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T 0853/01 09-08-2005
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Procédé de fabrication d'un tube pour assemblage combustible nucléaire
Westinghouse Atom AB
Sandvik AB
Nouveauté (oui)
Activité inventive (oui)
Admissibilité d'un motif d'opposition invoqué tardivement (non)
Exposé des faits et conclusions
I. Les recours des requérants/titulaires (ci-après dénommés "requérants RT"), du requérant/opposant I ((Westinghouse Atom AB, [autrefois ABB AB] ; ci-après dénommé : "requérant RO1") et du requérant/ opposant II (Sandvik AB ; ci-après dénommé "requérant RO2") visent tous à annuler la décision intermédiaire de la division d'opposition, remise à la poste le 18 juin 2001, maintenant le brevet EP-B-0 720 177 sous forme modifiée selon une requête subsidiaire des titulaires.
L'acte de recours des requérants RT a été déposé le 26 juillet 2001, et la taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 6 octobre 2001.
L'acte de recours du requérant RO1 a été déposé le 18 août 2001, et la taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 24 octobre 2001.
L'acte de recours du requérant RO2 a été déposé le 20 juillet 2001, et la taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 25 octobre 2001.
II. Les oppositions avaient été formées contre le brevet dans son ensemble notamment au titre de l'article 100a) CBE et étaient fondées sur les motifs d'opposition des articles 52(1), 54 et 56 CBE.
En outre, hors du délai d'opposition, le requérant RO1 a invoqué le motif prévu à l'article 100 b) CBE. La division d'opposition a décidé de ne pas prendre en compte ce motif à cause de son caractère non convaincant et tardif. En recours, le requérant RO1 a demandé à nouveau que ce motif soit admis dans la procédure.
III. À l'appui de leurs recours, les requérants RO1 et RO2 ont fait référence aux documents suivants :
D1.1.1 : A. V. Nikulina : "Metal science aspects of zirconium-base reactor material production in the Soviet Union", présenté à l'occasion de l'"AWARD of the William J. Kroll Zirconium Medal, Kobe - Japan -November 1990", "ASTM Ninth International Symposium on Zirconium in the Nuclear Industry", pages numérotées à la main 86-105 ;
D1.1.2 : F. G. Reshetnikov, A. V. Nikulina : "Production of zirconium-alloy fuel cladding tubes in the Soviet Union", indiqué à la main "1990 (Japan, 9 Intern. Sympos. of Z in the Nucl. Ind.)", pages numérotées à la main 111- 117 ;
D1.1.3 : A. V. Nikulina et al. : "Metallurgical factors determining zirconium alloy properties under irradiation", indiqué à la main "1989 (Intern. Conf., USSR, Alushta?)", pages numérotées à la main 118-130 ;
D1.1.4 : "Loop Test Reactor MIR", pages numérotées à la main 107-108 ; et
D1.1.5 : "SM-2 High-Flux Research Reactor", pages numérotées à la main 109-110 ;
D1.2 : EP-B-0 198 570 ;
D1.3 : P.V. Shebaldov et al. : "E110 alloy cladding tube properties and their interrelation with alloy structure-phase condition and impurity content", publié dans l'ouvrage "Zirconium in the Nuclear Industry : Twelfth International Symposium" ; editors G. P. Sabol et al. ; ASTM Stock Number : STP 1354, janvier 2000, pages 545-559 ;
D1.4 : J. P. Mardon et al. : "Influence of composition and fabrication process on out-of- pile and in-pile properties of M5 alloy", publié dans l'ouvrage "Zirconium in the Nuclear Industry : Twelfth International Symposium" ; editors G. P. Sabol et al. ; ASTM Stock Number : STP 1354, janvier 2000, pages 505-524 ;
D1.5 : WO-A-92/08818 ;
D1.6 : Zirconium in the Nuclear Industry, Symposium Strasbourg 24-27 juin 1985, pages 341-343 ;
D1.7 : US-A-4 212 686 ;
D1.8 : X. Meng et al., "Intermetallic Precipitates in Zirconium-Niobium Alloys", ASTM STP 1023, 1989, pages 478-486 ;
D1.9 : D. O. Northwood et al., "Microstructure of Zr- 2.5Nb Alloy Pressure Tubing", ASTM STP 1132, 1991, pages 156 and 157 ;
D1.10 : M. Hansen, "Constitution of Binary Alloys", 2nd edition, McGraw-Hill Book Comp., New York Toronto London, 1958, pages 741, 742, and 1023 ;
D1.10a : M. Hansen, "Constitution of Binary Alloys", 2nd edition, McGraw-Hill Book Comp., New York Toronto London, 1958, page 1079 ; et
D2.3 : US-A-4 450 016.
Les requérants RT ont fait référence aux documents :
T1 : P. Liang et al, "Thermodynamic Assessment of the Zr-O binary System", Z. Metallkd. 92 (2001) 7, pages 747-756 ; et
T2 : C. Wang et al, "On the thermodynamic modeling of the Zr-O system", Computer Coupling of Phase Diagrams and Thermochemistry, 28 (2004), pages 281-292.
IV. Une procédure orale s'est tenue devant la Chambre le 9 août 2005 en l'absence du requérant RO2.
V. Les requérants RO1 et RO2 ont demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen.
VI. Les requérants RT ont demandé, à titre de requête principale, l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet tel que délivré, ou, à titre de requêtes subsidiaires, le maintien du brevet sous forme modifiée suivant une première ou une seconde requête subsidiaire, déposées par lettre du 26 avril 2002.
VII. Les revendications indépendantes 1 et 8 selon la requête principale s'énoncent comme suit :
"1. Procédé de fabrication de tube destiné à constituer la totalité ou la partie externe d'une gaine de crayon de combustible nucléaire ou un tube guide pour assemblage de combustible nucléaire, caractérisé en ce que :
on constitue une barre en un alliage à base de zirconium contenant également de 50 à 250 ppm de fer, 0,8 à 1,3% en poids de niobium, moins de 1600 ppm d'oxygène, moins de 200 ppm de carbone et moins de 120 ppm de silicium ; on trempe à l'eau la barre après chauffage entre 1000°C et 1200°C ;
on file une ébauche après chauffage de 600°C à 800°C ; on lamine à froid, en au moins quatre passes, ladite ébauche pour obtenir un tube, avec des traitements thermiques intermédiaires entre 560°C et 620°C ; et on effectue un traitement thermique final entre 560°C et 620°C, l'ensemble des traitements thermiques étant effectué en atmosphère inerte ou sous vide."
"8. Tube de gainage pour crayon de combustible ou de guidage pour assemblage combustible de réacteur nucléaire refroidi et modéré par de l'eau sous pression, constitué d'un alliage à base de zirconium à l'état complètement recristallisé, ayant 50 à 250 ppm de fer, 0,8 à 1,3% en poids de niobium, 1000 à 1600 ppm d'oxygène, moins de 200 ppm de carbone, moins de 120 ppm de silicium, le reste étant constitué par du zirconium, exception faite des impuretés inévitables."
Les revendications 2 à 7 sont des revendications dépendantes.
Selon la première requête subsidiaire, la phrase "et ne comportant pas d'alignements de précipités de BetaZr" est ajoutée à la fin de la revendication 8.
La deuxième requête subsidiaire ne comprend que les revendications 1 à 7 de procédé.
VIII. Les arguments développés par le requérant RO1 peuvent être résumés comme suit :
Les documents D1.1.1 à D1.1.5 constituaient en fait des parties d'un seul document (D1.1). A la lumière de l'enseignement dudit document, les objets des revendications 1 et 8 étaient dépourvus de nouveauté ou, à tout le moins, n'impliquait aucune activité inventive. Quant à l'objet de la revendication 8, le document D1.1 se référait dans les parties D1.1.1 et D1.1.2 à un alliage Zr-1%Nb dont la composition correspondait à la composition revendiquée et qui était à la base de la fabrication des tubes destinés à constituer une gaine de crayon de combustible nucléaire. Quant au procédé revendiqué, le document décrivait expressément dans la partie D1.1.2 l'étape de laminage à froid d'une ébauche avec des traitements thermiques intermédiaires et finaux dans une gamme de températures qui tombaient en plein dans la gamme revendiquée. Les étapes qui précédaient le laminage à froid et qui restaient selon la revendication 1 du brevet, c'est-à-dire la trempe Beta et le filage de l'ébauche, constituaient des mesures qui étaient tout à fait usuelles et faisaient donc partie des connaissances générales de l'homme du métier. Ce fait était prouvé surtout par les documents D1.2, D1.5 à D1.7 et D2.3.
Quant à l'aspect de l'invention associant une résistance élevée au fluage thermique avec une teneur spécifique en fer, le document D1.4 apportait la preuve qu'un tel effet n'existait pas. Le brevet était donc erroné et ne satisfaisait pas les exigences des articles 83 et 100b) CBE.
IX. Selon le requérant RO2, l'objet de la revendication 1 n'était pas nouveau vis-à-vis l'enseignement du document D1.2. En outre, l'objet de la revendication 8 ne différait de l'enseignement du document D1.1.2 que par la teneur en oxygène, un détail qui n'impliquait pas une activité inventive.
X. Les requérants RT ont fait valoir qu'aucun des documents cités ne divulguait un procédé avec toutes les caractéristiques selon la revendication 1 ou un tube de gainage fabriqué à partir d'un alliage tel que défini par la revendication 8.
L'invention du brevet était fondamentalement un couplage entre une gamme de compositions inhabituellement restreinte et non évidente à rechercher et un schéma de traitements thermomécaniques qui constituait un choix spécifique parmi beaucoup d'autres. L'ensemble complexe et cohérent de caractéristiques liées à la composition d'alliage et aux multiples traitements thermomécaniques permettait de réaliser un tube de gainage ayant simultanément une résistance élevée au fluage à haute température et une résistance améliorée à la corrosion. Notamment, aucun des documents n'indiquait que la teneur en fer ne devrait dépasser 250 ppm afin d'obtenir les propriétés recherchées.
Le nouveau motif d'opposition selon l'article 100b) CBE était tardivement invoqué et au surplus mal fondé ; il ne devait donc pas être pris en considération.
Motifs de la décision
1. Les recours formés satisfaisant aux textes de la CBE, notamment quant aux délais prévus, sont recevables.
2. Requête principale - Nouveauté de l'objet de la revendication 1
2.1 Les seuls documents du groupe de documents cités par les requérants RO1 et RO2 traitant avec détails de la fabrication de tubes de gainage à base d'un alliage Zr-1%Nb sont les documents D1.1.2 et D1.2.
2.2 Le document D1.1.2 est compris dans un document désigné "D1.1" soumis par le requérant RO1 et comprenant en fait cinq parties numérotées D1.1.1 à D1.1.5 telles qu'indiquées ci-dessus. Etant donné que les parties D1.1.1 à D1.1.3 sont des publications sous le nom de différents groupes d'auteurs, que leurs dates manuscrites diffèrent ("1990" pour D1.1.1 et D1.1.2 ; "1989" pour D1.1.3), et que les parties D1.1.4 et D1.1.5 n'incluent aucune information bibliographique, chacune desdites parties constitue de toute évidence un document distinct et indépendant. La Chambre n'accepte donc pas l'avis du requérant RO1 selon lequel il s'agissait de parties d'un seul et même document.
Il s'ensuit qu'aux fins d'examen de la nouveauté au sens de l'article 54(1) et (2) CBE il n'est pas possible de combiner des informations divulguées dans le document D1.1.2 à des informations comprises par exemple dans les documents D1.1.1 ou D1.1.3.
2.3 Le document D1.1.2 se réfère aux alliages à base de zirconium pour des tubes de gainage utilisés dans un réacteur nucléaire, y compris un alliage binaire de type Zr-1%Nb.
2.3.1 Selon la page 112, premier paragraphe, les matières premières pour former cet alliage sont composées de quatre parties constituantes : du Zr électrolytique en poudre, du Zr de recyclage pur, du Zr obtenu par voie iodure, et du Nb sous forme métal. Le tableau 1 à la page 111 divulgue les teneurs en composants mineurs ou en impuretés des parties constituantes Zr "voie électrolytique" et Zr "voie iodure", y compris des teneurs en fer (Fe), oxygène (O), carbone (C) et silicium (Si). Quant à l'élément Fe, le tableau 1 indique une teneur "standard" de 500 ppm et une teneur "actuelle" de 130 ppm pour le Zr "voie électrolytique" et une teneur "standard" de 300 ppm ainsi qu'une teneur "actuelle" de 120 ppm pour le Zr "voie iodure". Quant à l'élément O, une teneur "standard" de 1000 ppm et une teneur "actuelle" de 700 ppm sont indiquées pour le Zr "voie électrolytique" ainsi que les teneurs correspondantes de 500 ppm et 200 ppm pour le Zr "voie iodure". Quant au C, les teneurs "standard" et "actuelle" divulguées pour le Zr "voie électrolytique" sont 200 ppm et 60 ppm, et 80 ppm et 70 ppm pour le Zr "voie iodure". Quant au Si, les teneurs correspondantes sont 200 ppm et 60 ppm pour le Zr "voie électrolytique" ou 80 ppm et 40 ppm pour le Zr "voie iodure".
2.3.2 L'information donnée par D1.1.2 laisse quelques doutes quant aux teneurs exactes en composants mineurs ou en impuretés dans l'alliage final : d'une part, parce que le tableau 1 ne précise que la matière première de zirconium pour former l'alliage et, d'autre part, parce que le document n'indique pas la pureté du Nb qui est ajouté à l'alliage. Surtout, l'enseignement du document ne reconnaît aucun effet attribué à la teneur en Fe et apparemment envisage pour la fabrication de tubes une teneur de l'ordre de 500 ppm, c'est-à-dire une teneur au-delà de la gamme requise selon la revendication 1 du brevet contesté, comme teneur satisfaisante.
2.3.3 De plus, en ce qui concerne le procédé de fabrication des tubes à base d'alliage Zr-1%Nb, D1.1.2 précise qu'un état complet de recristallisation est préférable pour certaines propriétés mécaniques (voir page 113, deuxième paragraphe, et page 114, premier paragraphe) et que la recristallisation est accomplie par un traitement thermique entre 580°C et 600°C d'une ébauche intermédiaire et de tubes finis. Les températures des traitements thermiques intermédiaires et finales tombent donc bien dans les gammes correspondantes revendiquées.
Cependant, D1.1.2 ne précise pas sous quel genre d'atmosphère ou de vide les traitements thermiques intermédiaires et finales doivent être effectués. En outre, le document ne donne aucune indication en ce qui concerne les détails de la fabrication de tube précédant le laminage à froid, c'est-à-dire concernant les étapes de préparation d'une barre de l'alliage et d'une ébauche. Bien que la Chambre partage l'avis du requérant RO1 que les étapes précédentes le laminage à froid, y compris un trempage Beta de la barre et un filage chaud de l'ébauche, sont en soi tout à fait conventionnelles et font donc parties des connaissances générales de l'homme du métier, ceci n'est pas le cas pour les conditions sous lesquelles lesdites étapes peuvent être réalisées et ainsi pour les gammes de températures respectives telles que revendiquées.
2.3.4 Pour ces raisons, la Chambre considère l'objet de la revendication 1 nouveau par rapport à la divulgation du document D1.1.2.
2.4 Le document D1.2 décrit un procédé de fabrication de tubes guides ou de gainage utilisés dans un réacteur nucléaire à base de trois types d'alliages Zr-Nb, à savoir des alliages binaires Zr-1%Nb ou Zr-2,5%Nb ainsi qu'un alliage ternaire Zr-1%Nb-0,5%X, dont X et choisi parmi les éléments Cu, Fe, Mo, Ni, W, V ou Cr.
2.4.1 Afin d'obtenir des tubes ayant une microstructure avec une distribution des précipités très fine, le procédé connu de D1.2 comprend les étapes suivantes (cf. revendications 1 à 3 ; page 2, lignes 34-63) :
- On constitue une barre en un alliage à base de Zr contenant par exemple 1% en poids de Nb.
- On trempe à l'eau la barre après chauffage entre 950°C et 1000°C. Selon le seul exemple concernant spécifiquement l'alliage binaire Zr-1%Nb, la température est choisi entre 968°C et 996°C (page 3, lignes 19-23).
- On file une ébauche après chauffage à moins de 700°C (ou même moins de 650°C) ou à 649°C selon l'exemple spécifique de l'alliage Zr-1% Nb (cf. page 3, lignes 24-26).
- On lamine à froid, en trois à cinq passes, ladite ébauche pour obtenir un tube, avec des traitements thermiques intermédiaires au-dessous de 650°C, de préférence, entre 500°C et 600°C ; et particulièrement à une température de 524°C dans l'exemple spécifique de l'alliage Zr-1%Nb (page 3, lignes 30-40).
- On effectue un traitement thermique final à une température inférieure à 600°C ; et spécifiquement à une température de 427°C dans l'exemple spécifique de l'alliage Zr-1%Nb (page 3, lignes 30-40).
2.4.2 Bien que le procédé connu de D1.2 comprends en principe toutes les étapes figurant dans la revendication 1 du présent brevet et bien que les diverses gammes connues de températures tombent dans ou couvrent sensiblement les gammes correspondantes revendiquées (ou au moins touchent celles-ci), l'enseignement connu n'antériorise pas le procédé selon la revendication 1 du brevet parce que de toute façon le document D1.2 n'indique pas de teneurs en impuretés ou composants mineurs dans l'alliage binaire Zr-1%Nb, et ne précise pas non plus sous quel genre d'atmosphère ou de vide les traitements thermiques intermédiaires et finaux doivent être effectués.
2.4.3 Il s'ensuit donc que l'objet de la revendication 1 du brevet contesté est nouveau aussi par rapport à l'enseignement du document D1.2.
3. Requête principale - Nouveauté de l'objet de la revendication 8
3.1 Les documents D1.1.1 et D1.1.2 sont les seuls documents disponibles qui comprennent des informations sur les composants mineurs et impuretés d'un alliage Zr-1%Nb utilisé pour des tubes de gainage dans un réacteur nucléaire.
3.2 Il s'ensuit des observations comprises dans les paragraphes 2.3.1 et 2.3.2 ci-dessus, que le document D1.1.2 ne divulgue pas l'enseignement de contrôler et limiter la teneur en Fe sur la gamme revendiquée de 50. ppm à 250 ppm.
De plus, entre les matériaux de base divulgués qui forment l'alliage, seulement le constituant Zr "voie électrolytique" atteint selon la variante "standard" une teneur en O de 1000 ppm tandis que toutes les autres variantes indiquées possèdent une teneur en O sensiblement inférieure à 1000 ppm. Il n'est donc pas possible d'atteindre par aucun mélange des constituants divers connus de D1.1.2 une teneur en O dans la gamme de 1000 ppm à 1600 ppm telle que revendiquée et le document ne comprend aucun indice qu'un telle gamme serait atteinte par une absorption additionnelle de O pendant la formation de l'alliage.
Par conséquent, l'objet de la revendication 8 est nouveau par rapport à la divulgation du document D1.1.2.
3.3 Le document D1.1.1 indique la signification des impuretés pour la résistance à la corrosion et les propriétés mécaniques des alliages Zr-Nb utilisés pour des tubes de gainage ou de guidage dans un réacteur nucléaire. Dans le contexte d'un alliage Zr-1%Nb, il est observé qu'une teneur en oxygène entre 1200 ppm et 1300 ppm augmente le degré de recristallisation pendant le laminage à froid et ainsi améliore la performance de tubes de gainage (cf. page 91, dernier paragraphe ; figure 6). Néanmoins, selon le tableau 2 (voir page 98), qui liste entre autres les teneurs maximales permises en impuretés pour les parties constituantes Zr "voie iodure" et Zr "voie électrolytique" ainsi que pour l'alliage Zr-1%Nb final, la teneur en O ne doit pas dépasser 500 ppm (dans Zr "voie iodure") ou 1000 ppm (dans Zr "voie électrolytique" et l'alliage final). Le tableau 2 indique aussi que la teneur en Fe ne doit pas dépasser 300 ppm (dans Zr "voie iodure") ou 500 ppm (dans Zr "voie électrolytique" et l'alliage final).
D1.1.1 ne divulgue donc pas un alliage à base de Zr-1%Nb dont la teneur en O se trouve dans la gamme revendiquée de 1000 ppm à 1600 ppm et dont la teneur en Fe reste toujours entre 50 ppm et 250 ppm telle que revendiquée.
Par conséquent, l'objet de la revendication 8 est nouveau aussi par rapport à la divulgation du document D1.1.1.
4. Requête principale - activité inventive
4.1 Selon la description du brevet litigieux, l'invention vise notamment à fournir un procédé de fabrication de tubes de gainage permettant d'arriver à un tube présentant simultanément une bonne résistance à la corrosion en milieu aqueux à haute température et une tenue au fluage à haute température satisfaisante, sans pour autant présenter de difficulté de mise en oeuvre conduisant à un taux de rebut élevé (colonne 1, lignes 40-46 du brevet).
Il est évident de la description du brevet que deux mesures de la revendication 1 jouent un rôle particulièrement important pour atteindre ce but.
Tout d'abord, il est important de ne pas dépasser une teneur en fer de 250 ppm afin d'éviter que la résistance au fluage à haute température diminue sensiblement (ibid. colonne 2, lignes 24-34). Il est également essentiel de ne faire subir à l'alliage aucun traitement thermique à une température supérieure à 620°C au-delà du filage, parce qu'un traitement thermique dépassant cette température réduit en effet notablement la résistance à la corrosion à chaud (ibid. colonne 2, lignes 35-43).
4.2 Quant à l'état de la technique concernant un procédé de fabrication de tubes de gainage à base d'un alliage du type Zr-1%Nb, la Chambre partage l'avis des requérants RO1 et RO2 que l'homme du métier a connaissance des documents D1.1.2 et D1.2 et combinerait leurs enseignements. Il reconnaitrait donc que le procédé divulgué par D1.2 est approprié pour la fabrication de tubes à base d'un alliage tel que connue de D1.1.2 ou, vice versa, que D1.2 complète le renseignement de D1.1.2 par les éléments manquants concernant les étapes de procédé qui nécessairement précèdent le laminage à froid.
4.3 D'une telle considération de la part de l'homme du métier résulterait un procédé duquel l'objet de la revendication 1 du brevet différait essentiellement dans les deux aspects suivants :
(i) la gamme de températures à partir de laquelle le trempage Beta doit avoir lieu est plus élevée (entre 1000°C à 1200°C selon la revendication 1 par rapport à 950°à 1000°C selon D1.2) ; et
(ii)la teneur en Fe est limitée à la gamme 50 ppm à 250 ppm.
4.4 La chambre note qu'elle ne peut discerner, contrairement à l'opinion des requérants RT, aucune différence en ce qui concerne les températures du filage et des traitements thermiques intermédiaires et finaux ou la teneur en O.
L'exemple spécifique de 649°C divulgué par D1.2 pour la température du filage tombe en plein dans la gamme revendiquée (600°C à 800°C).
Même si les exemples spécifiques divulgués par D1.2 pour les traitements thermiques intermédiaires et finaux (524°C et 427°C) se trouvent au-dessous de la gamme revendiquée (560°C à 620°C), les revendications 1 et 3 du D1.2 néanmoins indiquent que ces températures peuvent être choisies dans une gamme de températures jusqu'à une limite supérieure de 600°C. De toute façon, D1.1.2 (voir page 114, premier alinéa) enseigne, en tant qu'alternative assurant une recristallisation complète, une gamme (580°C à 600°C) qui tombe au milieu de la gamme revendiquée.
Enfin, toutes les valeurs pour la teneur en O indiquées dans D1.1.2 satisfont la condition revendiquée (moins de 1600 ppm). En outre, dans le contexte d'un alliage de type Zr-1%Nb, le document D1.1.1 (page 91, dernier alinéa ; figure 6) fait expressément référence à l'avantage d'une résistance élevée au fluage qui est associé avec une teneur en O entre 1200 ppm et 1600 ppm.
4.5 La gamme revendiquée de températures selon l'aspect (i) identifié ci-dessus assure que l'alliage se trouve complètement dans la phase Beta avant que le trempe à l'eau ait lieu.
Se référant aux documents T1 et T2 en tant qu'expertise, les requérants RT ont fait valoir que la limite inférieure de la phase Beta remontait sensiblement avec une teneur croissante en O si bien que la teneur en O telle que prévue par la l'invention nécessitait un chauffage à une température sensiblement au-dessus de la gamme connue de D1.2.
Néanmoins, selon la Chambre, l'aspect (i) ne peut pas justifier une activité inventive pour les raisons suivantes :
D'une part, il est à constater que le document D1.2 (revendication 1 ; page 2, lignes 51-53) ne laisse aucun doute que le trempage doit avoir lieu à partir de la phase Beta. Il est donc évident pour l'homme du métier de choisir une température appropriée assurant pour le procédé connu que l'alliage se trouve dans son ensemble dans la phase Beta. D'autre part, les documents T1 et T2 ainsi que le document D1.10a, tous se référant aux diagrammes de phase d'un système binaire Zr-O, montrent que l'effet d'une augmentation de la limite inférieure de la phase Beta est presque négligeable pour des teneurs en O dans la gamme revendiquée, c'est-à-dire au- dessous 1600 ppm (0,16% en poids). En outre, les documents D1.5 (page 9, lignes 19-23), D1.7 (colonne 3, lignes 3-9) et D2.3 (colonne 3, lignes 26-35) démontrent qu'il était tout à fait normal de chauffer des alliages Zr pour de tube de gainage afin d'une trempe Beta significativement au-dessus de 1000°C.
4.6 Quant à l'aspect (ii), la situation est tout à fait différente.
Aucun des documents de l'état de la technique présenté dans le recours n'indique qu'il soit possible d'augmenter sensiblement la résistance au fluage si on limite la teneur en Fe dans la gamme de 50 ppm à 250 ppm, tel qu'il est démontré par les expériences résumées dans la seule figure du brevet, tout en gardant une résistance améliorée à la corrosion telle qu'associée au traitement thermique spécifique pendant le laminage au froid.
Bien que les seuls documents D1.1.1 et D1.1.2 qui divulguent une teneur en Fe pour l'alliage Zr-1%Nb indiquent pour quelques matériaux de départ des teneurs "actuelles" en Fe tombant dans la gamme revendiquées ils mentionnent quand même une teneur "standard" ou "maximale" de 500 ppm ou 300 ppm pour ces matériaux (D1.1.1 : tableau 2 ; D1.1.2 : tableau 1) et une teneur maximale de 500 ppm pour l'alliage final (D1.1.1 : tableau 2). Il n'y a aucune information dans ces documents qui lasserait reconnaître que la teneur en Fe devrait être limitée dans la gamme revendiqué par le présent brevet.
Par contre, la figure du brevet montre qu'une déformation diamétrale et ainsi le degré de fluage triplent presque quand on augmente la teneur en Fe de 250 ppm à 300 ppm.
4.7 Le requérant RO1 a contesté qu'un tel effet serait associé à la gamme de Fe revendiquée et que le brevet se fondait sur une invention de sélection. Il s'est fondé sur le document D1.4 qui concernait un alliage de Zr ("M5") correspondant aux termes de la revendication 1 du brevet et qui avait été rédigé par les inventeurs du présent brevet. Il s'avérait notamment d'un passage à la page 510 de ce document qu'une teneur en Fe, bien qu'elle était plus grande (150 ppm à 600 ppm) que celle revendiquée, n'avait aucun effet ou alors seulement une influence négligeable sur la résistance au fluage. Cette résistance était plutôt sensible aux teneurs en oxygène et soufre. Il s'ensuivait que les inventeurs, à la date de dépôt de la demande, s'étaient trompés quant aux constituants responsables pour une bonne résistance au fluage.
4.8 Le document D1.4 constitue en fait une présentation des expériences publiées quelques années après le dépôt du présent brevet par les inventeurs du brevet concernant l'influence sur la résistance au fluage des variations de teneurs en composants et impuretés, y compris Fe, dans des alliages Zr-1%Nb. Bien qu'il apparaît que la constatation à la page 510, selon laquelle plusieurs facteurs de la composition chimique, dont les teneurs en Nb dans la gamme de 0,80 à 1,20% et en Fe dans la gamme de 150 à 600 ppm, n'exercent qu'un effet minime ou même nul quant à la corrosion et au fluage thermique d'un tube de gainage soit en contradiction manifeste avec les expériences montrées dans la figure du brevet, la Chambre note que la situation n'est pas en fait tellement claire si on prend en considération toute l'information divulgué par D1.4.
Quant à l'effet d'une teneur en Fe dans la gamme de 150 ppm à 600 ppm sur le fluage, le tableau 1 à la page 506 du D1.4 donne les entrées "+" ou "-", signifiant qu'un effet avantageux ou nuisible était observé dans cette gamme. De plus, D1.4 montre que certaines teneurs en S et O exercent un effet avantageux sur la résistance au fluage (cf. les figures 4 et 6). Il est donc bien concevable qu'un effet attribuable à la teneur en Fe soit masqué dans les expériences résumées dans D1.4.
De toute façon, pour les raisons indiquées, les preuves fournies par le requérant RO1 ne suffisent pas pour exclure avec certitude que l'effet divulgué dans la figure 1 du présent brevet n'existerait pas et pour montrer que le brevet donnerait un enseignement erroné.
4.9 Bien que les teneurs en Fe divulguées par les documents D1.1.1 ou D1.1.2 pour un alliage Zr-1%Nb englobent la gamme revendiquée, lesdits documents n'enseignent pas de limiter avantageusement la teneur en Fe dans la gamme de 50 ppm à 250 ppm.
A défaut d'un tel enseignement dans tous les documents cités par les requérants RO1 et RO2, il n'était pas prouvé d'une manière convaincante comment l'homme du métier serait nécessairement arrivé à l'invention.
Prenant en outre en considération la circonstance qu'il existe dans le présent cas une pléthore de paramètres de la composition de l'alliage et de la fabrication de tubes et donc une multitude de possibilités alternatives à choisir, les paramètres exerçant parfois des effets opposés sur la résistance au fluage et à la corrosion, la Chambre juge que le procédé spécifique selon la revendication 1 ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique disponible, même si l'invention n'est pas considérée comme une combinaison synergétique, tel que les requérants RT l'ont fait valoir, mais plutôt un compromis spécifique entre des demandes incompatibles.
4.10 Les considérations données ci-dessus, surtout sur la sélection de la teneur en Fe, s'appliquent mutatis mutandis au tube de gainage selon la revendication 8 du brevet.
5. Nouveau motif d'opposition selon l'article 100b) CBE
5.1 Le requérant RO1 a fondé ses objections à ce sujet sur les documents D1.3 et D1.4 bien qu'aucun argument spécifique a été présenté quant au document D1.3. Le requérant RO1 a fait valoir que ce problème d'exécution de l'invention n'est apparu la première fois qu'avec des enseignements de ces deux documents. Étant donné que les documents n'avaient été publiés qu'en l'année 2000, il n'était pas possible par principe de soulever ce motif pendant les neuf mois du délai d'opposition qui s'était terminé le 15 janvier 1999. A cause du fait que D1.4 divulguait que la résistance au fluage n'était pas sensible à la teneur en Fe mais plutôt aux teneurs en oxygène et soufre, le document était produit pour prouver que les inventeurs, à la date de dépôt de la demande, s'étaient trompés quant aux constituants responsable pour une bonne résistance au fluage. Donc le brevet qui ne faisait aucune référence au soufre n'exposait pas tous les éléments essentiels pour la solution du problème posé.
5.2 Les requérants RT ont fait valoir que la Chambre aurait la possibilité de prendre ce motif en compte si elle estimait que la division d'opposition aurait dû le prendre en compte au titre de l'article 114(2) CBE. Mais cela ne devrait pas être le cas pour les raisons exposées dans la décision de la division d'opposition. Aucune contradiction n'existait entre les enseignements du brevet et du document D1.4, dont l'enseignement n'excluait pas qu'une teneur en Fe dans la gamme revendiquée améliorait la résistance au fluage simplement parce que cet effet était masqué dans les expériences selon D1.4 par la présence de soufre en tant qu'impureté.
5.3 Selon la décision T 986/93, JO 1996, 215, qui a été confirmée par plusieurs autres décisions (voir par ex. T 104/94 ; T 891/94 ; T 165/99 ; T 496/02), il n'est pas interdit à une chambre de recours de tenir compte d'un motif d'opposition qui a été présenté tardivement au cours d'un opposition et que la division d'opposition n'a pas pris en considération en vertu de l'article 114(2) CBE lorsque la chambre estime que la division d'opposition a exercé à tort son pouvoir d'appréciation (point 16 de l'avis G 10/91 de la Grande Chambre). Lorsqu'une chambre de recours examine cette question, les mêmes critères que devant la division d'opposition s'appliquent, c'est-à-dire de savoir si, de prime abord, il existe de solides raisons de croire que ces motifs sont pertinents et qu'ils s'opposeraient au maintien du brevet.
5.4 La Chambre a donc examiné dans le présent cas si la division d'opposition a fait un usage correct de son pouvoir d'appréciation en décidant de ne pas tenir compte du motif d'opposition selon l'article 100b) CBE.
Dans ce contexte, il découle des considérations indiquées dans le paragraphe 4.8 ci-dessus que le requérant RO1 n'a pas prouvé avec certitude que l'effet avantageux sur la résistance au fluage indiqué dans la figure 1 du brevet ne soit pas spécifiquement associé avec une teneur en Fe telle que revendiquée. Il n'existe donc pas, de prime abord, des raisons fortes de présumer que le motif tardif compromettrait le maintien du brevet.
Pour cette raison, la Chambre n'a aucune raison d'estimer que la division d'opposition ait exercé à tort son pouvoir d'appréciation et, par conséquent, a décidé de ne pas admettre dans la procédure de recours le motif d'opposition au titre de l'article 100b) CBE.
6. En conclusion, les motifs d'opposition invoqués ne s'opposent pas au maintien du brevet tel que délivré.
7. La requête principale étant bien fondée il n'y a pas lieu à examiner les requêtes subsidiaires des requérants RT.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. Le brevet est maintenu tel que délivré.
3. Les recours des opposants I et II sont rejetés.