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T 2256/19 (Barrière thermique/Safran Aircraft Engines) 07-02-2022
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Barrière thermique déposée directement sur superalliages monocristallins
Preuves produites tardivement
Activité inventive - (oui)
Exposé des faits et conclusions
I. Le recours de l'opposante (requérante) concerne la décision de la division d'opposition rejetant l'opposition contre le brevet européen EP 1 975 261 B1.
II. Le libellé des revendications indépendantes du brevet tel que délivré s'énonce comme suit:
"1. Procédé de dépôt d'une barrière thermique sur un superalliage (10) monocristallin, caractérisé en ce que ledit superalliage (10) a une composition en masse de 3,5 à 7,5% Cr, 0 à 1,5% Mo, 1,5 à 5,5% Re, 2,5 à 5,5% Ru, 3,5 à 8,5% W, 5 à 6,5% Al, 0 à 2,5% Ti, 4,5 à 9% Ta, 0,08 à 0,12% Hf, 0,08 à 0,12% Si, le complément à 100% étant constitué par Ni et des impuretés éventuelles, et en ce qu'on dépose directement sur ce superalliage une zircone (20) stabilisée avec au moins un oxyde d'un élément choisi dans le groupe constitué des terres rares, ou avec une combinaison d'un oxyde de tantale et d'au moins un oxyde de terre rare, ou avec une combinaison d'un oxyde de niobium et d'au moins un oxyde de terre rare."
"6. Pièce caractérisée en ce qu'elle est constituée d'un superalliage (10) monocristallin ayant une composition en masse de 3,5 à 7,5% Cr, 0 à 1,5% Mo, 1,5 à 5,5% Re, 2,5 à 5,5% Ru, 3,5 à 8,5% W, 5 à 6,5% Al, 0 à 2,5% Ti, 4,5 à 9% Ta, 0,08 à 0,12% Hf, 0,08 à 0,12% Si, le complément à 100% étant constitué par Ni et des impuretés éventuelles, et en ce qu'au moins une partie de sa surface est en contact direct avec une zircone (20) stabilisée avec au moins un oxyde d'un élément choisi dans le groupe constitué des terres rares, ou avec une combinaison d'un oxyde de tantale et d'au moins un oxyde de terre rare, ou avec une combinaison d'un oxyde de niobium et d'au moins un oxyde de terre rare, cette zircone jouant le rôle de barrière thermique"
Les revendications 2 à 5 se rapportent directement ou indirectement à la revendication 1 et les revendications 7 et 8 se rapportent directement ou indirectement à la revendication 6.
III. Les documents suivants, cités dans la décision, sont pertinents pour la présente demande:
D1: EP 0 971 041 A1
D2: CA 2 276 154 A1, ce document est de la même famille
que D1 et est équivalent à celui-ci. Ci-après référence sera faite à D1.
D3: US 5 538 796 A
D4: US 5 262 245 A
D6: Clarke, D. R. and Phillpot, S. R., Materials today,
Juin 2005, pages 22 à 29
IV. Avec son mémoire exposant les motifs du recours, la requérante a soumis le document suivant:
D7: Holt, R.T. and Wallace W., International Metals
Reviews, March 1976, pages 1 à 24
V. Avec la réponse au recours, la titulaire (intimée) a soumis deux requêtes subsidiaires et le document suivant:
D9: Balint, D.S., Xu T., Hutchinson J.W., Evans A.G.;
Acta Materialia 54, 2006, pages 1815 à 1820
VI. La procédure orale devant la chambre s'est tenue le 7 février 2022.
VII. Les arguments de la requérante pertinents pour la présente décision peuvent être résumés comme suit:
Les documents D1(D2) ou D3 peuvent être utilisés comme état de la technique le plus proche.
D3 divulgue le dépôt direct d'une barrière thermique sur un superalliage sans sous-couche. D3 enseigne explicitement que le traitement de désulfurisation de l'alliage permet d'étendre la gamme d'alliages -comprenant assez d'aluminium - sur lesquels une barrière thermique peut être déposée directement. Le problème énoncé au paragraphe [0007] du brevet est sans importance, car il n'est pas lié aux caractéristiques distinctives. Le problème à résoudre est de trouver un superalliage alternatif. Le fait que D3 indique que la désulfurisation permet d'utiliser d'autres alliages incite la personne du métier à en chercher d'autres ayant un contenu en aluminium similaire. Elle va se tourner vers D1(D2) qui concerne le même domaine et divulgue des superalliages pour turbines à gaz soumises à des températures très élevées. Eu égard à la composition similaire du superalliage de D1 au superalliage de D3 et compte tenu de sa meilleure résistance au fluage, la personne du métier va essayer la composition de D1 dans la méthode de D3 et arrivera à l'objet revendiqué. Le fait que l'alliage de D1 ne contienne pas de cobalt n'a pas d'effet sur la stabilité de la barrière thermique.
D1(D2) concerne des superalliages à base de nickel pour la fabrication d'aubes monocristallines fixes et mobiles de turbines à gaz soumises à des températures élevées. Il divulgue qu'une couche protectrice d'alumine est formée à haute température. Il est implicite qu'une barrière thermique est requise pour résister à ces températures élevées. D6 divulgue que la zircone stabilisée à l'oxyde d'yttrium est la norme dans l'industrie. D1 ne divulgue pas que la barrière thermique est déposée directement sur le superalliage. Le problème à résoudre est de trouver une méthode pour appliquer une barrière thermique. D3 et D4 divulguent des superalliages ayant des compositions similaires à celle de D1. En particulier, D3 décrit le dépôt direct d'une barrière thermique sur un superalliage contenant assez d'alumine et ayant subi une étape de désulfurisation. D3 enseigne la possibilité de déposer directement la barrière thermique sur une large gamme d'alliages. L'absence de cobalt dans le superalliage de D1 n'a aucun effet sur la stabilité de la barrière thermique.
VIII. Les arguments pertinents de l'intimée se reflètent dans les motifs ci-dessous.
IX. La requérante demande que la décision attaquée soit annulée et que le brevet soit révoqué.
L'intimée demande que le recours soit rejeté ou que le brevet soit maintenu sous forme modifiée sur la base d'une des requêtes subsidiaires 1 ou 2, présentées avec la réponse au recours.
Motifs de la décision
1. Article 12(4) RPCR 2007
Le mémoire exposant les motifs du recours ayant été déposé avant la date d'entrée en vigueur du RPCR 2020 et la réponse à ce mémoire ayant été produite en temps utile, l'article 12(4) RPCR 2007 s'applique (voir l'article 25(2) RPCR 2020). Selon cet article, la chambre a le pouvoir de considérer comme irrecevables des preuves qui auraient pu être produites au cours de la procédure d'opposition.
La décision attaquée est basée sur les arguments des parties qui, pour la plupart, sont connus depuis le début de la procédure d'opposition et ne contient donc pas de raisonnement surprenant qui pourrait rendre nécessaire le dépôt de nouveaux documents.
C'est pourquoi la chambre ne voit pas de raison justifiant au stade du recours le dépôt de D7 et D9 qui sont des publications de recherche et n'illustrent pas les connaissances générales de la personne du métier. Ces documents ne sont pas considérés comme recevables et ne font donc pas partie de la procédure.
Requête principale (brevet tel que délivré)
2. Article 100a) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE
Les conditions énoncées à l'article 56 CBE sont remplies pour les raisons suivantes.
2.1 Revendication 1
2.1.1 L'invention concerne un procédé de dépôt d'une barrière thermique sur un superalliage monocristallin (alinéa [0001]).
2.1.2 Le document D3 est considéré comme l'état de la technique le plus proche, car il concerne aussi un tel procédé et a aussi comme but d'atteindre une longue durée de vie du superalliage revêtu d'une barrière thermique tout en simplifiant la fabrication et en réduisant le coût de fabrication (voir colonne 2, lignes 58 à 63). L'objectif est donc le même que dans le brevet en litige (alinéa [0007]). D3 enseigne que l'alliage René N5 utilisé est soumis à un traitement de désulfurisation (colonne 6, lignes 6 à 50). Le traitement de désulfurisation fait que la réaction du soufre avec l'yttrium, le zirconium ou une terre rare est superflue (colonne 6, lignes 62 à 67). De plus, il permet le dépôt de la barrière thermique directement sur l'alliage (voir colonne 9, lignes 57 à 65). La désulfurisation est donc clairement présentée comme faisant partie de l'invention de D3 (voir aussi la revendication 1).
D1 (D2) est moins approprié comme état de la technique le plus proche, car D1 concerne des superalliages adaptés à des applications dans les moteurs aéronautiques servant à la propulsion des avions et hélicoptères [alinéa 0001], mais ne s'intéresse pas aux barrières thermiques. Le but de D1 est de trouver un superalliage qui résiste mieux au fluage (alinéa [0009]) sans pénaliser la résistance à la corrosion et à l'oxydation à chaud (alinéa [0010]). Pour obtenir ce dernier effet, les superalliages sont généralement revêtus d'un dépôt protecteur (couche protectrice) du type aluminiure de nickel ou alliage MCrAlY (alinéa [0003]). L'interprétation de l'alinéa [0037] faite par la requérante en ce qui concerne une présence implicite d'une barrière thermique est basée sur une analyse a posteriori de D1, car cet alinéa se rapporte plutôt à cette couche protectrice.
2.1.3 Le problème à résoudre est de fournir un procédé plus simple (alinéa [0007]) tout en maintenant une excellente durée de vie. Ce problème a été formulé d'emblée dans le brevet en litige et il n'y a pas de raison de l'écarter à priori au vu de l'état de la technique D3 qui n'est pas cité dans le brevet.
2.1.4 Il est proposé de résoudre ce problème par un procédé selon la revendication 1 caractérisé en ce que la composition ne contient pas de cobalt, mais contient 2,5 à 5,5% de ruthénium, 0,08 à 0,12% de hafnium et 0,08 à 0,12% de silicium.
2.1.5 Il est accepté que le problème est résolu, car le choix de la composition de l'alliage fait que le procédé peut être réalisé sans désulfurisation, ce qui le rend plus simple. Les résultats des exemples du brevet montrent que le produit obtenu a une excellente durée de vie. Il n'y a pas de raison ou de preuve contraire qui montre que cet effet pourrait seulement être obtenu en incluant une étape de désulfurisation, ce qui pourrait ainsi mettre en cause la conclusion que le problème est résolu.
2.1.6 Il reste à déterminer si la solution proposée est évidente eu égard à l'état de la technique.
Comme indiqué plus haut (point 2.1.2) D3 enseigne clairement le traitement de désulfurisation comme étant essentiel. La personne du métier ne trouve donc pas d'incitation à changer la composition de l'alliage pour omettre cette étape. Même s'il est accepté que D3 enseigne que, grâce à la désulfurisation, le dépôt direct d'une barrière thermique est possible sur différents superalliages à base nickel contenant de l'aluminium, D3 ne dirige pas la personne du métier vers le choix d'un superalliage permettant l'omission de cette étape de désulfurisation et donc la simplification du procédé.
D1 (D2) ne concerne pas le dépôt d'une barrière thermique (point 2.1.2 ci-dessus). Il n'y a donc pas de raison pour laquelle la personne du métier essayant de résoudre le problème posé se tournerait vers D1. Une concentration similaire en aluminium n'est pas suffisante comme le montrent D4 (voir ci-dessous) et la comparaison entre les alliages AM1 et MCNG du brevet. De plus, la concentration de hafnium est moindre dans D1, alors que D3 présente le hafnium comme avantageux pour la fixation de soufre. Même s'il était accepté que théoriquement le silicium et le titanium présents dans D1 pouvaient piéger le soufre, rien n'indique que cela serait vraiment le cas dans le superalliage de D1 et suffisant pour omettre la désulfurisation, car D1 ne contient aucune indication à ce sujet. Le silicium est plutôt ajouté pour optimiser la tenue à l'oxydation à chaud des alliages (alinéa [0037]). En outre, il n'y a pas de raison d'exclure complètement le cobalt qui a un effet positif sur la résistance mécanique surtout que l'alliage René N5 de D3 en contient une quantité importante (7.5%). Il ressort aussi à l'évidence de D1 que des petits changements de la composition du superalliage ont un effet important sur la durée de vie (voir Tableau 1 et 3 de D1). Il n'y a pas d'indication explicite ou implicite dans D1 que le superalliage qui y est décrit puisse rendre obsolète l'étape de désulfurisation de D3 pour déposer directement une barrière thermique.
La combinaison du document D3 avec D1 est basée sur une approche a posteriori.
Le document D6 ne divulgue pas de composition d'alliage. Il n'enseigne pas que le dépôt de la zircone stabilisée avec l'yttrium peut toujours se faire directement sur n'importe quel alliage comprenant de l'oxyde d'aluminium, mais divulgue cette option comme une possibilité qui dépend de la composition du superalliage (voir page 23, colonne de gauche).
D4 concerne une amélioration des propriétés thermiques (colonne 2, lignes 13 à 18) et enseigne que la composition de l'alliage est cruciale pour obtenir l'effet désiré (colonne 2, lignes 22 à 25). Même si D4 ne décrit pas d'étape de désulfurisation, D4 montre que la possibilité de déposer directement une barrière thermique dépend de la composition du superalliage même à concentration similaire en aluminium, car les alliages des exemples C à E ne sont pas aptes à un tel dépôt direct (colonne 3, lignes 44 à 49). La composition la plus performante est celle de l'exemple 1 qui se distingue nettement de la composition utilisée dans le procédé selon la revendication 1 du brevet en litige.
La chambre conclut donc que la solution proposée ne découle pas de façon évidente de l'état de la technique.
2.1.7 Même si la personne du métier partait de D1, il n'y aurait pas de raison d'appliquer le procédé de D3 au superalliage de D1 eu égard à la différence de la composition des superalliages. En outre, comme indiqué ci-dessus, D1 enseigne plutôt une couche d'ancrage à l'alinéa [0003] et rien n'indique que le superalliage de D1 serait apte à tenir une barrière thermique déposée directement.
2.1.8 L'objet de la revendication 1 implique donc une activité inventive. Cela vaut également pour les revendications dépendantes 2 à 5.
2.2 Revendication 6
L'argumentation de la requérante concernant la revendication 1 s'appliquait aussi à la revendication 6. Par conséquent, la conclusion tirée pour la revendication 1 vaut aussi pour la revendication 6, laquelle implique donc également une activité inventive. Les revendications 7 et 8 se réfèrent directement ou indirectement à la revendication 6 et impliquent également une activité inventive.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté.