T 1510/09 19-09-2013
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COMPOSITION A BASE DE POLYETHYLENE ET PROCEDE DE FABRICATION D'OBJETS FACONNES A PARTIR DE CETTE COMPOSITION
Borealis Technology OY
Total Research & Technology Feluy
Chemtura Corporation
Requête principale
Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (oui)
Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non)
Requête subsidiaire
Modification occasionnée par un motif d'opposition
Extension de la protection conférée par le brevet (non)
Nouveauté - (oui) divulguation implicite (non)
Activité inventive - alternative non évidente - analyse a posteriori
I. Le recours se fonde sur la décision de la division d'opposition, remise à la poste le 19 mai 2009, de révoquer le brevet européen n° 1 278 797. La demande, déposée le 15 mars 2001 et publiée sous le n**(o). de publication internationale WO 01/70872, revendiquait la priorité de la demande européenne 00201031.2 en date du 22 mars 2000.
II. Les seules revendications indépendantes 1 et 11, et la revendication 12, telles que délivrées s'énonçaient comme suit. Les caractéristiques ajoutées aux revendications telles que déposées sont indiquées en caractères gras:
"1. Composition constituée d'au moins 94,5 % en poids d'un polyéthylène ayant une masse volumique standard supérieure à 940 kg/m**(3), de 0,05 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone, de 0 à 0,15 % en poids d'agent lubrifiant auxiliaire choisi parmi les acides gras, les esters d'acides gras, les sels d'acides gras, les amides d'acides gras mono-insaturés, les polyols contenant au moins 4 atomes de carbone, les monoéthers de mono- ou polyalcool, les esters de glycérol, les paraffines, les polysiloxanes, les polymères fluorés et leurs mélanges, et de 0 à 5 % en poids d'un ou plusieurs additifs choisi(s) parmi les anti-oxydants, les anti-acides, les anti-UV, les colorants et les agents antistatiques, la somme des pourcentages relatifs aux composés susmentionnés étant égale à 100%.
11. Procédé de fabrication d'objets façonnés à partir d'une composition à base de polyéthylène conforme à l'une quelconque des revendications 1 à 10.
12. Procédé selon la revendication 11 appliqué à la fabrication de capsules pour bouteilles par injection."
III. Trois oppositions avaient été formées en vue d'obtenir la révocation du brevet en sa totalité pour défaut de nouveauté et d'activité inventive (article 100 a) CBE), l'opposante 2 invoquant également les motifs d'opposition selon les articles 100 b) et 100 c) CBE). Les documents suivant étaient cités dans la procédure d'opposition:
D1: WO 00/68106
D2: Selective Fatty Chemicals as mold-release agents, Plastics Engineering, septembre 1987, pages 33-36
D3: Why Fatty Amides are the Preferred Slip Agents for Polyolefin Films, Addcon Asia, paper 15, 1997, pages 1-5
D4: Fatty Acid and Lipid Chemistry, F. Gunstone, 1996, page 103 (ISBN 0 7514 0253 2)
D5: US-A-5 948 846
D7: Slip migration in Extrusion Coatings, J. Glover, Converting & Packaging, mars 1998, 71(3), pages 188-192
D9: Effect of temperature on the slip and blocking of polyolefins containing various fatty acid amides, A. Maltby et al. Polymers, Laminations & Coatings Conference, 22-26 août 1999, Atlanta, Georgia, Volume 2, pages 1079-1087
D10: Fatty amides, synthesis, properties, reactions and applications, A. McKenna, Witco Chemical Corporation, 1982, pages 20 et 33
D11: The use of fatty acid amides as combined slip and anti-block additives, A. Maltby et al., Addcon World, 1999, 27-28 octobre 1999 (ISBN 1 85957 189 1)
D30: Plastic additive handbook, pages 5 ème édition, pages 601-607
D34-D39: Documents soumis par Basell Polyolefins GmbH, tiers à la procédure, en soutien d'une allégation d'usage antérieur public.
Essais soumis par lettre de la titulaire du 22 septembre 2008Essais soumis par lettre de la titulaire du 16 janvier 2009
Corrigendum soumis par courrier de la titulaire du 9 mars 2009 concernant les essais remis par lettre du 16 janvier 2009
IV. La décision est fondée sur le jeu de revendications soumis par lettre du 19 juin 2006 en tant que requête principale, ainsi que sur deux jeux de revendications soumis à titre de requêtes subsidiaires 1 et 2 lors de la procédure orale du 19 mars 2009. L'unique revendication indépendante de la requête subsidiaire 1 s'énonçait comme suit:
"1. Capsule à visser pour bouteilles constituée d'une composition constituée d'au moins 94,5 % en poids d'un polyéthylène ayant une masse volumique standard supérieure à 940 kg/m**(3), de 0,05 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone, de 0 à 0,15 % en poids d'agent lubrifiant auxiliaire choisi parmi les acides gras, les esters d'acides gras, les sels d'acides gras, les amides d'acides gras mono-insaturés, les polyols contenant au moins 4 atomes de carbone, les monoéthers de mono- ou polyalcool, les esters de glycérol, les paraffines, les polysiloxanes, les polymères fluorés et leurs mélanges, et de 0 à 5 % en poids d'un ou plusieurs additifs choisi(s) parmi les anti-oxydants, les anti-acides, les anti-UV, les colorants et les agents antistatiques, la somme des pourcentages relatifs aux composés susmentionnés étant égale à 100%."
V. Selon la décision contestée, la requête principale ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 84 CBE, en raison de la présence dans la revendication 1 de l'expression "Capsules à visser pour bouteilles comprenant une composition constituée d'au moins". Cette objection était surmontée par la première requête subsidiaire dans laquelle le terme "comprenant" avait été remplacé par l'expression "constitué de"), qui satisfaisait également aux exigences de l'article 123(2) et (3) CBE. Concernant la nouveauté, l'allégation d'usage public antérieur fondée sur les moyens de preuves D34 à D39 n'était pas jugée suffisamment étayée, la nouveauté vis-à-vis de D5 étant également reconnue. Les capsules revendiquées étaient de plus considérées comme nouvelles par rapport à D1, qui ne divulguait pas de capsule comprenant un polyéthylène haute densité. Concernant l'activité inventive, D5 étant considéré représenter l'état de la technique le plus proche, aucune des données expérimentales soumises par la titulaire au cours de la procédure d'opposition n'était admise dans la procédure, les essais soumis par lettres du 22 septembre 2008 et 16 janvier 2009 en raison de leur manque de pertinence et ceux remis le 9 mars 2009 au motif qu'ils étaient trop tardifs pour être analysés par les opposantes. Les essais du brevet montraient que les propriétés organoleptiques se dégradaient lorsque la teneur en érucamide augmentait, la revendication 1 du brevet autorisant en particulier l'utilisation d'un mélange érucamide / béhénamide dans un rapport en poids 75:25. Par conséquent, il n'avait pas été montré que le problème formulé par la titulaire, c'est-à-dire de trouver des alternatives aux capsules de D5, qui aient à la fois des propriétés organoleptiques et de couples satisfaisantes, et ceci sans avoir recours à la zéolithe, ait été résolu sur l'ensemble de la revendication 1. Le problème résolu par rapport à D5 se réduisait donc à la fourniture de capsules sans zéolithe. L'utilisation d'un autre agent lubrifiant tel que le stéaramide, enseigné dans D5, ainsi que dans D7, constituait un choix arbitraire évident pour l'homme du métier souhaitant résoudre ledit problème. L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire ne satisfaisait donc pas au critère de l'activité inventive. L'inclusion dans la revendication 1 de la deuxième requête subsidiaire de l'expression "exempte d'un agent lubrifiant auxiliaire" était, en fonction du sens attribué à cette expression, ou bien contraire aux dispositions de l'article 123(2) CBE ou bien de l'article 84 CBE. Le brevet était donc révoqué.
VI. La titulaire (ci-après, la requérante) a introduit un recours le 13 juillet 2009 contre la décision de la division d'opposition.
VII. L'opposante 3 a retiré son opposition par courrier du 22 septembre 2009.
VIII. Le mémoire exposant les motifs du recours a été soumis le 28 septembre 2009. Y étaient joints, deux jeux de revendications à titre de requête principale et requête subsidiaire, ainsi que des données expérimentales correspondant à celles soumises lors de la procédure d'opposition par lettre du 16 janvier 2009, complétées par le corrigendum du 9 mars 2009.
IX. Par lettres datées respectivement des 8 et 23 février 2010, les intimées opposantes 2 et 1 ont répondu au mémoire exposant les motifs du recours et soumis, entre autres les documents suivant:
D44: Ullmann's Encyclopedia of Industrial Chemistry (ISBN 3-527-20110-6), 1987, volume A 10, 3.6. Autooxidation
D45: Fatty Acids and Their Derivatives, Part I, A. Ralston, John Wiley, 1948, pages 415-418,
D46: Déclaration de Fabienne Radermacher, datée du 8 février 2010.
D47: US Food and Drug Administration, CFR Ch1, Edition 4-1-1997, page 231, § 177.1210 Closures with sealing gaskets for food containers
D48: Page Internet de Darwin Chemical, concernant le produit Erucamide 95%
D49: Fiche technique du produit Libwax-E (Erucamide), Liberty Chemicals.
X. En réponse, la requérante a soumis par courrier du 9 mai 2011 deux jeux de revendications en remplacement des requêtes principale et subsidiaire soumises avec le mémoire de recours.
XI. Des arguments supplémentaires de l'intimée opposante 2 furent soumis par courrier du 31 juillet 2013.
XII. Par courrier du 16 Août 2013, la requérante a soumis, outre des arguments supplémentaires, un jeu de revendications principal amendé, ainsi que deux jeux subsidiaires additionnels en tant que deuxième et troisième requêtes subsidiaires, la première requête subsidiaire, c'est à dire celle déposée par lettre du 9 mai 2011, étant maintenue.
XIII. Au cours de l'audience, tenue le 19 septembre 2013, la requête déposée par lettre du 9 mai 2011, en tant que première requête subsidiaire, était promue au rang de requête principale, une nouvelle requête subsidiaire étant alors déposée en remplacement de toute autre requête subsidiaire. La revendication 1 de chacune des requêtes restant en instance s'énonce comme suit, les insertions par rapport aux revendications telles que délivrées étant indiquées en caractères gras et les suppressions en [deleted: caractères barrés]:
Requête Principale (initialement déposée par courrier du 9 mai 2011 en tant que première requête subsidiaire)
"1. Capsule à visser pour bouteilles constituée d'une composition constituée d'au moins 94,5 % en poids d'un polyéthylène ayant une masse volumique standard supérieure à 940 kg/m**(3), de [deleted: 0,05] 0,08 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone, de 0 à [deleted: 0,15] 0,1 % en poids d'agent lubrifiant auxiliaire choisi parmi les acides gras, [deleted: les esters d'acides gras, les sels d'acides gras, les amides d'acides gras mono-insaturés,] les polyols contenant au moins 4 atomes de carbone, les monoéthers de mono- ou polyalcool, [deleted: les esters de glycérol,] les paraffines, les polysiloxanes, les polymères fluorés et leurs mélanges, et de 0 à 5 % en poids d'un ou plusieurs additifs choisi(s) parmi les anti-oxydants, les anti-acides, les anti-UV, les colorants et les agents antistatiques, la somme des pourcentages relatifs aux composés susmentionnés étant égale à 100%."
Requête subsidiaire (remise le 19 septembre 2013 lors de la procédure orale):
"1. Capsule à visser pour bouteilles susceptible d'être fabriquée par injection d'une composition constituée d'au moins 94,5 % en poids d'un polyéthylène ayant une masse volumique standard supérieure à 940 kg/m**(3), de [deleted: 0,05] 0,08 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone, de 0 à [deleted: 0,15] 0,1 % en poids d'agent lubrifiant auxiliaire choisi parmi les acides gras, [deleted: les esters d'acides gras, les sels d'acides gras, les amides d'acides gras mono-insaturés,] les polyols contenant au moins 4 atomes de carbone, les monoéthers de mono- ou polyalcool, [deleted: les esters de glycérol,] les paraffines, les polysiloxanes, les polymères fluorés et leurs mélanges, et de 0 à 5 % en poids d'un ou plusieurs additifs choisi(s) parmi les anti-oxydants, les anti-acides, les anti-UV, les colorants et les agents antistatiques, la somme des pourcentages relatifs aux composés susmentionnés étant égale à 100%."
XIV. Les arguments de la requérante, dans la mesure où ils sont pertinents pour la présente décision, peuvent être résumés de la manière suivante :
a) L'objet de la revendication 1 selon la requête principale se basait sur une combinaison des revendications 11 et 12 de la demande telle que déposée et de ses passages page 1, lignes 1-4, page 2, lignes 25-28 et page 3, lignes 6-9. La modification additionnelle contenue dans la revendication 1 de la requête subsidiaire se basait sur la page 5, lignes 32-34 de la demande telle que déposée. Ces modifications ne créaient pas une nouvelle combinaison non divulguée dans la demande telle que déposée et n'étendaient pas la protection conférée par le brevet, lequel conférait une protection pour une composition englobant celle de la capsule présente. Ces modifications, en réponse au motif d'opposition selon lequel l'objet revendiqué manquait d'activité inventive, répondaient aux exigences de la règle 80 CBE.
b) Concernant la nouveauté, la déclaration D46 reposait sur une lecture spéculative de D1, basée sur l'hypothèse que la capsule de l'exemple 8 de D1 possédait un certain module de flexion qui n'était pas divulgué dans D1. Les intimées opposantes, auxquelles la charge de la preuve du défaut de nouveauté allégué incombait, n'avaient cependant pas prouvé que la capsule de l'exemple 8 de D1 contenait un polyéthylène d'une densité supérieure à 940 kg/m**(3).
c) En ce qui concerne, l'activité inventive, D5 qui concernait la fabrication de capsules pour bouteilles et traitait du problème des piètres propriétés organoleptiques résultant de l'utilisation d'agents lubrifiants pour lesdites capsules, représentait l'art antérieur le plus proche. Le problème de la dégradation de ces agents lubrifiants tel l'érucamide dans les capsules était connu de longue date. Les amides gras migraient à la surface de la capsule et se dégradaient alors sous l'influence du rayonnement UV, les produits de cette dégradation conférant de mauvaises propriétés organoleptiques au contenu de la bouteille. La solution adoptée dans D5 reposait sur l'utilisation d'une zéolithe pour absorber les produits de la dégradation des agents lubrifiants menant à des mauvaises odeurs.
d) Le problème résolu par le brevet litigieux était la fourniture d'une alternative aux capsules pour bouteilles de D5, qui présente des propriétés organoleptiques et de glissance satisfaisantes, c'est-à-dire sans les goûts et odeurs conférés par l'utilisation d'érucamide. Que ce problème ait été résolu par le choix d'un amide d'acide gras saturé en tant qu'agent lubrifiant, sans nécessiter l'utilisation d'une zéolithe, était démontré par les essais du brevet litigieux et ceux soumis par courrier du 28 Septembre 2009. Une comparaison de l'érucamide avec le béhénémide en présence de zéolithe n'était pas appropriée, la zéolithe absorbant les odeurs provenant de la décomposition de ces agents, masquant ainsi toute différence. De plus, seuls pouvaient être comparés les essais au sein d'une même série de tests, les procédures expérimentales variant entre les différentes séries d'essais.
e) L'enseignement de D5, selon lequel l'utilisation d'une zéolithe était essentielle, détournait l'homme du métier de l'invention présente. Il n'indiquait pas de surcroît qu'un amide d'acide gras saturé puisse procurer un avantage particulier. Aucun autre document de l'état de la technique ne divulguait par ailleurs l'utilisation d'amides d'acide gras saturés dans la fabrication de capsules en contact avec la nourriture ou ne traitait des propriétés organoleptiques découlant de leur utilisation. Le simple passage d'un amide insaturé à un amide saturé n'était donc pas évident pour l'homme du métier.
f) L'argument des intimés selon lequel il était trivial pour l'homme du métier que les amides d'acides gras saturés soient moins sujets à des phénomènes d'auto-oxydation était basé sur des explications théoriques permettant d'expliquer le succès de la solution proposée par la titulaire. Cet argument relevait cependant d'une analyse a posteriori.
g) Par conséquent, l'objet de la requête subsidiaire ne découlait pas de manière évidente de l'état de la technique.
XV. Les arguments des intimées, dans la mesure où ils sont pertinents pour la présente décision, peuvent être résumés de la manière suivante :
a) Concernant la requête principale, la combinaison de caractéristiques objet de la revendication 1 n'avait pas de base dans la demande telle que déposée, la revendication 1 n'étant pas en particulier limitée aux capsules obtenues par injection. De plus, les caractéristiques de la composition selon la revendication 1 de la requête principale était celles définissant dans la demande telle que déposée la composition avant l'étape d'injection, qui n'était cependant pas nécessairement celle présente dans la capsule, car l'étape d'injection conduisait à une dégradation des agents antioxydants. La demande telle que déposée ne divulguait donc pas une capsule possédant la composition définie dans la revendication 1 de la requête principale qui contrevenait donc aux dispositions de l'article 123(2) CBE.
b) La requête subsidiaire déposée lors de la procédure orale était tardive. Elle n'était donc par recevable.
c) Les restrictions concernant la quantité d'amide d'un acide gras saturé et la limitation à certaines classes d'agents de lubrification auxiliaires, qui avaient été opérées dans la revendication 1, étaient contraires aux dispositions de la règle 80 CBE, car elles étaient sans effet sur l'appréciation du bien fondé des motifs d'opposition invoqués.
d) L'expression "susceptible d'être fabriquée par injection", qui exprimait le caractère virtuel de ce mode de fabrication nuisait à la clarté de la revendication 1.
e) De la restriction à certaines classes de composés pour les agents lubrifiants auxiliaires dont la quantité maximale avait été réduite de 0,15 à 0,1 % en poids, et ceci en combinaison avec une quantité minimum de 0,08 % en poids pour l'amide d'acide gras saturé, résultait un objet qui n'était pas divulgué dans la demande telle que déposé. Il était fait en outre référence à la décision T 1511/07. Même si chacune de ces caractéristiques était de manière individuelle divulguée dans la demande telle que déposée, leur combinaison ne l'était point, ce qui était contraire à l'article 123(2) CBE.
f) Les agents lubrifiants auxiliaires tels que des amides d'acides gras insaturés, par exemple l'érucamide, ou des sels d'acides gras, tel que le stéarate de calcium, pouvaient, selon le brevet tel que délivré, être utilisés dans des quantité au maximum de 0,15% en poids. Or, de la suppression dans la revendication 1 du brevet litigieux des amides d'acides gras insaturés et des sels d'acides gras de la liste des agents lubrifiants auxiliaires résultait que ceux-ci pouvaient être utilisés en tant qu'agents antistatiques ou anti-acides dans des quantités allant jusqu'à 5% en poids, c'est-à-dire supérieures à celles autorisées dans le brevet tel que délivré. Le fait que les amides d'acides gras mono-insaturés, en particulier l'érucamide, soient des agents antistatiques était démontré par D48 et D49. Les modifications opérées dans la revendication 1 conduisaient donc à une extension de la protection (article 123(3) CBE).
g) L'objet de la revendication 1 était anticipé par la capsule divulguée à l'exemple 8 de D1, celle-ci étant implicitement fabriquée avec un polyéthylène possédant une masse volumique standard supérieure à 940 kg/m**(3). Il était référé à la déclaration D46, qui prouvait quelle lecture serait faite de D1 par l'homme du métier. En particulier, la nature du polyéthylène utilisé pour la capsule de l'exemple 8 découlait du fait que celle-ci devait présenter une rigidité équivalente à celle des capsules en polypropylène selon les exemples 1 à 7, 9 et 10 de ce même document. Durant la procédure orale, les intimées n'ont plus invoqué l'usage antérieur précédemment cité à l'encontre de la nouveauté de l'objet breveté.
h) D5 représentait l'état de la technique le plus proche. Concernant le problème résolu par les capsules revendiquées:
i) Aucune donnée expérimentale présentant une comparaison avec l'état de la technique selon D5, c'est-à-dire une comparaison avec une capsule utilisant en combinaison de l'érucamide et de la zéolithe, n'avait été présentée. Aucune preuve n'existait donc que les capsules selon la revendication 1 soient supérieures en termes de glissance et de propriétés organoleptiques.
ii) Les preuves expérimentales à disposition étaient constituées des essais relatés dans le brevet, des essais soumis par lettre du 22 septembre 2008 et des essais déposés par lettre du 28 septembre 2009. Les essais selon le brevet montraient, comme l'homme du métier pouvait s'y attendre, que le remplacement d'un amide d'acide gras insaturé par un amide d'acide gras saturé entrainait une légère augmentation du couple d'ouverture des capsules, ainsi qu'une amélioration des propriétés organoleptiques des capsules exposées au rayonnement UV. L'amélioration des propriétés organoleptiques après exposition au rayonnement UV découlait de la moins bonne résistance aux UV des composés possédant des insaturations, ce qui était également trivial pour l'homme du métier.
iii) L'érucamide, bien qu'il ne puisse plus être utilisé dans la revendication 1 modifiée en tant qu'agent lubrifiant, était également un agent antistatique qui pouvait donc néanmoins être utilisé dans des quantités allant jusqu'à 5% en poids selon la revendication 1. Il s'en suivait que cet amide d'acide gras insaturé conduisait comme le montraient les essais fournis par la requérante à de mauvaises propriétés organoleptiques. Le problème formulé par la requérante n'était donc pas résolu par l'ensemble des capsules revendiquées.
iv) L'exemple 3 du brevet litigieux qui concernait une composition menant à un indice d'organolepticité de 2,7 montrait que les propriétés oganoleptiques obtenues avec l'invention revendiquée n'étaient pas bonnes. L'essai E des données fournies par lettre du 16 janvier 2009 le montrait également. La remarque que les tests avaient été pratiqués suivant le mode expérimental décrit dans la lettre du 22 septembre 2008 ne pouvait être correcte, les résultats des tests étant exprimés selon deux échelles d'indices d'organolepticité différentes. Les tests auxquels la requérante se référaient avaient été par ailleurs conduits dans des conditions différentes de celles utilisées dans le brevet.
v) En conclusion, le problème résolu vis-à-vis de D5 ne pouvait donc être que la mise à disposition d'une alternative aux capsules à visser de ce document.
i) L'utilisation d'un amide saturé afin de résoudre ce problème était évident au vu de l'enseignement de D5, colonne 2, ligne 52, selon lequel des amides saturés donnaient de bons résultats. Elle était également évidente pour le chimiste pour lequel il était connu que les amides saturés soient moins sensibles à l'auto-oxydation, l'érucamide ayant été utilisé dans D5 en raison de ses propriétés de glissance plus avantageuses. Que tous les composés oléfiniques, incluant les huiles et graisses insaturées, réagissent sous l'influence de la lumière avec l'oxygène, conduisant à la formation de produits procurant de mauvaises propriétés organoleptiques était connu de l'homme du métier, tel qu'illustré par les documents D44 et D45. Le fait que l'instabilité des amides d'acides gras insaturés augmente avec le nombre de doubles liaisons était enseigné dans D10, qui confirmait que les problèmes d'auto-oxydation n'étaient pas limités aux acides gras insaturés. D4 suggérait également que les amides d'acides gras saturés conduisent par rapport aux amides d'acides gras insaturées à de meilleures propriétés organoleptiques. Il était également fait référence au document de l'art antérieur D47 qui démontrait qu'il était connu d'utiliser le béhénamide dans les joints d'étanchéité destinés à la fermeture de récipients alimentaires. Accepter d'éventuels inconvénients liés à l'absence de zéolithe ne pouvait de surcroît justifier l'existence d'une activité inventive. De plus, l'homme du métier n'aurait pas été réticent, en particulier au vu des documents D2, D3, D5, D7, D9, D11 et D30, à utiliser des amides d'acides gras saturés lorsqu'il souhaitait obtenir des capsules possédant également de bonnes propriétés de glissance.
j) En conclusion, il était donc évident d'utiliser un amide d'acide gras saturé pour fournir une alternative aux capsules de D5. L'objet revendiqué n'était donc pas inventif.
XVI. La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et à titre principal le maintien du brevet sur la base du jeu de revendications déposée le 9 mai 2011 en tant que première requête subsidiaire, et subsidiairement sur la base de la requête intitulée "First Auxiliary Request" (revendications 1 à 8) déposée au cours de la procédure orale.
XVII. Les intimées (opposantes 1 et 2) ont demandé le rejet du recours.
XVIII. La décision a été prononcée à l'issue de la procédure orale.
1. Le recours est recevable.
Requête principale (première requête subsidiaire déposée par lettre du 09 Mai 2011)
2. Selon la page 5, lignes 25-28, de la demande telle que déposée, la composition selon l'invention, c'est-à-dire celle définie dans la revendication 1, peut être utilisée pour la fabrication de capsules à visser. De telles capsules peuvent être fabriquées par un procédé d'injection de cette composition (passage de la page 5, ligne 29, à la page 6, ligne 2 ; exemples 1 et 2). La concentration en anti-oxydant définie par la présente revendication 1 est uniquement divulguée dans la demande telle que déposée pour la composition devant être injectée. Or, au vu des conditions thermiques utilisées lors du procédé d'injection (page 6, lignes 1 à 10), la demande telle que déposée ne saurait divulguer de manière non ambigüe que la capsule formée par injection de cette composition puisse encore comprendre la même quantité d'agent anti-oxydants. En conséquence, la composition de la capsule telle que définie dans la composition 1 de la requête principale étend l'objet de la demande telle que déposée (article 123(2) CBE). La requête principale est donc rejetée.
Requête subsidiaire (remise lors de la procédure orale du 19 Septembre 2013).
Recevabilité
3. Les revendications de la requête subsidiaire, soumise lors de la procédure orale, correspondent à celles du jeu de revendications principal, modifiées par le remplacement dans la revendication 1 du premier terme "constitué" par l'expression "susceptible d'être fabriquée par injection". Cet amendement constitue une réponse immédiate, nécessaire et appropriée au nouvel argumentaire de l'intimée opposante 2 entendu pour la première fois lors de la procédure orale, et qui a mené au rejet de la requête principale. Ainsi, cet amendement ne saurait constituer un motif de non recevabilité de la requête subsidiaire. La Chambre décide par conséquent en vertu du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose d'admettre cette requête dans la procédure.
Règle 80 CBE
4. Contrairement à l'opinion des intimées, la règle 80 CBE ne requiert par que les modifications apportées au brevet surmontent un motif d'opposition, mais qu'elles soient occasionnées par un de ceux-ci. En l'occurrence, les modifications apportées à la revendication 1 du brevet litigieux concernant les quantités de lubrifiants, ainsi que la restriction à une capsule à visser pour bouteilles susceptible d'être fabriquée par injection visent à surmonter l'objection pour défaut d'activité inventive. Dans ces conditions, l'objection à l'encontre de la requête subsidiaire sur la base de la règle 80 CBE est sans fondement.
Article 123(2) CBE
5. La capsule à visser pour bouteilles selon la revendication 1 est définie sur la base du procédé par injection défini page 5, lignes 29-34 de la demande initiale, l'utilisation de la composition selon la revendication 1 d'origine étant implicite. Cette information correspond également à l'information donnée à la revendication 12, qui se réfère indirectement à la revendication 1, mis à part que la capsule n'y est pas précisée être une capsule à visser. De plus, la définition de la composition est modifiée, par rapport à la revendication 1 d'origine, par la suppression, dans la liste des agents lubrifiants auxiliaires, des esters d'acides gras, des sels d'acides gras, des amides d'acides gras mono-insaturés et des esters de glycérol, ainsi que par le changement de la limite inférieure pour la quantité d'amide d'acide gras saturé, passant de 0,05 à 0,08 % en poids, et de la limite supérieure pour la quantité d'agent lubrifiant auxiliaire passant de 0,15 à 0,1 % en poids, ces quantités étant divulguées, respectivement page 2, ligne 27 et page 3, ligne 7 de la demande initiale. Enfin, la revendication 1 contient par rapport à la demande telle que déposée l'expression "la somme des pourcentages relatifs aux composés susmentionnés étant égale à 100%".
6. Il n'a pas été disputé au cours de la procédure orale devant la Chambre que chacune de ces modifications prise de manière isolée, en particulier chacune des restrictions opérées, se base sur des passages de la demande telle déposée. La présence de la caractéristique selon laquelle la somme des pourcentages relatifs aux composés mentionnés dans la revendication 1 est égale à 100%, qui avait été contestée par l'intimée opposante 2 au motif de l'article 100 c) CBE, découle implicitement du fait que cette composition est définie être constituée desdits composés. La question se pose néanmoins de savoir si, comme l'ont soutenu les intimées, les restrictions effectuées prises dans leur ensemble, c'est-à-dire en combinaison, étendent l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle que déposée.
6.1 La décision de la Grande Chambre de Recours G 2/10 (JO OEB, 2012, 376) a rappelé, la norme de référence pour apprécier la conformité avec l'article 123(2) CBE de toute modification apportée aux parties d'un brevet européen relatives à la divulgation. Une telle modification ne peut être effectuée, quel que soit son contexte, que dans les limites de ce que l'homme du métier est objectivement en mesure, à la date de dépôt, de déduire directement et sans équivoque de l'ensemble de ces documents tels qu'ils ont été déposés, en se fondant sur les connaissances générales dans le domaine considéré (point 4.3 des motifs).
6.2 Concernant l'examen d'un ensemble de modifications sous la forme de restrictions, la Grande Chambre a par ailleurs confirmé au point 4.5.4 des motifs de la décision G 2/10 le principe utilisé dans une jurisprudence abondante, selon lequel il convient de déterminer si lesdites restrictions ont pour effet d'isoler des composés, des sous-classes de composés ou d'autres généralisations dites intermédiaires qui ne sont ni mentionnés expressément ni divulgués de manière implicite dans la demande telle que déposée (voir également La Jurisprudence des Chambres de recours de lOffice européen des brevets, 6ème édition, juillet 2010, III.A.1. et 2.).
6.3 Dans le cas d'espèce, la modification apportée à la revendication 1 initiale en restreignant son objet à une capsule susceptible d'être obtenue par injection n'introduit pas d'information qui n'ait pu être déduite directement et sans ambiguïté de la demande telle que déposée, la réalisation d'une capsule à visser pour bouteilles par un tel procédé étant le cur même de l'invention (voir page 5, lignes 29-34 et exemples 1 et 2 de la demande initiale). La possibilité d'utiliser de manière optionnelle l'un des agents lubrifiants additionnels choisi parmi les acides gras, les polyols contenant au moins 4 atomes de carbone, les monoéthers de mono- ou polyalcool, les paraffines, les polysiloxanes, les polymères fluorés et leurs mélanges ressort également sans ambiguïté aucune de la demande telle que déposée, les plages de concentration utilisées étant également définies dans la demande telle que déposée. Le fait d'utiliser la quantité minimum préférée pour l'amide d'acide gras saturé qui doit obligatoirement être utilisé tout en prenant la limite supérieure la plus basse pour l'agent auxiliaire qui est optionnel, et dont on peut donc limiter la quantité, fait implicitement partie de l'information technique présente dans la demande telle que déposée.
6.4 Par conséquent, aucune information technique qui n'ait été divulguée dans la demande telle que déposée n'émerge des restrictions opérées au sein de la revendication 1. Ainsi, l'objection des intimées selon laquelle la revendication 1 ne satisferait pas au critère de l'article 123(2) CBE n'est pas fondée.
Article 123(3) CBE
7. La question de savoir si une modification du brevet européen étend la protection conférée par celui-ci est examinée en déterminant l'étendue de la protection conférée par le brevet avant cette modification, celle-ci étant appréciée conformément à l'article 69(1) CBE et à son protocole interprétatif (décision de la Grande Chambre de Recours G 2/88 (JO 1990, 93, point 4 des motifs). Selon le point 4 des motifs de la décision G 2/88, le but fixé par le protocole est manifestement d'éviter que l'on ne mette trop l'accent sur la formulation littérale des revendications, lorsqu'on les considère en les coupant du contexte dans lequel elles apparaissent à l'intérieur du brevet, tout en évitant à l'inverse que l'on ne mette trop l'accent sur le concept inventif général ressortant du texte du brevet, comparé à l'état de la technique pertinent, sans qu'il soit tenu suffisamment compte par ailleurs de la formulation des revendications. Cette approche vise à assurer à la fois une protection équitable au demandeur et un degré raisonnable de certitude aux tiers (cf. article premier du protocole interprétatif de l'article 69 CBE).
7.1 Dans le cas d'espèce, il ressort sans ambiguïté du présent brevet que le but visé par l'invention est la fourniture d'une capsule à visser pour bouteilles possédant de bonnes propriétés organoleptiques, celle-ci pouvant être obtenue selon l'enseignement du brevet par injection de la composition définie à la revendication 1. Par ailleurs, il n'a pas été montré que l'on puisse obtenir une capsule à visser selon la revendication 1 présente sans avoir recours à une composition définie par les termes de la revendication 1 du brevet litigieux. Dans ces conditions, la transformation de la revendication 1 telle que délivrée portant sur une composition destinée à être utilisée pour la fabrication par injection de capsules à visser pour bouteilles à une capsule à visser pour bouteilles susceptible d'être fabriquée par injection de cette composition n'est pas contraire aux dispositions de l'article 123(3) CBE.
7.2 Si, comme le prétendent les intimées, la catégorie des agents antiacides ou des agents antistatiques, dont l'usage est défini dans la revendication 1 modifiée, se recoupe respectivement en ce qui concerne le stéarate de calcium et l'érucamide avec la définition d'un agent lubrifiant auxiliaire choisi parmi les sels d'acides gras et les amides d'acides gras mono-insaturés, ceci eût été également vrai dans le contexte des revendications du brevet tel que délivré. Il n'est de plus nullement défini dans la revendication 1 du brevet tel que délivré que tout additif choisi parmi les anti-oxydants, les anti-acides, les anti-UV, les colorants et les agents antistatiques ne peut être utilisé dans une quantité totale dépassant 0,15% en poids si celui-ci tombe également sous la définition d'un des agents auxiliaires de la revendication 1. Une telle interprétation serait de surcroît contraire à l'enseignement des exemples qui décrivent une composition comprenant 0,2% en poids de stéarate de calcium, indiqué être utilisé pour sa fonction anti-acide. En conséquence, la restriction de la définition des agents lubrifiants auxiliaires opérée dans la revendication 1 telle que délivrée et le fait que certains composés, qui ne tombent plus sous la définition des lubrifiants auxiliaires, puissent être utilisés dans des quantités de 0 à 5% en poids, ne conduit pas à utiliser des compositions pour le moulage par injection des capsules dont la définition a été étendue.
7.3 En conséquence, la modification du brevet opérée avec la requête subsidiaire est conforme aux dispositions de l'article 123(3) CBE.
Article 84 CBE
8. L'expression "susceptible d'être obtenue par" est une terminologie usuelle dans la formulation de revendications. Elle est destinée à dissiper tout ambiguïté quant à la nature de l'objet protégé. Le terme "susceptible" signifie que l'objet doit obligatoirement posséder tout caractéristique qui découlerait de ce procédé spécifique, sans pour autant restreindre la protection uniquement aux produits obtenus par un tel procédé. L'objection au titre de l'article 84 CBE est donc sans fondement.
Nouveauté
9. Pour pouvoir conclure à l'absence de nouveauté, l'objet revendiqué doit selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours découler directement et de façon non équivoque de l'état de la technique. Une absence de nouveauté a été invoquée dans le cas d'espèce uniquement vis-à-vis du document D1, art antérieur en vertu de l'article 54(3) CBE, en l'occurrence au vu de son mode de réalisation selon l'exemple 8.
9.1 Il n'est pas contesté que l'exemple 8 de D1 ne divulgue pas explicitement la fabrication d'une capsule en utilisant un polyéthylène dont la masse volumique standard est supérieure à 940 kg/m**(3), tel que requis par la revendication 1 présente. Le document D1 de par son enseignement général ne divulgue pas d'avantage, même implicitement, que cette capsule soit nécessairement fabriquée à partir d'un tel polyéthylène.
9.2 Le passage page 5, lignes 28-30 cité par l'intimée - opposante 2 enseigne simplement l'utilisation d'un polyéthylène linéaire de basse densité, dont la masse volumique standard, comme il ressort des arguments présentés peut être, mais n'est pas nécessairement, supérieure à 940 kg/m**(3).
L'argument à l'appui de l'objection de manque de nouveauté vis-à-vis de D1, qui se fonde sur la déclaration D46, part du postulat selon lequel la capsule en polyéthylène de l'exemple 8 présenterait une rigidité équivalente à celle des capsules en polypropylène des exemples 1 à 7, 9 et 10 de D1. Cependant, en l'absence d'indication dans D1 que les capsules en cause possèdent la même rigidité, cet argument est dénué de fondement. L'argument selon lequel la déclaration D46 prouverait la manière dont l'homme du métier interpréterait l'exemple 8 de D1 ne saurait être pertinent. L'opinion exprimée dans D46 ne représente que l'avis d'un seul individu. Elle ne peut en l'absence de preuves corroborantes, être considérée indiquer la lecture qui serait faite de l'exemple 8 de D1 par l'homme du métier. Par conséquent, D1 et en particulier son exemple 8 ne constituent pas une divulgation directe et non équivoque de l'objet revendiqué. L'objection pour manque de nouveauté soulevée par l'intimée 2 ne peut donc être retenue.
9.3 L'argument à l'appui de l'objection de manque de nouveauté vis-à-vis de D1, qui se fonde sur la déclaration D46, part du postulat selon lequel la capsule en polyéthylène de l'exemple 8 présenterait une rigidité équivalente à celle des capsules en polypropylène des exemples 1 à 7, 9 et 10 de D1. Cependant, en l'absence d'indication dans D1 que les capsules en cause possèdent la même rigidité, cet argument est dénué de fondement. L'argument selon lequel la déclaration D46 prouverait la manière dont l'homme du métier interpréterait l'exemple 8 de D1 ne saurait être pertinent. L'opinion exprimée dans D46 ne représente que l'avis d'un seul individu. Elle ne peut en l'absence de preuves corroborantes, être considérée indiquer la lecture qui serait faite de l'exemple 8 de D1 par l'homme du métier. Par conséquent, D1 et en particulier son exemple 8 ne constituent pas une divulgation directe et non équivoque de l'objet revendiqué. L'objection pour manque de nouveauté soulevée par l'intimée 2 ne peut donc être retenue.
Activité inventive
Etat de la technique le plus proche
Le brevet litigieux concerne des capsules à visser pour bouteilles susceptibles d'être fabriquées par injection d'une composition de polyéthylène, ladite composition comprenant un agent lubrifiant afin de faciliter leur dévissage. Ces capsules ne doivent pas présenter le désavantage de procurer une mauvaise odeur et un mauvais goût aux aliments stockés en contact avec celles-ci (voir paragraphes [0001] et [0002]). D5, cité au paragraphe [0002] du brevet litigieux, concerne également la fabrication de capsules à base de polyoléfine, préférentiellement à base de polyéthylène de masse volumique standard comprise entre 950 et 955 kg/m**(3). Ces capsules, dont la composition comprend un agent lubrifiant, sont obtenues par injection. Elles ne confèrent pas de mauvais goût ni de mauvaise odeur aux produits alimentaires (revendication 10; colonne 4, lignes 13-24; revendication 1 et colonne 1, lignes 33-37), grâce à la présence dans leur composition d'une zéolite en tant que capteur d'odeur et de goût (paragraphe [0003] du brevet litigieux). Les exemples de D5 divulguent la préparation par extrusion de granules d'une composition de polyéthylène de masse volumique standard de 952 kg/m**(3) comprenant un mélange de lubrifiants, monostéarate de glycérol et d'amide de l'acide docosénoïque (érucamide), ainsi qu'une zéolithe nécessaire à l'amélioration des propriétés organoleptiques. En accord avec les parties, et l'opinion de la Division d'Opposition, la Chambre considère donc que le document D5 représente le point de départ pour apprécier l'activité inventive.
10. Le brevet litigieux concerne des capsules à visser pour bouteilles susceptibles d'être fabriquées par injection d'une composition de polyéthylène, ladite composition comprenant un agent lubrifiant afin de faciliter leur dévissage. Ces capsules ne doivent pas présenter le désavantage de procurer une mauvaise odeur et un mauvais goût aux aliments stockés en contact avec celles-ci (voir paragraphes [0001] et [0002]). D5, cité au paragraphe [0002] du brevet litigieux, concerne également la fabrication de capsules à base de polyoléfine, préférentiellement à base de polyéthylène de masse volumique standard comprise entre 950 et 955 kg/m**(3). Ces capsules, dont la composition comprend un agent lubrifiant, sont obtenues par injection. Elles ne confèrent pas de mauvais goût ni de mauvaise odeur aux produits alimentaires (revendication 10; colonne 4, lignes 13-24; revendication 1 et colonne 1, lignes 33-37), grâce à la présence dans leur composition d'une zéolite en tant que capteur d'odeur et de goût (paragraphe [0003] du brevet litigieux). Les exemples de D5 divulguent la préparation par extrusion de granules d'une composition de polyéthylène de masse volumique standard de 952 kg/m**(3) comprenant un mélange de lubrifiants, monostéarate de glycérol et d'amide de l'acide docosénoïque (érucamide), ainsi qu'une zéolithe nécessaire à l'amélioration des propriétés organoleptiques. En accord avec les parties, et l'opinion de la Division d'Opposition, la Chambre considère donc que le document D5 représente le point de départ pour apprécier l'activité inventive.
Problème à résoudre et solution proposée
11. Partant ce cet état de la technique, la requérante n'a pas argué que le problème à résoudre soit une amélioration des capsules en termes de couple d'ouverture et de propriétés organoleptiques, ou même la fourniture de capsules présentant des propriétés quantitativement identiques. Conformément à la définition du problème donnée au paragraphe [0003] en relation avec les compositions originellement revendiquées, la titulaire a formulé le problème à résoudre comme la simple fourniture d'une alternative aux capsules de D5, en d'autres termes des capsules présentant des propriétés de glissance et organoleptiques satisfaisantes, c'est-à-dire sans les goûts et odeurs conférés par l'utilisation de l'érucamide. La solution proposée par le brevet litigieux au problème défini ci-dessus est la capsule selon la revendication 1 de la requête subsidiaire, caractérisée en particulier par le fait qu'elle comprend de 0,05 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone et qu'elle ne contient pas une zéolithe.
Succès de la solution
12. Pour démontrer que le problème ci-dessus défini est résolu avec succès par les capsules revendiquées, la requérante s'est appuyé sur les essais du brevet litigieux (exemple 1 selon l'invention et exemple 3 à titre de comparaison).
12.1 Ces essais montrent que le béhénamide, en l'absence d'une zéolithe en tant que capteur d'odeur et de goût, est un agent lubrifiant dont l'utilisation, comparée à celle de l'érucamide, résulte dans des capsules qui procurent après exposition au rayonnement UV de meilleures propriétés organoleptiques. Un tel résultat est également confirmé par les essais soumis avec le mémoire de recours, pour lesquels les propriétés organoleptiques après exposition à la lumière UV de capsules obtenues par injection des compositions D (aucun agent lubrifiant), E (utilisation de 0,2% en poids de béhénamide) et F (utilisation de 0,2% en poids d'érucamide), ont été déterminées, ces compositions étant à part l'agent lubrifiant en tout point identiques. Plus spécifiquement, ces essais, également effectués en l'absence de zéolithe, montrent une dégradation des propriétés organoleptiques plus rapide pour la capsule comprenant l'érucamide, l'eau en contact avec ladite capsule devenant impropre à la consommation en fin de test, alors que l'eau en contact avec les capsules obtenues avec les compositions D (aucun agent lubrifiant) et E (utilisation de 0,2% en poids de béhénamide) ne l'est pas.
12.2 Un tel résultat n'a pas été contesté par les intimées, qui au contraire ont soutenu qu'il était trivial pour l'homme du métier, tel qu'illustré par les documents D10, D44 et D45, car la présence de liaisons insaturées, sujettes à des phénomènes d'auto-oxydation, favorisaient la décomposition sous rayonnement UV des composés les renfermant et donc les mauvaises propriétés organoleptiques observées pour l'érucamide. La Chambre n'a donc pas raison de douter, au vu desdites explications, qu'un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone tel qu'utilisé selon la revendication 1 présente soit, comparé au mélange de lubrifiants à base d'érucamide utilisé dans les exemples de D5, plus favorable à l'obtention de propriétés organoleptiques satisfaisantes et ce en l'absence de zéolithe.
12.3 De plus, l'écart après exposition aux UV observé entre les indices d'organolepticité obtenus avec la composition ne comprenant pas d'agent lubrifiant (composition D) et celle comprenant le béhénamide (composition E) reste modeste, ce qui indique que le béhénamide ne contribue pas significativement à la dégradation des propriétés organoleptiques, alors que celui observé entre la composition comprenant l'érucamide (composition F) et la composition selon l'invention comprenant le béhénamide (composition E) est significatif (voir ci-dessus).
12.4 Dans ces conditions, et sur la base des moyens de preuves soumis par les parties, il est crédible que l'utilisation d'un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone permette d'obtenir en l'absence de zéolithe des capsules qui lorsque exposées au rayonnement UV ne confèrent pas à l'eau des propriétés organoleptiques la rendant impropre à la consommation.
12.5 De surcroît, l'utilisation d'un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone permet d'obtenir des capsules à visser dont le couple d'ouverture mesuré avant toute exposition UV, même s'il n'a pas été montré être supérieur à celui obtenu avec un amide d'acide gras insaturé, demeure néanmoins satisfaisant, ainsi qu'illustré par l'exemple 1 du brevet litigieux et les essais fournis avec le mémoire de recours. La crédibilité d'un tel résultat est en outre confirmé par le document D3, cité par les intimées, qui enseigne l'utilisation du béhéamide et du stéaramide en tant qu'agent de glissance pour les films de polyoléfine.
13. L'argument des intimées selon lequel le problème consistant à fournir des capsules possédant des propriétés organoleptiques satisfaisantes ne pouvait être résolu dans son ensemble, au motif que la capsule revendiquée autorisait l'emploi d'érucamide en tant qu'agent antistatique, ne saurait convaincre. De même qu'un document de l'art antérieur opposé au brevet doit être lu comme il l'aurait été par l'homme du métier à la date de publication dudit document, il est nécessaire d'attribuer aux revendications d'un brevet litigieux et par conséquent aux termes qu'elles comprennent leur signification pour l'homme du métier à la date de dépôt du brevet, ou la date de priorité selon le cas. En l'espèce, la question à laquelle il convient de répondre n'est pas uniquement de savoir si l'érucamide peut effectivement avoir la fonction d'un agent antistatique, mais si l'homme du métier, en faisant appel à ses connaissances générales, aurait compris à la date de priorité du brevet litigieux que la classe des agents antistatiques, dont il définissait dans la revendication 1 l'utilisation optionnelle, englobait un tel composé. Les documents D48 et D49, cités par les intimées pour démontrer que l'érucamide est un agent anti-statique, n'avaient pas, selon leur dire, été publiés avant la date de dépôt du brevet litigieux. Par conséquent, le simple fait d'attribuer la fonction d'agent antistatique à l'érucamide sans indiquer à quelle date cette information faisait partie des connaissances de l'homme du métier, qui plus est sans indiquer s'il s'agissait d'une utilisation dans le cadre des polyéthylènes, ne permet pas de montrer que l'emploi de la terminologie "agents antistatiques" dans la revendication 1 englobait l'érucamide à la date de dépôt du brevet litigieux. Par conséquent l'argument selon lequel l'érucamide peut être utilisé dans le brevet litigieux en tant qu'agent antistatique, est infondé et ne saurait être retenu.
14. Les intimées ont observé que la composition C du rapport d'essais de septembre 2008 et la composition F du rapport d'essais soumis en recours donnent, bien que leurs compositions soient similaires, des résultats différents aussi bien pour le couple d'ouverture, que l'indexe d'organolepticité. Contrairement à l'argument des intimées, on ne saurait sur cette base uniquement mettre en doute la fiabilité des essais soumis en recours, car toute comparaison de résultats entre les différentes séries de tests fournies par la requérante ne peut être objective et donc retenue dans l'appréciation de l'activité inventive, qu'à la condition que les méthodologies utilisées pour tester les compositions C et F soient en tout point comparables. Il n'est cependant pas apparent que la fabrication des capsules et leur traitement avant d'être testées, incluant la durée du stockage avant la mesure, qui est également de nature à influencer la migration de l'agent lubrifiant vers la surface des capsules, aient été identiques pour tester les compositions C et F. Dans ce contexte, l'indication dans le rapport d'essais fourni en recours que les procédures expérimentales suivies seraient telles que décrites dans la lettre du 22 septembre 2008 doit également être relativisée au vu du fait que les testeurs n'étaient pas les mêmes pour les deux séries d'essais (voir remarque 2 dans le rapport d'essais soumis en recours) et que des échelles différentes pour l'évaluation des propriétés organoleptiques avaient été utilisées. Par conséquent, dans le but de déterminer objectivement l'influence de l'agent lubrifiant sur les propriétés organoleptiques des capsules sous exposition UV, ou sur le couple d'ouverture desdites capsules sans exposition UV, il convient de comparer la composition F uniquement avec les compositions D et E au sein du même rapport d'essais.
15. Dans ces circonstances la Chambre accepte que le problème effectivement résolu par l'objet de la revendication 1 est la mise à disposition d'une capsule à visser autre que celle enseignée dans D5, dont les propriétés de glissance et organoleptiques sont satisfaisantes, ou en d'autres termes d'une capsule qui se laisse dévisser sans effort excessif et qui sous exposition au rayonnement UV ne confère pas à l'eau des propriétés organoleptiques la rendant impropre à la consommation.
Evidence de la solution
16. Par conséquent, la seule question en suspens est de savoir si l'état de la technique aurait suggéré à l'homme du métier cherchant à résoudre le problème défini ci-dessus la solution telle que définie par la revendication 1 litigieuse, en particulier l'utilisation de 0,08 à 0,5 % en poids d'au moins un amide d'acide gras saturé contenant de 8 à 30 atomes de carbone, tout en se passant de zéolithe.
16.1 La Chambre peut souscrire à l'argument des intimées selon lequel l'homme du métier pouvait s'attendre à ce que les amides saturés soient moins sensibles à l'auto-oxydation que les amides insaturées. Cet argument bien qu'il puisse expliquer le succès de la solution proposée par la titulaire ne constitue pas pour autant une indication pour l'homme du métier que les amides saturés ne conduisent pas à de mauvaises propriétés organoleptiques en l'absence de zéolithes. Cet argument relève à lui seul sans tenir compte du contexte de la divulgation de D5 d'une analyse a posteriori, c'est-à-dire en connaissance de cause de l'invention et en particulier des résultats expérimentaux divulgués dans le brevet. Une explication des phénomènes sous-jacents aux effets engendrés par l'invention, aussi limpide soit-elle, ne peut se substituer à l'analyse de savoir si l'homme du métier, partant du contexte particulier de l'état de la technique le plus proche aurait été incité par l'art antérieur à appliquer les mesures revendiquées.
16.2 Dans le cas d'espèce, l'homme du métier ne saurait occulter l'enseignement de D5, selon lequel pour la fabrication de capsules à base de polyoléfine incluant un agent lubrifiant choisi parmi les amides d'acides gras, qui sont explicitement divulgués inclure les amides d'acides gras saturés (voir D5, colonne 2, lignes 60-61, ainsi que la revendication 3), l'utilisation d'une zéolithe est obligatoire (voir D5, colonne 1, lignes 33-45 et revendications 9 et 10). Cet enseignement naturellement sous-entend pour l'homme du métier que l'utilisation d'une zéolithe pour les amides d'acides gras saturés est également nécessitée par la tendance de tels lubrifiants à donner des capsules conférant un mauvais goût et/ou une mauvaise odeur aux produits alimentaires emballés. L'homme du métier, partant de document D5, ne peut donc raisonnablement dans le but de poursuivre un but similaire à celui de D5 s'écarter de l'enseignement de ce document, c'est-à-dire se passer de la zéolithe et ne pas remplacer celle-ci par un composé exerçant la même fonction, tout en utilisant les amides d'acides gras saturés en tant qu'agent lubrifiant.
16.3 Le document D47, cité par les intimées, divulgue l'utilisation du béhénamide pour des joints d'étanchéité de récipients alimentaires. Il ne concerne spécifiquement ni les capsules de bouteilles, ni les joints susceptibles d'être exposés au rayonnement UV. Il n'est de surcroît pas précisé si ces joints sont nécessairement en polyéthylène, la mention de ce polymère dans la Table 1 concernant l'utilisation d'azodicarbamide. Par conséquent, le document D47 ne peut pas non plus suggérer la solution proposée par la revendication 1 litigieuse.
16.4 En conclusion, l'art antérieur cité par les intimées n'aurait pas guidé l'homme du métier vers la solution définie à la revendication 1 litigieuse.
Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire et, pour les mêmes raisons, celui des revendications dépendantes 2 à 8 impliquent une activité inventive.
17. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire et, pour les mêmes raisons, celui des revendications dépendantes 2 à 8 impliquent une activité inventive.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la première instance avec instruction de maintenir le brevet sur la base de la première requête subsidiaire déposée pendant la procédure orale (revendications 1 à 8), la description devant être adaptée en conséquence.