7.7.3 Raisons particulières s'opposant au renvoi en vertu de l'article 11 RPCR 2007
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- Durée de la procédure
Les chambres de recours reconnaissent de manière générale qu'un retard dans la procédure de première instance peut en principe être considéré comme une "raison particulière" s'opposant à un renvoi de l'affaire (T 1423/15).
Dans l'affaire T 1548/11, la chambre a estimé que des raisons particulières s'opposaient à un nouveau renvoi devant la division d'opposition, à savoir, en particulier, la durée de la procédure d'opposition /de recours (et notamment le fait qu'il y avait eu deux procédures de recours) ainsi que le retard supplémentaire considérable qui découlerait du renvoi. En outre, le requérant dont le droit d'être entendu avait été lésé avait demandé à la chambre de ne pas renvoyer l'affaire devant la division d'opposition, mais de trancher elle-même la question de l'activité inventive, encore en suspens. Dans de telles circonstances, le renvoi de l'affaire devant l'instance de premier degré serait inéquitable (voir aussi T 1824/15).
Dans l'affaire T 679/14, la chambre a fait observer que la longueur de la procédure, et le fait qu'il s'agissait du deuxième recours, constituaient des raisons particulières de ne pas renvoyer l'affaire en réaction aux vices majeurs qui avaient entaché la procédure de première instance.
Dans l'affaire T 2171/14, la chambre a rejeté la demande présentée par le requérant (titulaire du brevet) en vue du renvoi de l'affaire à l'instance du premier degré, et ce bien que la décision attaquée ait été entachée d'un vice majeur. La chambre a souligné qu'un renvoi aurait avant tout conduit à une procédure supplémentaire devant la division d'opposition, sans que l'on puisse en attendre de changement sur le fond. En outre, un tel renvoi aurait eu pour effet d'augmenter considérablement la durée totale de la procédure (ce qui n'aurait été d'aucune utilité, puisqu'une action en contrefaçon était en cours et que le requérant (opposant) avait demandé l'accélération de la procédure de recours).
- Âge de la demande de brevet ou du brevet
Dans l'affaire T 1709/06, la chambre a considéré qu'un renvoi à la division d'examen ne serait pas opportun compte tenu de l'ancienneté de la demande et du retard supplémentaire considérable qui découlerait d'un renvoi. De plus, lors de la procédure orale, le requérant avait exprimé le souhait que la chambre statue sur l'affaire.
De la même manière, la chambre, dans l'affaire T 1758/15, a décidé de ne pas renvoyer l'affaire à la division d'opposition, étant donné que le brevet était relativement ancien et que les faits ainsi que les principaux axes d'argumentation avaient déjà été présentés. Il était fort problable qu'un renvoi ne ferait que causer un retard de plusieurs années, à l'issue desquelles la chambre serait confrontée pour l'essentiel au même dossier. Cela serait contraire au principe d'économie de la procédure.
- Économie de la procédure
Dans l'affaire T 2068/14, la chambre a fait valoir que même si la procédure était entachée d'un vice majeur au sens de l'art. 11 RPCR 2007, l'objection pour manque de clarté soulevée par la chambre à l'encontre des revendications du requérant (art. 84 CBE) était d'emblée évidente lors de l'examen de la divulgation de l'objet revendiqué. Cela constituait une "raison particulière" s'opposant au renvoi de l'affaire à la première instance. La chambre a fait observer qu'il serait contraire aux principes de la sécurité juridique et de l'efficacité de la procédure de renvoyer une affaire, là où le requérant n'avait pas répondu de manière adéquate à des objections soulevées par la chambre qui compromettraient la délivrance d'un brevet européen.
- Arguments pris en compte par l'instance du premier degré
Dans la décision T 515/05, la chambre a estimé que le renvoi n'était pas opportun, notamment parce que i) les arguments du requérant avaient été pris en compte dans la décision attaquée, ii) le requérant avait eu entre temps la possibilité, et qu'il en avait usé, d'élargir son argumentation devant la chambre de recours, et iii) le requérant ne fournissait aucune raison concrète de justifier le renvoi (p. ex. il n'exprimait aucune intention de produire d'autres éléments de preuve dont la préparation nécessiterait un délai plus long). Dans les circonstances de l'espèce, un renvoi à la division d'opposition ne ferait que retarder inutilement la procédure.
Dans l'affaire T 1951/16, le requérant demandait explicitement à la chambre de ne pas effectuer de renvoi. De plus, l'instance du premier degré avait à l'évidence pris note des moyens que le requérant, bien que privé de la possibilité de les présenter oralement, avait soumis au sujet de l'absence d'unité.
Dans l'affaire T 1817/14, la division d'examen n'avait pas admis la deuxième requête subsidiaire dans la procédure. La décision attaquée ne mentionnait toutefois pas l'existence de la deuxième requête subsidiaire, ce qui constituait un vice majeur au sens de l'art. 11 RPCR 2007. La chambre a fait observer que le requérant avait manifestement été entendu au sujet de l'admission de la deuxième requête subsidiaire et que les motifs manquants étaient mentionnés dans le procès-verbal. Le requérant avait donc été en position de comprendre les raisons pour lesquelles la division d'examen n'avait pas admis la deuxième requête subsidiaire. La chambre a jugé que ces circonstances constituaient des raisons particulières de ne pas renvoyer immédiatement l'affaire à la division d'examen au titre de l'art. 11 RPCR 2007.
Dans l'affaire T 1929/12, même si la décision contestée était entachée d'un vice majeur au sens de l'art. 11 RPCR 2007, la chambre a estimé qu'il serait inutile de renvoyer l'affaire à la division d'examen, qui aurait en toute probabilité fini par émettre une autre décision mieux argumentée, mais ayant le même effet.
Dans l'affaire T 427/11, des raisons particulières, qui ne se limitaient pas en l'occurrence à la longueur de la procédure, s'opposaient à un renvoi de l'affaire. Par ailleurs, il était évident que la division d'opposition avait pris note de toutes les objections soulevées à l'encontre de l'absence d'activité inventive, même si l'argumentation correspondante dans la décision contestée était incomplète.
- Partialité d'un membre de la division d'opposition
Dans l'affaire T 1647/15, la chambre a fait observer que même si un éventuel soupçon de partialité envers un membre d'une division d'opposition peut normalement constituer un motif sérieux de renvoi, tel n'était pas le cas dans la présente affaire, dans laquelle ce soupçon n'avait pas pesé sur l'ensemble de la procédure de décision, mais avait résulté d'un emportement incontrôlé à la fin d'une procédure orale exceptionnellement longue et intensive. La chambre a par conséquent douté qu'un renvoi devant l'instance du premier degré, même composée différemment, soit conforme aux intérêts de la justice, étant donné que l'affaire ne ferait probablement que gagner encore en complexité, et que le renvoi retarderait de manière excessive le moment où elle serait définitivement tranchée. À cela s'ajoutait le fait qu'il s'agissait de la deuxième procédure de recours dans cette affaire.
- Vices de forme
Dans l'affaire T 1254/11, la chambre a admis, pour les besoins de l'argumentation, qu'à la fois le fait que ni une décision d'élargir la division d'opposition ni une décision d'en restreindre la composition n'avaient été versées au dossier accessible au public et le fait que seul le registre interne de l'OEB faisait état de la désignation d'un nouveau président constituaient des vices majeurs entachant la procédure d'opposition. Cependant, à la différence de la situation dans l'affaire T 990/06, il ressortait du dossier que la division avait été élargie puis que sa composition avait été restreinte en toute légalité. La chambre a estimé que ces circonstances constituaient des raisons particulières s'opposant au renvoi de l'affaire au sens de l'art. 11 RPCR 2007. Les vices majeurs susmentionnés, admis pour les besoins de l'argumentation, étaient des vices de forme, qui, de l'avis de la chambre, ne justifiaient pas de retarder considérablement la procédure.