T 3212/19 08-12-2022
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DISPOSITIF DE REFROIDISSEMENT A DOUBLE JET POUR MOULE DE COULEE SEMI-CONTINUE VERTICALE
Nouveauté - (oui)
Activité inventive - (oui)
Preuves produites tardivement - recevable (oui)
Objet premier de la procédure de recours - moyens de recours invoqués portant sur les objections sur lesquelles la décision était fondée
I. Le brevet européen N°2 802 427 (ci-après "le brevet") concerne un dispositif de refroidissement d'un moule de coulée semi-continue verticale à refroidissement direct de plaques de laminage ou billettes de filage et d'un procédé pour sa mise en ½uvre.
Une opposition a été formée contre le brevet dans son intégralité basée sur les motifs selon l'article 100 a) CBE pour manque de nouveauté et d'activité inventive, l'article 100 b) CBE pour insuffisance de la divulgation et l'article 100 c) CBE pour modifications inadmissibles.
La division d'opposition a décidé de rejeter l'opposition.
L'opposante a formé un recours contre cette décision dans les formes et les délais prescrits.
II. La Chambre a informé les parties avec la notification du 2 décembre 2021 conformément à l'article 15(1) du règlement de procédure des chambres de recours (RPCR 2020) de son opinion provisoire selon laquelle le recours devrait être rejeté.
Aucune des parties n'a par la suite discuté ou commenté l'opinion provisoire de la Chambre.
La requérante a simplement informé la Chambre par son courrier du 7 novembre 2022 de son intention de ne pas comparaître à la procédure orale prévue le 1er décembre 2022.
La procédure orale a par la suite été annulée et la présente décision prise en procédure écrite.
III. Requêtes
L'opposante (ci-après "la requérante") a requis
l'annulation de la décision de la division d'opposition et la révocation du brevet.
La titulaire (ci-après "l'intimée") a requis
le rejet du recours (requête principale)
et, subsidiairement,
le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base d'un des jeux de revendications modifiées déposés en tant que première à cinquième requêtes subsidiaires avec la réponse au mémoire exposant les motifs du recours.
L'intimée a requis de plus
le renvoi de l'affaire à la division d'opposition dans le cas où le document D30 serait admis dans la procédure.
IV. Les documents cités lors de la procédure d'opposition et pertinents pour la présente décision sont les suivants:
D1: US 5,582,230;
D2: "Epsilon**(TM) - Rolling ingot casting technology",
Wagstaff, Inc., PDS01-1, 2006;
D6a: "AirSlip**(TM) - Air casting technology mold",
Wagstaff, Inc., PDS08, 2007;
D6b: "AirSlip**(TM) - Air casting technology mold",
Wagstaff, Inc., PDS08-1, 2010;
D6c: "AirSlip**(TM) - Air casting technology mold",
Wagstaff, Inc., PDS08-2, 2010;
D7: "LHC**(TM) - Low head composite casting process mold
- VariMold**(TM)Adjustable ingot casting technology
mold", Wagstaff, Inc., PDS05-1, 2006;
D8: "LHC**(TM)- Low head composite rolling ingot casting
technology - Equipment operation and maintenance
manual" Wagstaff, Inc., Item #13414, 2009;
D9: "Epsilon**(TM) - Rolling ingot casting technology -
Equipment operation and maintenance manual",
Wagstaff, Inc., Item #72138, 2009;
D10a: "AirSlip**(TM) - Air casting process - Casting
operations manual - Revision 1", Wagstaff, Inc.,
1998;
D10b: "AirSlip**(TM) - Air casting process - Casting
operations manual - Revision 2", Wagstaff, Inc.,
Item #13404, 2003;
D30: R. B. Wagstaff et al., "Enhanced Cooling Techique
for Rolling and Extrusion Ingot", Proceedings of
4th Australasian Asian Pacific Conference on
Aluminium Cast House Technology, TMS, Warrendale
PA, USA, 1995, pages 317-330; and
D31: J.F. Grandfield et al., "Water Cooling in Direct
Chill Casting: Part 1, Boiling Theory and
Control", Light Metals, The Minerals, Metals &
Materials Society, 1997, pages 691-699.
V. La revendication 1 indépendante de dispositif de la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit:
"1. Dispositif de refroidissement d'un moule de coulée semi-continue verticale à refroidissement direct de plaques de laminage ou billettes de filage (3), constitué de deux rangées de trous, disposées sur l'ensemble du périmètre interne de la cavité du moule, dans sa partie inférieure de sortie de la plaque ou billette, chacune des rangées de trous étant située à proximité d'un plan perpendiculaire à l'axe vertical dudit moule, caractérisé en ce que :
a) Les deux rangées de trous sont reliées à une seule et même chambre de liquide de refroidissement (2) aménagée dans le corps dudit moule,
b) La première rangée desdits trous, soit la plus haute dans le moule vertical, ou encore la plus en amont pour ce qui est de la distribution du liquide, est reliée à ladite chambre (2) au moyen de canaux permettant la projection (4) dudit liquide de refroidissement sur ladite plaque ou billette (3) avec un angle d'incidence de 32 ± 5, degrés par rapport à l'axe vertical du moule,
c) La deuxième rangée desdits trous, soit la plus basse dans le moule vertical, ou encore la plus en aval pour ce qui est de la distribution du liquide, est reliée à ladite chambre (2) au moyen de canaux permettant la projection (5) dudit liquide de refroidissement sur ladite plaque ou billette (3) avec un angle d'incidence de 22 ± 5 degrés par rapport à l'axe vertical du moule,
d) Les trous de la deuxième rangée, la plus basse ou encore en aval pour ce qui est de la distribution du liquide, sont disposés sensiblement sur la médiatrice de l'intervalle entre deux trous de la première rangée, soit la plus haute ou la plus en amont, relativement à l'axe vertical du moule."
La revendication 6 indépendante de procédé de la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit:
"6. Procédé de mise en ½uvre dudit dispositif de refroidissement selon l'une des revendications 1 à 5 pour la coulée semi-continue verticale à refroidissement direct de plaques de laminage ou billettes de filage (3), caractérisé en ce que le débit total d'eau de refroidissement pour l'ensemble des trous des deux rangées, soit le débit quittant la chambre de liquide de refroidissement (2), est compris entre 0.3 et 0.8 l/min par cm linéaire de périmètre de moule, au début de la phase transitoire de démarrage de la coulée, c'est-à-dire la phase pendant laquelle le débit de liquide de refroidissement et la vitesse de coulée n'ont pas atteint leur valeur de régime permanent, puis est porté au débit voulu pour le régime permanent de coulée."
Les énoncés des revendications indépendantes des requêtes subsidiaires ne sont pas pertinents pour la présente décision.
VI. Les arguments de la requérante sont résumés comme suit (une discussion plus détaillée est fournie le cas échéant dans les motifs de la décision):
Documents 30 et 31 - recevabilité
Les documents D30 et D31 représentent les connaissances générales de la personne du métier car ils concernent les deux moules LHC**(TM) et AirSlip**(TM)-UniMold**(TM) de Wagstaff, Inc. qui ont défini le standard dans l'industrie de la coulée des alliages d'aluminium. Ils devraient donc être admis dans la procédure.
Documents 10a et 10b - recevabilité
D'après l'article 12(4) RPCR 2007 tout élément présenté par les parties doit être pris en compte par la Chambre. Il n'y a donc pas de base légale pour que la Chambre ne puisse pas prendre en compte les arguments et les moyens de preuve présentées par la requérante. Les raisons fournies pour les documents D30 et D31 s'appliquent de la même manière aux documents D10a et D10b. Ils devraient donc être admis dans la procédure.
Requête principale (brevet tel que maintenu)
D1 divulgue toutes les caractéristiques de la revendication 1, y compris la caractéristique a) selon laquelle les deux rangées de trous sont reliées à une seule et même chambre de liquide de refroidissement aménagée dans le corps du moule, malgré la présence de soupapes dans les passages reliant les différentes parties de la seule et même chambre. L'objet de la revendication 1 manque donc de nouveauté par rapport à la divulgation de D1.
La seule caractéristique distinctive de la revendication 1 vis-à-vis de D1 pris comme art antérieur le plus proche est la caractéristique a). Le problème technique objectif qui en est déduit est de simplifier le dispositif connu. Face à ce problème la personne du métier penserait immédiatement à en supprimer les soupapes, au vu en particulier des enseignements de D6a, D6b et D6c. Ce faisant elle arriverait à l'objet revendiqué de manière évidente.
La seule caractéristique distinctive de la revendication 1 vis-à-vis du moule AirSlip**(TM) de Wagstaff, Inc. des documents D6a, D6b et D6c pris comme art antérieur le plus proche est l'angle d'incidence de la première rangée de trous (caractéristique b)). La personne du métier cherchant à diminuer la cambrure et à faciliter le démarrage de la coulée plus particulièrement dans le cas des alliages durs pour l'aérospatiale, penserait immédiatement à diminuer la valeur de l'angle d'incidence de la première rangée sur la base de ses connaissances générales. Ce faisant, elle arriverait à l'objet revendiqué de manière évidente.
L'effet technique escompté n'est pas obtenu sur toute l'étendue de la protection recherchée du fait que dans la revendication 1 les angles d'incidence des deux jets peuvent être proches voire identiques, les deux rangées de trous peuvent aussi être très proches et la taille des trous n'est pas spécifiée. Pour cette raison également une activité inventive ne peut pas être reconnue pour l'objet de la revendication 1.
VII. Les arguments de l'intimée sont brièvement résumés comme suit (une discussion plus détaillée est fournie le cas échéant dans les motifs de la décision):
Documents 30 et 31 - recevabilité
Les documents D30 et D31 ne sont pas plus pertinents que les documents déjà versés au dossier et ne représentent pas les connaissances générales de la personne du métier. La décision de la division d'opposition de ne pas les admettre était donc justifiée et devrait être maintenue.
Documents 10a et 10b - recevabilité
Les documents D10a et D10b ne devraient pas être admis dans la procédure de recours car ils n'ont pas pas été cités dans le mémoire exposant les motifs de recours.
Requête principale (brevet tel que maintenu)
D1 décrit la présence de soupapes montées dans les passages reliant les différentes chambres. D1 ne divulgue donc pas que les deux rangées de trous sont reliées à une seule et même chambre de liquide de refroidissement aménagée dans le corps dudit moule (caractéristique a)). D1 ne divulgue pas non plus la combinaison des angles d'incidence des deux rangées de trous (caractéristiques b) et c)). L'objet de la revendication 1 est donc nouveau par rapport à D1.
Partant de D1 comme art antérieur le plus proche, la personne du métier ne consulterait pas D6a, D6b ou D6c car leurs dispositifs (AirSlip**(TM)) travaillent dans le domaine d'ébullition nucléée alors que le problème technique à résoudre consiste à trouver un dispositif permettant de travailler dans le domaine de caléfaction. Par conséquent, même s'il était admis que D6a, D6b et D6c divulguaient une seule chambre alimentant deux rangées de jet, la personne du métier serait amenée à conclure qu'une seule chambre ne permet pas d'obtenir le régime de caléfaction. De plus, les enseignements des documents D6a, D6b et D6c ne sont pas compatibles avec D1, car ils concernent un moule pour la coulée de billettes alors que D1 concerne un moule pour la coulée de plaques.
Les documents D6a, D6b et D6c concernent le dispositif AirSlip**(TM) qui s'applique à la coulée de billettes. Ils ne divulguent de manière directe et non ambiguë ni la présence d'une seule et unique chambre, ni les caractéristiques b) et c) de la revendication 1.
L'effet des différences (caractéristiques a), b) et c)) est d'obtenir une caléfaction stable sur tout le domaine de débit d'alimentation d'eau. Le problème technique objectif est donc de trouver une solution permettant d'obtenir une caléfaction stable sur tout le domaine de débit. D6a, D6b et D6c ne cherchent pas à travailler dans le domaine de caléfaction. Par conséquent, rien dans D6a, D6b et D6c ne suggère de modifier le dispositif, en particulier de diminuer l'angle d'incidence de la première rangée de jets pour améliorer le régime de caléfaction. Bien au contraire, les documents D6a, D6b et D6c incitent à choisir un premier angle d'incidence supérieur à 40°.
Ce qui compte pour que le régime de caléfaction ait le temps de s'établir est que la distance verticale entre les impacts des jets issus de chacune des deux rangées soit suffisante. L'effet technique recherché peut donc être obtenu sur toute l'étendue des deux plages des angles d'incidence et de la distance entre les deux rangées de trous de la revendication 1. La personne du métier saurait choisir la taille des trous et leur nombre dans le dispositif de la revendication 1 de telle manière à ce que le débit soit rendu uniforme.
L'objet de la revendication 1 est donc inventif.
Etant donnée que la revendication 6 indépendante de procédé comprend le dispositif de la revendication 1, son objet est nouveau et inventif pour les mêmes raisons que celles fournies pour le dispositif de la revendication 1.
1. Toutes les raisons et conclusions fournies ci-après ont été présentées aux parties dans la notification du 2 décembre 2021 en tant qu'opinion provisoire de la Chambre. Cette opinion provisoire n'a été par la suite ni discutée ni contestée par les parties.
Au vu de l'annonce de la non-comparution de la requérante à la procédure orale, la Chambre, après avoir réexaminé l'ensemble des éléments à sa disposition, n'a pas trouvé de raison de changer son opinion provisoire et a conclu que la décision pouvait être prise en procédure écrite. En effet, lorsqu'une procédure orale est prévue sur requête d'une partie et que cette partie exprime par la suite son intention de ne pas y assister, cette déclaration peut en règle générale être interprétée comme étant un retrait de la requête en procédure orale (cf. Jurisprudence des Chambres de Recours, 10ème édition 2022, III.C.4.3.2).
2. Droit applicable
2.1 La version révisée du Règlement de Procédure des Chambres de Recours (RPCR) est entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Sous réserve des dispositions transitoires (article 25 RPCR 2020), la version révisée s'applique à tout recours qui est en instance à sa date d'entrée en vigueur.
2.2 Dans la présente affaire, le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé avant le 1er janvier 2020. Par conséquent, l'article 12(4) à (6) RPCR 2020 ne s'applique pas mais, en lieu et place, l'article 12(4) RPCR 2007 continue de s'appliquer (article 25(2) RPCR 2020).
En revanche, l'article 12(4) à (6) RPCR 2020 s'applique à la réponse à ce mémoire étant donné qu'elle a été produite le 28 mai 2020, c'est-à-dire en dehors des délais fixés par le courrier du 17 janvier 2020.
3. Documents - recevabilité
3.1 Documents D30 et D31
3.1.1 Les documents D30 et D31 ont été déposés tardivement en procédure d'opposition avec le courrier de la requérante du 12 avril 2019. La division d'opposition a décidé de ne pas les admettre dans la procédure car ils n'apparaissaient pas être plus pertinents que ceux qui avaient déjà été versés au dossier, notamment D1, D10a et D10b, et concernaient des publications spécifiques qui ne représentaient pas les connaissances générales de la personne du métier, cf. décision attaquée, point 9 des motifs et aussi procès-verbal de la procédure orale, point 4.4.
3.1.2 La requérante conteste cette conclusion de la décision attaquée et requiert l'admission des documents D30 et D31 dans la procédure. Elle argue qu'ils représenteraient les connaissances générales de la personne du métier car ils concerneraient les deux moules LHC**(TM) et AirSlip**(TM) -UniMold**(TM) de Wagstaff, Inc., tous deux largement connus dans le domaine technique de la coulée des alliages d'aluminium avant la date de priorité du brevet, comme le prouveraient les documents D6a, D6b, D6c, D7, D8, D10a et D10b. Ces moules, plus particulièrement le moule LHC**(TH), auraient défini le standard dans l'industrie de la coulée des alliages d'aluminium à la date de priorité du brevet, comme cela ressortirait d'ailleurs du brevet contesté lui-même.
3.1.3 Selon la jurisprudence constante, en cas de contestation d'une décision prise par l'instance du premier degré dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, la Chambre n'est pas habilitée à réexaminer l'ensemble des faits de l'espèce déjà examinés en première instance pour déterminer si elle aurait ou non exercé de la même manière son pouvoir d'appréciation. Une Chambre de recours ne devrait statuer dans un sens différent de la manière dont l'instance du premier degré a exercé son pouvoir d'appréciation que si elle parvient à la conclusion que l'instance du premier degré a exercé son pouvoir d'appréciation sur la base de principes erronés, qu'elle n'a pas tenu compte des principes corrects, ou qu'elle a exercé son pouvoir de manière arbitraire ou déraisonnable et a ainsi outrepassé les limites du pouvoir d'appréciation qui lui est conféré (cf. G 7/93, JO OEB 1994, 775, T 640/91, JO OEB 1994, 918; Jurisprudence des Chambres de Recours, supra, V.A.3.4.1.b).
3.1.4 La requérante n'a fourni aucun argument sur la manière dont la division d'opposition a exercé son pouvoir d'appréciation pour conclure à l'irrecevabilité des documents tardifs D30 et D31.
3.1.5 La Chambre considère que la division d'opposition a basé sa décision de façon appropriée sur le principe de la pertinence de prime abord des documents en question au vu d'autres documents qui avaient été versés au dossier.
De plus, la Chambre partage l'avis de la division d'opposition que les documents D30 et D31 consistent en des publications relatives à des moules spécifiques, ce qui ne les qualifient pas comme reflétant les connaissances générales de la personne du métier, même si certains passages peuvent toutefois concerner des principes généraux. En particulier, comme indiqué par la requérante elle-même, D30 concerne les moules spécifiques LHC**(TM) (cf. page 323), AirSlip**(TM) (cf. page 325) et UniMold**(TM) (cf. page 326) de Wagstaff, Inc. Le fait que ces moules étaient connus avant la date de priorité du brevet ne change rien à cet état de fait.
Par conséquent, la Chambre ne voit pas de raison de statuer différemment de la décision attaquée, point 9 des motifs.
3.1.6 La requête de l'intimée de renvoi de l'affaire à la division d'opposition dans le cas où le document D30 aurait été admis dans la procédure est de ce fait sans objet.
3.2 Document D10a et D10b
3.2.1 L'intimée conteste la recevabilité des documents D10a et D10b en arguant qu'ils n'auraient pas été cités dans le mémoire exposant les motifs de recours.
3.2.2 Les documents D10a et D10b qui avaient déjà été soumis avec les motifs d'opposition sont effectivement mentionnés par la requérante pour la première fois en procédure de recours dans sa lettre ultérieure du 16 février 2021. Ils ne constituent cependant pas une modification des moyens de la requérante mais plutôt un développement puisqu'ils concernent les manuels d'utilisation du moule AirSlip**(TM) divulgué dans les documents D6a, D6b et D6c utilisés par la requérante dans le mémoire exposant les motifs du recours. À ce titre ils servent simplement de support explicatif des modes de fonctionnement des dispositifs des documents D6a, D6b et D6c. La Chambre ne voit donc pas de raison de ne pas les admettre dans la procédure de recours (article 13(1) RPCR 2020).
4. Requête principale - revendication indépendante 1 de dispositif - nouveauté
La requérante considère que l'objet de la revendication 1 manquerait de nouveauté par rapport à la divulgation de D1 (cf. décision attaquée, point 12.1 des motifs).
4.1 Divulgation de D1
Le document D1 divulgue un dispositif de refroidissement d'un moule ("mold" 2) de coulée semi-continue verticale à refroidissement direct ("direct cooling") de plaques aptes au laminage (colonne 1, lignes 6-42; "casting molten metal into an elongated body of metal", "ingot"), constitué de deux rangées de trous (colonne 9, lignes 63-67 et colonne 10, lignes 11-13; figures 6 et 8-12; "holes" 68, 70, "respective series of holes"), disposées sur l'ensemble du périmètre interne de la cavité du moule (colonne 10, lignes 16-18; "staggered about the circumference of the mold"), dans sa partie inférieure de sortie de la plaque, chacune des rangées de trous (68, 70) étant située à proximité d'un plan perpendiculaire à l'axe vertical dudit moule (colonne 10, lignes 13-15; "from the mitered surfaces 64, 66 of the annulus 62", cf. figures 6 et 8-12).
Dans le dispositif de D1:
b) la première rangée desdits trous (70), soit la plus haute dans le moule vertical (2), ou encore la plus en amont pour ce qui est de la distribution du liquide, est reliée aux deux sections de chant ("end sections" 42) et aux deux sections de grande surface ("side sections" 44) de la chambre inférieure ("lower chamber" 40) au moyen de canaux permettant la projection dudit liquide de refroidissement sur ladite plaque avec un angle d'incidence compris entre 30 et 105 degrés par rapport à l'axe vertical du moule (colonne 6, lignes 13-16; revendications 6 et 31), plus précisément un angle de 45 degrés dans le mode de réalisation selon l'invention de D1 (colonne 11, ligne 59-67; figure 9),
c) la deuxième rangée desdits trous (68), soit la plus basse dans le moule vertical, ou encore la plus en aval pour ce qui est de la distribution du liquide, est reliée à la chambre supérieure ("upper chamber" 38) au moyen de canaux permettant la projection dudit liquide de refroidissement sur ladite plaque avec un angle d'incidence compris entre 15 et 30 degrés par rapport à l'axe vertical du moule (colonne 6, lignes 16-20; revendications 6 et 31), plus précisément un angle de 22,5 degrés dans le mode de réalisation selon l'invention de D1 (colonne 11, ligne 59-67; figure 9),
d) les trous (68) de la deuxième rangée, la plus basse ou encore en aval pour ce qui est de la distribution du liquide, sont disposés sensiblement sur la médiatrice de l'intervalle entre deux trous (70) de la première rangée, soit la plus haute ou la plus en amont, relativement à l'axe vertical ("vertical axis" 12) du moule (cf. colonne 10, lines 18-22; figures 6 et 8-15, "the holes in one series of holes are circumferentially offset from the holes in the other series of holes, and vice versa, and each extend through the intervals of space between the pairs of holes in the other series of holes").
4.2 Caractéristique a)
La requérante considère que D1 divulguerait la caractéristique a) selon laquelle les deux rangées de trous sont reliées à une seule et même chambre de liquide de refroidissement aménagée dans le corps du moule.
4.2.1 Les parties s'accordent sur le fait que la chambre inférieure (40) de D1 comprend quatre parties, deux sections de grande surface ("side sections" 44) et deux sections de chant ("end sections" 42), et que la chambre supérieure (38) est quant à elle annulaire et en une seule partie (cf. figure 3 pour la chambre supérieure et figure 5 pour la chambre inférieure).
4.2.2 La requérante argue qu'au vu des passages (82, 84) reliant la chambre supérieure (38) et les sections de grande surface (44) de la chambre inférieure (40), le liquide de refroidissement pourrait accéder à ces sections de grande surface (44) via la chambre supérieure (38) qui serait elle-même reliée aux sections de chant (42) de la chambre inférieure (40) à l'aide des passages (82). La chambre supérieure (38) serait ainsi inter-connectée aux quatre sections (42, 44) de la chambre inférieure (40) de telle sorte à former une seule et unique chambre, cf. colonne 10, lignes 33-45.
Dans chacun des passages (84) est montée une soupape ("valve" 88), cf. colonne 10, lignes 41-45 et figures 5 et 8. D'après la requérante, la chambre unique divulguée dans D1 serait alors continue lorsque les soupapes (88) sont en position ouverte.
Le passage de D1, colonne 11, ligne 59 à colonne 12, ligne 2 et figure 9, décrit un mode de réalisation dans lequel les soupapes (88) sont fermées (cf. également colonne 8, lignes 1-13). Le liquide de refroidissement qui circule alors dans la chambre supérieure (38) et les sections de chant (42) de la chambre inférieure (40) ne peut pas accéder aux sections de grande surface (44) de la chambre inférieure (40). Pour la requérante le fait que les soupapes (88) puissent être fermées dans le dispositif de D1 ne jouerait cependant aucun rôle. Ce passage de D1, colonne 11, ligne 59 à colonne 12, ligne 2 et figure 9, représenterait d'après la requérante simplement une méthode d'utilisation du dispositif divulgué qui ne serait pas pertinente pour l'objet de la revendication 1 qui concerne un dispositif. Le dispositif de D1 tomberait dans celui de la revendication 1 lorsque les soupapes (88) sont ouvertes.
Toujours d'après la requérante, ni la revendication 1 de la requête principale, ni le brevet dans son ensemble, cf. par exemple paragraphe 36 et figure 6, ne fournirait de précision quant à une éventuelle forme de la chambre de liquide de refroidissement. La chambre unique inter-connectée de D1, cf. par exemple figures 7 et 8, tomberait donc dans la formulation large de la chambre de la revendication 1 de la requête principale.
La décision attaquée serait donc erronée en ce que trop d'importance aurait été attribuée à la sémantique de D1 plutôt qu'à ce que la personne du métier en aurait déduit au vu des aspects techniques qui y sont divulgués. Le but de D1 serait de fournir du liquide de refroidissement de façon simultanée via les deux rangées de trous en utilisant pour cela une unique chambre de liquide de refroidissement quand les soupapes (88) sont ouvertes.
Il serait connu en particulier de débuter la coulée avec les soupapes (88) en position ouverte.
4.2.3 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante pour les raisons suivantes.
D1 décrit explicitement la présence des chambres inférieure et supérieure (38, 40), avec dans la chambre inférieure (40) les sections de grande surface (44) qui sont reliées au reste via les soupapes (88) montées dans les passages (84). La présence de ces soupapes constitue une séparation sans équivoque entre deux parties distinctes, c'est-à-dire deux chambres, même si cette séparation peut être momentanément occultée (soupapes (88) en position ouverte) en fonction du mode d'utilisation du moule de D1 (cf. décision contestée, page 8, troisième paragraphe). Le dispositif de D1 comprend ainsi trois chambres de liquide de refroidissement distinctes:
- une première chambre consistant en la chambre supérieure (38) et les sections de chants (42) de la chambre inférieure (40); et
- une deuxième et une troisième chambres constituées chacune d'une section de grande surface (44) de la chambre inférieure (40).
Par conséquent, D1 ne divulgue pas la caractéristique a).
4.3 Caractéristiques b) et c)
L'intimée considère que D1 ne divulguerait:
- ni la caractéristique b): angle d'incidence de la première rangée de trous la plus en amont pour ce qui est de la distribution du liquide compris entre 27° et 37°;
- ni la caractéristique c): angle d'incidence de la deuxième rangée de trous la plus en aval pour ce qui est de la distribution du liquide compris entre 17° et 27°.
4.3.1 Pour l'intimée, l'orientation des trous de la première et deuxième rangée devrait être considérée conjointement du fait de leur effet de synergie sur la cambrure du pied de lingot. La figure 3 du brevet montrerait qu'une bonne cambrure ne peut pas être obtenue sur toute la plage de débit avec une seule rangée de trous (cas 30).
Les angles d'incidence divulgués dans D1 sont compris entre 30 et 105° pour la première rangée de trous et entre 15 et 30° pour la deuxième rangée de trous (colonne 6, lignes 13-20). L'intimée argue alors que les plages revendiquées des angles d'incidence des deux rangées de trous recouperaient celles divulguées dans D1 et consisteraient en une sélection des plages connues.
La sélection revendiquée serait ainsi effectuée à partir de deux listes pour définir les angles d'incidence de chaque rangée de trous. Pour l'intimée cette combinaison ne serait pas divulguée sous une forme individualisée par D1 qui divulguerait uniquement le mode de réalisation: 45° et 22,5°.
4.3.2 La Chambre ne partage pas l'avis de l'intimée.
L'angle d'incidence (22,5°) de la deuxième rangée de trous selon le mode de réalisation des figures de D1 (cf. aussi colonne 11, lignes 59-64) tombe complètement dans la plage revendiquée (entre 17° et 27°). Pour cette raison déjà la plage est considérée comme étant anticipée par ce mode de réalisation de D1.
De plus, comme indiqué par la requérante la plage sélectionnée (entre 17° et 27°) n'est pas non plus considérée comme étroite par rapport à celle divulguée (entre 15° et 30°), ni comme éloignée des valeurs limites de 15° et 30° de la plage connue de D1. La divulgation générale de D1 sur l'angle d'incidence de la deuxième rangée de trous anticipe également la sélection correspondante revendiquée.
L'angle d'incidence de la première rangée de trous selon le mode de réalisation des figures de D1 (45°) ne tombe par contre pas dans la plage revendiquée entre 27° et 37°. Le mode de réalisation spécifique divulgué dans D1 (45° et 22,5°) n'anticipe donc pas en lui-même la combinaison des caractéristiques b) et c).
La Chambre partage toutefois l'avis de la requérante que la plage sélectionnée (entre 27° et 37°) est divulguée dans D1 par un deuxième mode de réalisation correspondant à la limite inférieure (30°) de la plage entre 30 et 105°. Pour ce deuxième mode de réalisation, aucun angle d'incidence spécifique de la deuxième rangée de trous n'y est cependant divulgué en combinaison.
La personne du métier déduirait toutefois directement et sans ambiguïté que l'angle qui y sera associé doit être sélectionné dans la plage d'angle d'incidence de la deuxième rangée de trous divulguée dans D1, c'est-à-dire entre 15 et 30°. Ce faisant elle aboutirait inévitablement à une combinaison d'angles d'incidence des trous qui, soit tombe dans la combinaison revendiquée, soit est très proche. Les caractéristiques b) et c) sont donc divulguées par ce deuxième mode de réalisation de D1.
4.3.3 Au vu des raisons ci-dessus, l'objet de la revendication 1 est nouveau par rapport à la divulgation de D1 (article 54(1) CBE) sur la base uniquement de la caractéristique a).
5. Requête principale - revendication indépendante 1 de dispositif - activité inventive
5.1 La requérante conteste que l'objet de la revendication 1 de la requête principale présente une activité inventive
- à partir de D1 ou du moule LHC**(TM) de D30 (page 323 et suivantes) pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement des documents D2 ou D9 (moule Epsilon**(TM) de Wagstaff, Inc.) ou des documents D6a, D6b, D6c ou encore D30 (pour la caractéristique a)) et avec l'enseignement du document D30 (pour les caractéristiques b) et c));
- à partir des documents D2 et/ou D9 relatifs au moule Epsilon**(TM) de Wagstaff, Inc. pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement du document D30 (caractéristique b)); et
- à partir de D6a, D6b, D6c ou du moule UniMold**(TM) à chambre unique de D30 (page 326 et suivantes) pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement du document D30, voire avec les connaissances générales de la personne du métier (caractéristique b)).
La requérante conteste également l'obtention de l'effet technique escompté sur toute l'étendue de la protection recherchée (les angles d'incidence des deux jets pourraient être proches voire identiques; les deux rangées de trous pourraient être très proches; la taille des trous ne serait pas spécifiée).
5.2 Recevabilité de certaines objections
5.2.1 Au vu de l'irrecevabilité des documents D30 et D31 établie au point 3.1 ci-avant, les objections soulevées par la requérante sur la base d'un de ces documents sont également irrecevables.
Comme indiqué au point 2 ci-avant, l'article 12(4) à (6) RPCR 2020 ne s'applique pas au mémoire exposant les motifs du recours mais, en lieu et place, l'article 12(4) RPCR 2007.
L'article 12(4) RPCR 2007 stipule que
"[S]sans préjudice du pouvoir de la chambre de considérer comme irrecevables les faits, preuves et requêtes qui auraient pu être produits ou n'ont pas été admis au cours de la procédure de première instance, tout élément présenté par les parties, conformément au paragraphe 1, sera pris en considération par la chambre si et dans la mesure où il concerne l'affaire faisant l'objet du recours et remplit les conditions visées au paragraphe 2" (emphase par la Chambre).
La requérante n'a pas fourni de raisons pour lesquelles les objections soulevées pour la première fois avec son mémoire de recours n'auraient pas pu être soulevées lors de la procédure d'opposition, et la Chambre n'en voit aucune.
La procédure de recours est largement déterminée par le cadre factuel et juridique de la procédure de première instance. Cela implique qu'une requérante n'est pas libre de présenter les moyens qu'elle invoque en procédure de recours comme elle l'entend, en l'occurrence des objections, et de contraindre ainsi la Chambre à rendre une première décision sur des questions critiques ou à renvoyer l'affaire à la division de première instance. Conférer une telle liberté à une requérante irait à l'encontre d'une procédure de recours ordonnée et efficace. En effet, cela permettrait un choix tactique qui compromettrait la bonne répartition de fonctions entre la première instance et les Chambres de recours et serait absolument inacceptable pour l'économie de la procédure de manière générale (G 9/91, JO OEB 1993, 408, point 6 des motifs; T 1705/07, point 8.4 des motifs et T 1067/08, points 7.1 à 7.2 des motifs, non publiées au JO OEB).
À cet égard, il est aussi fait référence à l'article 12(2) RPCR 2020 qui stipule que
"[E]étant donné que la procédure de recours a pour objet premier une révision de nature juridictionnelle de la décision attaquée, les moyens invoqués par une partie dans le cadre du recours doivent porter sur les requêtes, les faits, les objections, les arguments et les preuves sur lesquels la décision attaquée était fondée" (emphase par la Chambre).
Au vu de ces raisons, les objections qui n'ont pas été traitées dans la décision attaquée sont considérées comme irrecevables.
5.2.2 Par conséquent, seulement les objections de manque d'activité inventive suivantes soulevées par la requérante dans son mémoire exposant les motifs du recours et comprises dans la décision attaquée sont prises en compte:
- à partir de D1 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement des documents D6a, D6b, D6c (caractéristique a)); et
- à partir de D6a, D6b, D6c pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec les connaissances générales de la personne du métier (caractéristique b)).
5.3 À partir de D1
5.3.1 Par rapport au deuxième mode de réalisation de D1 qui consiste en un angle d'incidence de la première rangée de trous de 30°, seulement la caractéristique a) de la revendication 1 de la requête principale est distinctive au vu de la discussion sur la nouveauté au point 4 ci-avant.
5.3.2 L'intimée fait valoir un effet de synergie de cette caractéristique a) avec les autres caractéristiques b) et c), en l'occurrence l'obtention d'un régime de caléfaction stable sur une large plage de débit.
Le brevet dans son ensemble ne décrit cependant pas un tel effet technique qui serait associé à cette seule caractéristique distinctive a).
5.3.3 Par conséquent, la Chambre suit la requérante en ce que le seul effet technique qui peut être associé à la caractéristique distinctive a) par rapport à la divulgation de D1 est une simplification du moule. Dans D1 les chambres sont reliées entre elles par des soupapes (88) qui peuvent être en position ouverte ou fermée en fonction du mode de fonctionnement choisi (cf. discussion de la divulgation de D1 aux points 4.1 et 4.2 ci-avant).
5.3.4 Il n'existe cependant aucune raison pour laquelle la personne du métier faisant face au problème de simplification du moule envisagerait d'abandonner les différentes possibilités de fonctionnement du dispositif de D1 en supprimant les soupapes (88) comme suggéré par la requérante. En effet, ce faisant elle ne pourrait plus faire fonctionner le moule de D1 de la manière qui y est divulguée et obtenue par la fermeture des passages (84) à l'aide des soupapes (88), cf. colonne 11, ligne 59 à colonne 13, ligne 14. Elle irait à l'encontre de l'enseignement de D1. Si jamais elle souhaitait conserver les possibilités de fonctionnement du dispositif de D1 tout en supprimant les soupapes, elle devrait alors le modifier d'une manière qui n'est ni divulguée dans les documents disponibles, ni comprise dans les connaissances générales de la personne du métier. Pour cette raison déjà une activité inventive à partir de D1 peut être reconnue.
5.3.5 De plus, il n'apparaît pas non plus de raison pour laquelle la personne du métier cherchant à simplifier le moule de coulée de plaques connu de D1 prendrait en compte un moule de coulée de billettes comme celui de D6a, D6b et D6c.
5.3.6 Le moule AirSlip**(TM) de D6a, D6b et D6c présente un angle d'incidence de la première rangée de trous supérieur à 40° et un angle d'incidence de la deuxième rangée de trous inférieur à 25° (cf. dernier paragraphe de la page 1 de D6a et D6b). Partant du mode de réalisation de D1 considéré comme le plus proche avec un angle d'incidence de la première rangée de trous de 30° combiné à un angle d'incidence de la deuxième rangée entre 15° et 30° (toute la plage possible de D1), la personne du métier devrait modifier l'enseignement de D6a, D6b et D6c avant sa combinaison de telle manière à en déduire que le moule qui y est divulgué et les caractéristiques qui y sont afférentes seraient compatibles avec le deuxième mode de réalisation de D1, c'est-à-dire avec un angle d'incidence de 30° pour la première rangée de trous, bien inférieur à la limite basse de 40° de D6a, D6b et D6c.
5.3.7 Au vu des raisons ci-avant, la personne du métier partant de D1 comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement de D6a, D6b, D6c n'arriverait pas à l'objet revendiquée d'une manière évidente.
5.4 À partir des documents D6a, D6b, D6c
5.4.1 Les documents D6a, D6b et D6c concernent le moule AirSlip**(TM) de Wagstaff, Inc. pour la coulée de billettes.
Comme indiqué par la requérante ce moule comprend une chambre unique de telle sorte que la caractéristique a) y est divulguée (cf. page 1, deuxième et troisième figures en partant du haut pour D6a et D6b et page 1, deuxième figure en partant du haut pour D6c).
Les documents D6a, D6b et D6c ne divulguent cependant pas l'angle d'incidence de la première rangée de trous (caractéristique b)) (cf. page 1, dernier paragraphe de D6a et D6b: angle d'incidence de la première rangée de trous est supérieur à 40°).
5.4.2 La requérante considère que la personne du métier cherchant à optimiser le moule, en l'occurrence à diminuer la cambrure et à faciliter le démarrage de la coulée plus particulièrement dans le cas des alliages durs pour l'aérospatiale, penserait immédiatement à diminuer la valeur de l'angle d'incidence de la première rangée sur la base de ses connaissances générales qui consisteraient en ce que le régime de caléfaction faciliterait le démarrage de la coulée et qu'il serait atteint avec un angle d'incidence plus faible. Ce faisant, elle arriverait à l'objet revendiqué de manière évidente.
5.4.3 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante. En effet, même si les connaissances générales de la personne du métier alléguées par la requérante était acceptées comme telles, l'affirmation selon laquelle la personne du métier sélectionnerait inévitablement la plage revendiquée reste une allégation infondée. Les connaissances générales alléguées ne font pas état des valeurs d'angles d'incidence pour la première rangée de trous telles que revendiquées. L'objection n'est donc pas convaincante.
5.5 Effet technique sur toute l'étendue revendiquée
Les objections ci-après ont été soulevées par la requérante indépendamment du choix d'un art antérieur le plus proche.
Angles d'incidence des deux jets
5.5.1 La requérante considère que les angles d'incidence des deux rangées de trous dans la revendication 1 peuvent être très proches, voire égaux (27°). Dans ce cas de combinaisons d'angles proches ou égaux, l'effet technique recherché d'un régime de caléfaction stable dans un domaine de débit étendu ne serait pas obtenu au vu de la description du brevet, paragraphe 40 qui préciserait que la "deuxième rangée de jets(5) doit avoir une incidence plus faible" et que "[D]deux rangées de jets trop proches sont en fait équivalentes à une rangée unique de jets". Ainsi, comme l'effet technique ne serait pas obtenu sur toute l'étendue de la protection recherchée, l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 ne pourrait pas être reconnue.
5.5.2 La Chambre ne partage pas cet avis.
Comme indiqué par l'intimée, ce qui compte pour que le régime de caléfaction ait le temps de s'établir est que la distance verticale entre les impacts des jets issus de chacune des deux rangées soit suffisante, par exemple comprise entre 10 et 40 mm, cf. brevet, paragraphe 40, lignes 19-21 et 25-27. La Chambre est convaincue que cette configuration d'impacts peut aussi être obtenue lorsque les angles d'incidence des deux jets sont proches voire égaux. L'effet technique recherché peut donc être obtenu sur toute l'étendue des deux plages des angles d'incidence de la revendication 1.
Proximité des deux rangées de trous
5.5.3 La requérante considère que comme l'espacement vertical entre les deux rangées de trous n'est pas spécifié dans la revendication 1, celles-ci peuvent être très proches. Dans une configuration de proximité elles seraient "équivalentes à une rangée unique de jets" (brevet, paragraphe 40) ce qui ne permettrait pas d'obtenir la caléfaction recherchée, cf. paragraphe 15 du brevet. Ainsi, comme l'effet technique ne serait pas obtenu sur toute l'étendue de la protection recherchée, l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 ne pourrait pas être reconnue.
5.5.4 La Chambre ne partage pas cet avis.
Comme déjà discuté ci-avant pour les angles d'incidence des deux rangées de trous, ce qui compte pour que le régime de caléfaction ait le temps de s'établir est que la distance verticale entre les impacts des jets issus de chacune des deux rangées soit suffisante, par exemple comprise entre 10 et 40 mm, cf. brevet, paragraphe 40, lignes 19-21 et 25-7 du brevet. Cette configuration d'impacts peut sans ambiguïté être aussi obtenue pour des rangées de trous proches l'une de l'autre. L'effet technique recherché peut donc être obtenu quelle que soit la distance entre les deux rangées de trous de la revendication 1.
La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante qu'il serait nécessaire d'introduire dans la revendication 1 la caractéristique relative à la distance verticale des impacts. En effet, il s'agirait ici d'examiner si une caractéristique essentielle est manquante, ce qui concernerait de facto un examen de la clarté. La conformité des revendications du brevet aux exigences de l'article 84 CBE ne peut cependant pas être examinée dans le cas présent à l'encontre de la requête principale (cf. G 3/14, OJ OEB 2015, A102, Sommaire).
Taille des trous
5.5.5 La requérante argumente que d'après le brevet, paragraphes 11 à 13, pour avoir une bonne santé de pied et une minimisation de sa cambrure l'architecture intérieure de la lingotière et les diamètres des trous devraient être conçus de telle manière à atteindre de faibles débits tout en garantissant une très bonne uniformité du débit le long du moule.
Comme la revendication 1 couvrirait des rangées de trous de tous diamètres et sans lien entre les diamètres des trous de la première rangée et ceux de la deuxième rangée, l'effet recherché d'une très bonne uniformité du débit et d'une augmentation progressive et simultanée du débit d'eau sur les deux rangées de jets (cf. brevet, paragraphe 42), ne pourrait pas être obtenu sur toute l'étendue de la revendication 1.
5.5.6 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante.
Il s'agit ici d'examiner si la taille des trous représente une caractéristique essentielle manquante, ce qui concerne de facto un examen de la clarté. Comme déjà indiqué ci-avant, la conformité des revendications du brevet aux exigences de l'article 84 CBE ne peut pas être examinée dans le cas présent à l'encontre de la requête principale (cf. G 3/14, supra, Sommaire).
La Chambre est toutefois convaincue que la personne de métier saurait choisir les diamètres adéquats des trous dans le dispositif de la revendication 1 de telle manière à obtenir les effets escomptés.
Dans l'affaire T 1188/00, non publiée au JO OEB et citée par la requérante, la titulaire du brevet avait fait valoir pour la première fois au stade du recours une reformulation du problème à résoudre sur la base d'un effet allégué. Elle avait alors argué que la charge de la preuve que le problème n'aurait pas été résolu sur toute l'étendue revendiquée revenait à l'opposante. La Chambre avait réfuté son argument et indiqué qu'il incombait au titulaire du brevet de prouver s'il était vraisemblable que l'effet pouvait être obtenu pour l'ensemble du domaine revendiqué quand un problème concernant un effet allégué était reformulé pour la première fois au stade du recours. La décision T 1188/00 n'est donc pas pertinente pour le cas présent (Jurisprudence des Chambres de Recours, supra, I.D.4.4.2 et I.D.9.8.3).
6. Requête principale - revendication indépendante 6 de procédé
La requérante conteste que l'objet de la revendication 6 de la requête principale présente une activité inventive à partir de D1 comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement du document D2 ou D8.
Ces objections n'ayant pas été soulevées dans la procédure d'opposition, elles sont irrecevables pour les mêmes raisons que celles fournies au point 5.2.1 ci-avant.
De plus, comme la revendication 6 indépendante de procédé comprend le dispositif de la revendication 1, son objet est nouveau et inventif pour les mêmes raisons que celles fournies ci-avant pour le dispositif de la revendication 1 (cf. également décision contestée, point 12.3 des motifs).
7. Première à cinquième requêtes subsidiaires
Au vu des conclusions de la Chambre sur la requête principale il est inutile de discuter les requêtes subsidiaires.
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté.