T 0181/95 12-09-1996
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Dispositif pour la modulation ou la démodulation directe en hyperfréquences
Activité inventive par rapport aux documents considérés par la Division d'examen (oui)
Forme en deux parties d'une revendication indépendante ne reposant pas sur un état de la technique selon l'article 54(2) CBE
Grave déficience de clarté dans l'unique notification précédant le rejet de la demande
Principe de bonne foi
Vice substantiel de procédure (oui)
Remboursement de la taxe de recours (équitable)
Renvoi à la première instance pour suite à donner
Clarity of communication (no)
Inventive step (yes)
Principle of good faith
Substantial procedural violation (yes)
Reimbursement of appeal fee (yes)
Remittal to first instance (yes)
Novelty - state of the art
I. Le présent recours est dirigé contre la décision de la Division d'examen rejetant la demande de brevet européen n° 89 403 405.7, pour le motif que l'objet des revendications 1 à 6 ne présentait pas d'activité inventive par rapport à l'art antérieur selon les documents :
D1 : UKW-Berichte Volume 3, 1984, pages 130 à 135 , J.Kestler, "PLL-Oszillatoren mit Verzögerungsleitung", partie 1 : "Theoretische Grundlagen", et
D2 : IEEE GALLIUM ARSENIDE INTEGRATED CIRCUIT SYMPOSIUM, Portland, Oregon, 13-16 octobre 1987, pages 227 à 230 ; K.W. Lee et al., "Push-push, frequency doubling, MMIC oscillators".
II. La revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Dispositif pour la modulation ou la démodulation directe en hyperfréquences, comportant deux mélangeurs (2, 3) qui délivrent (démodulation) ou reçoivent (modulation) le premier (2) un signal en phase P(t) et le second (3) un signal en quadrature Q(t), lesdits mélangeurs (2, 3) étant commandés le premier (2) par deux signaux dont les phases sont 0° et 180°, et le second (3) par deux signaux dont les phases sont 90° et 270°, ces quatre signaux étant fournis par deux déphaseurs (9,10), ce dispositif étant caractérisé en ce qu'il comporte un oscillateur local (8) commandé par une tension dit VCO, qui fournit deux signaux de sorties en opposition de phase, le premier signal VC1(t) en phase à 0° étant adressé au premier déphaseur (9), et le second signal VC2(t) en opposition de phase à 180° étant adressé au second déphaseur (10)."
Les revendications 2 à 6 sont dépendantes de la revendication 1.
III. Les arguments présentés par le requérant peuvent être résumés comme suit :
Rien dans le document D1 ne suggérerait l'utilisation d'un oscillateur local à deux sorties pour contrôler deux déphaseurs, qui eux-mêmes contrôlent deux mélangeurs. Le document D1 divulguerait un oscillateur PLL ("Phase Locked Loop") commandé par un déphaseur variable et la figure 7 de D1 ne décrirait que ce déphaseur variable alors qu'aucun déphaseur variable ne serait utilisé dans le dispositif revendiqué.
D2 décrirait un oscillateur local doubleur de fréquence à une seule sortie. Si l'on décomposait le fonctionnement de cet oscillateur a posteriori, on pourrait certes constater que le doublage de fréquence est obtenu par deux oscillateurs travaillant en opposition de phase, dont les sorties sont combinées pour éliminer la fréquence fondamentale mais cet oscillateur connu ne serait d'aucune utilité pour arriver au dispositif revendiqué puisque celui-ci n'utiliserait pas de doublage de fréquence et qu'il n'y aurait dans D2 aucune suggestion pour une autre utilisation d'un oscillateur local à deux sorties. L'oscillateur PLL selon D1, dans lequel on remplacerait, si cela était possible, le VCO à une sortie par la partie amont du VCO selon D2 ne constituerait pas un modulateur-démodulateur. D1 ne suggérerait pas l'utilisation possible d'un déphaseur variable dans un circuit modulateur ou démodulateur.
En raison de l'absence de lien direct entre les documents D1 et D2 et le dispositif revendiqué, il n'aurait pas été possible de comprendre la position exprimée par la Division d'examen lors de la première notification. La demande d'explication qui aurait été formulée pour que le demandeur puisse répondre sur le fond n'aurait pas été agréée et un rejet aurait été prononcé en réponse à cette demande d'explication, mettant le déposant dans l'obligation de faire un recours pour exprimer ses points de vue. Le demandeur devrait pouvoir prendre position sur une argumentation qu'il comprend.
IV. Le requérant sollicite l'annulation de la décision de rejet, la délivrance d'un brevet sur la base du texte déposé et le remboursement de la taxe de recours.
1. Le recours est recevable.
2. Nouveauté
Le document D1 décrit un oscillateur à phase bloquée de type PLL (voir figure 2), prévu pour un circuit fonctionnant dans les domaines UHF/VHF et équipé, entre autres, d'un circuit de retard ("Verzögerungsleitung" VL) et d'un circuit générateur de phase variable, ci-après désigné par déphaseur. Le document D2 décrit un oscillateur doubleur de fréquence, de type push-push, prévu pour le domaine des hyperfréquences. Aucun de ces documents ne mentionne ou prévoit l'utilisation de l'oscillateur qu'il décrit dans un dispositif pour la modulation ou la démodulation.
Par conséquent, l'objet de la revendication 1 est nouveau par rapport aux dispositifs décrits par D1 ou D2.
3. Activité inventive
3.1. Le problème technique à résoudre selon la présente demande est de réaliser un modulateur-démodulateur prévu pour le domaine des hyperfréquences et qui présente un meilleur rendement que celui du modulateur-démodulateur de l'art antérieur le plus proche selon les figures 1 et 2. de la demande ainsi qu'une compacité accrue facilitant son intégration. La Chambre observe toutefois que la validité du problème énoncé ci-dessus, en tant que problème technique objectif, présuppose que l'art antérieur le plus proche selon les figures 1 et 2 est divulgué par un document publié avant la date de priorité de la présente demande (voir à ce sujet les parties 4 et 5 de la présente décision).
Le modulateur-démodulateur revendiqué est obtenu, selon la description de la demande, par modification d'un modulateur-démodulateur connu illustré par les figures 1 et 2 de la demande et correspondant au modulateur-démodulateur défini par le préambule de la revendicatin 1.
Cette modification permet d'aboutir au modulateur-démodulateur selon les figures 3 et 4 de la demande et consiste en la suppression d'un des trois déphaseurs du modulateur-démodulateur connu et par le fait que les deux déphaseurs restants 9 et 10 sont commandés par un oscillateur 8 du type VCO qui délivre deux signaux VC1(t) et VC2(t) en opposition de phase au lieu d'un signal unique comme c'est le cas pour le VCO 4 du dispositif connu.
3.2. Le dispositif selon D1 (voir figure 2) est un circuit à phase bloquée (PLL) mettant en oeuvre, entre autres composantes :
- un oscillateur du type VCO délivrant un signal de fréquence fo,
- un circuit retardateur VL ("Verzögerungsleitung") introduisant un retard de durée tv (voir figure 3),
- un déphaseur ("variabler Phasenschieber") produisant une phase ajustable v entre son signal de sortie et son signal d'entrée.
3.2.1. Le déphaseur équipant ce dispositif connu peut être celui ("Variabler Phasenschieber mit Kapazitätsdioden") illustré par la figure 7 de D1. Sa fonction peut être décrite comme suit :
a) Il est strictement conçu pour introduire, entre la tension d'entrée Ue et la tension de sortie Ua, une phase variable v agissant sur la fréquence fo de façon telle que celle-ci lui soit proportionnelle et inversement proportionnelle à la durée tv (voir équation 3, page 132).
b) Il ne possède qu'une borne d'entrée prévue pour la tension Ue et une borne de sortie prévue pour la tension Ua alors que le modulateur-démodulateur selon la revendication 1 présente (voir figure 3) :
- en mode "modulateur", deux entrées P(t) et Q(t) en quadrature de phase et une sortie v(t),
- en mode "démodulateur", deux sorties P(t) et Q(t) en quadrature de phase et une entrée v(t).
Si l'on objectait, par un raisonnement a posteriori, que le signal d'entrée Ue du déphaseur selon la figure 7 de D1 pourrait être un signal modulé, il n'en reste pas moins vrai que ce déphaseur ne délivrerait qu'un signal de sortie Ua au lieu de deux signaux en quadrature et ne remplirait pas la fonction de démodulation conforme au préambule de la revendication 1 de la présente demande.
c) La phase variable v produite par ce déphaseur est obtenue grâce à quatre diodes du type "varactor" dont les capacités sont commandées par des tensions de polarisations continues inverses, U1 et U2 (voir figure 8). Selon D1, ces diodes varactors remplacent le condensateur tournant utilisé dans le déphaseur selon la figure 6 de D1 (voir D1, page 135, colonne de gauche, lignes 3 à 6). La Chambre ne voit pas pourquoi, contrairement à l'opinion de la Division d'examen, les diodes varactors D1, D2, D3 et D4 destinées à remplacer le condensateur tournant et prévues pour produire un déphasage variable rempliraient la fonction de diodes mélangeuses. L'argumentation de la Division d'examen selon laquelle les diodes D1, D2, D3 et D4 sont utilisées comme dispositif mélangeur est dénuée de tout fondement car elle ne peut absolument pas se déduire du principe de fonctionnement du déphaseur telle qu'il est décrit dans le document D1 étant donné qu'il n'y a pas de signaux à mélanger dans l'oscillateur PLL qu'il décrit.
En l'absence de toute suggestion dans le document D1 et compte tenu du fonctionnement de ce déphaseur décrit clairement dans ce document, il n'est pas justifié d'affirmer, comme le prétend la Division d'examen, que les "bornes désignées U1 et U2 permettent d'entrer ou de sortir de ces bornes des signaux de modulation". U1 et U2 sont des tensions continues de polarité négative dont on peut faire varier la valeur selon une loi sinusoïdale en fonction de l'angle de rotation d'un potentiomètre sinus-cosinus (voir D1, figures 8 et 9 et page 135, colonne de gauche, lignes 20 à 38). Ces tensions ajustables ont pour but de faire varier la largeur de la zone d'appauvrissement (en porteurs de charges) des jonctions p-n de chaque diode afin de modifier les valeurs de leurs capacités qui elles-mêmes déterminent la valeur du déphasage v. Il est connu de l'homme du métier que le mélange de signaux dans des diodes met à profit la non-linéarité de leur caractéristique courant-tension et non les variations des capacités de leurs jonctions. In n'y a donc aucune identité de fonction entre les diodes varactors utilisées dans le déphaseur selon la figure 7 de D1 et des diodes de mélange.
d) Les tensions Ue et Ua, respectivement appliquée et prélevée sur le transformateur Tr du déphaseur selon la figure 7 de D1 ("weshalb der Ausgang der Schaltung mit der Anzapfung von Tr verbunden ist", voir D1, page 135, colonne de gauche, lignes 10 et 11), sont obligatoirement des tensions respectivement d'entrée et de sortie. Par conséquent, un seul signal alternatif, Ue, est appliqué sur le déphaseur selon le document D1. Il en résulte que l'argumentation de la Division d'examen (voir page 4 de la décision de rejet, dernier paragraphe) selon laquelle, si l'on applique des signaux de fréquence "approprié" (l'utilisation fautive du masculin singulier ne permet pas au lecteur de déduire si ce sont les signaux ou leur fréquence qui doivent être appropriés) aux bornes Ue et Ua, des produits de mélange sont obtenus aux bornes U1 et U2, est inexacte et ne repose que sur des considérations a posteriori.
3.2.2. La Division d'examen a avancé un certain nombre d'arguments techniques sous la forme d'allégations qu'elle n'a pas jugé bon d'étayer par des exemples concrets fournis par l'état de la technique. En particulier :
- Compte tenu du problème à résoudre selon la demande et son domaine d'application en hyperfréquences, affirmer qu'il n'y a pas de différence fondamentale dans le fonctionnement d'un circuit selon que l'on travaille en ondes courtes ou en hyperfréquences n'est pas correct. Les hyperfréquences sont supérieures au GHz. Les circuits oscillants correspondants sont des cavités résonnantes dont l'excitation se fait par des tubes à modulation de vitesse ou des magnétrons et les antennes sont des guides d'ondes. De telles composantes ne sont pas utilisées pour les circuits opérant dans les domaines de fréquences VHF/UHF et mettant en oeuvre des oscillateurs PLL du type de celui décrit dans D1.
- La Chambre ne peut pas partager l'opinion de la Division d'examen selon lequel le dispositif selon la figure 7 de D1 ne serait en fait qu'un mélangeur "paramétrique". Il est vrai qu'une diode varactor peut être utilisée comme condensateur variable faisant partie d'un circuit oscillant dans un amplificateur paramétrique, mais le qualificatif "paramétrique" implique la présence d'un générateur de tension de pompage délivrant généralement une onde carrée de fréquence appropriée pour faire varier périodiquement la capacité de la diode. Rien dans D1 ne suggère la mise en oeuvre de tels moyens pour le déphaseur de la figure 7.
- Selon cette figure, U1 et U2, ainsi qu'il a été déjà observé ci-dessus, sont les tensions continues réglables de polarisation des varactors et il n'y a aucune raison de supposer que ces tensions pourraient être des signaux de modulation qui seraient découplés de la fréquence de la porteuse par les condensateurs CA. Le texte de D1 est clair sur le fait que ces condensateurs servent au découplage HF des points de connexions entre les varactors D1 et D2 et entre les varactors D3 et D4, donc au découplage HF des tensions U1 et U2 (voir page 135, colonne de gauche, lignes 6 à 10).
3.2.3. En conclusion, contrairement aux assertions de la Division d'examen, le circuit combinant les dispositifs selon les figures 2 et 7 du document D1 consiste en un déphaseur à une entrée et une sortie, piloté par un oscillateur du type VCO commandé en mode PLL. Il ne fonctionne pas en modulateur-démodulateur et ne peut donc pas représenter un état antérieur de la technique d'un modem à une entrée et deux sorties (ou l'inverse). Rien dans l'enseignement du document D1 ne permet de supposer que ce circuit pourrait être modifié de façon à travailler comme un modulateur-démodulateur. L'argumentation de la Division d'examen est fondée sur une analyse supposant la connaissance de la solution proposée par la revendication 1. D1 ne présente aucune pertinence vis-à-vis du dispositif défini par la revendication 1.
3.3. Le document D2 décrit un oscillateur push-push doubleur de fréquence, fonctionnant en hyperfréquences, et comportant notamment la mise en oeuvre de deux oscillateurs équilibrés suivis chacun d'un étage constitué par un amplificateur tampon. La Division d'examen a prétendu que si l'on prenait "le signal" de sortie aux deux drains des transistors, il serait clair que "ces signaux" sont de phases opposées, symétriques par rapport au potentiel de masse et en a déduit que l'homme du métier penserait immédiatement à combiner cet oscillateur au circuit selon la figure 7 de D1 pour obtenir le modulateur-démodulateur selon la revendication 1.
3.3.1. L'interprétation de la Division d'examen en ce qui concerne l'oscillateur selon D2 ne peut être agréée par la chambre. Comme le montre la figure 1 de D2, les drains des deux étages de sortie sont connectés à une résistance de charge de 50 ohms. Pour obtenir un signal de fréquence double, ces deux étages sont commandés symétriquement et en opposition de phase ce qui permet d'effectuer sur la charge une addition des signaux de fréquence (et de phase) double et une soustraction (donc l'annulation) des signaux à la fréquence fondamentale. Il est donc évident que l'oscillateur selon D2 délivre simplement un signal unique de fréquence double et ne saurait, par conséquent, être utilisé tel quel pour la fourniture de deux signaux en opposition de phase à deux déphaseurs du type de ceux définis dans la revendication 1. Faute de toute suggestion dans D1 et D2, l'homme du métier n'aurait aucune raison de transformer cet oscillateur en oscillateur du type VCO et de débrancher les deux sorties de drains de la résistance de charge pour alimenter deux déphaseurs dans un circuit modulateur-démodulateur en général, et, à plus forte raison, dans un circuit modulateur-démodulateur du type revendiqué.
3.3.2. En conclusion, le document D2 ne suggère aucune modification qui permettrait à l'oscillateur qu'il décrit d'être commandé en tension pour fonctionner en VCO et fournir deux signaux de sortie en opposition de phase. Il ne mentionne pas la possibilité de mettre en oeuvre cet oscillateur dans un dispositif pour la modulation ou la démodulation. Puisque le document D1 lui-même ne fait aucune allusion à un tel dispositif, l'enseignement combiné de D1 et de D2 ne peut suggérer les caractéristiques du dispositif défini par la revendication 1.
4. Etant donné qu'aucun des documents D1 et D2 ne se rapporte à un dispositif pour la modulation ou la démodulation et que les caractéristiques de la revendication 1 ne vont pas de soi pour l'homme du métier, l'objet de cette revendication implique une activité inventive par rapport à ces documents.
Toutefois, selon la décision T 248/85 (JO OEB 1986, 261 ; voir paragraphe 2 du sommaire et paragraphes 9.1 et 9.2 des motifs), une appréciation portée sur l'activité inventive par rapport à l'état de la technique le plus proche n'est objective que si cet état de la technique a été identifié sans équivoque et s'il a été vérifié. La Chambre constate que la brevetabilité de l'objet de la revendication 1 n'a pas été examinée par la Division d'examen par rapport à l'enseignement d'un document décrivant l'art antérieur connu selon le préambule de la revendication 1. D'après la description de la présente demande, les figures 1 et 2 de cette demande représentent un démodulateur selon cet art antérieur. Le préambule de la revendication 1 de la présente demande décrit un dispositif modulateur-démodulateur me ttant en oeuvre le démodulateur conforme à ces figures 1 et 2. Toutefois, aucun document parmi ceux cités dans le rapport de recherche ne décrit le dispositif défini par le préambule de la revendication 1 et un tel document n'est pas cité dans la demande. Il ressort des paragraphes 4.2 et 4.3 de la décision T 654/92 (non publiée) que l'état antérieur de la technique doit être interprété comme état de la technique au sens de l'Art. 54(2) CBE et que la pratique consistant à prendre comme point de départ une antériorité connue du demandeur mais non pas du public à la date de priorité d'une demande ne satisfait pas aux exigences de la CBE. S'il s'avérait que l'objet de la revendication 1 a été délimité par rapport à un état de la technique qui n'a pas été publié, cette délimitation ne serait pas conforme aux dispositions de l'Art. 54(2) CBE et de la Règle 27(1) b) CBE et l'énoncé du problème technique à résoudre selon le présente demande devrait être revu (voir point 3.1 de la présente décision).
5. Dans la décision T 13/84 (JO 1986, 253 ; voir paragraphe 7) il est établi que la formulation en deux parties d'une revendication se justifie s'il existe un état de la technique nettement défini dont l'objet revendiqué se distingue par d'autres caractéristiques techniques. On en conclut que, s'il n'existe pas de document ou d'autres preuves de l'art antérieur décrivant le dispositif selon le préambule de la revendication 1, la formulation de cette revendication en deux parties n'est pas justifiée car elle donne une image fausse de l'état de la technique (cf. Règle 29 (1) a) CBE). De plus, il ressort de la décision T 688/91 (non publiée ; voir paragraphe 4.16), qu'une délimitation inexacte entre le préambule et la partie caractérisante d'une revendication enfreint les dispositions de la règle 29(1) a) CBE et de l'Art. 84 CBE. Dans le cas présent, il importait donc de savoir si la formulation de la revendication 1 en deux parties était conforme à l'art antérieur. Par conséquent, la Division d'examen aurait dû s'enquérir auprès du demandeur de l'existence d'un document publié ou d'autres moyens de preuve décrivant l'état de la technique reflétant le préambule de la revendication 1 et aurait dû examiner la brevetabilité de l'objet de cette revendication au vu de ce document ou de ces moyens de preuve.
6. Demande de remboursement de la taxe de recours
Dans les motifs de recours, le requérant s'est exprimé en ces termes : "Nous demandons le remboursement de la taxe de recours, pour les motifs suivants : le demandeur doit pouvoir prendre position sur une argumentation de non brevetabilité qu'il comprend. L'absence de lien direct entre les documents D1 et D2 et la présente invention, puisque ni l'un ni l'autre ne parlent de modulateur-démodulateur hyperfréquence, a rendu impossible une compréhension de fond de la position exprimée par la Division d'examen lors de la première notification officielle. Une explication a été demandée pour que le demandeur puisse répondre sur le fond. Cette explication n'a pas été donnée et un rejet a été prononcé en réponse à cette demande d'explication, mettant le déposant dans l'obligation de faire un recours pour exprimer sa position. Cette procédure ne nous paraît pas respecter les usages prescrits par l'Office Européen des Brevets."
6.1. Pour les raisons suivantes, la Chambre partage l'avis exprimé par le requérant :
a) Selon la jurisprudence des chambres de recours, le principe de la bonne foi et de la protection de la confiance légitime, qui gouverne les procédures organisées entre l'OEB et le demandeur, veut que les notifications soient clairement motivées et non ambiguës pour le demandeur, c'est-à-dire qu'elles soient rédigées de telle manière que tout malentendu soit exclu de la part d'un destinataire sensé (voir décisions J 10/84, JO OEB 1985, 71 et J 3/87, JO OEB 1989, 3).
Il va de soi que le texte de toute notification doit être rédigé de façon à respecter les règles élémentaires de grammaire propres à la langue officielle utilisée. Dans le cas des divisions d'examen, le non-respect de ces conditions dans une notification contenant des objections de forme ou des objections techniques contre la brevetabilité de l'objet revendiqué est susceptible d'entraîner des ambiguïtés ou des difficultés de compréhension des arguments qui y sont développés et de placer le demandeur dans une position de doute quant aux mesures à envisager pour remédier à ces objections. Or, l'unique notification de la Division d'examen, datée du 12 mars 1992, est parsemée d'innombrables fautes d'orthographe et de syntaxe qui rendent peu claire, voire obscure, la compréhension technique de certains passages (voir en particulier paragraphes 2 à 4, 6).
Pour justifier son point de vue, et en l'absence de tout raisonnement substantiel, la Division d'examen a prétendu que le déphaseur selon la figure 7 de D1 fonctionnait comme un mélangeur ou un amplificateur paramétriques alors que rien dans ce document ne décrit ou ne suggère un tel fonctionnement. La Chambre ne méconnaît pas et ne saurait mettre en doute le droit légitime de la Division d'examen en matière d'appréciation de l'activité inventive. Toutefois, dans le cas présent, il importait qu'elle prît objectivement en considération toutes les connaissances techniques en rapport avec l'invention et jugeât à leur juste valeur tous les arguments, objections et questions soumis par le demandeur. Il importait, par conséquent, que la Division d'examen répondît à la demande d'explication formulée par le demandeur dans sa lettre du 10 juillet 1992, avant de décider du rejet de la demande.
b) La Division d'examen a également notifié au demandeur de citer dans la demande de brevet les documents D1 et D2 et d'indiquer l'état correspondant de la technique. Dans sa lettre de réponse datée du 10. juillet 1992 le demandeur a exprimé ses doutes en ces termes : "Si nous citons D1, nous ne voyons pas comment exposer qu'un déphaseur, à une entrée et une sortie, piloté par un VCO à une sortie (ce qui donne un PLL) représente l'art antérieur de la technique d'un modem à une entrée et deux sorties (ou l'inverse) piloté par un VCO à deux sorties en opposition. Quant au document D2, nous ne voyons pas pourquoi le citer puisque nous avons déjà cité notre propre brevet n° 0 250 301 qui est antérieur à D2". La Chambre est d'avis que la demande de citation de D1 n'était pas justifiée et celle de D2 était inutile.
c) Le demandeur était donc en droit de manifester des réserves et sa surprise d'avoir à pallier certaines irrégularités auxquelles il estimait ne pas pouvoir remédier facilement, en particulier du fait que D1 ne pouvait pas être considéré comme art antérieur au sens de l'Art. 54 (2) CBE. Bien que le demandeur ait insisté sur le manque de pertinence des documents D1 et D2 dans sa réponse à l'unique notification, la Division d'examen n'a pas fourni de raisonnement substantiel montrant pourquoi l'homme du métier avait des raisons objectives de combiner ces documents. Il était donc normal que le demandeur demandât des explications et attendît de la Division d'examen une nouvelle notification ou une communication téléphonique sans avoir à redouter, pour toute réponse, un rejet de la demande. Cependant, la Division d'examen n'a tenu aucun compte de la demande d'explication du demandeur et a légitimé le rejet de la demande par le fait que le demandeur n'avait pas déposé de nouvelles revendications après avoir reçu sa notification (voir paragraphe II.1 de la décision de rejet).
d) Le demandeur, par lettre datée du 3 mars 1994, a attiré l'attention de la Division d'examen sur le fait qu'il désirait être "protégé par un brevet avant que le produit ne devienne obsolète" et que la dernière lettre échangée avec l'examinateur de la demande remontait au 10 juillet 1992, soit à plus de dix-huit mois, et était restée sans réponse. Il s'est donc écoulé plus de deux ans entre la date du 12. mars 1992 de l'unique notification de la Division d'examen et la date du 10 mai 1994 du rejet de la demande, sans que la Division d'examen se soit manifestée auprès du demandeur et que la moindre attention ait été accordée à sa demande d'explication formulée vingt-deux mois avant ce rejet. On ne peut donc pas admettre que la Division d'examen, soucieuse de réaliser une économie de procédure, ait été animée du désir d'y mettre fin dans des délais raisonnablement courts après que le demandeur eut manifesté le désir de ne pas modifier les revendications et la description avant d'avoir obtenu, en réponse à ses arguments développés dans la lettre du 10 juillet 1992, des explications claires justifiant de telles modifications.
Par conséquent, pour toutes ces raisons, la Division d'examen n'a pas agit en toute bonne foi en omettant de répondre aux arguments prima facie convaincants formulés par le demandeur. Une seconde notification au demandeur était nécessaire.
6.2. En accord avec la jurisprudence selon la décision T 89/93 (non publiée), la Chambre estime qu'une Division d'examen ne saurait rejeter une demande après une première notification si le demandeur s'est réellement efforcé de répondre aux objections qui y sont formulées et s'il paraît vraisemblable que la poursuite de la procédure pourrait conduire à un résultat positif. Or, bien que le demandeur n'ait pas déposé de nouvelles revendications après l'unique notification de la Division d'examen, il s'en était expliqué en s'efforçant de réfuter, sans arguments dilatoires, les critiques qui y étaient exprimées, avait posé des questions sensées et constructives et avait annoncé son désir de coopération (voir page 3 de la lettre du 10 juillet 1992, avant-dernier para graphe). Enfin, cette notification n'était pas entièrement négative puisque la Division d'examen suggérait qu'une nouvelle revendication rédigée sur la base de la revendication 4 serait susceptible d'être acceptée (voir paragraphe 5 de cette décision).
6.3. En rejetant la demande après sa première et unique notification, sans avoir accordé au demandeur des éclaircissements à certains arguments obscurs qui y étaient développés, en négligeant d'étayer ses allégations techniques malgré les points de désaccord justifiés soulevés par le demandeur, la Division d'examen n'a pas laissé au demandeur d'autre choix que celui de déposer un recours pour qu'il puisse exprimer sa position. Par conséquent, la Division d'examen n'a pas respecté le principe de la bonne foi et de la protection de la confiance légitime, évoqué plus haut, et qui doit régir les relations entre l'OEB et ses usagers. De plus, elle a enfreint l'Art. 113(1) CBE car elle n'a pas pris suffisamment en considération, avant le rejet de la demande de brevet, les questions et arguments formulés par le demandeur (voir décision J 7/82, JO OEB 1982, 391).
7. La règle 67 CBE prévoit que la taxe de recours est remboursée lorsqu'il est fait droit au recours et si le remboursement paraît équitable en raison d'un vice substantiel de procédure. Dans le cas présent, il est indéniable que le rejet de la demande sur la base des documents D1 et D2 n'était pas justifié et la décision de rejet doit être annulée. Il apparaît, de plus, pour les raisons exposées aux paragraphes 6.1 à 6.3 ci-dessus, que la Division d'examen n'a pas agit équitablement vis-à-vis du demandeur et a commis un vice substantiel de procédure en enfreignant l'Art. 113(1) CBE et le principe de bonne foi.
Par conséquent, compte tenu des circonstances rappelées ci-dessus, la Chambre estime que le remboursement de la taxe de recours est équitable et doit être ordonné.
8. En vertu du pouvoir que lui confère l'Art. 111(1) CBE, la Chambre estime approprié de renvoyer la présente affaire à la première instance pour suite à donner sous les conditions suivantes :
a) L'objet de la revendication 1 implique une activité inventive par rapport aux dispositifs décrits dans les documents D1 et D2.
b) Il devra être vérifié si la forme en deux parties (cf. règle 29 (1) a) et b) CBE) de la revendication 1 est justifiée par rapport à l'état de la technique objectif tel qu'il est défini par l'Art. 54(2) CBE.
c) Les documents D1 et D2 n'ont pas à être cités dans la description.
DISPOSITIF
Pour ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré pour suite à donner, compte tenu des observations faites au paragraphe 8 de la présente décision.
3. Le remboursement de la taxe de recours est ordonné.