T 0195/01 30-09-2003
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Transducteur à ondes de surface à réflexion acoustique distribuée et filtre comportant un tel transducteur
Pouvoir discrétionnaire de la division d'opposition exercé correctement (oui)
Activité inventive (oui)
I. L'opposante a formé un recours contre la décision de la division d'opposition concernant le maintien du brevet européen n° 0 646 296 dans une forme modifiée.
II. Les documents suivants considérés au cours de la procédure d'opposition restent pertinents :
E1 : P.V. Wright, and S.A. Wilkus, "A prototype low-loss filter employing single-phase unidirectional transducers", Proc. of the Ultrasonics Symposium 1983, pages 72-76,
E6: P. Ventura et al., "Synthesis of SPUDT filters with simultaneous reflection and transduction optimization", Proc. of the Ultrasonics Symposium 1992, pages 71-75,
et le document suivant produit par l'opposante le 26. octobre 2000 :
E7: T. Kodama et al., "Design of low-loss SAW filters employing distributed acoustic reflection transducers", Proc. of the Ultrasonics Symposium 1986, pages 59-64.
III. La revendication indépendante 1 du brevet tel que maintenu par la division d'opposition s'énonce comme suit :
"Transducteur à ondes de surface à réflexion acoustique distribuée du type DART comprenant une juxtaposition de cellules émettrices et de cellules réflectrices caractérisé en ce qu'il comporte :
- au moins un changement de signe de la fonction de réflexion, c'est-à-dire qu'il comporte au moins un réflecteur dont le centre est distant de k Lambda/2 + Lambda/4 du centre des autres réflecteurs définissant ainsi une cellule à réflexion négative (-R), Lambda étant la longueur d'onde correspondant à la fréquence centrale de fonctionnement du transducteur et k un entier non nul ;
- des zones (11,13) de cellules à réflexion positive, désignées par E, R, chacune de ces cellules comportant au moins une source (E) et un réflecteur (R) tels que les ondes émises par une source (E), dans une direction privilégiée X et les ondes réfléchies par un réflecteur (R) dans ladite direction, sont en phase à la fréquence centrale de fonctionnement du transducteur ;
- des zones (12) de cellules à réflexion négative comportant des cellules réflectrices (-R) telles que ci-dessus définies et dans lesquelles les ondes réfléchies sont en opposition de phase par rapport aux ondes émises ou réfléchies par les cellules à réflexion positive, dans la direction privilégiée X de propagation de l'onde, à la fréquence centrale de fonctionnement du transducteur,
la répartition spatiale adaptée des cellules à réflexion positive et des cellules à réflexion négative permettant de créer l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur d'un même DART."
Les revendications 2 à 7 sont dépendantes de la revendication 1.
IV. La division d'opposition, se basant sur la règle 71bis(1) CBE n'a pas pris en considération le document E7 au motif, entre autres, que ce document, qui avait été déposé la veille de la procédure orale, soit le 26 octobre 2000, alors que la date limite fixée par la citation à la procédure orale était le 27 septembre 2000 et que le dernier changement aux revendications avait été apporté le 13 avril 1999, avait été présenté tardivement. Selon la décision attaquée, il n'était pas évident au premier abord de savoir quelles cellules du transducteur représenté à la figure 7 de E7 correspondraient aux différentes cellules revendiquées dans le brevet attaqué, ni de quelle façon elles constitueraient de petites cavités résonantes. E7, du fait de la taille et de la qualité de la figure 7 et du manque de description des paramètres cruciaux dans ce document, ne pouvait être considéré comme anticipant la revendication 1 du brevet attaqué. En conclusion, E7 ne pouvait "de prime abord avoir aucune influence dans la procédure d'opposition".
Aucun des documents E1 et E6 ne divulguait de groupement de doigts en cellules, de groupement de cellules en zones de cellules à réflexion positive et en zones de cellules à réflexion négative et ne suggérait la création de l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur d'un même DART. E1 cherchait à éviter tout fonctionnement en cavité résonante et il n'y avait aucune raison de combiner E6 avec E1.
V. Une procédure orale devant la chambre de recours a eu lieu le 30 septembre 2003.
VI. La requérante (opposante) a soumis entre autres les arguments suivants :
Conformément aux décisions des chambres de recours T 258/84 (JO 1987, 119) ainsi que T 164/89 et T 1016/93 (toutes deux non publiées dans JO), E7, qui portait atteinte à la nouveauté de l'invention, ou la rendait évidente, devait être pris en considération puisqu'il était susceptible de changer la décision de la chambre. En effet, le document E7 divulguait un transducteur DART qui comportait selon la figure 1(a) des réflecteurs ajourés disposés entre des électrodes, un décalage de Lambda/4 d'un réflecteur déphasant l'onde qu'il réfléchissait de 180°. Sur la figure 7 de la copie originale de E7 on pouvait reconnaître à l'oeil nu des zones de réflecteurs d'ondes en phase alternant avec des zones de réflecteurs d'ondes en opposition de phase. Ces zones correspondaient aux zones de cellules à réflexion positive et de cellules à réflexion négative de la revendication 1. L'équation (17) (page 62), interprétée en combinaison avec la fonction d'excitation du transducteur visible sur la figure 7, prouvait que la fonction de réflexion du transducteur comportait des changements de signe. La courbe de réflexion acoustique de la figure 8(a) conduisait à la même conclusion. Il Btait implicite de E7, ou évident pour l'homme de l'art, que des réflexions multiples entre les réflecteurs en phase et ceux en opposition de phase créaient l'équivalent de petites cavités résonantes comme dans la revendication 1.
Le document E6 se rapportait à un transducteur SPUDT dont la fonction de réflexion r (voir la figure à la page 71) avait une allure sinusoïdale et comportait donc des changements de signe. Le transducteur SPUDT décrit dans le document E1 comportait des réflecteurs (électrodes hachurées), dont au moins l'un d'eux était distant des autres réflecteurs d'un nombre impair de quart de longueur d'onde, ainsi que des zones de cellules à réflexion positive et de cellules à réflexion négative, comme dans la revendication 1. Les réponses des transducteurs selon la figure 3 et la courbe de la figure 10, qui montrait une fonction d'auto-convolution, prouvaient aussi que la fonction de réflexion du transducteur de E1 comportait des changements de signe. Les cellules divulguées par E1 pouvaient constituer les diverses cellules à réflexion négative qui étaient impliquées par la figure à la page 71 de E6. Au vu de la combinaison évidente de E1 et E6 l'objet de la revendication 1 ne faisait pas preuve d'activité inventive.
VII. L'intimée (titulaire du brevet) a soumis entre autres les arguments suivants :
Le but de l'invention était de réduire la taille d'un transducteur de type DART en maximalisant le nombre de réflexions entre les réflecteurs des cellules à réflexion positive et ceux des cellules à réflexion négative, ce qui créait l'équivalent de cavités résonantes dans le transducteur. E7, au contraire, proposait de réduire le "triple transit" dans un transducteur DART au moyen d'une distribution pondérée de réflecteurs ajourés. Contrairement à l'invention, la fonction de réflexion pondérée du transducteur de E7, représentée par l'équation (17) de la page 62, était proportionnelle au produit d'auto-convolution de la fonction de transduction. La mise en oeuvre d'une transformée de Fourier dans le calcul de cette équation prouvait que le transducteur avait une réponse impulsionnelle finie, ce qui excluait des réflexions multiples, et donc la formation de cavités résonantes, entre les réflecteurs du transducteur. Le transducteur de E7 utilisait une distribution pondérée de réflecteurs ajourés. Les réflecteurs de grande dimension étaient concentrés au voisinage du centre du transducteur dont les extrémités ne comportaient que des réflecteurs de taille réduite. Le coefficient de réflexion au sein du transducteur de E7 était donc trop faible pour créer l'équivalent de petites cavités résonantes. La courbe de réflexion acoustique de la figure 8(a) de E7 présentait des zéros, mais ceci n'impliquait pas de résonance à l'intérieur du transducteur. E7, qui avait été produit tardivement et n'anticipait pas le transducteur selon la revendication 1, ne devait pas être pris en considération dans la procédure.
Rien dans E6, et en particulier pas la fonction de réflexion r du transducteur selon la figure de la page 71, n'indiquait un transducteur qui comportait un changement de signe de la fonction de réflexion, ou des zones de cellules à réflexion positive et de cellules à réflexion négative, ou bien des cavités résonantes. Le document E1, qui formait l'art antérieur le plus proche, proposait un transducteur SPUDT destiné à réduire les effets du "triple transit". Le réflecteur, décalé de Lambda/4 par rapport aux autres transducteurs des deux cellules selon la figure 1, ne satisfaisait pas à la condition de distance entre réflecteurs donnée dans la revendication 1 du brevet opposé. E1 ne montrait aucune extrapolation de la structure du transducteur. Les figures 3 et 10 n'indiquaient pas de changement de signe de la fonction de réflexion. L'équation (12) (page 74 de E1), qui était identique à l'équation (17) de E7, excluait pour les mêmes raisons la création de petites cavités résonantes au sein du transducteur. Ceci ressortait aussi de la petite valeur de la fonction de réflexion K(x) dans E1. La combinaison de E1 et E6 n'était ni évidente, ni n'aboutissait à l'objet de la revendication 1.
VIII. La requérante (opposante) demande l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen n° 0 646 296.
IX. L'intimée (titulaire du brevet) demande le rejet du recours.
1. Le recours est recevable.
Non prise en considération du document E7 par la division d'opposition
2. Il n'est pas contesté que E7 a été présenté après la date fixée dans la citation, par la division d'opposition, à la procédure orale et qu'un changement n'était pas intervenu dans les faits de la cause. Par conséquent, la règle 71bis(1) CBE conférait à la division d'opposition un pouvoir discrétionnaire concernant la prise en compte de E7. Ce pouvoir discrétionnaire a été exercé de façon raisonnable en prenant en considération tous les éléments du cas d'espèce et en donnant des raisons pour lesquelles la pertinence de E7 ne s'imposait pas et ne justifiait pas une prise en compte tardive de E7.
3. Le transducteur selon la revendication 1 sous sa forme modifiée comporte des zones de cellules à réflexion négative dont le réflecteur a son centre distant de k Lambda/2 + Lambda/4, avec k>=1, du centre des réflecteurs des cellules à réflexion positive. Ceci permet des réflexions multiples entre les réflecteurs des cellules à réflexion positive et des cellules à réflexion négative. Selon le brevet (colonne 2, lignes 11 à 18), la répartition spatiale adaptée de ces deux catégories de cellules permet la réalisation de filtres de type à cavités résonantes formés de 2 DART et "en augmentant le nombre de trajets repliés le long de l'axe de propagation, on crée l'équivalent de petites cavités résonnantes à l'intérieur même d'un DART". La dernière caractéristique de la revendication 1 forme donc une caractéristique fonctionnelle spécifiant une répartition spatiale des deux catégories de cellules telle que le nombre des réflexions multiples entre les réflecteurs de ces cellules permet de créer l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur d'un même transducteur. Selon le fascicule du brevet (colonne 2, lignes 15 à 23), cette répartition permet de réduire la taille des transducteurs.
4. La situation est différente dans E7 qui est concerné par le problème du "triple transit" dans les transducteurs à réflexion interne (voir E7, page 59, les sections "Abstract" et "Introduction"). La chambre de recours ayant pesé les arguments pour et contre l'introduction du document E7 est arrivée à la conclusion que la création de l'équivalent de petites cavités résonantes dans le transducteur de E7 n'a pas été démontrée par la requérante. Étant donné que la chambre n'est pas convaincue que E7 est d'une pertinence telle qu'il ait une influence considérable sur la décision à prendre, la chambre n'a aucune raison pour statuer dans un sens différent de la manière dont l'instance de premier degré a exercé son pouvoir discrétionnaire et décide de ne pas admettre ce document dans la procédure de recours. La jurisprudence citée par le requérant (voir l'alinéa VI) ne s'applique donc pas aux circonstances du cas d'espèce.
Documents E1 et E6 - Activité inventive
5. La requérante n'a pas contesté que les documents E1 et E6 ne mettent pas en cause la nouveauté de l'objet de la revendication 1. Selon elle, cependant, l'objet de la revendication 1 n'implique pas d'activité inventive au vu de l'enseignement de ces deux documents pris en combinaison.
6. E1 se rapporte à un transducteur à ondes de surface à réflexion acoustique. Selon la figure 1, une cellule de longueur Lambda comporte un réflecteur dont le centre est distant de Lambda/4 du centre d'un autre réflecteur de cette cellule et du centre des réflecteurs de la cellule adjacente. Mais ni E1 en général, ni la figure 1 qui ne montre pas d'arrangement de plus de deux cellules, ne spécifient la création de l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur du transducteur. A cet égard, E1 indique que la synthèse au premier ordre de la fonction de transduction Alpha(x) et de la fonction interne de réflexion K(x), synthèse qui est basée sur les équations (7), (12) et (16), suppose que K(x) est petit (voir pages 73 et 74, la section "First-order synthesis"). E1 exclut donc des valeurs élevées de la fonction interne de réflexion qui sont une condition nécessaire pour la création de l'équivalent de petites cavités résonantes. La création de l'équivalent de petites cavités résonantes au sein d'un transducteur n'est donc ni divulguée, ni suggérée, par E1.
7. E6 se rapporte à un transducteur à ondes de surface à réflexion acoustique de type SPUDT. La figure de la page 71 montre la fonction de transduction g et la fonction de réflexion r du transducteur. Mais ni E6 en général, ni la courbe représentant la fonction de réflexion r, qui n'est pas représentée en référence à un système d'axes normés et n'indique pas les valeurs prises par cette fonction, ne spécifient la création de l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur du transducteur. De plus, d'après E6 (page 72), la conception du transducteur revient à minimiser une fonction E(r,g) des fonctions de transduction et de réflexion. La création de petites cavités résonantes au sein d'un transducteur n'est donc ni divulguée, ni suggérée, par E6.
8. Puisqu' aucun des documents E1 et E6 ne divulgue, ni ne suggère, de transducteur dans lequel est créé l'équivalent de petites cavités résonantes, l'homme de l'art combinant l'enseignement de ces deux documents à la date de priorité du brevet ne serait pas parvenu de façon évidente à un transducteur comportant une "répartition spatiale adaptée des cellules à réflexion positive et des cellules à réflexion négative permettant de créer l'équivalent de petites cavités résonantes à l'intérieur d'un même DART", comme c'est le cas pour le transducteur selon la revendication 1. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 et des revendications dépendantes 2 à 7 ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique susmentionné et est considéré comme impliquant une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
9. La Chambre conclut donc que le brevet tel que maintenu sous forme modifiée au cours de la procédure d'opposition, et l'invention à laquelle il se rapporte satisfont aux dispositions de la Convention.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.