G 0009/92 (Partie non requérante) 14-07-1994
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Reformatio in peius
Maintien du brevet dans sa forme modifiée conformément à la requête subsidiaire
Décision n'ayant pas fait droit aux prétentions des deux parties
Recours d'une partie
Requêtes de la partie non requérante dépassant le cadre de l'acte de recours
Opinion de la minorité
Rappel de la procédure
I. Dans les affaires T 60/91 et T 96/92 (portées devant la chambre de recours 3.2.1 - décisions publiées au JO OEB 1993, 551), ainsi que dans l'affaire T 488/91 (portée devant la chambre 3.5.1 - décision non publiée au JO OEB), le recours est dirigé contre des décisions intermédiaires de la division d'opposition qui a conclu que les motifs d'opposition ne font pas obstacle au maintien, dans sa forme modifiée, du brevet attaqué. La première instance a estimé que le brevet pouvait être maintenu dans sa forme modifiée dès l'instant que toutes les conditions de forme seraient remplies. Les décisions intermédiaires prévoyaient un recours indépendant, conformément à l'article 106(3) CBE.
II. Dans l'affaire T 60/91, le titulaire du brevet n'a pas demandé à la division d'opposition de maintenir le brevet tel que délivré, mais a produit, à titre de requête principale et de requête subsidiaire, deux textes modifiés, l'un (requête principale) contenant des caractéristiques limitatives par rapport au brevet tel que délivré, l'autre (requête subsidiaire) apportant une nouvelle limitation par rapport à la requête principale. La division d'opposition a considéré que l'objet du brevet selon la requête principale n'impliquait pas d'activité inventive et a constaté dans une décision intermédiaire qu'aucun motif d'opposition ne faisait obstacle au maintien du brevet conformément à la requête subsidiaire.
Le titulaire du brevet et unique requérant a conclu au maintien du brevet selon la requête principale présentée à la division d'opposition. Dans ses conclusions en réponse, l'opposant et intimé a demandé la révocation du brevet dans son intégralité.
III. Dans l'affaire T 96/92, le titulaire du brevet a demandé, dans sa requête principale présentée à la première instance, que l'opposition soit rejetée et, à titre subsidiaire, que le brevet soit maintenu dans la forme limitée qu'il avait présentée. Dans sa décision intermédiaire, la division d'opposition a maintenu le brevet dans le texte correspondant à la requête subsidiaire.
L'opposant et unique requérant a conclu à la révocation du brevet. Le titulaire du brevet et intimé a répliqué en demandant le maintien du brevet tel que délivré ou, à titre subsidiaire, tel qu'approuvé dans la décision intermédiaire de la division d'opposition.
IV. Dans l'affaire T 488/91, l'opposant est également l'unique requérant. Le titulaire du brevet a soumis à la division d'opposition deux jeux (limités) de revendications à titre de requête principale et de requête subsidiaire. Dans sa décision intermédiaire, la division d'opposition a maintenu le brevet dans le texte comportant les revendications selon la requête subsidiaire.
L'opposant et unique requérant a demandé une modification de la décision dans le sens d'une révocation du brevet.
Le titulaire du brevet et intimé a demandé le rejet du recours ainsi que le maintien du brevet dans la forme approuvée dans la décision de la division d'opposition. Au cours de la procédure orale, il a ramené cette requête au rang de requête subsidiaire, et a demandé alors, à titre de requête principale, le maintien du brevet dans le texte déjà présenté, à titre de requête principale, à la division d'opposition mais rejeté par cette dernière.
V. La chambre de recours 3.2.1, chargée d'examiner les affaires T 60/91 et T 96/92, a estimé qu'il s'agissait dans les deux cas de statuer sur la question de savoir si une chambre de recours peut modifier la décision attaquée au détriment de l'unique requérant ou si une telle modification est interdite (interdiction de la "reformatio in peius"). Dans ces deux affaires, les intimés, sans avoir eux-mêmes formé de recours, ont présenté des requêtes qui vont au-delà de celles des requérants, et ce au détriment de ces derniers.
Jusqu'à présent, l'admissibilité de ces requêtes a été diversement appréciée dans la jurisprudence. Dans l'affaire T 369/91 (JO OEB 1993, 561), la chambre a rejeté la requête en maintien du brevet tel que délivré (rejet de l'opposition) du titulaire du brevet qui n'avait pas formé de recours contre la décision intermédiaire de la division d'opposition. En revanche, dans les décisions T 576/89 (JO OEB 1993, 543) et T 123/85 (JO OEB 1989, 336), il a été fait droit à la demande du titulaire du brevet de maintenir le brevet tel que délivré. Dans la deuxième décision, le maintien du brevet était approuvé à condition qu'il n'y ait pas détournement de procédure.
VI. Faisant référence à ces divergences jurisprudentielles, la chambre 3.2.1 a joint les affaires T 60/91 et T 96/92 en vue de soumettre à la Grande Chambre de recours la double question de droit suivante :
La chambre de recours peut-elle modifier au détriment du requérant la décision attaquée ?
Et si oui, dans quelle mesure ?
Les décisions T 60/91 et T 96/92, qui ont donné lieu à la saisine de la Grande Chambre de recours sous le numéro G 9/92, sont publiées au JO OEB 1993, 551.
VII. Se référant à ces décisions, la chambre 3.5.1, chargée d'examiner l'affaire T 488/91, a soumis à la Grande Chambre de recours la même double question de droit (G 4/93).
VIII. La Grande Chambre de recours a décidé de joindre en une procédure commune les questions soulevées par la chambre 3.2.1 (G 9/92) et par la chambre 3.5.1 (G 4/93), conformément à l'article 8 du règlement de procédure des chambres de recours (JO OEB 1983, 3, tel que publié au JO OEB 1989, 362).
IX. Après cette décision, qui a marqué le début de la procédure, le titulaire du brevet et intimé partie à la procédure T 96/92 a retiré sa requête principale visant au rejet de l'opposition et donc au maintien du brevet tel que délivré. Etant donné que dans cette affaire, la question de droit soumise à la Grande Chambre de recours ne se pose plus, il a été mis fin, pour ce qui est de la décision T 96/92, à la procédure engagée devant la Grande Chambre de recours.
X. Les autres parties à la procédure devant la Grande Chambre de recours ont eu la possibilité de présenter leurs observations. Les parties représentant le point de vue de l'unique requérant ont estimé que les intimés ne devaient pas être autorisés à présenter des requêtes indépendantes en guise de réponse. La décision rendue par la première instance ne peut être examinée que dans le cadre du recours. Dans la mesure où cette décision a fait droit aux prétentions de l'unique requérant, elle ne saurait faire l'objet de son recours. Il n'est pas prévu dans la CBE de disposition permettant à l'intimé de présenter un "recours incident" en réaction au recours formé. En l'absence de délai à respecter, un tel recours pourrait en outre retarder considérablement la procédure et attribuer à l'intimé des avantages injustifiés par rapport à la partie qui a formé son recours dans le délai prescrit. Le fait qu'une partie, aux prétentions de laquelle la décision de la première instance n'a pas fait droit, forme un recours, ne peut constituer une surprise pour la partie adverse. L'examen de la décision incriminée dans le cadre du recours est conforme aux principes d'une procédure équitable.
Les parties à la procédure devant la Grande Chambre de recours représentant le point de vue des parties non requérantes se sont déclarées en faveur d'une totale liberté de décision de la part des chambres de recours. Ainsi, lorsque le titulaire du brevet est le seul requérant, le simple fait que l'opposant n'a formé aucun recours ne doit pas empêcher les chambres de recours de constater la non brevetabilité de l'invention sur la base du texte approuvé par la division d'opposition dans sa décision intermédiaire. Toute restriction serait artificielle et obligerait les chambres qui examinent les requêtes principales et subsidiaires à exécuter un "numéro d'équilibriste" lorsqu'elles évaluent les critères de brevetabilité. Le recours constitue une situation à la fois nouvelle et inattendue pour l'intimé qui est en droit de réagir sans aucune restriction. Si l'opposant n'a pas attaqué la décision de la première instance, cela signifie simplement qu'il s'est accommodé du texte du brevet tel qu'approuvé dans la décision, pour le cas où celle-ci passerait en force de chose jugée. Mais si le titulaire du brevet conteste la décision en formant un recours, celui-ci doit accepter le risque d'une riposte et donc d'une possible révocation du brevet. A l'inverse, si l'opposant est le seul requérant, celui-ci doit s'attendre à ce que le titulaire du brevet revienne sur des requêtes antérieures et demande le maintien du brevet sous sa forme non modifiée.
Exposé des motifs
Principes de procédure
1. La question de droit posée à la Grande Chambre de recours concerne des principes généraux du droit procédural tels qu'ils sont énoncés dans de nombreux codes de procédure des Etats parties à la CBE, même si ces principes sont régis par des dispositions différentes. Dans les décisions T 60/91 et T 488/91 ayant donné lieu à la saisine de la Grande Chambre, il s'agit de savoir si et dans quelle mesure la procédure devant les chambres de recours prévue par la CBE est liée par l'acte de recours. A quelques exceptions près, les procédures qui régissent les demandes de brevet européen et les brevets européens dans la CBE sont introduites sur requête, laquelle détermine l'étendue de la procédure. Ceci correspond au principe suivant lequel le juge ne doit pas statuer au-delà d'une requête (ne ultra petita). Dans la présente affaire, la question porte sur le point de savoir dans quelle mesure la requête introduisant le recours affecte la suite de la procédure. Cette question doit être examinée systématiquement dans le cadre du droit procédural prévu par la CBE.
2. La procédure d'opposition fait suite à la délivrance du brevet (art. 99 CBE). Elle est régie par les articles 99 à 105 CBE ainsi que par les dispositions correspondantes du règlement d'exécution. Le principe de l'examen d'office des faits s'applique également à la procédure d'opposition (art. 114(1) CBE). Cependant, certaines limites ont été fixées à ce principe, afin d'éviter d'éventuels retards en raccourcissant la procédure, d'en rendre plus transparent le déroulement, et de limiter les risques pour les parties.
3. La nature des principes de procédure fondamentaux qui régissent la procédure d'opposition et la procédure de recours sur opposition a déjà fait l'objet de plusieurs décisions de la Grande Chambre de recours. Dans la décision G 9/91 (JO OEB 1993, 408) qui traite de la compétence des divisions d'opposition et des chambres de recours en matière de décision, la Grande Chambre a estimé qu'une procédure d'opposition n'est en instance que dans la mesure dans laquelle le brevet européen a été attaqué dans la déclaration visée à la règle 55c) CBE. Au-delà, il n'y a pas de compétence et donc de compétence pour examiner les faits (cf. G 9/91, points 10 et 11 des motifs). La division d'opposition et la chambre de recours ne peuvent être compétentes pour décider de la révocation ou du maintien du brevet que dans la mesure dans laquelle le brevet a été mis en cause dans l'acte d'opposition.
4. L'application du principe de l'examen d'office (art. 114(1) CBE) est également assortie de restrictions en ce qui concerne les motifs d'opposition. Toutefois, il ne s'agit pas là d'une question de compétence mais de l'application équilibrée des principes de procédure (G 10/91, JO OEB 1993, 420, point 12 des motifs). La division d'opposition n'examine que les motifs d'opposition invoqués par l'opposant dans le délai d'opposition, ces motifs devant dûment se fonder sur des faits et des justifications. Les motifs qui ne sont pas invoqués dans la déclaration figurant dans l'acte d'opposition ne sont pris en compte que dans des cas exceptionnels auxquels s'appliquent des conditions particulières (cf. G 10/91, point 16 des motifs).
5. En ce qui concerne la procédure de recours sur opposition, la Grande Chambre de recours a invoqué des motifs qui limitent davantage encore l'application du principe de l'examen d'office. La procédure de recours inter partes est avant tout destinée à offrir à la partie déboutée la possibilité de contester le bien- fondé de la décision de la division d'opposition. Un nouveau motif d'opposition ne peut être exceptionnellement pris en considération au stade de la procédure de recours qu'avec l'accord du titulaire du brevet (G 10/91, point 18 des motifs).
6. A propos de la compétence des chambres de recours, il convient d'examiner également l'effet produit par le retrait du recours. La procédure de recours prend fin lorsque l'unique recours ou, si plusieurs recours ont été formés, tous les recours ont été retirés. Dans ce cas, la chambre n'est plus compétente pour poursuivre la procédure et pour statuer (G 7/91, JO OEB 1993, 356 et G 8/91, JO OEB 1993, 346).
La requête initiale du requérant et ses effets contraignants
7. La question de droit soumise à la Grande Chambre de recours pose le problème de savoir si et dans quelle mesure une chambre de recours peut, au cours de la procédure de recours sur opposition, s'écarter de la requête initiale au détriment du requérant. Dans la décision qui a donné lieu à la saisine de la Grande Chambre, la chambre a considéré cette question avant tout du point de vue de l'interdiction d'une possible modification de la décision au détriment du requérant (reformatio in peius). Mais, par essence, la question soumise concerne les effets contraignants qui découlent de la requête initiale du requérant pour la suite de la procédure. Il peut s'agir d'un effet limitatif tant sur des requêtes du requérant ou de l'intimé que sur une action d'office. En revanche, la CBE ne contient aucune disposition selon laquelle la décision rendue au sujet d'un recours ne doit pas désavantager le requérant par rapport à la décision contestée.
8. La décision G 2/91 de la Grande Chambre de recours (JO OEB 1992, 206) a déjà soulevé la question de savoir jusqu'à quel point la partie non requérante peut dans ses requêtes s'opposer à celles du requérant ou si elle doit éventuellement se borner à défendre la décision attaquée (point 6.2 des motifs). Seule la partie qui forme un recours - recevable - acquiert la position de requérant, alors que la partie non requérante est simplement partie à la procédure de recours, conformément à l'article 107, deuxième phrase CBE (point 6.1 des motifs).
9. Le recours vise à supprimer le "grief" par une modification ou une annulation de la décision attaquée (art. 107, première phrase CBE). La chambre de recours doit examiner si le recours est recevable et s'il peut y être fait droit (art. 110(1) CBE). A la suite de l'examen au fond du recours, la chambre de recours statue "sur le recours" (art. 111(1), première phrase CBE). Elle peut statuer elle-même sur l'affaire ou la renvoyer à la première instance pour suite à donner (art. 111(1), deuxième phrase CBE). Mais la procédure de recours a toujours pour objet le recours lui-même. Celui-ci ne doit pas être considéré simplement comme étant la phase initiale de cette procédure.
10. En vertu de la CBE, le recours doit être formé et donc l'acte de recours présenté dans un certain délai, ce qui permet de raccourcir la procédure. Il serait contraire à cette disposition d'accorder sans restriction à la partie non requérante le droit d'orienter par ses propres requêtes la procédure dans une autre direction sans lui fixer un délai. Quiconque ne fait pas appel d'une décision de la première instance dans le délai imparti ne peut revendiquer le droit - non limité dans le temps - de présenter des requêtes dont la portée correspond à un acte de recours, et donc se mettre dans la position de requérant, en réaction à un recours de la partie adverse. Les dispositions de la règle 65(1) CBE relatives à l'irrecevabilité du recours en cas d'inobservation du délai imparti montrent clairement toute l'importance accordée à un tel délai. La seule interprétation qui puisse être donnée de cette règle est que les requêtes présentées hors délai et dépassant le cadre de la requête initiale (règle 64 b) CBE) ne sont pas recevables. La CBE ne prévoit pas la possibilité pour l'intimé de former un recours incident.
11. L'argument selon lequel le recours constitue une "situation à la fois nouvelle et inattendue" pour l'intimé, ne saurait être retenu. Les mêmes possibilités de recours sont offertes aux deux parties, sous réserve du respect des conditions générales de recevabilité. Lorsqu'une partie n'a pas eu totalement gain de cause, l'autre partie doit s'attendre à ce qu'elle forme un recours.
En sa qualité d'intimée, la partie non requérante a la possibilité, au cours de la procédure de recours, d'invoquer tout ce qu'elle considère utile et nécessaire pour défendre le résultat obtenu devant la première instance.
12. De même, l'idée selon laquelle le requérant devrait - indépendamment d'un recours de la partie adverse - courir le risque, par son recours, de compromettre le résultat acquis en première instance, est étrangère à la CBE. Dans le même esprit, le droit procédural suivant la CBE ne prévoit pas non plus que l'unique requérant puisse être amené, par des requêtes en réponse, à retirer son recours.
13. Les conclusions pouvant être tirées de l'affaire dans laquelle le titulaire du brevet est le seul à avoir formé un recours, d'une part, et de celle où l'opposant est l'unique requérant, d'autre part, sont exposées ci-après.
Le titulaire du brevet est l'unique requérant (T 60/91)
14. Dans la première affaire, le titulaire du brevet est le seul à avoir formé un recours ; celui-ci est dirigé contre une décision intermédiaire de la division d'opposition, qui a déclaré que le brevet pouvait être maintenu dans sa forme modifiée. Dans le recours formé par le titulaire du brevet, ce texte modifié n'est pas couvert par l'acte de recours, c'est-à-dire la déclaration indiquant la mesure dans laquelle la décision incriminée est attaquée (art. 108, première phrase, et règle 64 b) CBE). En formant un recours, le requérant vise en effet à ce que ce texte soit remplacé par un autre texte proposé par lui ou, s'il n'est pas fait droit à cette requête, donc si le recours est rejeté, que le brevet soit maintenu dans la forme approuvée par la division d'opposition.
Le cadre défini par l'acte de recours est dépassé lorsque l'opposant non requérant forme une requête en révocation du brevet. L'opposant ne peut donc plus former valablement une telle requête après l'expiration du délai de recours.
L'opposant est l'unique requérant (T 488/91)
15. Dans la seconde affaire, l'opposant est l'unique requérant ; le recours est dirigé contre une décision intermédiaire de la division d'opposition, qui a déclaré que le brevet pouvait être maintenu dans sa forme modifiée. L'opposant a formé un recours dans le but de modifier la décision attaquée, de telle sorte que le brevet soit révoqué dans son intégralité ou qu'il soit constaté qu'aucun motif d'opposition ne fait obstacle au maintien du brevet dans une autre forme qui, selon lui, est normalement plus restreinte par rapport à celle retenue dans la décision intermédiaire.
16. Le titulaire du brevet, qui n'a formé aucun recours et qui est donc seulement partie à la procédure, conformément à l'article 107, deuxième phrase CBE, n'a pas le droit de former un "recours incident" non soumis à un délai. Ses requêtes sont donc limitées par rapport aux droits dont il bénéficierait en tant que requérant. En ne formant pas de recours, le titulaire du brevet a laissé entendre qu'il n'avait pas l'intention de contester le brevet tel que maintenu en vertu de la décision de la division d'opposition. En principe, il ne peut donc que défendre ce texte. La chambre de recours peut rejeter toutes les modifications qu'il propose au cours de la procédure de recours si celles-ci ne sont ni utiles ni nécessaires, ce qui est le cas lorsque les modifications ne sont pas occasionnées par le recours (art. 101(2) CBE, règles 58(2) et 66(1) CBE; T 406/86, JO OEB 1989, 302; T 295/87, JO OEB 1990, 470).
17. Opinion de la minorité
Une minorité des membres de la Grande Chambre de recours considère que le principe de l'examen d'office a la priorité et qu'une reformatio in peius est donc admissible. Cette opinion minoritaire se fonde sur le texte des dispositions concernant l'examen d'office, texte qui est resté inchangé, pour l'essentiel, depuis le premier projet relatif à un droit européen des brevets (cf. propositions du président du groupe de travail CEE "Brevets" du 29.05.1961 au 09.04.1962, article 96 du projet, doc. IV/6514/61 du 28.07.1961). Ce principe a été confirmé dans les observations relatives à l'article 96 du projet où il est dit que : "Par conséquent, si un titulaire de brevet fait appel du fait que son brevet européen provisoire a été annulé en partie lors de l'examen, la chambre de recours peut, sur la base des pièces déjà mentionnées mais aussi de celles qui n'ont pas encore été prises en considération, annuler entièrement le brevet européen provisoire". Même si le premier avant-projet concerne encore une procédure d'opposition précédant la délivrance du brevet, il ressort de comptes rendus de sessions ultérieures que le passage à l'opposition postérieure à la délivrance ne devrait rien modifier à l'application du principe de l'examen d'office, celui-ci ayant été décidé pour d'autres raisons (BR 87/71 du 28.02.1971, point 9, p.5). De l'avis de la minorité, on ne trouve donc pas dans la CBE de base juridique permettant de limiter la compétence des chambres de recours lors des procédures de recours sur opposition.
DISPOSITIF
Par ces motifs, la Grande Chambre de recours apporte les réponses suivantes à la double question de droit qui lui a été soumise :
1. Si le titulaire du brevet est l'unique requérant contre une décision intermédiaire maintenant le brevet dans sa forme modifiée, ni la chambre de recours, ni l'opposant non requérant en sa qualité de partie à la procédure conformément à l'article 107, deuxième phrase CBE, ne peuvent contester le texte du brevet tel qu'approuvé dans la décision intermédiaire.
2. Si l'opposant est l'unique requérant contre une décision intermédiaire maintenant le brevet dans sa forme modifiée, le titulaire du brevet ne peut en principe que défendre le brevet tel qu'approuvé par la division d'opposition dans sa décision intermédiaire. La chambre de recours peut rejeter toutes les modifications proposées par le titulaire du brevet en sa qualité de partie à la procédure conformément à l'article 107, deuxième phrase CBE, si ces modifications ne sont ni utiles ni nécessaires.