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T 1563/07 18-11-2010
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Benne basculante
I. Le brevet européen Nr. 1 288 065 a été maintenu sous une forme modifiée par la décision de la Division d'Opposition en date du 24 juillet 2007. Des recours ont été formés contre cette décision à la fois par la Titulaire (Requérante I) et par l'Opposante (Requérante II) par télécopies respectivement en date du 2 octobre 2007 et 19 septembre 2007. Les mémoires exposant les motifs du recours ont été déposés respectivement par télécopies en date du 30 novembre 2007 et 29 novembre 2007.
II. Avec la citation à la procédure orale, en date du 18 mai 2010, la Chambre a attiré l'attention des parties sur les documents D2 (FR-A-2 595 302), D5 (EP-A1-374 336), D5bis (US-A-5 090 773), D4 (DDR-A-60494), D6 (EP-A1-408 744), D7 (CARROSSERIE, No. 580, Mai 2001), D8 (brochure "Bennes Manjot", Mars 2001), D12 (GB-A-992 066) et D13 (GB-A-821 016) cités pendant la procédure.
III. L'Opposante a communiqué par lettre en date du 5 octobre 2010 et reçue le 14 octobre 2010 que "au nom et pour le compte de l'opposant, nous nous désistons et nous nous retirons de l'instance. Un accord étant parvenu entre les parties, notre mandant souhaite ne plus contester la brevetabilité de l'invention couverte par ce brevet européen".
IV. La Chambre a notifié aux parties par télécopie en date du 11 novembre 2010 le texte suivant : "La Chambre interprète la lettre de l'Opposante (Requérante II) en date du 5 Octobre 2010 comme un retrait du recours. Toutefois, l'Opposante (Requérante II) a l'opportunité de contester cette interprétation de la Chambre et de le faire savoir par écrit ou oralement, au plus tard à la procédure orale. Si l'Opposante (Requérante II) ne devait plus se manifester, la Chambre considérera que les termes "nous nous désistons et nous nous retirons de l'instance" ainsi que "notre mandant souhaite ne plus contester la brevetabilité de l'invention couverte par ce brevet européen", employés par l'Opposante (Requérante II) dans sa lettre du 5 Octobre 2010, équivalent à une déclaration du retrait du recours."
V. La procédure orale a eu lieu le 18 novembre 2010. Ni la Titulaire ni l'Opposante n'y étaient représentées, comme elles l'avaient annoncé respectivement par lettre du 18 octobre 2010 et du 5 octobre 2010. La Chambre a constaté que le recours de l'Opposante a été retiré par la lettre reçue le 14 octobre 2010. La Chambre a également considéré que la Titulaire se fonde uniquement sur ses écritures (Art. 15 RPCR, supplément au JO OEB 1/2010, 38). La Titulaire avait sollicité par écrit l'annulation de la décision contestée et le rejet de l'opposition (requête principale) ou, à titre subsidiaire, l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet européen sur la base de la revendication 1 déposée par lettre en date 28 avril 2008 (première requête auxiliaire) ou le maintien du brevet sous la forme approuvée par la Division d'Opposition (deuxième requête auxiliaire).
La revendication 1 telle que délivrée a le libellé suivant :
"Dispositif basculant pour véhicules routiers comprenant un châssis fixe (8), une benne basculante (3) et un système de levage (6) à structure en compas caractérisé en ce que
- la benne basculante (3), est une structure hémicylindrique autoportante
- les extrémités libres de la structure en compas (6) sont solidarisées à pivotement, respectivement au châssis (8) et à la partie inférieure de la benne (3), au moins un vérin (10) étant disposé entre les branches (4,5) de ce compas, respectivement près de l'articulation du compas et de la partie inférieure de la benne hémicylindrique (3) et exercant sur la dite benne, lors du levage, une contrainte en élongation".
La revendication 1 de la première requête auxiliaire a le libellé suivant :
"Dispositif basculant pour véhicules routiers comprenant un châssis fixe (8), une benne basculante (3) et un système de levage (6) à structure en compas caractérisé en ce que
- la benne basculante (3), est une structure hémicylindrique autoportante
- les extrémités libres de la structure en compas (6) sont solidarisées à pivotement, respectivement au châssis (8) et à la partie inférieure de la benne (3), au moins un vérin (10) étant disposé entre les branches (4,5) de ce compas, respectivement près de l'articulation du compas et de la partie inférieure de la benne hémicylindrique (3) et exercant sur la dite benne, lors du levage, une contrainte en élongation, la branche supérieure du compas étant fixée à la benne par l'intermédiaire d'une semelle de répartition de charge."
VI. La Requérante I (Titulaire) a développé les arguments suivants :
La décision de la Division d'Opposition est basée sur un raisonnement a posteriori en ce qu'il intègre dans le problème à résoudre une partie de la solution, à savoir le fait que la benne doit être soumise à une contrainte en élongation. En effet, en partant du document D2 (FR-A-2 595 302), l'homme du métier doit faire un choix qui comporte la façon dont le compas est monté entre la benne et le châssis. A cet égard, il est clair que D2 montre plusieurs possibilités, par exemple à travers le montage de la figure 4, illustrant un compas qui s'ouvre vers l'arrière. Dans ce mode de réalisation, la poutrelle sur laquelle le compas exerce sa poussée est soumise à une contrainte en compression, à l'inverse de ce qui est préconisé dans le brevet opposé. Par conséquent, dans la mesure où on considère D2 comme constituant l'état de la technique le plus proche, cette variante de réalisation aurait dû, elle aussi, être prise en considération par l'homme du métier pour qui, de l'avis de la Division d'Opposition, le problème est de "trouver une benne légère pour un compas du type du document D2". De plus, D2 évoque non seulement la possibilité d'inverser la position du compas, mais également (page 9, lignes 23-28) la possibilité de monter le compas sens dessus-dessous. Toutes ces variantes sont parfaitement fonctionnelles et donc le choix de la figure 1 de D2 comme représentant l'art antérieur le plus proche parait arbitraire et conduit nécessairement à un raisonnement a posteriori.
Quant à la formulation du problème technique objectif, le problème formulé par la Division d'Opposition n'est pas approprié et comporte déjà des éléments de l'invention. En particulier, on peut énoncer le problème de l'allégement sans qu'il soit nécessaire de se focaliser sur le poids de la benne. Il existe une multitude de possibilités permettant de résoudre le problème technique en cause, à savoir réduire le poids d'un camion à benne tel que décrit dans D2.
Enfin, le raisonnement de la Division d'Opposition porte sur la combinaison de l'enseignement de D2 avec des caractéristiques isolées de manière arbitraire de l'enseignement de D5bis (US-A-5 090 773) pour arriver ex post facto à l'objet de l'invention. En fait, l'enseignement de D2 ne s'applique pas à tous les types de bennes, mais uniquement à celles posées sur un châssis et ne concerne donc pas les bennes autoportantes. En conséquence, on ne voit pas comment l'homme du métier pourrait combiner l'enseignement de D2 avec celui de D5bis, qui montre une benne autoportante. En plus, D5bis divulgue la nécessité de combiner la benne autoportante avec un berceau supportant et épousant parfaitement la forme de la benne, ce qui est incompatible avec l'utilisation d'un compas placé nécessairement sous la benne.
1. Les recours de la Requérante I (Titulaire) et de la Requérante II (Opposante) sont recevables.
2. D'après le libellé du courrier de la Requérante II (Opposante) en date du 5 octobre 2010 et reçu le 14 octobre 2010, notamment les premier et second paragraphes de ce courrier ("nous nous désistons et nous nous retirons de l'instance" ainsi que "un accord étant parvenu entre les parties, notre mandant souhaite ne plus contester la brevetabilité de l'invention couverte par ce brevet européen"), la Requérante II (Opposante) a déclaré ne plus vouloir agir en qualité de requérante vu l'accord signé entre les parties. Dans ces conditions, la Chambre a interprété le courrier de l'Opposante comme un retrait du recours. Elle en a informé les parties dans sa notification en date du 11 novembre 2010, tout en donnant à la Requérante II (Opposante) la possibilité de contester cette interprétation de la Chambre, soit par écrit ou oralement, au plus tard à la procédure orale. L'Opposante n'ayant pas réagi à la notification du 11 Novembre 2010, la Chambre en conclut que le recours de la Requérante II a été retiré le 14 octobre 2010.
3. Force est tout d'abord de constater que le document D2 divulgue selon le mode de réalisation de la figure 1 un dispositif basculant avec toutes les caractéristiques de la revendication 1 du brevet, exception faite pour la caractéristique que la "benne basculante est une structure hémicylindrique autoportante". Cela n'est pas contesté par la Requérante I (Titulaire). L'objet de la revendication 1 est donc nouveau par rapport à D2.
4. Selon la description du brevet, le terme "benne..hémicylindrique autoportante" définit des bennes qui "ne nécessitent normalement pas de longerons inférieurs de renfort" et qui "sont donc plus légères que des bennes classiques" (paragraphe [0003]). La benne divulguée dans D5 (EP-A-374 336) et dans D5bis (qui revendique la priorité de D5) est citée comme exemple d'une benne autoportante (paragraphe [0003]). Ces bennes plus légères sont obtenues par cintrage à la presse d'une tôle rectangulaire. Pour la Chambre, le terme "autoportante" signifie que la benne n'est pas portée par un cadre, un châssis ou une structure séparée. Cette formulation n'exclut pas la présence éventuelle de renforts ou même de longerons. La revendication 2 du brevet indique effectivement la présence de renforts à l'endroit où la branche supérieure du compas est fixée à la benne. Les bennes hémicylindriques divulguées dans D5 et D5bis, le cas échéant avec des renforts, ne fournissent en conclusion que des exemples d'une "benne autoportante".
5. Il ressort de la discussion ci-dessus, qu'une benne hémicylindrique autoportante se caractérise essentiellement par un poids réduit, et par ce qu'elle permet, tel que détaillé dans D5 (colonne 1) ou D5bis, une simplification de la fabrication et une réduction des coûts. Ces avantages évidents et importants étaient connus de l'homme du métier et il a déjà été proposé dans l'état de la technique représenté par les documents D7 et D8 de combiner une benne hémicylindrique semblable à la benne "Guillaume" mais pourvues de renforts, avec un système de levage à structure en compas et donc avec des vérins qui ne sont pas localisés en position frontale de la benne (voir D7, page 22, première et deuxième colonne; page 21, figure "benne semi-cylindrique Manjot"; voir également D8, figures). Il est à noter que D7 se réfère explicitement aux bennes autoportantes de D5 et D5bis dénommées selon l'inventeur "Guillaume".
6. Il ressort de l'exposé qui précède, que l'homme du métier aurait combiné de manière évidente le dispositif basculant de D2 avec une benne telle que connue de D5 ou D5bis, afin d'obtenir les avantages mentionnées. A cet égard, D2 montre à la figure 1 une structure en compas articulée à une structure B portante de la benne. Il est évident que cette structure portante peut être intégrée de façon appropriée dans une benne autoportante sans excéder les capacités ordinaires de l'homme du métier (voir par exemple D7 et D8). De manière évidente ce dernier aurait cherché à obtenir une répartition des efforts sur la benne et aurait obtenu une benne autoportante avec des structures de renfort. Il était également évident pour l'homme du métier d'adapter le berceau ou la structure du support fixe (voir D5bis) d'une telle benne, de manière conforme à la structure de la benne, tout en permettant l'opération du compas, muni d'un vérin, disposé au dessous de la benne, comme montré à la figure 1 de D2 (voir par exemple D7 et D8). L'homme du métier serait parvenu, par conséquent, aussi bien à l'objet de la revendication 1 du brevet qu'à l'objet de la première requête auxiliaire, une "semelle de répartition de charge" étant assimilable et équivalente à un structure de renfort, sans l'exercice d'une activité inventive (Art. 56 CBE 1973).
7. Les arguments présentés par la Requérante I n'ont pas pu convaincre la Chambre. En premier lieu, le choix du mode de réalisation selon la figure 1 de D2 comme état de la technique le plus proche n'est pas arbitraire. Tout au contraire, ce choix est déterminé par le fait que ce mode de réalisation est effectivement le plus proche de l'invention, et que l'homme du métier est bien conscient des efforts de réaction qui se développent entre le châssis et la benne lors de l'ouverture du compas. Cela est d'ailleurs décrit très clairement dans D2 (page 4, lignes 20-25). En conséquence, il ne fait aucun doute, que la configuration de la figure 1, qui minimise les efforts de réaction (voir D2, page 4, lignes 20-25), constitue le point de départ le plus approprié et le plus proche de l'invention.
En plus, il est en principe possible pour l'Opposante de considérer différents état de la technique comme point de départ pour l'appréciation de l'activité inventive, aussi longtemps que le choix d'un état de la technique spécifique apparait raisonnable et légitime. Dans ce cas, l'objet d'une revendication doit impliquer une activité inventive par rapport à chacun de ces différents états de la technique.
Enfin, si dans le cas présent il est vrai que le problème technique pourrait être considéré comme résidant plus généralement dans la réduction du poids et des coûts et dans la simplification de la construction d'un camion à benne, sans être forcément focalisé sur la benne, il est néanmoins vrai que ce problème conduirait nécessairement et inévitablement l'homme du métier à envisager, entre autres, d'adapter la structure de la benne.
8. Pour les raisons indiquées plus haut, la requête principale et la première requête auxiliaire de la Requérante I sont rejetées. Le brevet est donc maintenu dans sa forme modifiée selon la deuxième requête auxiliaire de la Requérante I approuvée par la décision de la Division d'Opposition. En particulier, le recours de l'Opposante ayant été retiré, il découle de la décision G 4/93 de la Grande Chambre de recours (JO OEB, 1994, 875), que la Chambre n'a ni la faculté ni le droit d'examiner la deuxième requête auxiliaire de la Requérante I.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.