T 0247/87 25-04-1990
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Perfectionnement au dispositif d'introduction du courant gazeux dans les appareils de granulation et/ou d'enrobage en lit jaillissant
Inventive step - alternative
Activité inventive oui - alternative non évidente
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 80 401 694.7 déposée le 28 novembre 1980 (n° de publication 0 030 192) avec revendication d'une priorité du 30 novembre 1979 fondée sur une demande française, a été rejetée par décision de la division d'examen en date du 23 avril 1987. Cette décision a pour base la revendication unique d'origine dont le libellé est le suivant : Perfectionnnement au dispositif d'introduction du courant gazeux dans les appareils de granulation et/ou d'enrobage en lit jaillissant comportant une partie inférieure tronconique divergente dont la base de plus petit diamètre d est reliée à une conduite d'alimentation en gaz de diamètre supérieur à d par l'intermédiaire d'une partie tronconique convergente dont la petite base a pour diamètre d, caractérisé par le fait que l'on intercale entre les petites bases de diamètre d des parties tronconiques divergente de l'enceinte de granulation et convergente de la conduite d'alimentation en gaz, une partie cylindrique ayant une hauteur h supérieure à 0,5 d et inférieure à 0,66 d.
II. Le rejet avait pour motif le manque d'activité inventive du dispositif revendiqué, vis-à-vis de l'enseignement du document D1 : US-A-3 110 626.
Dans sa décision, la division d'examen a constaté que le dispositif revendiqué était nouveau, le rapport des dimensions h/d n'étant pas divulgué dans D1. Concernant le choix spécifique de ce rapport, elle a estimé que les résultats en découlant étaient similaires aux effets obtenus dans D1 grâce à l'utilisation d'un venturi et a considéré que ce choix était à la portée de l'homme du métier.
Selon la décision, le but recherché dans le document D1 est également de réduire la perte de charge à un minimum acceptable et il serait évident pour l'homme du métier poursuivant ce but de limiter la hauteur de la partie cylindrique du venturi compte-tenu du frottement de l'air sur les parois. Le choix des valeurs les plus appropriées entrerait dans le cadre des opérations de réglage de routine à la portée de l'homme du métier.
En outre, D1 indiquerait expressément que le venturi doit éliminer les inconvénients mentionnés dans la demande, à savoir la formation de trop gros grains et le blocage du lit, ceci en évitant toutes perturbations et régions de distribution imparfaite du gaz. Il apparaîtrait donc immédiat à l'homme du métier que la hauteur de la partie étranglée doit être suffisante pour éviter les effets tourbillonnaires connus provoqués par le convergent du venturi et transformer le courant gazeux perturbé en courant laminaire homogène. Le choix des valeurs les plus appropriées serait une opération de routine.
III. Par lettre reçue le 9 juin 1987, la requérante (demanderesse) a formé un recours contre cette décision. Simultanément elle a acquitté la taxe de recours prescrite et présenté un mémoire exposant les motifs du recours.
Les arguments essentiels présentés dans celui-ci peuvent être résumés comme suit : Le dispositif décrit dans D1 ne permet pas d'obtenir un lit jaillissant. En effet, la présence dans l'enceinte de granulation de l'élément de contrôle (désigné "cloison interne" dans la décision) rend impossible les échanges entre le jet et les particules de la région annulaire du lit à tous les niveaux le long de la hauteur du jet et par conséquent le lit de particules ne possède pas les caractéristiques d'un lit jaillissant tel que défini dans les documents "Chemical Engineers' Handbook" 5e édition (1974), pages 20-52 et 20-53 ou FR-A-1 125 461. C'est dans la partie supérieure de l'enceinte de granulation qu'il pourrait y avoir un lit jaillissant.
En outre, l'élément de contrôle interne est considéré comme indispensable dans D1 où il est précisé qu'il forme une barrière servant à éviter les phénomènes de "slugging" ou "chocking".
Selon la présente demande, l'emploi du venturi conduit à une augmentation de la perte de charge alors que selon D1 la perte de charge est diminuée. Il n'y a donc pas équivalence des buts recherchés.
La présence, l'absence et la dimension de la poche vide de granules à la partie inférieure du lit de granulation dépendent du rapport h/d. L'utilisation d'un venturi ayant les proportions définies dans la revendication augmente la dimension de la poche obtenue avec un convergent-divergent et la substance pulvérisée se répartit ainsi sur une plus grande surface ce qui permet d'éviter la formation d'agglomérats par dépôt d'un excès de substance.
IV. La requérante requiert l'annulation de la décision contestée et la délivrance d'un brevet sur la base de la revendication d'origine.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108 et à la règle 64 CBE, il est donc recevable.
2. Dans la décision antérieure T 204/83 (JO, 1985, 310) concernant la même demande et ayant pour base la même revendication, il a été constaté que celle-ci ne soulève aucune objection du point de vue formel et que son objet est nouveau.
Il reste donc à examiner si l'objet de la revendication implique une activité inventive, le manque d'activité inventive étant d'ailleurs le seul motif de rejet invoqué dans la décision contestée.
3. La demande de brevet rejetée concerne un perfectionnement au dispositif d'introduction du courant gazeux dans les appareils de granulation et/ou d'enrobage en lit jaillissant. Ces appareils comportent une enceinte de granulation présentant une partie inférieure tronconique divergente dont la base de plus petit diamètre d est reliée à une conduite d'alimentation en gaz de diamètre supérieur à d par l'intermédiaire d'une partie tronconique convergente.
3.1. Un tel dispositif d'enrobage est connu du document D1 que la Chambre considère comme l'état de la technique le plus proche à défaut d'arguments convaincants montrant qu'il n'y a pas formation d'un lit jaillissant.
3.2. Le dispositif selon D1 est destiné à l'enrobage uniforme et précis de particules. Il comprend une enceinte d'enrobage (74) dont la partie inférieure en forme d'entonnoir ou de cône (colonne 5, ligne 7) comporte un élément de contrôle tubulaire (75, 80) cylindrique ou tronconique, disposé dans son axe et ajustable verticalement par translation. Un tube de Venturi (35, 36, 37) est raccordé d'une part à la base de l'enceinte et d'autre part à des moyens, notamment une conduite d'alimentation, assurant l'introduction d'un courant gazeux tout d'abord dans le tube de Venturi puis dans l'enceinte d'enrobage. Une buse destinée à la pulvérisation du liquide d'enrobage à l'intérieur de l'élément de contrôle est située dans le venturi et peut être déplacée verticalement le long de son axe (voir revendications 1 ou 2 ; colonne 1, lignes 42-59 ; colonne 3, lignes 70-75 ; figures 1 et 6). Ce dispositif permet d'effectuer l'enrobage en fonctionnement discontinu (cf. colonne 4, lignes 33-36 et colonne 8, lignes 71-75).
Le courant gazeux ascendant est réglé de telle sorte que la majeure partie des particules circule à l'intérieur de l'enceinte d'enrobage. Les particules traversent d'abord la zone d'enrobage (13) à l'intérieur de l'élément de contrôle et continuent leur mouvement vers le haut le long de la partie axiale de l'enceinte jusqu'à atteindre la zone de désengagement (14) où elles ne sont plus supportées par le courant gazeux. Elles se déplacent alors radialement vers les parois de l'enceinte puis redescendent pour revenir dans la partie inférieure de l'enceinte. Lorsqu'elles atteignent la base de l'élément de contrôle elles sont reprises par le courant gazeux ascendant issu du venturi et le cycle est répété (voir colonne 5, lignes 55-74, figures 1, 6 et 7).
3.3. Il n'est pas expressément mentionné dans D1 que l'enrobage des particules est effectué dans un lit jaillissant, cependant la forme de l'enceinte d'enrobage, l'introduction du jet gazeux ascendant et la circulation des particules décrites dans ce document correspondent à la définition des lits jaillissants indiquée par la requérante dans la demande (page 1, lignes 6-17) comme souligné dans la décision contestée. Elles correspondent aussi à la définition du lit jaillissant donnée dans les manuels et ouvrages de référence illustrant les connaissances générales de l'homme du métier dans le domaine technique concerné, par exemple "Techniques de l'Ingénieur" A 5851, page 12 ; "Spouted beds", K.B. Mathur et N. Epstein, 1974, Academic Press London, pages 1 à 4 ; ou encore "Chemical Engineer's Handbook" 5e édition, pages 20-52 et 20-53 cité par la requérante. Il est à noter à ce sujet que le second ouvrage prévoit d'introduire un tube vertical plus ou moins long dans la région axiale du lit jaillissant, la partie inférieure du jet restant cependant libre pour permettre la recirculation des particules solides (voir pages 257 et 258). Il ne ressort pas de cet ouvrage que dans ces conditions un lit jaillissant ne puisse pas se former.
Il résulte de ce qui précède que les arguments de la requérante concernant l'impossibilité d'obtenir un lit jaillissant dans le dispositif selon D1 ne paraissent être confirmés ni par la définition donnée dans la demande, ni par les connaissances générales dans le domaine des lits jaillissants. Par conséquent, la Chambre ne peut suivre l'opinion de la requérante, d'autant plus que celle-ci a admis qu'il pourrait y avoir un lit jaillissant dans la partie supérieure de l'enceinte d'enrobage (74).
3.4. Le dispositif selon D1 présente plusieurs avantages. Il permet tout d'abord d'effectuer un enrobage uniforme et exact des particules. Grâce à l'utilisation du venturi, les particules peuvent être maintenues à l'intérieur de l'enceinte d'enrobage avec un minimum de perte de pression comparativement à la chute de pression considérable résultant de l'emploi d'un écran (voir colonne 1, lignes 42-48 ; colonne 3, lignes 32-48). En outre, l'utilisation de l'élément de contrôle permet d'éliminer le phénomène de "chocking", c'est-à-dire l'étouffement du lit, ou le phénomène de "slugging". Ce dernier, qui correspond d'après la requérante au renardage, résulte conformément au document D1 d'un regroupement de particules dans le courant d'air ascendant, ce qui entrave son écoulement et peut même l'interrompre complètement (voir colonne 4, lignes 17-22 et colonne 8, lignes 7-30). L'élément de contrôle contribue par conséquent à la stabilité du lit jaillissant. Il permet en outre de minimiser les durées d'interruption, de chargement et de déchargement et donc d'enrober plus de particules (voir colonne 4, lignes 33-36).
4. Partant du document D1, le problème technique à la base de la demande peut donc être vu dans la recherche d'une variante à ce dispositif permettant d'obtenir un enrobage uniforme des particules, c.à.d. sans formation de gros agglomérats, dans un lit jaillissant restant stable même en marche continue.
Pour résoudre ce problème, il est proposé selon la revendication de donner à la partie cylindrique située entre les parties convergente de l'enceinte d'enrobage et divergente de la conduite d'alimentation une hauteur h supérieure à 0,5 d et inférieure à 0,66 d, d étant le petit diamètre des parties tronconiques.
Il ressort des indications figurant dans la description, notamment page 2, lignes 39-40, et page 3 que le résultat recherché est effectivement obtenu par la solution revendiquée. Le problème posé a donc été résolu de façon crédible.
5.1. D'après D1, l'utilisation d'un venturi dans un appareil d'enrobage de particules permet de supprimer tout écran et de maintenir les particules à l'intérieur de l'enceinte d'enrobage avec un minimum de perte de pression comparativement à la chute de pression considérable provoquée par un écran. Il permet aussi d'éliminer les zones mortes, c'est-à-dire les régions à distribution imparfaite de gaz ou de particules par rapport au reste du système (voir colonne 3, lignes 32-48). Dans ce contexte la Chambre n'a trouvé dans la colonne 3 aucune indication établissant expressément une relation entre la présence de ces régions et le phénomène d'obstruction à la partie inférieure du lit ou la formation de trop gros grains avec blocage du lit, contrairement à ce qui est suggéré dans la décision contestée (page 4, second paragraphe et page 5, point 4).
D1 mentionne certes un avantage supplémentaire à la colonne 3, lignes 49-57, à savoir que le bouchage de la buse de pulvérisation par les particules en cours de formation est évité en plaçant celle-ci dans la partie étranglée du venturi, cependant il n'est pas question ici de blocage du lit. Le manque de stabilité du lit est évoqué dans D1 uniquement dans le cadre des avantages ou des effets produits par l'élément de contrôle (75, 80).
5.2. En ce qui concerne les dimensions du tube de Venturi, D1 enseigne que le terme "venturi" n'implique pas nécessairement des proportions correspondant à celles d'un véritable venturi mais s'applique à tout retrécissement formé entre deux parties coniques emboitées dans un tube droit et provoquant une dimimution de la pression et une augmentation de la vitesse d'un courant gazeux le traversant (voir colonne 3, lignes 23-31). Cette définition englobe par conséquent un domaine de variation large et ceci pour toutes les dimensions ou proportions du venturi (comparativement au domaine très étroit revendiqué pour un rapport particulier). D1 précise certes certaines valeurs ou certains domaines appropriés pour le rapport du diamètre interne du retrécissement du venturi au diamètre du col de l'enceinte d'enrobage et pour les angles du cône d'entrée et du cône de sortie du venturi (voir colonne 3, lignes 58-69), mais il est totalement silencieux quant à la hauteur h du retrécissement ou au rapport h/d, ce paramètre n'étant même pas mentionné.
Par conséquent, bien que le document D1 expose de façon détaillé les avantages procurés par l'emploi d'un venturi, il n'attribue aucune importance au rapport des dimensions h/d dans le contexte des avantages indiqués à la colonne 3 et encore moins en relation avec le problème de manque de stabilité du lit. Dans ces circonstances l'homme du métier ne peut trouver dans D1 aucun indice lui suggérant que le rapport h/d présente une importance primordiale et critique pour l'obtention d'un enrobage uniforme, sans formation de gros agglomérats, en lit jaillissant stable. En l'absence de tels indices le mettant sur la voie de l'invention, il n'aurait aucune raison d'effectuer des opérations de réglage de routine pour choisir les valeurs les plus appropriées du rapport h/d.
5.3. Comme déjà mentionné précédemment, le document D1 traite aussi du manque de stabilité du lit et de son étouffement éventuel, mais il ressort de façon non équivoque de D1 qu'il est nécessaire d'utiliser l'élément de contrôle (75 ou 80) dans ce dispositif d'enrobage pour résoudre ce problème (voir colonne 3, ligne 70 à colonne 4, ligne 22 ; colonne 8, lignes 7-37). Cette solution qui va dans une direction totalement différente de celle proposée dans la demande, ne suggère pas non plus à l'homme du métier que le rapport des dimensions h/d joue un rôle essentiel pour l'obtention d'un enrobage uniforme et d'un lit stable.
5.4. Il résulte de ce qui précède que le choix du rapport h/d dans le domaine revendiqué ne découle pas de façon évidente du document D1.
5.5. Aucun autre document n'a été cité à l'encontre de l'objet de la revendication unique dans la décision contestée. De plus la Chambre a constaté que le document supplémentaire cité dans le rapport de recherche ainsi que les documents mentionnés dans la demande ne contiennent aucune information susceptible d'orienter l'homme du métier vers la solution revendiquée, aucun d'entre eux ne suggèrant d'intercaler une partie cylindrique entre les parties convergente de l'enceinte d'enrobage et divergente de la conduite d'alimentation pour résoudre le problème posé.
En conclusion, le dispositif selon la revendication de la demande est considéré comme impliquant une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'examen avec mission de délivrer un brevet sur la base de la revendication unique d'origine.