T 0043/82 16-04-1984
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Application à titre de médicaments de dérivés du tétrahydro pyridinyl indole et compositions pharmaceutiques les renfermant
Première appl.thérapeutique de substances conues
First therapeutical use
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 79 400 020.8, déposée le 9 janvier 1979 et publiée le 25 juillet 1979 sous le numéro 0 003 200, pour laquelle est revendiquée une priorité du 16 janvier 1978, fondée sur un dépôt antérieur en France, a été rejetée par décision du 17 septembre 1981 de la Division d'examen de l'Office européen des brevets. Cette décision se fonde sur les revendications déposées le 19 janvier 1981. La rédaction de la revendication l était la suivante :
Médicaments caractérisés en ce qu'ils sont constitués par les dérivés du tétrahydropyridinyl-indole répondant à la formule générale :
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dans laquelle A représente un atome d'hydrogène ou un radical méthoxy, R1, R2, identiques ou différents, représentent un atome d'hydrogène ou un radical méthyle, ainsi que par les sels d'addition avec les acides pharceutiquement acceptables, desdits dérivés.
II. Le motif du rejet est que, la demande portant sur une première introduction des substances connues de la formule générale I en thérapeutique, l'étendue de la protection couverte par la revendication 1 n'est pas conforme aux dispositions des Articles 52(4) et 54(5) CBE et qu'elle doit être limitée aux indications thérapeutiques spécifiques prévues dans la demande initiale.
Les revendications 2 à 12 étaient jugées acceptables.
III. La Demanderesse a formé un recours, contre cette décision reçu le 26 octobre 1981 et motivé celui-ci le 6 janvier 1982. Le recours tend principalement à la délivrance du brevet conformément à la demande. A titre subsidiaire, il conclut à la délivrance du brevet sur la base des revendications 2 à 12, en supprimant leur dépendance vis-à-vis de la revendication 1.
IV. Selon le mémoire à l'appui du recours, la requérante a soutenu que les textes invoqués des Articles 54(5) et 52(4) CBE ne contiennent aucune prescription quant à la limitation de la portée de la brevetabilité du médicament. Si le texte vise "une méthode de traitement..." l'article indéfini "une" est un singulier générique. La disposition de l'Article 54(5) CBE se justifie par le fait qu'il n'est pas possible de déterminer avec certitude la fonction pharmacologique et l'application pharmaceutique d'un médicament et que le secret médical doit être respecté. Une restriction de la portée du brevet engendrerait une insécurité juridique pour l'inventeur ainsi que pour les tiers. L'Office européen des brevets acceptant la revendication illimitée d'une substance nouvelle à titre de médicament, il ne serait pas logique de ne pas l'admettre lorsque la substance n'est pas nouvelle, puisque l'invention pharmaceutique est de même nature dans les deux cas.
V. Après que la Chambre de recours ait formulé ses observations, la requérante a présenté le 3 août 1983 de nouvelles revendications modifiées et de nouvelles pages 1 et 2 de la description.
La rédaction de ces revendications était la suivante :
1. Composés chimiques constitués par les dérivés du tétrahydropyridinyl-indole répondant à la formule générale :
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dans laquelle R représente un atome d'hydrogène ou un radical méthoxy, R1 et R2, identiques ou différents, représentent un atome d'hydrogène ou un radical méthyle, ainsi que par les sels d'addition avec les acides pharmaceutiquement acceptables desdits dérivés, pour leur utilisation dans une méthode de traitement thérapeutique du corps humain ou animal.
2. Composés chimiques selon la revendication 1, pour leur utilisation comme antidépresseurs, neuroleptiques et antiémétiques chez l'homme ou l'animal.
3. Composés chimiques selon la revendication 1, pour leur utilisation comme antidépresseurs chez l'homme ou l'animal.
4. Composés chimiques selon la revendication 1, pour leur utilisation comme neuroleptiques chez l'homme ou l'animal.
5. Composés chimiques selon la revendication 1, pour leur utilisation comme antiémétiques chez l'homme ou l'animal.
6. Composés chimiques selon la revendication 1, destinés au traitement des troubles psychiques, des troubles du comportement, des troubles caractériels ainsi qu'au traitement des vomissements et nausées de toutes origines chez l'homme ou l'animal.
7. Composés chimiques selon la revendication 1, destinés au traitement des troubles psychiques, des troubles du comportement et des troubles caractériels chez l'homme ou l'animal.
8. Composés chimiques selon la revendication 1, destinés au traitement des vomissements et nausées de toutes origines chez l'homme ou l'animal.
9. Composés chimiques, selon l'une des revendications 1 à 8, caractérisés en ce qu'ils sont constitués par les dérivés du tétrahydropyridinyl-indole répondant à la formule I de la revendication 1, dans laquelle R a la signification indiquée et R1 et R2 représentent un atome d'hydrogène, ainsi que par les sels d'addition avec les acides pharmaceutiquement acceptables desdits dérivés.
10. Composé chimique, selon l'une des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il est constitué par le 5-méthoxy 3-(1-méthyl 1,2,3,6-tétrahydropyridin-4-yl) 1H-indole, ainsi que par ses sels d'addition avec les acides pharmaceutiquement acceptables.
11. Composé chimique, selon l'une des revendications 1 à 8, caractérisé en ce qu'il est constitué par le 3-(1-méthyl 1,2,3,6-tétrahydropyridin-4-yl) 1H-indolé, ainsi que par ses sels d'addition avec les acides pharmaceutiquement acceptables.
12. Compositions pharmaceutiques, caractérisées en ce qu'elles renferment, à titre de principe actif, l'un au moins des composés chimiques définis dans l'une des revendications 1 à 11.
VI. Après accord téléphonique, les modifications suivantes du texte étaient retenues : à la fin de la revendication 12, ajouter : "ainsi qu'un excipient pharmaceutique inerte à l'exception de l'éthanol" ; supprimer les revendications 2 et 6 ; renuméroter les revendications 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11 et 12 en : 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées par les Articles 106 à 108 et la règle 64 de la CBE. Il est donc recevable.
2. Le contenu des revendications ne dépasse pas la demande dans sa forme initiale. L'application des substances selon la revendication 1, comme médicaments, possédant des propriétés à la fois antidépressives, neuroleptiques et antiémétiques et basés sur une étude pharmacologique a été révélée suffisamment.
3. L'état de la technique antérieur est révélé par J. Org. Chem. 40, 2525-2529 (1975). Six composés selon la demande figurent dans cet article dans les tableaux I et II. La demande contient deux exemples décrivant la préparation de deux composés différents. Tous les deux composés préparés étant identiques à un de ces six composés connus, notamment celui de l'exemple 1 au composé 4r, celui de l'exemple 2 au composé 4g, il faut conclure que le groupe de composés selon la revendication 1 n'est pas nouveau en soi. Ceci n'est pas conteste par la requérante.
4. Il est vrai que des composés selon le J. Org. Chem. 40, 2525-2529 (1975) cité ont été préparés dans le but de trouver des propriétés biologiques intéressantes (page 2526, troisième alinéa). Cependant, la suggestion que ces composés peuvent avoir de telles propriétés n'est pas considérée comme comportant leur utilisation thérapeutique. En outre, le groupe des composés indiqués explicitement dans ce contexte (des dérivés du tryptamine) n'est pas compris dans la demande. Ainsi, les composés revendiqués pour leur utilisation thérapeutique sont nouveaux au sens de l'Article 54(5).
Dans les brevets français 2 328 468 et 2 293 391 sont décrits des composés analogues possédant une activité antidépressive antiparkinsonienne et antiémétique. Du fait qu'ils possèdent un noyau pipéridyl, ainsi complètement saturé, au lieu d'un noyau tetrahydropyridyl insaturé, ces composés diffèrent structurellement de ceux selon la demande. En outre, l'activité neuroleptique des composés selon la demande ne figure pas dans l'art antérieur.
En résumé, l'utilisation thérapeutique des composés revendiqués ne découlant pas d'une manière évidente de l'état de la technique, l'activité inventive à la base de l'invention par rapport a l'art antérieur est indiscutable.
5. Les composés chimiques étant connus, mais leur activité thérapeutique n'étant pas révélée, la demande concerne une première application thèrapeutique de substances connues. Pour assurer une protection satisfaisante de l'invention, les deux catégories de revendications présentées :
a) une revendication pour une composition pharmaceutique (la revendication 12),
b) selon l'article 54(5) CBE, des revendications pour des composés en soi, destinés à une méthode de traitement thérapeutique (les revendications l à 11). sont en principe tous les deux brevetables.
6. Selon la Chambre la Convention ne contient ni un ordre ni une prohibition d'une protection illimitée puisque cette étendue n'est pas défini ni à l'article 54(5) ni à l'article 52(4).
7. Il n'est certainement pas logique de ne pas accepter une protection illimitée lorsque la substance n'est pas nouvelle, en considérant qu'une telle protection est généralement acceptée pour une substance nouvelle. L'acceptation d'une protection aussi étendue que possible constitue en effet la généralisation pour les médicaments de la pratique générale, et s'impose pour récompenser équitablement l'invention.
Il n'y a lieu de s'écarter d'une telle pratique que si une nécessité impérieuse se présente (cf. décision T 128/82). En outre, refuser la protection étendue aboutirait à introduire une différence essentielle entre la protection accordée aux compositions selon la revendication 12 et celle des substances selon la revendication 1.
8. Selon la Chambre, l'article indéfini "une" doit être considéré en effet comme un pluriel générique. Une interprétation étroite de l'article, c'est-à-dire numérique, rendrait impossible la protection de plusieurs effets thérapeutiques, tels qu'ils se présentent habituellement, dans une seule demande.
9. La revendication 12 est acceptable puisque la nouveauté des compositions pharmaceutiques définies est sauvegardée par deux adjonctions au texte initial :
a) les compositions doivent contenir un excipient pharmaceutique diffèrent du principe actif pour exclure les compositions constituées par le principe actif seul,
b) comme excipient pharmaceutique, l'éthanol est exclu, les solutions alcooliques des composés chimiques revendiqués étant déjà connues (J. Org. Chem. 40, 2528 (1976), experimental section).
Le fait que l'enseignement de l'invention, à savoir les propriétés pharmaceutiques des composés, n'était pas connu, justifie une rédaction strictement limitée de cet abandon (disclaimer) qui correspond au contenu littéral de l'art antérieur.
10. En résumé, la Chambre estime qu'une protection larqe de la première application thérapeuticue d'un composé connu ne peut pas être rejetée sur la seule base de l'article 34(5) CBE. Ca ne signifie pas qu'une telle protection soit acceptable sans toutes les hypothèses de cette nature (cf. décision T 128/82).
11. Il n'a pas été formulé de requête en remboursement de la taxe de recours en application de la règle 67 de la CBE. Au surplus, dans le cas d'espèce, une telle mesure ne serait pas justifiée.
DISPOSITIF
Par ces motifs il est statué comme suit :
1. La décision de la Division d'examen de l'Office européen des brevets du 17 septembre 1981 est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la première instance avec mission d'accorder un brevet européen sur la base des pièces suivantes :
- revendications 1-12 et pages 1 et 2 de la description reçues le 3 août 1983,
- pages 3-7 de la description initiale, à condition qu'à la revendication 12 et à la page 2, ligne 33 soit ajouté :
"ainsi qu'un excipient pharmaceutique inerte, à l'exception de l'éthanol", et que les revendications 2 et 6 soient supprimées ; les revendications 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11 et 12 étant renumérotées en : 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10.