T 0197/88 (Poursuite de la procédure d'opposition) 02-08-1988
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1. Si une opposition est retirée alors que la notification prévue à la règle 58(4) CBE a déjà été envoyée, la division d'opposition doit en tout état de cause, dans l'intérêt du public, poursuivre d'office la procédure d'opposition (cf. décision T 156/84, "Adsorption sous pression alternée/AIR PRODUCTS", point 3.5 des motifs. JO OEB 1988,372).
2. S'il n'a pas été donné à l'une des parties la possibilité de présenter ses observations et que, de ce fait, les conditions énoncées à l'article 113(1) CBE n'ont pas été respectées, la taxe de recours doit être remboursée.
Procédure d'opposition - poursuite de la procédure dans l'intérêt du public après le retrait de l'opposition
Remboursement de la taxe de recours (oui)
Violation du droit des parties à être entendues
I. Le brevet européen n° 3 890 a été délivré le 26 janvier 1983. Une opposition contre ce brevet a été formée le 19 août 1983. L'opposante sollicitait la révocation du brevet au motif que son objet ne satisfaisait pas aux conditions requises pour la brevetabilité, telles qu'exposées aux articles 52 à 57 CBE.
II. A l'issue de la procédure orale tenue le 26 juin 1985, le président a annoncé aux parties que la division d'opposition avait l'intention de maintenir le brevet sous une forme modifiée, en se fondant sur les revendications déposées à titre subsidiaire le 14 juin 1985, puis modifiées durant la procédure orale. Il était demandé à la titulaire du brevet de présenter une description modifiée, tenant compte des nouvelles revendications. La titulaire du brevet s'est conformée à cette décision et a produit des pages modifiées de la description.
III. Le 10 janvier 1986, a été envoyée la notification visée à la règle 58(4) CBE. L'opposante a répondu en signalant à la division d'opposition que les nouvelles revendication ne satisfaisaitent pas aux conditions énoncées à l'article 100 b) CBE, mais la titulaire du brevet a déclaré pour sa part qu'elle acceptait le brevet tel que modifié. En raison des objections soulevées par l'opposante, la division d'opposition a, dans une notification émise conformément à l'article 101(2) et à la règle 58(1), (2) et (3) CBE, signalé qu'elle reprenait la procédure d'opposition. La titulaire du brevet a été invitée à présenter ses observations en réponse aux objections de l'opposante, ce qu'elle a fait dans une lettre du 9 décembre 1986.
IV. Par lettre en date du 5 novembre 1986, l'opposante a déclaré qu'elle retirait son opposition. Le 26 janvier 1988, compte tenu du retrait de l'opposition, et l'OEB n'ayant aucune raison, en l'état du dossier, de poursuivre d'office la procédure, la division d'opposition a décidé de clore la procédure d'opposition. Le 15 mars 1988, la titulaire du brevet s'est pourvue contre cette décision et a produit simultanément un mémoire dans lequel étaient exposés les motifs de son recours ; la taxe de recours a été acquittée à la même date. La titulaire du brevet a souligné qu'elle accordait une grande importance à ce que son brevet soit maintenu sous sa forme modifiée, car elle voulait être sûre que ses revendications soient valables et éviter toute ambiguïté et tout risque d'interférence avec sa demande de brevet européen EP-A-1 473.
1. Le recours est recevable
2. Il est stipulé à la deuxième phrase de la règle 60(2), CBE, que "la procédure d'opposition peut être poursuivie" d'office par l'OEB en cas de retrait de l'opposition. Telle qu'elle est formulée dans les trois langues officielles, cette disposition signifie que l'Office européen des brevets dispose d'un certain pouvoir d'appréciation lorsqu'il décide de poursuivre la procédure d'opposition après le retrait de l'opposition. L'OEB doit user de façon équitable de ce pouvoir, et tenir compte à la fois des intérêts du public, de ceux du titulaire du brevet, et des siens propres.
3.1. Dans la décision faisant l'objet du recours, la division d'opposition a estimé que, en l'état du dossier, il n'y avait aucune raison pour que l'OEB poursuive d'office la procédure. Elle a omis d'exposer dans le détail les motifs l'ayant conduite à une telle conclusion. Contrairement à la division d'opposition, la Chambre considère que, dans la présente espèce, un nombre suffisant de raisons plaident en faveur de la poursuite de la procédure.
3.2. En cas de retrait de l'opposition, la procédure d'opposition doit être poursuivie si, en l'état du dossier, il est probable qu'elle entraînera , sans aide supplémentaire de l'opposant et sans que la division d'opposition soit obligée de procéder à de coûteuses investigations, une limitation ou une révocation du brevet européen (cf. Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets, partie D, chapitre VII, 6.2 et 6.3). Dans ces conditions, l'Office doit poursuivre la procédure d'opposition, puisqu'il est tenu d'une manière générale vis-à-vis du public de ne pas maintenir des brevets qu'il juge juridiquement non valables, ou de les maintenir uniquement à condition d'y apporter les limitations nécessaires (cf. décision T 156/84, Adsorption sous pression alternée/AIR PRODUCTS, point 3.5 des motifs, JO OEB 1988, 372).
3.3. Etant donné cette obligation générale, l'Office européen des brevets doit en tout état de cause pousuivre la procédure d'opposition lorsqu'une notification établie conformément à la règle 58(4) CBE a déjà été envoyée aux parties avant la date à laquelle l'opposition a été retirée. Le fait que cette notification ait été envoyée montre clairement que la division d'opposition était convaincue de l'impossibilité de maintenir le brevet européen tel qu'il avait été délivré. Dans ces conditions, il est de l'intérêt du public que la procédure d'opposition se poursuive après le retrait de l'opposition, même si la titulaire du brevet n'était pas d'accord avec les modifications proposées par l'Office européen des brevets et à plus forte raison du moment que, comme c'est le cas en l'occurrence, elle a explicitement marqué son accord.
3.4. Aussi convient-il d'annuler la décision de mettre fin à la procédure d'opposition, objet du présent recours, et de renvoyer l'affaire devant la première instance.
4. La règle 67 CBE dispose que le remboursement de la taxe de recours est ordonné "lorsqu'il est fait droit au recours par la chambre de recours, si le remboursement est équitable en raison d'un vice substantiel de procédure". Avant de prendre la décision de clore la procédure d'opposition, la division d'opposition n'a pas donné à la titulaire du brevet la possibilité de présenter ses observations et a enfreint de ce fait l'article 113(1) CBE, dans la mesure où la décision contestée a été fondée sur des motifs au sujet desquels la titulaire du brevet n'a pas pu prendre position. Prendre une partie par surprise constitue un vice substantiel de procédure au sens où l'entend la règle 67 CBE. La Chambre juge donc équitable d'ordonner le remboursement de la taxe de recours.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la première instance pour qu'elle poursuive la procédure d'opposition.
3. Le remboursement de la taxe de recours est ordonné.