T 0669/17 (Procédé d'alimentation en puissance - BRANDT/WHIRLPOOL) 24-06-2021
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Procédé d'alimentation en puissance d'au moins un inducteur et appareil de cuisson mettant en oeuvre ledit procédé
Activité inventive - nouvelle formulation du problème technique,
Motifs d'opposition - extension de l'objet de la demande (oui),
Généralisation intermédiaire,
Requêtes subsidiaires produites tardivement - recevable (non),
I. Le brevet européen 2 200 399 a fait l'objet d'une opposition, fondée sur les motifs selon l'article 100c) CBE, pour extension de l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle qu'elle avait été déposée et, selon l'article 100a) CBE, pour défaut de nouveauté et d'activité inventive.
II. L'opposition a été rejetée.
III. La division d'opposition a estimé que le procédé revendiqué n'était pas le résultat de généralisations intermédiaires, contrairement à ce que prétendait l'opposante. Elle a notamment considéré que l'incorporation au procédé revendiqué des caractéristiques de la revendication initiale 9, sans intégrer celles de la revendication 8 dont elle dépendait, était permise dans la mesure où les revendications d'origine 8 et 9 décrivaient deux modes alternatifs de fonctionnement des inducteurs, en parallèle ou en alternance, exclusifs l'un de l'autre.
IV. En ce qui concerne l'objection d'absence de nouveauté du procédé de la revendication 1 (articles 52, 54 CBE), la division d'opposition a considéré que le procédé revendiqué était nouveau compte tenu de
D1 : EP-A-1 951 003.
La division d'opposition a également estimé que le procédé revendiqué impliquait une activité inventive au sens de l'article 56 CBE compte tenu de l'enseignement de D1, cet état de la technique ayant été retenu au titre d'état de la technique le plus proche.
V. La requérante (opposante) a formé un recours à l'encontre de cette décision et demandé son annulation et la révocation du brevet.
VI. Dans le mémoire exposant les motifs du recours, la requérante reprend et développe les arguments soulevés devant la première instance quant à une extension de l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande initiale et à une absence d'activité inventive de l'objet de la revendication 1.
VII. L'intimée demande, à titre principal, le rejet du recours et le maintien du brevet tel que délivré.
VIII. À titre subsidiaire, l'intimée demande que le recours soit rejeté et le brevet maintenu sous une forme modifiée, selon l'une des requêtes subsidiaires 1 à 3. Les requêtes subsidiaires 1 à 3 correspondent aux requêtes déposées dans le courrier de réponse au mémoire de recours. Dans la réponse au mémoire de recours, l'intimée fait également part de son intention de modifier les requêtes subsidiaires 2 et 3 et de déposer deux nouvelles requêtes correspondantes au cas où la chambre estimerait que la revendication 1 du brevet tel que délivré s'étend au-delà du contenu de la demande telle que déposée.
IX. Dans la notification émise en vertu de l'article 15(1) RPCR 2020, dans laquelle la chambre exposait son avis provisoire, celle-ci avait notamment reconnu la pertinence des arguments avancés par la requérante relatifs à une extension de l'objet du brevet (article 100c) CBE). La structure des revendications d'origine 8 et 9 suggérait, en effet, que les caractéristiques omises dans la revendication 1 telle que délivrée étaient, en réalité, étroitement associées aux caractéristiques retenues.
X. En ce qui concerne l'activité inventive, la chambre estimait que le critère retenu dans la revendication 1 telle que délivrée, pour décider d'un mode d'alimentation en alternance, traduisait simplement la difficulté qu'il y avait à déterminer une fréquence de travail commune, lorsque la dynamique de puissance de l'un des deux inducteurs était réduite. La solution consistant à abandonner le mode d'alimentation en parallèle des inducteurs et à y substituer une alimentation en alternance, apparaissait dès lors évidente, voire inévitable.
XI. L'attention de l'intimée était également attirée sur le fait que la déclaration relative à son intention de déposer de nouvelles requêtes subsidiaires 4 et 5 (dernier paragraphe de sa réplique au mémoire de recours), selon la position qu'adopterait la chambre, ne valait pas dépôt effectif et que la recevabilité de ces requêtes, si elles devaient se matérialiser (ce qui s'avéra être le cas dans le courrier émis en réponse à l'avis provisoire), serait établie sur la base des dispositions du règlement de procédure entré en vigueur le 1er janvier 2020.
XII. Les requêtes subsidiaires 4 et 5 ont été déposées, formellement, dans le courrier rédigé en réaction à l'avis provisoire émis par la chambre. Elles reflètent l'intention, déjà exprimée par l'intimée dans sa réponse au mémoire de recours, de procéder, le cas échéant, au dépôt de ces requêtes.
XIII. Au cours de la procédure orale devant la chambre, les parties ont confirmé leurs requêtes respectives.
XIV. La revendication 1 selon la requête principale de l'intimée, c'est-à-dire du brevet tel que délivré, s'énonce comme suit:
Procédé d'alimentation en puissance de deux inducteurs (I, I1, I2) associés respectivement à des récipients à chauffer (R1-R6), montés en parallèle sur une même phase de puissance d'une alimentation électrique et alimentés respectivement par deux onduleurs (31, 32) commandé par un générateur de fréquence (34), ledit procédé d'alimentation comprenant une étape d'analyse (E45) de chaque inducteur (I1, I2) associé à un récipient à chauffer (R1-R6), ladite étape d'analyse (E45) étant adaptée à déterminer une fonction entre la puissance instantanée (P) alimentant ledit inducteur (I) et la période du signal de découpage (T) généré par ledit générateur de fréquence (34) commandant ledit onduleur (31,32) alimentant ledit inducteur (I1,I2), ladite étape d'analyse (E45) comprenant des mesures mises en oeuvre [sic] pour un échantillon de valeurs de puissance de consigne (Pmin, Pmax, PI1, PI2) attribuées audit inducteur (I1,I2) caractérisé en ce qu'à ladite étape d'analyse (E45), si pour au moins un desdits deux inducteurs (11,12), une valeur de puissance de consigne minimale (Pmin) et une valeur de puissance de consigne maximale (Pmax) sont proches l'une de l'autre, le procédé d'alimentation en puissance comporte uniquement une phase d'alimentation en alternance desdits deux inducteurs (I1, I2).
XV. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 correspond à la revendication 2 du brevet. La revendication 1 reprend ainsi l'intégralité des caractéristiques des revendications 1, 8 et 9 de la demande telle que déposée. En l'occurrence, la revendication 1 intègre les caractéristiques selon lesquelles:
... à ladite étape d'analyse (E45), si les deux inducteurs (11, I2) associés respectivement auxdits récipients (R1-R6) admettent un fonctionnement en parallèle, ledit procédé d'alimentation en puissance comporte une phase d'alimentation en parallèle desdits deux inducteurs (11, I2), dans laquelle lesdits deux inducteurs (11, I2) sont alimentés respectivement par lesdits deux onduleurs (31, 32) commandés à une même fréquence de travail (Ft), ladite fréquence de travail (Ft) étant déterminée à partir desdites fonctions déterminées lors de ladite étape d'analyse (E45) entre la période du signal de découpage (T) généré par le générateur de fréquence (34) commandant lesdits deux onduleurs (31, 32) et la puissance instantanée (P) alimentant chaque inducteur (11,12), la somme des puissances instantanées (P1p, P2p) alimentant chaque inducteur (11, I2) pendant la phase d'alimentation en parallèle étant égale à la puissance maximale fournie par ladite phase de puissance de l'alimentation électrique.
XVI. La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 correspond à la fusion des revendications 1 et 5 du brevet. Concrètement, le revendication 1 intègre à sa partie caractérisante les caractéristiques selon lesquelles:
... l'échantillon de valeurs de puissance de consigne pour chaque inducteur (I1, I2) comprend au moins une valeur de puissance de consigne minimale (Pmin) correspondant à une valeur de puissance minimale continue admise (PminCont) par ledit inducteur (I1, I2) et une valeur de puissance de consigne maximale (Pmax) correspondant à une valeur de puissance maximale continue admise (PmaxCont) par ledit inducteur (I1, I2) ...
XVII. La revendication 1 de la requête subsidiaire 3 correspond à la fusion des revendications 1, 5 et 9 du brevet. Elle diffère de la revendication 1 de la requête subsidiaire 2 en ce que la caractéristique additionnelle de la requête 2 reproduite ci-dessus a été intégrée au préambule de la revendication et en ce que la revendication intègre, à sa partie caractérisante, les caractéristiques selon lesquelles:
... ladite étape d'analyse (E45) mise en ½uvre pour une valeur de puissance de consigne minimale (Pmin) et une valeur de puissance de consigne maximale (Pmax) comporte des étapes (E51-E62) adaptées à déterminer les limites de fonctionnement dudit inducteur (I1, I2) associé audit récipient (R1-R6), et notamment ladite valeur de puissance minimale continue admise (PminCont) par ledit inducteur (I1, I2) et ladite valeur de puissance maximale continue admise (PmaxCont) par ledit inducteur (I1, I2) ...
XVIII. Les revendications 1 des requêtes subsidiaires 4 et 5 diffèrent des revendications 1 des requêtes subsidiaires 2 et 3, respectivement, en ce qu'elles intègrent les caractéristiques de la revendication 2 du brevet.
Requête principale - brevet tel que délivré - activité inventive
1. Le document D1 décrit un procédé d'alimentation en puissance qui reproduit les caractéristiques techniques du préambule de la revendication 1. Concrètement, D1 décrit un procédé d'alimentation en puissance de deux inducteurs associés respectivement à des récipients à chauffer, montés en parallèle sur une même phase de puissance d'une alimentation électrique et alimentés respectivement par deux onduleurs commandés par un générateur de fréquence (cf. paragraphes [0001], [0029] - [0036]).
2. Le procédé d'alimentation de D1 comprend une étape d'analyse de chaque inducteur associé à un récipient à chauffer (cf. paragraphes [0041] - [0047]), ladite étape d'analyse étant adaptée à déterminer la fonction reliant la puissance instantanée alimentant ledit inducteur à la période du signal de découpage généré par le générateur de fréquences commandant ledit onduleur. L'étape d'analyse consiste en une succession de mesures réalisées sur une gamme de fréquences prédéfinie (cf. paragraphe [0043]), permettant ainsi de relier les puissances délivrées aux fréquences sélectionnées dans la plage de fréquences retenue.
3. Le procédé d'alimentation de D1 vise à définir pour une période d'activation des inducteurs (T) une première phase commune de durée (T1) au cours de laquelle les deux inducteurs sont alimentés par un signal de même fréquence f1. Cette première phase est ensuite suivie d'une seconde phase de durée T2 au cours de laquelle seul l'un des deux inducteurs sera alimenté par un signal de fréquence f2, différente de f1. Les durées T1 et T2 sont sélectionnées afin de transmettre à chacun des récipients une puissance moyenne au cours de la durée T équivalente à la puissance de consigne requise (cf. paragraphe [0051]). Si, selon un mode de réalisation préféré, les périodes T1 et T2 se succèdent de façon continue (T = T1 + T2), il est également prévu que les périodes T1, T2 soient suivies d'une période de repos T3, au cours de laquelle aucun des inducteurs n'est alors alimenté. Le procédé d'alimentation consiste alors en une répétition des cycles d'alimentation de durée T (T = T1 + T2 + T3) (cf. paragraphe [0058]).
4. Le procédé revendiqué se distingue du procédé connu de D1 en ce qu'il est décidé, au cours de l'étape d'analyse, lorsque pour au moins un desdits deux inducteurs la valeur de puissance de consigne minimale et la valeur de puissance de consigne maximale sont proches l'une de l'autre, que le procédé d'alimentation en puissance qui sera effectivement mis en ½uvre se limitera à une phase d'alimentation en alternance desdits deux inducteurs.
5. La condition retenue dans la revendication 1 pour le fonctionnement en alternance des inducteurs ne se limite donc pas à constater qu'un fonctionnement en parallèle n'est pas possible pour alors décider d'un fonctionnement en alternance, comme le suggère l'opposante, mais traduit le souci sécuritaire auquel l'intimée tente de remédier par le biais de l'invention.
6. En effet, une faible dynamique de puissance pour un couple inducteur/récipient, c'est-à-dire une plage de puissances réduite, ne fait nullement obstacle à ce que la plage de fréquences correspondante (même si elle sera elle-même bornée et réduite) recoupe ou se superpose à celle de l'autre couple inducteur/récipient. La condition sécuritaire introduite dans le procédé selon l'invention vise donc à prévenir, en amont, tout problème ultérieur susceptible de résulter d'un fonctionnement en parallèle.
7. En l'occurrence, l'intimée fait valoir que la condition sécuritaire vise à prévenir toute situation, au cours des phases d'alimentation en parallèle, ou la fréquence utilisée ne correspondrait plus à la plage de fréquences effectivement adaptée. Or, une alimentation à une fréquence inadaptée se traduira par des pics de courant, une inefficacité du transfert d'énergie vers le récipient à chauffer, une surchauffe des circuits, et donc, un risque de casse accru.
8. Ces risques sont la conséquence directe du glissement de la caractéristique traduisant la relation puissance/fréquence en cours de fonctionnement et sont particulièrement présents quand cette caractéristique est définie sur une plage de fréquences réduite, ce que traduit la condition sécuritaire.
9. L'existence d'une activité inventive requiert que le problème identifié soit effectivement résolu par l'invention.
10. Or, le risque que le comportement du système évolue au cours de son fonctionnement et que la fréquence d'excitation initialement retenue ne corresponde plus, à un instant donné, à la plage de fréquences effectivement adaptée est a priori le même que le couple inducteur/récipient présentant la dynamique de puissance réduite fonctionne en parallèle ou en alternance. La solution proposée n'en est donc pas une. Elle ne saurait donc justifier l'existence d'une activité inventive.
11. Ce point est contesté par l'intimée : celle-ci souligne que la dérive des caractéristiques diffère selon le mode d'alimentation considéré. Cette dérive est, en effet, sensiblement plus marquée au cours d'une alimentation en parallèle qu'au cours d'une alimentation an alternance qui, par définition, comprend des phases de repos, limitant ainsi les risques de surchauffe. En l'occurrence, la mise à jour régulière des caractéristiques puissance/fréquence lors des phases d'analyse serait suffisante, dans le cas d'une alimentation en alternance, pour pallier aux risques évoqués ci-dessus.
12. La demande initiale fait effectivement état d'un phénomène de glissement des caractéristiques de fonctionnement (cf. paragraphes [0015], [0016]), pour justifier que l'étape d'analyse, qui précède l'étape d'alimentation, soit répétée régulièrement afin que le système puisse s'adapter à des conditions de fonctionnement en continuelle évolution. Le glissement à l'origine d'une modification du comportement du circuit résonnant, évoqué dans la demande, est attribué à une dérive de la charge inductive du système inducteur/récipient, résultant elle-même d'une modification de la température ou d'un changement de position du récipient.
13. Les arguments développés par l'intimée reviennent à faire état d'un problème à résoudre plus spécifique que celui qui avait été initialement évoqué. Même s'il est communément accepté que le problème technique résolu par l'invention puisse être reformulé compte tenu de l'état de la technique pris en compte, encore faut-il que ce problème puisse se déduire de la demande initiale et des connaissances générales.
14. Le problème désormais mis en avant par l'intimée, dont il est ici question, et qu'il convient de prévenir, n'est cependant pas explicité dans la demande originale. Rien, en effet, dans le demande initiale ne fait état d'une dynamique de glissement qui serait problématique dans un mode d'alimentation en parallèle, mais ne le serait pas lors d'une alimentation en alternance.
15. En l'occurrence, la chambre estime que si l'élévation de température, et la dérive du circuit résonnant qui en résulte, est certainement plus lente lors d'une alimentation d'un système inducteur/récipient en alternance, elle ne sera pas moins présente. Les dysfonctionnements identifiés ci-dessus, liés à une inadéquation de la fréquence utilisée, seront donc les mêmes pour les deux modes d'alimentation alternatifs envisagés, conduisant ainsi aux mêmes conséquences néfastes.
16. Les arguments avancés par l'intimée suggèrent que l'invention résulte, en réalité, de l'association de la condition sécuritaire reproduite dans la revendication 1 et de la détermination de la périodicité de mise à jour des caractéristiques de fonctionnement : cette dernière étant sélectionnée de manière à garantir que le phénomène de dérive, dans le cas de l'alimentation en alternance et pour les puissances moyennes de consigne effectivement délivrées, soit suffisamment limité pour que la fréquence d'alimentation sélectionnée demeure adaptée entre deux mises à jour successives.
17. Or, ni la revendication 1 ni d'ailleurs la demande ne s'étendent sur le coté quantitatif de cet aspect, se limitant à observer l'existence de cette dérive des caractéristiques de fonctionnement et de la nécessité d'une mise à jour régulière.
18. En conclusion, l'homme du métier n'aurait pas été en mesure de reconnaître, sur la base de la demande initiale et de ses connaissances générales, l'existence du problème technique mis en exergue par l'intimée.
19. En l'absence de problème technique effectivement résolu par l'invention, pré-requis à la reconnaissance d'une activité inventive, les caractéristiques distinctives identifiées ci-dessus sont dépourvues d'effet. Elles ne sauraient donc justifier de l'existence d'une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
Requêtes subsidiaires 1 à 3 - recevabilité
20. Les requêtes subsidiaires 1 à 3 ont été soumises par l'intimée en réponse à la communication du mémoire de recours. Leur admissibilité dans la procédure de recours relève des dispositions du règlement de procédure alors en vigueur (RPCR 2007).
21. La requérante demande que les requêtes subsidiaires 1 à 3 soient déclarées irrecevables dans la mesure où les objections soulevées l'avaient été au cours de la procédure d'opposition et que l'intimée avait alors eu la possibilité de les déposer, mais avait choisi de ne pas le faire. En outre, les requêtes subsidiaires ne permettent pas, de prime abord, de surmonter les objections soulevées : la requête subsidiaire 1 est sans effet pour ce qui relève de l'objection de manque d'activité inventive et les requêtes subsidiaires 2 et 3 sont sans effet pour ce qui concerne l'objection d'extension de l'objet de la demande.
22. La chambre retient cependant que les requêtes subsidiaires 1 à 3 ont été modifiées afin de répondre aux objections de la requérante relatives à une extension de l'objet du brevet ou à l'absence d'activité inventive. La signification des modifications apportées peut être appréciée par la requérante et la chambre sans difficultés particulières. Elles ne génèrent, notamment, aucune difficulté technique et leur pertinence, au vu des objections soulevées, est manifeste.
23. La chambre rejette les arguments soulevés par la requérante et décide, dans le cadre du pouvoir discrétionnaire que lui confère l'Article 12(4) RPCR 2007 (applicable, en l'espèce, compte tenu des dispositions transitoires de l'article 25 RPCR 2020), que les requêtes subsidiaires 1 à 3 sont recevables.
Requêtes subsidiaires 1 à 3 - requête de renvoi à la division d'opposition
24. La jurisprudence des chambres de recours ne confère pas de caractère absolu au droit à deux instances. En l'occurrence, la chambre constate que les requêtes admises dans la procédure de recours ne soulève aucune difficultés techniques ou procédurales particulières qui justifieraient que la chambre dispose d'un premier avis avant de pouvoir se prononcer.
25. Au-delà des raisons justifiant de la recevabilité de ces requêtes, la chambre constate que les modifications apportées aux revendications indépendantes sont en rapport direct avec les objections soulevées, qu'il s'agisse de l'objection d'extension de l'objet du brevet par incorporation des caractéristiques absentes de la revendication brevetée (requête subsidiaire 1), ou de l'objection d'absence d'activité inventive par l'introduction de caractéristiques supplémentaires quant à la définition de la fonction puissance/fréquence au cours de l'étape d'analyse (requêtes subsidiaires 2 et 3).
26. Un renvoi à la division d'opposition serait, en l'espèce, contraire au principe d'économie de la procédure.
27. La requête de renvoi à la division d'opposition est donc rejetée.
Requête subsidiaire 1
28. Les caractéristiques additionnelles introduites dans le revendication, visant un fonctionnement en parallèle des deux inducteurs, n'affectent en rien l'analyse développée ci-dessus relative au manque d'activité inventive du procédé selon la requête principale. En effet, celle-ci repose sur l'absence de problème technique résolu par l'invention que l'homme du métier aurait été à même de reconnaître. Ce constat s'applique mutatis mutandis au procédé de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1.
29. Le procédé de la revendication 1 n'est pas inventif au sens de l'article 56 CBE.
Requêtes subsidiaires 2 et 3 - extension de l'objet du brevet
30. La revendication 1 du brevet résulte de la combinaison de caractéristiques tirées des revendications initiales 1, 8 et 9. La revendication 1 selon les requêtes subsidiaires 2 et 3 correspondent, respectivement, à la fusion des revendications 1 et 5 et 1, 5 et 9 du brevet.
31. La requérante estime que la revendication 1 selon les requêtes subsidiaires 2 et 3 constitue, au même titre que la revendication 1 du brevet, une généralisation intermédiaire non-admissible du contenu de la demande initiale. En effet, certaines caractéristiques techniques présentes dans la revendication initiale 8, dont la revendication initiale 9 dépend, ne sont pas reproduites dans la revendication 1 de ces requêtes.
32. Concrètement, la revendication 1 selon les requêtes subsidiaires 2 et 3 définit un procédé d'alimentation mettant en ½uvre uniquement une phase d'alimentation en alternance des deux inducteurs lorsque les puissances de consigne maximale et minimale sont proches l'une de l'autre, sans faire mention de la phase d'alimentation en parallèle desdits deux inducteurs, effectivement évoquée dans la revendication 8 d'origine.
33. L'argumentation de l'intimée repose pour l'essentiel sur le constat selon lequel les revendications 8 et 9 définissent les deux branches de l'alternative relative à l'alimentation des inducteurs. Dans le contexte de l'invention, l'homme du métier aurait reconnu, malgré la dépendance formelle des revendications 8 et 9, que les modes d'alimentation envisagés s'excluent mutuellement.
34. La division d'opposition s'est ralliée à cette analyse et relève, dans la décision rendue, que les deux modes d'alimentation évoqués aux revendications 8 et 9 sont exclusifs l'un de l'autre.
35. Ce point de vue est corroboré, selon l'intimée, par la description de la demande d'origine qui fait bel et bien ressortir, dans le cadre de la description de la phase d'analyse, que l'aspect essentiel de l'invention réside dans la détermination des caractéristiques puissance/fréquence, qui permet de s'affranchir de la mesure en temps réel des courants pour le contrôle de l'alimentation. À l'opposé, les modes d'alimentation ne sont pas présentés comme des éléments essentiels de l'invention.
36. Les arguments avancés par la requérante ne sont cependant pas convaincants.
37. En l'occurrence, les modifications apportées à la revendication 1 par rapport à sa version d'origine consistent à introduire une condition sécuritaire ayant pour effet, lorsqu'elle est vérifiée, de sélectionner l'alimentation en alternance.
38. Le point de vue selon lequel les revendications 8 et 9 définiraient les deux branches de l'alternative relative à l'alimentation des inducteurs, est rejeté en ce qu'il est par trop simplificateur. Ce point de vue revient à considérer les revendications d'origine 8 et 9 comme deux revendications matériellement indépendantes, malgré la dépendance formelle.
39. De l'avis de la chambre, il convient cependant, en l'absence de toute incompatibilité entre l'intitulé de la revendication 9 et celui de la revendication 8 dont elle dépend, de tirer toutes les conséquences de la dépendance formelle. Une approche différente reviendrait à nier le caractère général et impératif résultant des dispositions de l'article 84 CBE et de la règle 43(1) CBE. En l'espèce, les termes introductifs de la revendication 9 d'origine ("Procédé d'alimentation conforme à la revendication 8") sont dépourvus d'ambiguïté.
40. Les revendications initiales 8 et 9 définissent, au-delà des modes d'alimentation qui seront effectivement retenus, une étape implicite préalable de détermination du mode d'alimentation adapté, compte tenu des conditions de sélection retenues. L'alimentation en alternance des inducteurs apparaît dès lors comme le résultat de la bifurcation par rapport à la situation de référence de la revendication 8, lorsque la condition particulière reproduite dans la revendication 9 est remplie.
41. La modification introduite dans les revendications 1 des requêtes subsidiaires 2 et 3 (et du brevet) relève donc d'un mode de réalisation beaucoup plus élaboré qui ne se limite pas au seul procédé d'alimentation en puissance du système à un instant donné t, mais intègre un processus beaucoup plus complet de commande destiné à sélectionner le mode d'alimentation à mettre en ½uvre.
42. Les revendications 1, 8 et 9 initiales ne peuvent, dès lors, constituer la base de la revendication 1 des requêtes subsidiaires 2 et 3.
43. La description ne semble pas davantage en mesure de suppléer à cette situation. En effet, le passage de la description relative à la commande du système vient au contraire corroborer l'analyse qui précède. Le passage de la description (paragraphs [0148] à [0161] de la demande publiéee) confirme en effet que les modes d'alimentation en parallèle et en alternance sont étroitement liés, le mode d'alimentation en alternance étant retenu lorsque le mode d'alimentation en parallèle est impossible.
44. Les passages de la description relatifs à la phase d'analyse et à la détermination de la caractéristique puissance/fréquence, même s'ils envisagent le cas d'un seul couple inducteur/récipient, ne peuvent davantage fournir la base requise aux modifications effectuées. En effet, dès lors que l'intimée intègre à la revendication d'origine certaines caractéristiques techniques relatives au mode de commande, elle doit alors en supporter les conséquences, c'est-à-dire accepter que les modifications envisagées intègrent effectivement tous les éléments essentiels du mode de réalisation particulier dans lequel elle puise ces caractéristiques.
45. En l'absence de tout élément dans la demande initiale indiquant que le mode d'alimentation en alternance serait envisageable indépendamment du cadre général défini par le procédé de commande, les revendications 1 des requêtes subsidiaires 2 et 3 constituent une généralisation intermédiaire du procédé initialement revendiqué dépourvue de tout fondement dans la demande initiale.
46. Pour cette raison, le procédé selon la revendication 1 des requêtes subsidiaires 2 et 3 s'étend au-delà du contenu de la demande initiale contrairement aux exigences de l'article 123(2) CBE.
Requêtes subsidiaires 4 et 5 - recevabilité
47. Selon une première approche développée par la requérante, les requêtes subsidiaires 4 et 5 devraient être déclarées recevables au même titre que les requêtes subsidiaires 1 à 3, car elles auraient, elles aussi, été déposées avec le courrier de réponse au mémoire de recours. Leur recevabilité relèverait donc des dispositions de l'article 12(4) RPCR 2007.
48. La chambre ne saurait souscrire à cette interprétation des écrits de la requérante. Dans le dernier paragraphe de son courrier de réponse, celle si précise, en effet :
Bien entendu, si la Chambre de Recours devait considérer que l'objet de la revendication 1 s'étendait au-delà du contenu de la demande telle que déposée, la Titulaire modifierait les requêtes subsidiaires 2 et 3 pour incorporer dans l'objet de la revendication 1 l'objet de la revendication 2 du brevet délivré (comme proposé dans la requête subsidiaire 1).
49. Comme en atteste l'usage du conditionnel, la formulation retenue ne saurait être assimilée à une requête formelle présentée en bonne et due forme.
50. Selon une seconde approche, l'intimée demande que les requêtes soient déclarées recevables au titre de requêtes tardives. Le nouveau règlement de procédure ne fait nullement obstacle à ce que de telles requêtes soient admises à un stade avancé de la procédure dès lors qu'elles sont convergentes et permettent, de prime abord, de surmonter l'objection d'extension de l'objet du brevet.
51. Selon elle, une conclusion différente reviendrait à exiger des parties qu'elles multiplient leurs requêtes afin de tenir compte de toutes les éventualités. Une telle démarche ne serait dans l'intérêt de personne.
52. En outre, même si la déclaration d'intention de l'intimée dans sa réponse au mémoire de recours ne constitue pas une requête formelle, elle n'en établit pas moins l'intention de déposer, le cas échéant, ces requêtes. Leur dépôt effectif ne peut donc surprendre la requérante. La formulation retenue était en effet dépourvue d'ambiguïté quant aux contenu des requêtes qu'il était proposé de déposer.
53. La chambre retient que le dépôt tardif des requêtes subsidiaires 4 et 5 constitue une modification des moyens au sens de l'article 12(4) RPCR 2020. En outre, la chambre doute que ces requêtes permettent de surmonter les objections soulevées aux titre de l'article 56 CBE et tire toutes les conséquences de la rigueur résultant de l'article 12(4) RPCR 2020.
54. Les requêtes subsidiaires 4 et 5 ne sont pas recevables.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. Le brevet est révoqué.