T 0272/91 (Amidon/NESTLE) 27-01-1994
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Procédé de préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante
Activité inventive (oui) - solution non évidente
Inventive step (yes) - non-obvious solution
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet n 85 100 091.9 a donné lieu à la délivrance du brevet européen 0 150 715 sur la base de six revendications de procédé dont la revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Procédé de préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante, par traitement thermique en présence d'eau et d'un émulsifiant, caractérisé par le fait que l'on prépare un mélange d'amidon, d'un émulsifiant comprenant au moins un monoester d'acide gras, à raison de 1 à 5 % en poids de monoester d'acide gras par rapport au poids sec de l'amidon, et d'eau, de sorte que la teneur en eau du mélange soit de 20 à 30 % en poids, et l'on traite thermiquement le mélange à une température de 90-120 C durant 1-20 min pour obtenir un amidon dispersible à 95-100 % dans l'eau bouillante."
II. L'intimée (opposante) a fait opposition à ce brevet et requis sa révocation. Les seuls documents cités ont été les suivants :
(1) EP-A-0 076 381
(2) EP-A-0 138 010
(3) DE-A-2 930 664
III. La Division d'opposition a révoqué le brevet attaqué pour manque d'activité inventive vis-à-vis de l'état de la technique représenté par les documents (1) à (3) indiqués ci-dessus.
IV. La requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre cette décision ; un nouveau jeu de quatre revendications a été soumis en même temps.
Les arguments présentés par la requérante au cours de la procédure en faveur de la brevetabilité du brevet attaqué sont essentiellement les suivants :
- le procédé revendiqué a été modifié de façon à préciser que le traitement thermique est obligatoirement un traitement aux micro-ondes conformément à la revendication 4 du brevet délivré ; par conséquent, aucune des modifications effectuées dans la description et au niveau des revendications ne devrait donner lieu à des objections formelles ;
- comme aucun des documents opposés ne décrit un procédé effectué aux micro-ondes, le procédé revendiqué doit être considéré comme nouveau ;
- le procédé revendiqué est également inventif puisque les documents (1) et (3) ne suggèrent d'aucune façon la préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante par un procédé dont la durée n'est que de quelques minutes quand le traitement thermique appliqué est un traitement aux micro-ondes ; le document (2) n'est pas à prendre en considération pour l'appréciation de l'activité inventive puisqu'il porte une date de publication postérieure à la date de dépôt du brevet attaqué. En outre, l'activité inventive ne peut être mise ne cause sur la base des connaissances générales dans le domaine technique en question puisqu'il est seulement connu d'utiliser les micro-ondes pour chauffer rapidement des quantités de produit relativement modestes. Or, contrairement à ce qui est connu, il ressort clairement du brevet attaqué que le procédé revendiqué peut être effectué rapidement même en continu dans un tunnel à micro- ondes, ce qui montre bien qu'il se prête au traitement de quantités industrielles. De plus, l'essai comparatif effectué par l'inventeur montre clairement que les micro-ondes ont pour effet d'accélérer le chauffage de la quantité d'eau présente dans un produit alimentaire (nouilles en blé dur) et non pas le processus d'hydratation précédent la cuisson ou le temps de cuisson total d'un tel produit. Dans le procédé selon l'invention, il s'agit de former des complexes entre l'amylose et l'émulsifiant utilisé, ce qui est seulement possible si l'émulsifiant ensemble avec l'eau présente dans le mélange peut pénétrer à l'intérieur des particules d'amidon, ce processus étant comparable au processus d'hydratation. Or, l'homme du métier n'avait aucune raison de penser que ce processus puisse être accéléré par un traitement aux micro-ondes.
V. L'intimée conteste que la limitation de l'objet revendiqué à un traitement thermique aux micro-ondes implique une activité inventive. En particulier, elle a fait valoir que toute ménagère savait que les micro-ondes permettaient une cuisson particulièrement "rapide" et que tout homme du métier était parfaitement au courant que les micro-ondes assuraient une "pénétration de la chaleur" extrêmement rapide. Dans ces conditions, il appartenait à la requérante d'indiquer en quoi consistait l'effet surprenant du procédé revendiqué. En outre, il était également connu qu'en pratique l'utilisation des micro-ondes était limitée au traitement de faibles quantités de produit. L'avantage des temps de traitement courts mis en avant par la requérante était donc en réalité compensé par l'impossibilité de traiter des quantités de produit importantes. Or, la rapidité du traitement aux micro-ondes n'étant nullement surprenante, le procédé revendiqué n'était pas basé sur un effet pouvant être regardé comme inventif.
VI. La Chambre a constaté que les parties à la procédure ont choisi de laisser passer le délai fixé par la Chambre dans une notification conformément à l'article 110(2) CBE, sans s'exprimer.
VII. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet européen sur la base des revendications 1 à 4 et de la description amendée soumises au cours de la procédure de recours.
L'intimée demande le rejet du recours.
VIII. L'actuelle revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Procédé de préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante, par traitement thermique en présence d'eau et d'un émulsifiant, caractérisé par le fait que l'on prépare un mélange d'amidon, d'un émulsifiant comprenant au moins un monoester d'acide gras, à raison de 1 à 5 % en poids de monoester d'acide gras par rapport au poids sec de l'amidon, et d'eau, de sorte que la teneur en eau du mélange soit de 20 à 30 % en poids, et l'on traite thermiquement le mélange aux micro-ondes à une température de 90-120 C durant 1-20 min pour obtenir un amidon dispersible à 95-100 % dans l'eau bouillante."
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Les nouvelles revendications 1 à 4 satisfont aux exigences de l'article 123(2) et (3) de la CBE puisqu'elles sont toutes supportées par la demande initialement déposée et qu'elles n'ont pas pour effet d'étendre la protection du brevet tel que délivré.
En ce qui concerne l'article 123(2) CBE, il en est de même des modifications intervenues à la suite de la suppression des exemples 1 à 6 du brevet attaqué. Ceci n'a pas été mis en cause par l'intimée.
3. Le brevet européen attaqué concerne un procédé de préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante.
4. Le document (1) constitue sans aucun doute l'état de la technique le plus proche puisqu'il concerne un procédé de préparation d'un amidon dispersible à 60-100 % dans l'eau bouillante par traitement thermique, de préférence dans une enceinte close, à une température de 50 à 120 C en présence d'eau et d'un émulsifiant comprenant un motif d'acide gras (p.ex. monoester d'acide gras). La teneur en eau du mélange est de 10 à 40 % en poids (p.ex. entre 20. % et 35 % dans les exemples de réalisation). L'émulsifiant est utilisé à raison de 0,25-5 % par rapport au poids de l'amidon. La durée du traitement est de 3 à 16 heures. Dans ces conditions l'amidon forme un complexe avec l'émulsifiant tout en ne gélatinisant pas (voir page 1, ligne 1 à page 6, ligne 2 ; page 8, 2ème paragraphe ; page 9, dernier paragraphe ; page 10, 3ème paragraphe ; page 11, premier paragraphe ; page 13, lignes 4 à 11 ; page 14, 2ème paragraphe et exemples).
5. Partant du document (1), le problème technique consistait à trouver un procédé de préparation d'un amidon dispersible dans l'eau bouillante nettement plus rapide que le procédé connu.
Pour résoudre ce problème, il est proposé, conformément à la revendication 1 actuelle du brevet européen en question, d'effectuer le traitement thermique en présence d'eau et d'un émulsifiant comprenant au moins un monoester d'acide gras, à raison de 1 à 5 % en poids de monoester d'acide gras par rapport au poids sec de l'amidon, de sorte que la teneur en eau du mélange soit de 20 à 30 % en poids et à une température de 90-120 C durant 1-20 minutes pour obtenir un amidon dispersible à 95-100 % dans l'eau bouillante.
Les indications figurant dans la description du brevet attaqué et notamment les exemples 1 à 3 (anciens exemples 7. à 9) montrent que la solution revendiquée répond bien au problème posé et que le résultat recherché peut être effectivement obtenu de la façon indiquée dans la revendication 1.
6. L'intimée n'a pas contesté la nouveauté des revendications actuelles. En effet, aucun des documents cités ne permet de mettre en cause la nouveauté de ces revendications.
Par conséquent, l'objet des revendications 1 à 4 doit être considéré comme nouveau.
7. Comme le document (2) représente un état de la technique au sens de l'article 54(3) CBE, les documents (1) et (3) sont les seuls à prendre en considération pour examiner si le procédé revendiqué implique une activité inventive.
7.1. Le procédé connu du document (1) est clairement limité à un traitement thermique réalisé par simple chauffage du mélange amidon, eau et émulsifiant, effectué de préférence dans une enceinte close, exigeant une durée de traitement de 3 à 16 heures (voir point 4 ci-dessus). Il est important de noter qu'en dépit de la longueur d'un tel traitement thermique, ce document ne suggère aucune mesure permettant d'accélérer le chauffage, les seuls modes de chauffage indiqués dans les exemples de réalisation étant le bain-marie et le chauffage dans un four afin de pouvoir travailler à température constante (voir exemples I et V). Par conséquent, cherchant à résoudre le problème tel que posé au point 5 ci-dessus, l'homme du métier ne pouvait tirer de ce document aucune information lui permettant de connaître les mesures à prendre afin d'obtenir beaucoup plus rapidement le résultat recherché (c'est-à-dire un amidon dispersible dans l'eau bouillante).
Il en est de même du procédé décrit dans le document (3) puisque, dans ce procédé connu, une fécule de racines ou de tubercules est traitée par la chaleur (températures p.ex. entre 90 et 120 C) et l'humidité (16-35 % en poids) dans des conditions de traitement qualifiées de relativement douces et illustrées par le traitement en enceinte close d'une fécule native de pomme de terre, ayant une teneur (naturelle) en humidité de 19,2 %, à une température de 103 C durant 115 minutes (voir page 5, deux derniers paragraphes ; page 10, dernier paragraphe à page 14, premier paragraphe). Bien que le produit ainsi obtenu se prête à être ajouté directement à un liquide aqueux bouillant sans formation de grumeaux, tout comme le document (1), ce document ne contient rien qui puisse suggérer à l'homme du métier d'utiliser un chauffage aux micro-ondes pour raccourcir le temps de traitement d'un mélange humide d'amidon et d'émulsifiant et résoudre le problème technique ci-dessus.
7.2. En outre, l'argument de l'intimée que même la ménagère sait que les micro-ondes permettent de cuire rapidement des quantités limitées de produit et que l'homme du métier sait que les micro-ondes assurent une "pénétration de la chaleur" extrêmement rapide n'est pas convaincant puisque la requérante a montré par un essai comparatif dont la crédibilité n'a pas été mise en cause que les micro-ondes ont seulement pour effet d'accélérer le chauffage de la quantité d'eau présente dans un produit alimentaire et n'influence d'aucune façon le processus d'hydratation précédent la cuisson, ni le temps de cuisson total du produit traité. De plus, la Chambre ne dispose d'aucune information permettant de mettre en question l'analogie faite par la requérante entre le processus d'hydratation bien connu et la complexation de l'amylose par l'émulsifiant (mentionnée explicitement dans le brevet attaqué). Dans ces conditions, il n'existe aucune raison de penser que l'homme du métier aurait envisagé d'utiliser la technique de chauffage par micro- ondes afin de résoudre le problème qu'il s'est posé (voir décision T 2/83, JO OEB 1984, 265, en particulier point 7 des motifs).
8. Pour les raisons ci-dessus, la Chambre est arrivée à la conclusion que le procédé revendiqué implique une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la première instance afin de maintenir le brevet sous forme modifiée, dans la version suivante :
- revendications 1 à 4 reçues le 11 février 1992,
- description : colonnes 1 à 6 et 9 reçues le 28. juin 1991 et colonnes 7/8 reçues le 11. février 1992.