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T 0069/95 (FROMAGE/NESTLE) 12-01-1996
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Procédé de fabrication de fromages
Taxe et surtaxe d'impression - Prélèvement automatique
Notification - Texte ambigü (oui)
Taxe de recours - Remboursement (oui)
Exposé des faits et conclusions
I. Le brevet européen n 0 240 607 correspondant à la demande européenne n 86 117 206.2 déposée le 10 décembre 1986 par la Société des Produits NESTLE S.A a été accordé, avec effet au 22 novembre 1990, par décision de la Division d'examen datée du 11 octobre 1990.
II. Suite à une opposition formée le 21 août 1991 par W.D. KRAYER, la Division d'opposition a, par décision intermédiaire au sens de l'article 106(3) CBE datée du 31. janvier 1994 et remise à la poste le 8 février 1994, établi que, compte tenu des modifications apportées par la titulaire au cours de la procédure d'opposition, le brevet satisfaisait aux conditions énoncées dans la CBE et donc pouvait être maintenu sous une forme amendée.
III. Par notification du 16 mai 1994, établie conformément à la règle 58(5) CBE, la titulaire du brevet a été informée que, la décision précitée étant passée en force de chose jugée, elle devait acquitter la taxe d'impression du nouveau fascicule et produire les traductions des revendications modifiées dans le délai prescrit.
IV. Le 23 septembre 1994 une nouvelle notification fondée sur la règle 58(6) CBE avisait la titulaire du brevet que, la taxe d'impression n'ayant pas été acquittée dans les trois mois impartis par la règle 58(5) CBE, cet acte pouvait, moyennant le paiement d'une surtaxe, être valablement accompli dans un délai supplémentaire de deux mois.
V. La taxe ni la surtaxe n'ayant été payées dans les délais impartis, la Division d'opposition a, par décision du 10. janvier 1995, révoqué le brevet en application des dispositions de l'article 102(4) CBE.
VI. Par acte motivé reçu à l'Office européen des brevets le 16. janvier 1995, la Société des Produits NESTLE S.A a formé un recours contre cette décision. La taxe de recours a été simultanément acquittée.
VII. La requérante expose que, après avoir produit, en réponse à la notification du 16 mai 1994, la traduction des revendications modifiées, elle a pensé que la taxe d'impression due serait prélevée automatiquement conformément à sa demande de prélèvement automatique du 24. juin 1994 avec effet au 1er juillet 1994. Elle souligne que, suite à la notification du 23 septembre 1994, elle s'est trouvée confortée dans son idée car la page 2 de cette notification comportait une notice expresse indiquant que la taxe et la surtaxe seraient automatiquement prélevées le dernier jour du délai supplémentaire. Elle soutient donc que c'est en toute bonne foi qu'elle a jugé que les démarches requises avaient été accomplies. Elle demande en conséquence l'annulation de la décision entreprise et le remboursement de la taxe de recours.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. La décision J 1/89 du 1er février 1989 (JO OEB 1992, 17) a rappelé le principe établi par la jurisprudence des Chambres de recours qui pose que : "en vertu du principe de bonne foi qui régit les relations entre l' OEB et les demandeurs, les notifications doivent être formulées en termes clairs et ne prêtant pas à équivoque dans l'esprit du demandeur". La décision précise que : "le texte des notifications doit être rédigé de telle sorte que tout risque de méprise de la part d'une personne sensée qui en est destinataire soit écarté". Il convient donc de rechercher si, en l'espèce, la notification du 23. septembre 1994 dont le caractère ambigü est invoqué par la requérante, satisfaisait ou non aux exigences précitées.
3. Le dernier paragraphe de la première page de la notification incriminée précise que "s'il n'est pas satisfait en temps voulu à cette invitation" à savoir acquitter la taxe d'impression et la surtaxe dans le délai supplémentaire de deux mois, "le brevet européen sera révoqué conformément à l'article 102(4) et (5) CBE". La page 2 quant à elle est rédigée ainsi qu'il suit :
"Note aux personnes participant au système de prélèvement automatique : Le délai normal imparti pour le paiement de la taxe susmentionnée avait déjà expiré à la date de réception de l'ordre de prélèvement automatique. Le montant de la taxe et la surtaxe sera automatiquement prélevé le dernier jour du délai supplémentaire (point 11.1 de la règlementation applicable aux comptes courants, supplément au JO OEB 06/1994)"
4. Il n'est pas contestable que la requérante participait à ce système. Ceci est établi par la demande de prélèvement automatique datée du 24 juin 1994 qu'elle a fait parvenir à l'OEB et qui concerne plus de 30 demandes de brevets. Force est toutefois de constater que, dans cette liste qui a été versée au dossier, la demande correspondant au cas présent n'est pas mentionnée. Il est dès lors compréhensible que l'OEB n'ait pas prélevé automatiquement la taxe et la surtaxe objets du présent litige.
5. La requérante a exposé que cette omission était involontaire et devait s'expliquer par le fait que, le brevet ayant déjà été délivré, il n'avait pas été pris en compte dans son système de suivi automatique des taxes concernant les demandes en cours. Dès lors que l'omission était involontaire, ce que la Chambre admet car le contraire apparaît invraisemblable en regard de l'intérêt qu'elle a toujours manifesté pour la délivrance du brevet en cause, la première phrase de la notice précitée : "Le délai normal imparti pour le paiement de la taxe sus- mentionnée avait déjà expiré à la date de réception de l'ordre de prélèvement automatique." n'a pu que la confirmer dans le sentiment que l'OEB avait reçu l'ordre de prélèvement correspondant au cas de l'espèce et que les informations contenues dans la seconde phrase à savoir : "Le montant de la taxe et de la surtaxe sera automatiquement prélevé etc..." s'appliquaient à la présente procédure.
6. La Chambre relève encore que cet incident s'est produit en juin 1994, c'est à dire le mois même où la Règlementation relative à la procédure de prélèvement automatique a été publiée dans un numéro spécial du Journal Officiel de l'OEB (6/1994, 5). Elle en tire que, dans cette phase de mise en place du nouveau système, la requérante qui a cru de bonne foi avoir transmis dans sa demande de prélèvement du 24 juin la liste exhaustive de ses "cas en cours" a encore été abusée par le caractère général du titre de la notice précitée explicitement adressé : "aux personnes participant au système de prélèvement automatique".
7. Se fondant sur les dispositions de l'article 5(1) du Règlement précité un titre de notice tel que : "note relative aux procédures pour lesquelles un prélèvement automatique a été ordonné" serait susceptible d'attirer l'attention des utilisateurs du système sur le fait que le prélèvement automatique ne sera effectué que si l'ordre de paiement a été expressement donné pour la procédure concernée.
8. Il est clair par ailleurs que le propos de la notification incriminée était d'avertir la requérante qu'elle devait acquitter, dans un délai supplémentaire de deux mois, la taxe et la surtaxe et ce afin de lui éviter une omission susceptible d'entraîner la perte de son brevet. Dès lors, après avoir indiqué que ces formalités n'avaient pas été accomplies en temps utile, ce qui correspondait bien à la réalité des faits de l'espèce, la notification n'aurait pas dû ajouter que le délai avait expiré avant la date de réception de l'ordre de prélèvement automatique. Ceci n'était pas exact car l'OEB n'avait évidemment pas reçu cet ordre, mais surtout cette indication s'avérait contraire à la finalité de la notification puisque la requérante, au lieu de se voir avertir qu'elle devait accomplir les diligences nécessaires, se trouvait confortée dans le sentiment que les prélèvements seraient effectués automatiquement, selon les modalités spécifiées dans la dernière phrase de la notice.
9. Ainsi que retenu dans la Décision J 1/89 précitée, si un demandeur se fonde sur une notification équivoque, il ne doit pas s'en trouver lésé. Il convient donc d'annuler la décision frappée de recours, la procédure de délivrance devant être reprise en l'état où elle se trouvait avant l'envoi d'une notification selon les dispositions de la règle 58(6) CBE, car la notification datée du 23. septembre 1994 doit être considérée comme non avenue.
10. Les informations erronées contenues dans la notification du 23 septembre 1994 sont à l'origine d'un vice substantiel de procédure car, en dissuadant la titulaire d'entreprendre les diligences nécessaires au paiement de la taxe et de la surtaxe d'impression, elles ont eu pour conséquence directe la décision de révocation du brevet ci-après annulée. Il convient donc, sur le fondement des dispositions de la règle 67 CBE, de faire droit à la demande de remboursement de la taxe de recours.
DISPOSITIF
Par ces motifs la Chambre,
1. annule la décision de révocation du 10 janvier 1995 ;
2. renvoie l'affaire devant la première instance pour reprise de la procédure de délivrance en l'état où elle se trouvait avant l'envoi de la notification du 23. septembre 1994 qui doit être considérée comme non avenue ;
3. ordonne le remboursement de la taxe de recours.