T 0234/86 (Thérapie par courants d'interférence) 23-11-1987
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1. Un acte d'opposition répond aux conditions énoncées à la règle 55c) CBE, qui prévoit qu'il doit comporter une "déclaration précisant ... les justifications invoquées", si la justification invoquée (en l'occurrence, un document) y est désignée de façon précise, et si l'opposant indique quels faits il entend prouver par ce moyen. L'appréciation de ladite justification (c'est-à- dire, en l'occurrence, la vérification à effectuer en vue d'établir s'il s'agit d'un document publié antérieurement) relève de l'examen de l'admissibilité quant au fond des motifs de l'opposition.
2. La division d'opposition a le droit, et elle est même tenue le cas échéant, de décider le maintien du brevet sur la base d'une requête formulée à titre subsidiaire et avec une préférence moindre par le titulaire du brevet, même si ce dernier maintient une requête principale ainsi que des requêtes subsidiaires non admissibles, précédant dans l'ordre de ses préférences la requête à laquelle il convient de faire droit. En prenant une telle décision, la division d'opposition ne contrevient ni aux dispositions des articles 102(3) et 113(2), ni à celles de la règle 58 CBE.
3. Aussi longtemps qu'il n'existera pas de jurisprudence constante à cet égard, si la CBE ne prescrit pas clairement la procédure à suivre dans une situation donnée (c'est-à-dire, en l'occurrence, dans le cas où il a été formulé une requête principale et des requêtes subsidiaires), l'application d'une procédure inappropriée ne pourra pas être assimilée à un vice substantiel de procédure, justifiant le remboursement de la taxe de recours (cf. décision T 156/84, JO OEB 1988, 372, point 3.13 des motifs).
4. Si une requête (c'est-à-dire, en l'occurrence, les requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5) est rejetée sans que, ni dans la décision proprement dite, ni dans une notification antérieure à laquelle cette décision fait référence, le motif du rejet soit indiqué (règle 68(2) CBE), il y a lieu d'assimiler cette absence d'indication des motifs à un vice substantiel de procédure, justifiant le remboursement de la taxe de recours (règle 67 CBE).
Activité inventive (oui)
Etat pertinent de la téchnique: domaines techniques dur lesquels porte la demande et domaines techniques généraux les englobant
Recevabilité de l'opposition
Déclaration précisant les justifications invoqueés
Appreciation de ces justiifcations
Délivrance d'un brevet sur la base d'une requête subsidiaire dans le cas du maintien d'une requête prinicpale à laquelle il ne peut être fait droit
Remboursement de la taxe de recours (oui)
Vice substantiel de procédure - disposition ambigues en matière de procédure
Vice substantiel de procédure - rejet non motivé d'une requête
Exposé des faits et conclusions
I. La requérante est titulaire du brevet européen n° 0 002 811, délivré le 24 février 1982 sur la base de huit revendications. La demande, déposée le 21 décembre 1978 sous le n° 78 101 805.6, revendiquait la priorité d'une demande déposée le 27 décembre 1977, sous le n° AT 9305/77.
II. L'intimée (opposante) a fait opposition au brevet le 15 novembre 1982.
III. Lors de la procédure d'opposition, la requérante a conclu au rejet de l'opposition pour irrecevabilité, au motif que l'un des documents cités par l'opposante (DE-A-2 632 700 : document 3) avait été publié après la date de priorité du brevet en litige, et qu'il ne pouvait d'autre part être opposé qu'aux dernières revendications dépendantes, et non pas à la revendication 1. Le point de vue défendu par la requérante était le suivant :
Etant donné que, dans l'acte d'opposition, c'est la totalité du brevet qui est attaquée, et que le document en question constitue un maillon indispensable dans l'argumentation développée par l'intimée, l'opposition se fonde sur un document qui ne peut être pris en considération. Ne serait-ce que pour cette raison, l'opposition doit être rejetée comme irrecevable.
Par ailleurs, l'intimée a cité un autre document relativement long (DE-A-2 615 157 : document 4), sans préciser quels étaient les passages pertinents.
Les renseignements fournis par l'intimée au sujet de ce document ne sont pas suffisants pour que la requérante puisse examiner à fond les arguments que l'intimée a fait valoir en se référant audit document. Pour cette raison également, l'opposition doit être rejetée comme irrecevable.
IV. A l'issue de la procédure orale, et après un abondant échange de correspondance, la requérante a formulé finalement le 12 juin 1985 une requête à titre principal et sept requêtes à titre subsidiaire.
V. Par une notification en date du 17 juillet 1985, établie conformément à la règle 58(4) CBE, la Division d'opposition a fait savoir aux parties qu'elle envisageait de maintenir le brevet européen dans le texte correspondant à la requête subsidiaire 2.7 de la requérante. Elle ajoutait les précisions suivantes :
- "le maintien du brevet dans sa forme modifiée ne pourra être décidé que si le titulaire du brevet accepte de faire de la requête 2.7, qu'il a formulée à titre subsidiaire le 12 juin 1985, sa requête principale ; en effet, la division d'opposition ne prend de décision sur le brevet que dans le texte proposé ou accepté par le titulaire, qui ne peut en tout état de cause être que le texte faisant l'objet de la requête principale (article 113(2) CBE).
- afin d'accélérer la procédure, la division d'opposition établit la notification visée à la règle 58(4) CBE sur la base du texte correspondant à la requête subsidiaire 2.7. Si, dans le délai prescrit à la règle 58(4), le titulaire du brevet n'émet aucune objection à l'encontre du texte dans lequel il est envisagé de maintenir le brevet, il sera considéré qu'il a fait de la requête 2.7, déposée à titre subsidiaire le 12 juin 1985, sa requête principale. Si le titulaire du brevet soulève des objections, la division d'opposition statuera sur la requête principale valable à cette date, conformément à l'article 102 CBE."
La notification de la Division d'opposition renvoyait à cet égard au renseignement juridique communiqué par l'OEB sous le n° 15/84 (JO OEB 1984, 491).
VI. Dans sa réponse à la notification précitée, la requérante a refusé de faire de la requête 2.7, qu'elle avait présentée à titre subsidiaire, sa requête principale, et a justifié son point de vue essentiellement par les arguments suivants :
Tous les textes des revendications proposés dans la requête principale et dans les requêtes subsidiaires proviennent du titulaire du brevet, ce qui veut dire qu'ils ont été implicitement acceptés même si, pour ce qui est des requêtes subsidiaires, cette acceptation ne vaut que pour le cas où les requêtes les précédant dans l'ordre de préférence seraient rejetées, un tel rejet pouvant parfaitement faire l'objet d'une décision.
Les textes des revendications qui ont été proposés n'ont pas à être acceptés de manière explicite ; dans l'article 113(2), les deux termes, "proposé" et "accepté" sont reliés non pas par un "et", mais par la conjonction "ou", qui exprime une alternative.
Il ne ressort pas de l'article 113(2) CBE que le texte proposé ou accepté ne peut être que celui qui correspond à la requête principale, ou qu'il ne peut faire l'objet que d'une seule requête. L'article 113 vaut aussi bien pour la première que pour la deuxième instance ; or au niveau de l'instance de recours, ainsi qu'en témoignent une série de décisions, il est assurément possible de soumettre dans une requête principale et une requête subsidiaire des textes différents, qui sont réputés proposés au sens où l'entend l'article 113(2), et au sujet desquels la chambre de recours, en respectant certes l'ordre de préférence, rend une décision (T 169/83, JO OEB 1985, 193, notamment p. 195 et 198, point 1).
Il existe ainsi plusieurs textes proposés et acceptés, le titulaire du brevet se réservant simplement la possibilité, au cas où il serait fait droit non pas à la requête principale, mais à une requête subsidiaire, d'engager un recours afin de poursuivre la procédure pour les requêtes précédant dans l'ordre de ses préférences la requête à laquelle il aurait été fait droit.
Le titulaire du brevet a d'ailleurs non seulement un intérêt légitime, mais également le droit d'exiger qu'il soit statué sur ces requêtes par une décision susceptible de recours et motivée sur le fond.
Si l'on considère que le demandeur ou le titulaire d'un brevet qui souhaite faire statuer dans le cadre d'un recours sur la plus large de ses requêtes ne doit formuler que cette requête et attendre tout d'abord son rejet en première instance pour présenter d'autres requêtes à titre subsidiaire, cela revient pratiquement à le priver d'une instance pour l'examen de ces autres requêtes, sur lesquelles seule l'instance de recours aurait à statuer et dont généralement, comme c'est d'ailleurs le cas en la présente espèce, l'une est jugée admissible.
VII. Par une décision en date du 20 mai 1986, la Division d'opposition a jugé l'opposition recevable, toutes les conditions énoncées à l'article 99 et à la règle 55 CBE étant remplies et aucun des arguments avancés par le titulaire du brevet ne pouvant être considéré comme fondé.
La Division d'opposition a motivé sa décision comme suit :
- il n'est stipulé nulle part dans la CBE que l'opposition n'est recevable que si les faits et justifications invoqués par l'opposant sont probants en eux-mêmes.
- Pour ce qui concerne les éléments de la demande non couverts par la demande dont la priorité est revendiquée, le document publié durant l'intervalle de priorité fait partie de l'état de la technique publié antérieurement.
- le document dans son ensemble n'est pas long, de telle sorte que l'homme du métier peut très rapidement y repérer les éléments techniques pertinents ayant un rapport avec le présent brevet.
VIII. Dans sa décision, la Division d'opposition a prononcé la révocation du brevet au motif que, par rapport au document US-A-3 895 639 (document 1) et à l'article de G. Silverman et a1. : "A programmable parallel timing system", publié dans IEEE Transactions on Bio-Medical Engineering, Vol. BME-18, n° 3, pages 201 à 205, mai 1971 (New York) (document 2), les objets des revendications soumises à titre de requête principale n'impliquaient pas une activité inventive, ce qu'elle a d'ailleurs démontré dans le détail.
IX. Aux points IV et V de l'exposé des motifs de la décision, il est en outre précisé que, selon la pratique constante de l'Office, le brevet doit être révoqué du seul fait de la non-recevabilité de la requête principale qui, seule, représente le texte proposé ou accepté (sans réserve) par le titulaire du brevet, au sens où l'entend l'article 113(2) CBE. Pour ce qui est des requêtes subsidiaires n°s 2.2 à 2.6, l'exposé des motifs renvoie à une notification antérieure de la Division d'opposition.
X. La requérante a formé recours contre la décision de la Division d'opposition le 18 juillet 1986 et acquitté simultanément la taxe prescrite ; le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 17 septembre 1986. Dans ce mémoire, la requérante sollicite le maintien du brevet sur la base des revendications 1 à 8 du fascicule de brevet ou, à titre subsidiaire, sur la base de l'un des six jeux de revendications déposés le 14 juin 1985, ainsi que le remboursement de la taxe de recours.
(...)
XII. Par lettre en date du 11 août 1986, l'intimée a retiré son opposition, sans prendre position sur le contenu du mémoire exposant les motifs du recours.
XIII. Dans sa version actuelle, la revendication 1 selon la requête principale est libellée comme suit :
(...)
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 de la CBE; il est donc recevable.
2. Recevabilité de l'opposition
2.1. La requérante ne conteste pas que l'opposition réponde aux conditions énoncées à l'article 99 ainsi qu'à la règle 55, paragraphes a), b) et d) CBE.
Elle conteste simplement que l'opposition satisfasse à toutes les conditions énoncées à la règle 55 c), estimant que les faits et justifications sur lesquels s'appuie l'opposante ne sont pas probants, dans la mesure où, pour prouver les faits allégués, celle-ci produit des documents qui ne conviennent pas pour apporter la preuve requise (DE-A-2 632 700) ou qui n'apparaissent pas immédiatement comme appropriés (DE-A-2 615 157).
2.2. La Chambre estime à cet égard, tout comme la Division d'opposition, qu'aucun des arguments produits par la requérante ne peut être tenu pour fondé, la CBE ne stipulant nulle part que l'opposition n'est recevable que si les faits et justifications invoqués par l'opposant sont "probants en eux-mêmes".
2.3. Pour prouver que, ainsi qu'elle le prétend, l'objet de la revendication 1 du brevet qui a été délivré n'est pas brevetable parce qu'il n'implique pas d'activité inventive, l'opposante s'est référée aux connaissances générales de l'homme du métier et a cité trois documents supplémentaires (pages 3 et 4 de l'acte d'opposition), qu'elle a désignés de façon précise. De surcroît, elle a indiqué chaque fois ce qui doit être considéré comme connu et d'après quel document. Ce faisant, elle pouvait s'abstenir de citer avec précision le passage du document DE-A-2 615 157 qui selon elle constituait une divulgation de l'invention, étant donné que ce document n'est pas long (six pages et demie dactylographiées). Par conséquent, les conditions requises en la matière par la règle 55 c) CBE ont été remplies dans la présente espèce.
2.4. L'appréciation des justifications, c'est-à-dire en l'occurrence la vérification à effectuer en vue d'établir si les documents cités permettent vraiment de prouver les faits allégués, relève uniquement de l'examen de l'admissibilité quant au fond des motifs de l'opposition, lequel ne peut avoir lieu, en vertu de l'article 101(1) CBE, que lorsque la recevabilité de l'opposition a été établie. Dans la présente espèce, ce n'est donc qu'après avoir établi la recevabilité de l'opposition qu'il aurait fallu examiner si la priorité de la première demande autrichienne pouvait à juste titre être revendiquée, et dans l'affirmative, dans quelle mesure elle pouvait l'être, si les documents cités avaient été publiés avant la date de priorité et si ce qu'ils exposent correspond à ce que prétend l'opposante.
3. Requête principale
(...)
3.3. Nouveauté
(...)
3.3.8. L'objet de la revendication 1 est donc nouveau (article 54 CBE).
3.4. Activité inventive
(...).
3.4.5. L'objet de la revendication 1 implique donc une activité inventive, au sens où l'entend l'article 56 CBE.
Les revendications 2 à 8 sont des revendications dépendantes de la revendication 1. Leurs objets impliquent donc également une activité inventive.
La Chambre estime par conséquent qu'aucun des motifs d'opposition visés à l'article 100a) CBE ne s'oppose au maintien du brevet en litige sur la base du texte des revendications 1 à 8 qui avait été retenu pour la délivrance.
4. Requêtes subsidiaires
(...)
5. Remboursement de la taxe de recours.
5.1. Dans le mémoire o" elle exposait les motifs du recours, la requérante a sollicité le remboursement de la taxe de recours, en faisant valoir que la Division d'opposition avait refusé de statuer sur ses requêtes subsidiaires, ce qui constituerait un vice substantiel de procédure au sens où l'entend la règle 67 CBE.
5.2. Dans l'exposé des motifs de sa décision (point IV), la Division d'opposition a justifié son refus par le fait qu'elle ne peut décider de maintenir un brevet sous une forme modifiée que dans le texte accepté sans réserve par le titulaire du brevet. Le titulaire du brevet n'ayant pas accepté sans réserve les textes correspondant aux requêtes subsidiaires, elle ne pouvait donc rendre de décision que sur la requête principale.
5.3. A l'appui de cette thèse, la Division d'opposition a invoqué le renseignement juridique de l'OEB n° 15/1984 (JO OEB 1984, 491).
5.4. Aux termes de l'article 102(3)a) CBE, la division d'opposition ne peut maintenir le brevet européen tel qu'il a été modifié que si, conformément aux dispositions du règlement d'exécution (règle 58, paragraphes 4 et 5 CBE), il est établi que le titulaire du brevet est d'accord sur le texte dans lequel la division d'opposition envisage de maintenir le brevet.
Dans le renseignement juridique susmentionné, il est indiqué que, dans la procédure d'opposition, il peut également être opportun de déposer un jeu de revendications à titre subsidiaire, sur la base duquel la division d'opposition pourrait rendre une décision de maintien du brevet dans une version modifiée.
Le titulaire du brevet peut aussi sauvegarder ses droits en retenant un jeu de revendications qui n'est pas accepté par la division d'opposition. S'il fait des objections dans le délai d'un mois prévu à la règle 58(4) de la CBE, la division d'opposition a la possibilité de révoquer le brevet. Le titulaire du brevet peut de cette manière engager une procédure devant la chambre de recours sans perdre la possibilité de demander à titre subsidiaire un brevet européen basé sur la version restreinte proposée par la division d'opposition. Il est tenu toutefois de s'opposer expressément à la proposition de la division d'opposition (cf. renseignement juridique n° 15/84, point 4).
5.5. Pour la Chambre, ce renseignement juridique prête pour le moins à confusion. Il peut en effet donner l'impression que, dans le cas où le titulaire du brevet maintient des requêtes (par exemple la requête principale ou des requêtes subsidiaires venant avant dans l'ordre de ses préférences) qui visent au maintien du brevet dans une version que la division d'opposition n'a pas l'intention de retenir, le brevet lui-même peut être révoqué même si, dans le même temps, il existe aussi une requête subsidiaire portant sur une version qui, de l'avis de la division d'opposition, remplit les conditions énoncées dans la CBE.
5.5.1. Or ce n'est pas l'interprétation qu'il convient de donner de l'article 102(3)a) ensemble la règle 58(4) et l'article 113(2) CBE, ceci pour les raisons suivantes:
Tout d'abord, on ne peut dénier au titulaire du brevet le droit de soumettre à la division d'opposition non seulement une requête principale, mais également des requêtes subsidiaires. Ce droit est reconnu dans le renseignement juridique n° 15/84, qui recommande même d'en faire usage. Les chambres de recours ont d'ailleurs toujours accepté que de telles requêtes subsidiaires soient présentées (du moins dans la mesure où elles étaient déposées dans les délais) (cf. décision T 169/83 précitée). Ceci figurait également dans les intentions des auteurs de la Convention (cf. travaux préparatoires à la CBE, doc. M/PR/I, p. 56, point 509).
Ainsi que la requérante le souligne à juste titre, exiger que le texte sur lequel il est statué soit proposé ou accepté sans réserve par le titulaire du brevet reviendrait à poser une condition supplémentaire en sus de celles déjà énoncées à l'article 113(2) CBE.
5.5.2. Le fait que, comme le stipule l'article 102(3)a) CBE, la division d'opposition ne puisse décider de maintenir un brevet que lorsqu'il est établi pour elle que le titulaire du brevet est d'accord sur le texte dans lequel elle envisage de maintenir le brevet ne signifie pas que cet accord doive être formulé sans réserve.
Le texte de l'article 102(3) CBE est en effet le suivant : "Si la division d'opposition estime que, compte tenu des modifications apportées par le titulaire du brevet européen au cours de la procédure d'opposition, le brevet et l'invention qui en fait l'objet satisfont aux conditions de la présente convention, elle décide de maintenir le brevet tel qu'il a été modifié, pour autant que :
a) conformément aux dispositions du règlement d'exécution, il est établi que le titulaire du brevet est d'accord sur le texte dans lequel la division d'opposition envisage de maintenir le brevet, et que ..."
A ce même propos, il est précisé dans la règle 58(4) qu'avant de prendre la décision de maintenir le brevet européen dans sa forme modifiée, la division d'opposition notifie aux parties qu'elle envisage le maintien du brevet ainsi modifié et les invite à présenter leurs observations dans le délai d'un mois si elles ne sont pas d'accord sur le texte dans lequel elle a l'intention de maintenir le brevet.
5.3.3. Les dispositions de l'article 102(3) a) et de la règle 58(4) CBE sont en conformité avec les dispositions générales de procédure énoncées à l'article 113(2) CBE, qui stipule que l'Office européen des brevets n'examine et ne prend de décision sur la demande de brevet européen ou le brevet européen que dans le texte proposé ou accepté par le demandeur ou par le titulaire du brevet.
Le fait que les articles 102(3) et 113(2) ainsi que la règle 58(4) CBE ne visent que "le" texte ne signifie pas nécessairement que l'on ne peut proposer qu'un seul texte aux fins de décision ou, en d'autres termes, que le texte doit être proposé ou accepté sans réserve.
Bien au contraire, le titulaire du brevet a également la possibilité, comme c'est le cas dans la présente espèce, de n'émettre qu'un accord sous réserve (sous forme d'une requête subsidiaire). Pour la procédure de recours, cette possibilité ressort clairement des travaux préparatoires à la CBE (cf. doc. M/PR/I loc.cit.). C'est pourquoi en pareil cas, d'après la jurisprudence des chambres de recours, les articles 102 et 113, de même que la règle 58, paragraphes 4 et 5 CBE, ont été interprétés comme signifiant qu'il est possible de maintenir un brevet sous une forme modifiée, même si le titulaire du brevet n'a demandé qu'à titre subsidiaire son maintien sous cette forme (cf. notamment décision T 205/83 Copolymères d'ester vinylique et d'acide crotonique/HOECHST, JO OEB 1985, 363).
5.5.4. Il n'y a aucune raison d'interpréter les dispositions précitées de la CBE de manière différente selon que ce sont les divisions d'opposition ou les chambres de recours qui sont concernées.
5.5.5. Une telle démarche va également dans le sens de la rationalisation nécessaire du déroulement de la procédure, puisqu'elle permet au titulaire du brevet, comme à l'opposant, de décider s'il a intérêt ou non à former un recours et puisque, lorsqu'un recours est formé, il n'est pas nécessaire que l'instance de recours décide le renvoi pour éviter au titulaire du brevet de perdre le bénéfice d'une instance, dès lors que celui-ci ne demande l'examen par l'instance de recours que des requêtes qui ont été rejetées en première instance.
5.6. Par conséquent, de l'avis de la Chambre, la division d'opposition a le droit, et elle est même tenue le cas échéant, de décider le maintien du brevet sur la base d'une requête formulée à titre subsidiaire par le titulaire, même si ce dernier maintient une requête principale ainsi que des requêtes subsidiaires non admissibles, précédant dans l'ordre de ses préférences la requête à laquelle il convient de faire droit. Elle estime qu'en prenant une telle décision, la division d'opposition ne contrevient ni aux dispositions des articles 102(3) et 113, ni à celles de la règle 58 CBE.
5.7. Avant que la décision de maintenir un brevet sous une forme limitée ne soit rendue, le titulaire du brevet est invité à produire la traduction des revendications modifiées, à acquitter la taxe d'impression etc... Toutes ces dépenses se révèlent avoir été effectuées en pure perte si plus tard, à la suite d'un recours, le texte se voit une nouvelle fois modifié ou si le brevet est révoqué. La pratique actuelle, qui consiste à rendre une décision intermédiaire motivée et susceptible de recours dans le cas où l'opposant a soulevé des objections, doit permettre d'éviter cet inconvénient. (cf. Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, D-VI, 6.2.2 et 6.2.3 et Communication de l'OEB "La procédure d'opposition à l'OEB", JO OEB 1985, 272).
Cette procédure peut s'appliquer sans problème même dans le cas où le titulaire du brevet a donné son accord sous réserve.
5.8. Les décisions de ce type, relatives au maintien d'un brevet sur la base d'une requête subsidiaire, sont rendues à l'expiration du délai fixé à la règle 58(4), du moins lorsque la procédure a lieu par écrit ; elles sont susceptibles de recours, conformément à l'article 106(3), et, comme toutes les décisions susceptibles de recours, doivent être motivées, en vertu de la règle 68(2) CBE. Le titulaire du brevet peut considérer qu'il n'a pas été fait droit à ses prétentions dans la mesure où il n'a pas été fait droit à une ou à plusieurs de ses requêtes venant dans l'ordre de ses préférences avant la requête subsidiaire à laquelle il a été fait droit. Quant à l'opposant, s'il a formulé son désaccord avant l'expiration du délai prévu à la règle 58(4) (cf. décision T 244/85, publiée au JO OEB 1988, 216), cette décision ne fait pas non plus droit à ses prétentions. C'est pourquoi, dans la décision, il y a lieu de préciser les motifs du rejet pour chacune des requêtes émanant du titulaire du brevet, ainsi que les motifs pour lesquels il a été fait droit à une requête subsidiaire que l'opposant avait contestée dans les délais.
5.9. Dans la présente espèce, du fait d'une interprétation erronée de la CBE, le brevet, au lieu d'être maintenu dans le texte dans lequel, selon la Division d'opposition, il pouvait être maintenu, a été révoqué. Cette erreur d'interprétation ne peut cependant être assimilée à un vice substantiel de procédure, la CBE ne prescrivant pas clairement la procédure à suivre dans le cas où il a été formulé une requête principale et des requêtes subsidiaires (cf. décision T 156/84, point 3.13, publiée au JO OEB 1988, 372).
5.10. Aux termes de la règle 68(2) CBE, les décisions de l'OEB doivent être motivées. Si, comme c'est le cas dans la présente espèce, il est, dans une seule décision, répondu négativement à plusieurs requêtes formulées par une partie, il y a lieu en tout état de cause de préciser dans ladite décision les motifs du rejet de chacune de ces requêtes. Or, il n'a pas été suffisamment tenu compte de cette obligation. Il peut certes être admis, à titre exceptionnel, de faire référence dans l'exposé des motifs d'une décision aux motifs énoncés dans des notifications antérieures, à condition que les considérations qui ont conduit la division d'opposition à prendre une telle décision ressortent nettement de l'exposé de motifs figurant dans lesdites notifications, ce qui n'est pas le cas dans la présente espèce, du moins en ce qui concerne le rejet des requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5.
La décision elle-même fait référence à une notification jointe à la notification du 17 juillet 1985, émise conformément à la règle 58(4), qui renvoie elle-même à une notification du 13 février 1985. Le motif du rejet de ces requêtes subsidiaires comme non conformes aux dispositions du droit des brevets, à savoir le défaut d'activité inventive, y est certes bien précisé. Toutefois, pour toute justification du bien-fondé de ce motif d'opposition, il était fait référence à des délibérations de la Division d'opposition, desquelles il ressortait que celle-ci avait accepté les arguments de l'opposante en faveur d'un texte de la revendication 1 ayant une portée plus large que le texte qu'elle proposait, du fait de la suppression des mots "l'entrée du", et que par conséquent le brevet devait être révoqué. C'est là une justification qui peut suffire à la rigueur dans le cas où les arguments présentés par la partie adverse ne nécessitent pas d'explication et lorsque les faits de la cause sont d'une simplicité telle que l'on peut comprendre sans peine pour quelles raisons la division d'opposition accepte ces arguments, mais dans la présente espèce, il est permis de douter que ces simples conditions soient réunies. Pour ce qui est des requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5, qui proposent des textes sur la base desquels a été rendue la décision de révoquer le brevet, la seule chose qui ressort de la notification précitée (point 3) est que, compte tenu de l'interprétation donnée par l'opposante de l'article publié dans "IEEE Transactions", l'objet de la revendication 1, dans le texte proposé par la division d'opposition (et sur lequel se fondent ces requêtes subsidiaires) ne semblerait pas impliquer d'activité inventive. Cette simple présomption n'est pas un motif suffisant, d'autant que les arguments invoqués par l'opposante à l'appui de cette thèse visent non pas les textes de la revendication 1 proposés dans les requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5, mais le texte de portée plus large sur lequel se fondent actuellement les requêtes subsidiaires 2.2 et 2.4. Ainsi donc, même s'il ressort clairement de la notification précitée que, pour la Division d'opposition, l'objet de la revendication 1 telle que proposée dans les requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5 n'implique pas d'activité inventive, nulle part dans ladite notification et, par voie de conséquence indirecte, nulle part dans la décision attaquée, il n'est indiqué si, et dans l'affirmative pourquoi, la division d'opposition considère que les arguments développés par l'opposante au sujet d'un appareil dans lequel la sortie d'un diviseur de fréquence est (d'une manière quelconque) reliée par couplage rétroactif à un autre diviseur de fréquence, valent également pour un appareil dans lequel la sortie d'un diviseur de fréquence est (tout particulièrement) reliée par couplage rétroactif à l'entrée d'un autre diviseur de fréquence. Le rejet des requêtes subsidiaires 2.3 et 2.5 n'est donc pas motivé, contrairement à ce qu'exigent la règle 51(3) pour les notifications et la règle 68(2) pour les décisions de l'OEB. Pour la Chambre, cette absence de motifs constitue un vice substantiel de procédure, qui justifie le remboursement de la taxe de recours (règle 67 CBE).
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la première instance pour maintien du brevet dans sa forme modifiée, sur la base des documents suivants :
2.1. Revendications 1 à 8 du fascicule de brevet
2.2. Description pages 1 et 2 de l'annexe à la notification du 4 avril 1984 établie conformément à la règle 58(4) CBE colonne 1, ligne 56, à colonne 2, ligne 3, du fascicule de brevet page 3, ligne 21, à page 15 de l'annexe à la notification du 4 avril 1984 ;
2.3. Dessins : figures 1 à 6 du fascicule de brevet
3. Il est ordonné le remboursement de la taxe de recours.