Gordana Vunjak-Novakovic

Lauréate du Prix de l'inventeur européen 2021 dans la catégorie Prix du public

Les méthodes traditionnelles de remplacement de tissus humains endommagés ou manquants reposent soit sur une douloureuse greffe prélevée à un autre endroit du corps du patient, soit sur des tissus de donneurs décédés, susceptibles d’être rejetés par le système immunitaire. Dans les deux cas de figure, les cellules sont combinées avec des biomatériaux avant d’être insérées dans le corps, dans l’espoir que la transplantation aboutisse à une régénération des tissus. À travers cette approche, il est difficile de faire croître de l’os et de lui donner la forme exacte souhaitée – or, il s’agit de la transplantation de tissus la plus courante après la transfusion sanguine.

Insatisfaite des méthodes existantes, Gordana Vunjak-Novakovic a inventé avec son équipe une alternative consistant à cultiver des cellules en laboratoire, en contrôlant scrupuleusement l’environnement afin d’influencer la croissance, puis à implanter dans le corps les tissus produits en laboratoire. Cette méthode fonctionne en attachant des cellules souches à un support en biomatériau, qui fait office de matrice et détermine le type de tissu qui se formera. Le support et les cellules souches sont insérés dans un bioréacteur qui imite les conditions présentes dans le corps humain et contrôle soigneusement les variables, telles que la température, le pH, les nutriments, l’oxygène et les facteurs de croissance. Le tissu cultivé de cette façon possède une grande précision anatomique, ce qui contribue à réduire le risque de rejet de la greffe par le système immunitaire lors de son implantation dans le corps.

Une solution efficace dotée d’un potentiel inégalé

Gordana Vunjak-Novakovic a appliqué sa technologie à de nombreux domaines de la régénération tissulaire et commercialise ses inventions brevetées à travers plusieurs entreprises, notamment EpiBone, qu’elle a cofondée en 2013. Environ deux millions de greffes osseuses sont effectuées chaque année, dont une partie auprès d’enfants nés avec des déformations congénitales de la tête et de la face. Ces patients devraient normalement subir de nombreuses chirurgies, pendant plusieurs années, car des greffes de remplacement sont nécessaires au fur et à mesure de leur croissance. Grâce à la méthode mise au point par Gordana Vunjak-Novakovic, ces chirurgies à répétition ne sont plus indispensables, car l’os implanté grandit avec l’enfant.

TARA Biosystems, l’une des entreprises cofondées par la chercheuse, a imaginé une approche pour concevoir du tissu cardiaque adulte. Elle fournit des cellules fonctionnelles pour différentes applications biomédicales, notamment pour les essais in vitro de nouveaux médicaments ou pour créer des tissus propres à chaque patient, permettant un diagnostic et un traitement personnalisés. Gordana Vunjak-Novakovic codirige également des recherches sur la régénération de poumons gravement endommagés à des fins de transplantation, en raccordant les organes au système circulatoire du receveur en amont de la transplantation. Plus récemment, elle et ses collègues ont exploré des moyens d’utiliser leur technologie pour réparer les tissus pulmonaires endommagés par la COVID-19.