Article 100b) CBE.
6.1 En ce qui concerne les indications apportées en rapport au motif de suffisance dans l'acte d'opposition, le paragraphe 1 à la page 4 porte l'intitulé "manque de clarté" ("Fehlende Klarheit") et se borne à contester la formulation de la dernière caractéristique de la revendication 1 sous forme de résultat à atteindre. Il est observé que la revendication ne délivre aucun enseignement technique sur le moyen d'obtenir le type d'amortissement à atteindre. D'après l'acte d'opposition il ne pourrait donc y avoir de délivrance basé sur un tel manque de clarté.
6.2 La division relève à juste titre que la nature de cette objection se rapporte à une objection de manque de clarté sous l'article 84 CBE qui ne fait pas partie des motifs d'opposition et non pas sur un manque de suffisance sous l'article 83 CBE qui aurait pu être un motif d'opposition.
6.3 Même si la requérante observe que l'acte d'opposition indique expressément les articles 100(b) et 83 CBE qui se rapportent à la suffisance, cette référence aux articles corrects de la CBE ne peut remplacer la nécessité d'étayer le motif de suffisance par des arguments que la division d'opposition puisse reconnaître objectivement comme se rapportant effectivement à un défaut de divulgation de l'ensemble du brevet. Or le contenu des seuls deux paragraphes du chapitre "Fehlende Klarheit", comme mentionné au point 6.1 ci-dessus, s'apparente objectivement à un défaut d'indication dans la revendication 1 de moyens pour obtenir le résultat recherché, c'est à dire un manque de clarté. Il n'y a aucune indication que ce manque de clarté affecte également les autres parties de la divulgation. En fait, aucune référence n'est faite à la description ou aux figures. Objectivement, l'acte d'opposition n'allègue qu'un manque de clarté de la revendication 1.
6.4 La chambre ne considère pas non plus que la division d'opposition ait changé, de manière erronée, la nature de l'objection présenté dans l'acte d'opposition comme un simple manque de clarté. Une objection à l'encontre d'une caractéristique par le résultat à atteindre est effectivement du domaine de la clarté selon l'Article 84 CBE. En outre, la division a également raison en constatant que l'acte d'opposition se rapporte seulement à la revendication 1, au lieu d'essayer de démontrer que le brevet opposé dans son ensemble ne permet pas à l'homme du métier, en prenant compte son savoir faire, d'exécuter l'invention.
6.5 Comme cette constatation est objectivement correcte la Chambre ne peut pas non plus y voir une vice de procédure, comme l'a argué la requérante à la page 5, paragraphe pénultième, des motifs de recours.
De même, le fait que la division n'ait pas adressé pendant la procédure orale le défaut allégué de définition d'une variable externe dans la divulgation n'implique non plus une violation du droit d'être entendu, contrairement à l'argument de la requérante à la page 11, dernière phrase des motifs de recours. Il s'agissait là déjà d'une question sur le fond concernant le motif d'insuffisance, et non pas de la seule question qui était à examiner en premier lieu, à savoir si ce motif avait été étayé selon les conditions de la règle 76(2)(c) CBE.
La Chambre conclut qu'il n'y a pas lieu de rembourser la taxe de recours selon la règle 103(1)(a) CBE en raison d'un vice substantiel de procédure.
6.6 La chambre confirme donc la conclusion de la division d'opposition que le manque de suffisance selon l'article 100b) CBE n'était pas suffisamment étayé dans l'acte d'opposition.
7. Motif de nouveauté - Article 100a) et 54 CBE
7.1 Il n'est pas contesté que l'objection de nouveauté ait été formulée par rapport à une seule divulgation E1 non opposable car ne faisant pas partie de l'état de la technique selon l'article 54(2) ou (3) CBE puisqu'il s'agit d'une demande de brevet nationale allemande publiée le 8 octobre 2015 après la date de dépôt 3 juillet 2015 de la présente demande.
7.2 La requérante soumet que la division d'opposition aurait du considérer la famille entière de E1 qui comprend une demande internationale WO2015/150227 A1 revendicant la priorité de E1 du 2 avril 2014, qui désigne l' Europe et a été déposée le 26 mars 2015.
7.3 La chambre est d'avis que la division d'opposition a à juste titre estimé que ce motif ne comportait pas d'indication recevable. L'investigation sur la famille de E1 de la part de la division d'opposition, telle qu' invoquée par la requérante, conduirait à assister l'opposante dans une procédure contentieuse et donc à traiter les parties de manière inéquitable (voir G0009/91 point 2 de la décision).
7.4 La question de savoir si le contenu de WO 2015/150227 A1 (et d'un autre document WO 2007/022923 A2) soumis le 6 mars 2018 après le délai d'opposition est prima facie pertinent ou non, ne peut se poser que si une opposition est recevable, et donc une procédure d'opposition est valablement initiée.
7.5 La Chambre ajoute que tous les membres d'une famille de brevets ne sont pas inclus lorsqu'une divulgation précise dans cette famille est prise en compte. En particulier le contenu de la divulgation de la demande internationale publiée WO 2015/150227 A1, qui revendique la priorité du document E1 utilisé à l'encontre de la revendication 1 dans l'acte d'opposition, peut être sensiblement différent du contenu d'une divulgation expressément citée.
7.6 La chambre confirme donc que la division d'opposition a correctement estimé que le motif de nouveauté basé exclusivement sur une divulgation ne faisant pas partie de l'état de la technique selon l'article 54(2) ou (3) CBE ne répondait pas aux conditions énoncées à la règle 76(2)c) CBE.
8. Motif d'activité inventive - Article 100a) et 56 CBE
8.1 En ce qui concerne le dernier motif de manque d' activité inventive, le paragraphe 1 de la page 7 de l'acte d'opposition fait référence de manière générale et non spécifique aux documents cités lors de l'examen, et allègue que la caractéristique 1.6 ne peut justifier une activité inventive car l'homme du métier envisagerait un amortissement plus important pour un ski soumis à une impulsion que pour le retour en position de ce ski.
8.2 La division d'opposition a remarqué à juste titre que la procédure d'opposition était une procédure distincte de la procédure d'examen et non pas un prolongement de celle-ci. L'acte d'opposition ne citant aucun document particulier de la procédure d'examen, ni aucun passage spécifique, et ne le commentant pas était donc défaillant car il ne précisait ni les caractéristiques connues de l'un des documents, ni aucun effet technique ou problème à résoudre (cf page 4, paragraphes 1 à 4 de la décision). La chambre est d'accord avec ces constatations sur l'absence d'argumentation portant au moins sur les éléments essentiels de l'approche problème solution en rapport avec l'activité inventive.
8.3 La Chambre ajoute que les indications apportées en rapport avec ce motif, ne permettaient pas à la division d'opposition et à la titulaire de pouvoir comprendre sans investigation excessive quel document comprenait les caractéristiques essentielles du préambule ni le problème à résoudre ni les considérations de l'homme du métier envisageant l'amortissement d'un ski. A ce sujet, voir par exemple la décision T1194/07, selon laquelle les éléments clés établissant le lien entre l'état de la technique cité et la revendication, et les arguments déterminants indiquant pourquoi l'homme du métier aurait pu envisager de combiner les caractéristiques de cet état de la technique ne devraient pas manquer dans l'enchaînement logique des idées conduisant de l'état de la technique à l'invention.
8.4 La chambre confirme donc la conclusion de la division d'opposition concernant le défaut d'étayer le motif d'activité inventive conformément à la règle 76(2)c) CBE.
9. Il ressort de ce qui précède que la division d'opposition avait raison de conclure qu'aucun des motifs d'opposition n'était suffisamment étayé dans l'acte d'opposition. Elle confirme donc la décision de la division d'opposition sur le rejet de de l'opposition conformément aux dispositions de l'article 101(2) CBE.
10. Correction du procès verbal exclusivement du ressort de la division d'opposition
10.1 Concernant la requête en correction du procès verbal de la procédure orale devant la division d'opposition, conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours, il revient en principe à l'instance devant laquelle a eu lieu la procédure orale de corriger le procès-verbal de la procédure orale (JCR, 9éme édition 2019; III.C.7.10.3). La Chambre n'a donc pas compétence pour faire droit à la correction demandée.
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté