T 0768/21 (VERRE FEUILLETE/ST GOBAIN) 08-11-2022
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VERRE FEUILLETÉ MINCE
I. Le recours de l'opposante fait suite à la décision de la division d'opposition de rejeter l'opposition formée à l'égard du brevet européen n° 3 060 396, de revendication 1 libellée comme suit:
"1. Vitrage feuilleté pour automobile résistant aux projections de gravillons comprenant au moins une feuille de verre externe, une feuille de verre interne et une feuille polymérique située entre les deux feuilles de verre, caractérisé en ce que la feuille de verre externe a une épaisseur d'au plus 2 mm et un coefficient de dilatation thermique inférieur à 70.10**(-7) K**(-1), la feuille de verre interne a une épaisseur d'au plus 1,1 mm et est plus mince que la feuille de verre externe, ledit vitrage feuilleté pour automobile étant un pare-brise ou un toit."
II. Dans sa décision, la division d'opposition a conclu que le motif invoqué, à savoir le défaut d'activité inventive, ne s'opposait pas au maintien du brevet tel que délivré. Ce faisant, elle a fait valoir que le document D1 (US 6,265,054 B1) représentait l'état de la technique le plus proche et que l'objet tel que délivré ne découlait pas à l'évidence du contenu de D1 pris isolément ou en combinaison avec l'enseignement des documents D2 (DE 10 2010 032 092 A1), D3 (DE 10 2009 025 972 A1), D7 (Brochure SCHOTT BOROFLOAT**(®)33 2002) ou
D18 (US 2010/0151210 A1).
III. Dans son mémoire de recours, la requérante a contesté cette conclusion et fait valoir non seulement que les combinaisons de documents susmentionnées s'opposaient au maintien du brevet tel que délivré, mais également réitéré l'objection déjà soulevée en première instance selon laquelle l'objet tel que délivré présentait un défaut d'activité inventive à la lumière de la divulgation du document D18 prise en combinaison avec l'enseignement de D1.
IV. En réponse - par courrier daté du 6 décembre 2021 - la propriétaire du brevet (ci-après l'intimée) a contesté ces objections et conjointement déposé seize jeux de revendications modifiées à titre de requêtes subsidiaires 1, 1 bis, 2, 2bis, 3 à 7, 7bis, 8, 8bis, 9 à 11 et 11bis, avec en particulier la revendication 1 selon la requête subsidiaire 8 étant libellée comme suit (différences avec la revendication 1 telle que délivrée mises en exergue par la chambre):
"1. Vitrage feuilleté pour automobile résistant aux projections de gravillons comprenant au moins une feuille de verre externe ayant une composition chimique du type borosilicate, une feuille de verre interne et une feuille polymérique située entre les deux feuilles de verre, caractérisé en ce que la feuille de verre externe a une épaisseur d'au plus 2 mm et un coefficient de dilatation thermique inférieur à 70.10**(-7)K**(-1), la feuille de verre interne a une épaisseur d'au plus 1,1 mm et est plus mince que la feuille de verre externe, ledit vitrage feuilleté pour automobile étant un pare-brise ou un toit et l'épaisseur totale dudit vitrage feuilleté étant inférieure à 4,5 mm, et la feuille de verre externe comprend entre
SiO2 75-85%,
Al2O3 2-3%,
B2O3 10-15%,
Na2O + K2O 3-7%."
V. En date du 27 avril 2022, la requérante a soumis 3 nouveaux documents dont D23 (ALDRICH**(®) AL-223 Technical Bulletin "Description of Pyrex**(®) Brand 7740 Glass Used in Corning Labware") et demandé que les requêtes "bis" soient écartées de la procédure de recours pour dépôt tardif. Elle a en outre attaqué les requêtes subsidiaires pour défaut d'activité inventive sur la base d'une combinaison des documents D18 et D1.
VI. Par courrier daté du 18 juillet 2022, l'intimée a demandé de déclarer irrecevables les 3 documents susmentionnés, car déposés tardivement.
VII. Dans son avis préliminaire, la chambre a fait valoir que l'objet des requêtes principale et subsidiaires 1, 1 bis, 2, 2bis, 3 à 7 et 7bis semblait être dépourvu d'activité inventive au vu de la divulgation du document D18 pris isolément ou en combinaison avec l'enseignement de D1. La chambre a par contre émis un avis positif à l'égard de la requête subsidiaire 8, dont l'objet ne lui semblait pas découler à l'évidence de l'état de la technique connu de l'homme du métier.
VIII. Par courrier daté du 23 septembre 2022, la requérante a contesté cette prise de position de la chambre, faisant valoir que l'objet des requêtes 8 et suivantes présentait un défaut d'activité inventive par rapport à la divulgation du document D18 pris isolément ou en combinaison avec l'enseignement du document D2 ou D3. Elle s'est en outre référé au document D7 pour la composition chimique du verre Pyrex.
IX. Au terme du débat qui s'est tenu à la procédure orale du 8 novembre 2022, l'intimée a déclaré retirer toutes les requêtes de rang supérieur à la requête subsidiaire 8. La requérante a par ailleurs attaqué cette dernière pour défaut d'activité inventive et, pour l'essentiel, repris ou développé ses arguments soumis en réponse à l'opinion préliminaire de la chambre. A la clôture des débats, les requêtes des parties étaient les suivantes:
La requérante/opposante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.
L'intimée/propriétaire a demandé le maintien du brevet sur la base des revendications selon l'une des requêtes subsidiaires 8, 8bis, 9 à 11 et 11bis, toutes déposées avec la réponse au mémoire de recours du 6 décembre 2021.
1. Requête subsidiaire 8 - Activité inventive
Par application de l'approche-problème solution développée par les chambres de recours, la chambre est parvenue à la conclusion que l'objet de la revendication 1 selon cette requête satisfait aux dispositions de l'article 56 CBE pour les raisons qui suivent:
1.1 Selon la jurisprudence des chambres de recours, l'état de la technique le plus proche est un document qui divulgue un objet conçu dans le même but ou visant à atteindre le même objectif et présentant pour l'essentiel des caractéristiques techniques semblables à l'invention revendiquée, et qui donc appellent peu de modifications structurelles.
1.1.1 Dans le cas d'espèce, et contrairement à l'avis de l'intimée selon laquelle celui-ci serait représenté par le document D1, la chambre a conclu que l'état de la technique le plus proche se retrouvait dans le document D18, qui divulgue (revendications 1 et 2) un vitrage feuilleté comprenant plusieurs feuilles de verre laminées par une couche de résine intercalaire thermoplastique, avec au moins l'une des feuilles de verre de surface étant un verre à base de borosilicate exempt d'alcalins, l'épaisseur de chacune des feuilles de verre étant d'au plus 1 mm, et l'épaisseur totale de l'ensemble des feuilles de verre étant de 2 à 10 mm. Les exemples selon D18 mettent par ailleurs en oeuvre un verre à base de borosilicate d'épaisseur 0,7 mm libellé "OA-10", dont le coefficient de dilation thermique tombe sous le libellé de la revendication 1 en question. D18 décrit en outre que ces vitrages sont susceptibles d'être mis en oeuvre dans les automobiles (paragraphe [0001]), en particulier comme pare-brise (paragraphe [0002]).
1.1.2 Ce dernier point a été contesté par l'intimée, qui a fait valoir que le paragraphe [0002] traitait de l'art antérieur et non de l'invention selon D18. Elle a d'autre part avancé que les vitrages selon D18 n'étaient pas bombables et donc non conformes à un usage comme pare-brise.
1.1.3 La chambre ne peut se joindre à ces arguments, car il est incontesté qu'il existe encore des pare-brise plats sur le marché; les vitrages plats de D18 sont donc conformes à un tel usage. Par ailleurs, la revendication 1 incriminée n'est nullement limitée aux pare-brise bombés et envisage même l'utilisation des vitrages selon l'invention comme toit pour automobiles qui, selon la chambre, ne sont pas nécessairement bombés. Ceci a été contesté par l'intimée, mais n'a été étayé d'aucune preuve; une telle preuve aurait par exemple pu être déposée en réponse à l'opinion préliminaire de la chambre, mais l'intimée n'a pas jugé utile d'y répondre.
1.1.4 La chambre observe en outre que, même si D18 n'aborde pas l'aspect spécifique de la résistance au gravillonnage mis en exergue par l'intimée, l'un des problèmes sous-tendant le vitrage feuilleté selon D18 est sa résistance mécanique aux chocs d'une part, et sa résistance à la fissuration d'autre part, telles que mises en avant aux paragraphes [0007], [0016] et [0023], où il est en particulier demandé au vitrage de ne pas se briser en cas de choc avec un corps humain ou un objet, ou en cas de rayures générées à la surface du vitrage.
D18 ne divulgue pas explicitement de quel objet ledit vitrage est supposé être protégé, mais décrit (par. [0028]) en particulier une vitrine supposée résister aux chocs violents lors d'une tentative d'effraction, laquelle résistance est testée en lâchant sur le vitrage une bille en acier d'1 et 3 kg d'une hauteur variant de 50 à 480 cm (par. [0032]).
La résistance à la fissuration mentionnée plus haut est pour sa part testée en pressant une pointe Vickers avec une force variant de 0,1 à 2 kg sur le vitrage posé horizontalement pendant 15 secondes (D18, paragraphe [0025]).
Pour la chambre, il est manifeste qu'un vitrage résistant à de telles contraintes mécaniques est également adapté aux applications automobiles, comme le suggère D18. En particulier, il est manifeste qu'un tel vitrage présente également de manière implicite une certaine résistance aux projections de gravillons et semble donc convenir à tout le moins comme vitrage de toit d'un véhicule automobile, où le problème du gravillonnage est plus restreint que sur le pare-brise, ou même inexistant.
1.1.5 Il suit de ce qui précède que le document D18 fait non seulement partie du même domaine technique que celui de l'invention revendiquée, mais il résout également un problème très proche de celui de la présumée invention.
1.1.6 Quant à D1, ce document est considéré par la chambre comme plus éloigné que D18, car même s'il décrit des vitrages feuilletés pour pare-brise de faible épaisseur, cet art antérieur ne divulgue ni suggère la mise en oeuvre sur l'une des faces extérieures desdits vitrages d'un verre de coefficient de dilatation thermique inférieur à 70.10**(-7)K**(-1), ni celle d'un verre au borosilicate et encore moins celle d'un verre de composition telle que celle requise par la revendication 1 de la requête en instance.
La chambre reconnaît que D1 (col. 1, lignes 11 à 14) mentionne les propriétés classiques que doivent présenter les vitrages pour pare-brise, à savoir de bonnes propriétés optiques et mécaniques, en particulier de résistance aux impacts, ainsi que leur faible masse, mais ce document ne s'attache pas plus au problème spécifique de la résistance améliorée au gravillonnage que D18, si bien que pour la chambre ce dernier représente l'état de la technique le plus proche.
1.1.7 Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1 de la requête en instance se différencie de la divulgation de D18 en ce que la feuille de verre externe est plus épaisse que la feuille de verre interne, et qu'elle comprend entre 75 et 85% de SiO2, entre 2 et 3% d'Al2O3, entre 10 et 15% de B2O3, et entre 3 et 7% de Na2O + K2O.
1.2 Eu égard au problème sous-tendant l'invention revendiquée, celui-ci est décrit au paragraphe 4 du brevet comme étant la mise à disposition d'un verre feuilleté bon marché, mince, léger, et présentant une bonne résistance mécanique, en particulier aux projections de gravillons. Le vitrage feuilleté selon le document D18 présentant toutefois déjà ces diverses qualités, à l'exception d'une référence explicite aux projections de gravillons, le problème à résoudre se doit donc d'être reformulé de manière moins ambitieuse, à savoir en la mise à disposition d'un verre feuilleté alternatif à celui selon D18, présentant tout particulièrement une résistance aux projections de gravillons.
1.3 Comme solution audit problème moins ambitieux le brevet contesté propose le vitrage feuilleté selon la revendication 1, qui est notamment caractérisé par le fait que la feuille de verre interne est plus mince que la feuille de verre externe et en ce qu'elle comprend entre 75 et 85% de SiO2, entre 2 et 3% d'Al2O3, entre 10 et 15% de B2O3 et entre 3 et 7% de Na2O + K2O.
1.4 La chambre ne voit pas de raison particulière pour ne pas reconnaître que le problème moins ambitieux est effectivement résolu par le vitrage revendiqué, si bien qu'il reste à vérifier si la solution proposée découle ou non à l'évidence des documents cités comme état de la technique.
1.4.1 La chambre observe à cet égard que concernant la première caractéristique distinctive, à savoir la différence d'épaisseur entre les deux feuilles de verre extérieures du vitrage, il est vrai que D18 n'oriente pas explicitement l'homme du métier vers cette solution, mais force est de constater qu'aucun effet technique n'est lié à cette différence d'épaisseur, si ce n'est que le vitrage est ainsi rendu plus léger, si bien que cette caractéristique est manifestement triviale pour l'homme du métier à la recherche d'un vitrage plus léger alternatif à celui de D18, et à tout le moins évidente au vu de l'enseignement de D1, qui divulgue dans sa revendication 13 (et les passages correspondants de la description) un vitrage pour pare-brise présentant une épaisseur dissymétrique entre les feuilles de verre interne et externe. Pour l'homme du métier, il va de soi qu'en réduisant l'épaisseur de l'une des feuilles de verre, le vitrage n'en sera que plus léger et si de plus la réduction d'épaisseur est réalisée sur le côté du vitrage non directement exposé aux chocs, la résistance mécanique de l'ensemble ne devrait pas - à preuve du contraire - en être fondamentalement affectée, surtout si la différence d'épaisseur est minime, ce qui n'est pas exclu de l'objet de la revendication 1 en question. Il s'ensuit pour la chambre qu'aucune contribution inventive ne peut être vue dans cette caractéristique distinctive.
1.4.2 Eu égard à la deuxième caractéristique distinctive, la chambre ne peut suivre l'argumentaire de l'opposante selon laquelle celle-ci serait rendue évidente par le document D18 lui-même, ou à tout le moins par le contenu du document D2.
1.4.3 La chambre observe que D18 décrit certes au paragraphe [0014] la mise en oeuvre d'un verre de type borosilicate, et plus précisément au paragraphe [0015] celle d'un tel verre à base d'alcalins tel que le Pyrex**((RTM)), mais le verre dont il est question au paragraphe [0014] n'est pas celui selon l'invention décrite dans D18 (qui selon la revendication 1 doit être exempt d'alcalins), mais celui de la face opposée et donc celui non susceptible d'être soumis aux chocs et impacts; quant à celui mentionné au paragraphe [0015], il est explicitement décrit comme ne présentant pas la résistance aux rayures, et donc à la fissuration, recherchée dans D18. Il s'ensuit que de ces seuls passages l'homme du métier en charge du problème moins ambitieux susmentionné, et en particulier celui visant une bonne résistance mécanique aux gravillons, ne peut arriver à l'objet revendiqué.
1.4.4 La requérante a ensuite fait valoir qu'il était évident pour l'homme du métier d'arriver à l'objet revendiqué à partir des exemples de D18, et en particulier du Tableau 3, car de ce dernier et des Figures 1 et 2 du brevet (reproduits ci-dessous), il était manifeste que l'objet selon la revendication 1 incriminée ne représente pas un mode alternatif à celui de D18, car incluant des modes opératoires de bien plus mauvaise qualité que l'invention selon D18.FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
Le tableau 3 de D18 montre la résistance à la fissuration du verre OA-10 par rapport aux verres Pyrex ou silico-sodocalcique, et les figures 1 et 2 du brevet comparent les vitrages C1 et C5 (de feuille externe respectivement en verre silico-sodocalcique et aluminosilicate de sodium) aux vitrages C3 (de feuille de verre externe de type borosilicate exempt d'alcalin), C4 (de feuille de verre externe de type aluminosilicate de lithium) et C2 (de feuille de verre externe de type borosilicate de composition telle que revendiquée).
La requérante a fait valoir qu'au vu du Tableau 3, il était manifeste que le verre Pyrex - qui tombe sous le libellé de la revendication 1 - était beaucoup moins résistant à la fissuration que le verre OA-10 (de type borosilicate exempt d'alcalins) qui à l'origine tombait sous le libellé de la revendication 1, si bien que cette dernière couvre implicitement des modes opératoires si fragiles qu'ils ne résolvent pas le problème sous-tendant l'invention, de sorte que le problème objectif à résoudre n'est autre que la mise au point d'un vitrage de plus mauvaise résistance à la fissuration que les vitrages à la base de l'invention selon de D18. Or, un tel vitrage - à savoir celui ayant le verre Pyrex comme verre externe - est connu et décrit dans D18 lui-même, si bien que l'objet revendiqué est rendu évident par D18 lui-même.
1.4.5 La chambre ne peut se joindre à cette conclusion, car le test mis en oeuvre pour mesurer la résistance à la fissuration des vitrages selon D18 est un test statique mettant en oeuvre une pointe Vickers pressée pendant 15 secondes avec une force variant de 0,1 à 2 kg contre la face externe du vitrage, alors que celui selon le brevet est un test dynamique qui consiste à lâcher une pointe Vickers lestée sur la face externe du vitrage maintenu dans un cadre souple à partir de hauteurs allant de 100 à 2 000 mm avec un temps de contact avec le vitrage, selon l'intimée (non contesté par la requérante), de l'ordre de quelques dizaines de microsecondes. Pour la chambre, il est incontestable que le test dynamique est plus proche des conditions propres au problème sous-tendant l'invention, à savoir la résistance aux fissures provoquées par des gravillons, que celui de D18, où les vitrages sont supposés résister à des impacts provoqués par des chocs avec des personnes ou des "objets" non précisément décrits.
Il s'ensuit que l'allégation selon laquelle le vitrage basé sur le verre Pyrex serait bien moins résistant au gravillonnage que celui basé sur le verre OA-10 ne peut être suivie, car il n'a ni été démontré que les deux tests mènent aux mêmes résultats, ni est-il crédible - en l'absence de preuve du contraire - qu'un test mené en statique avec un temps de contact de 15 secondes puisse mener aux mêmes résultats qu'un test dynamique avec un temps de contact de quelques dizaines de microsecondes.
1.4.6 L'opposante a en outre fait valoir que les Figures 1 et 2 du brevet montraient que le vitrage C3 - dont la composition du verre externe serait, selon elle, proche de celle du verre OA-10 à la base de l'invention selon D18 - est le plus résistant au gravillonnage de tous les vitrages testés, et en particulier bien meilleur que le vitrage C2, basé sur le vitrage revendiqué. Selon la requérante, le seul problème à résoudre serait donc celui de proposer un vitrage de bien plus mauvaise qualité que celui de D18.
1.4.7 La chambre ne peut se joindre à cette conclusion, car même si de la Figure 2, il ressort que le vitrage C3 est visiblement meilleur au test simulant le gravillonnage que les vitrages comparatifs C1 et C5, et en particulier que le vitrage C4 (considéré à l'origine comme faisant partie de l'invention au moment du dépôt de la demande), la Figure 1 montre que le vitrage C2 basé sur le verre revendiqué est également bien plus résistant au test simulant le gravillonnage que le vitrage C4 et que les vitrages comparatifs C1 et C5, si bien que même si le vitrage C2 n'est pas comparé directement avec le vitrage C3, il n'en est pas moins parmi les deux plus résistants au gravillonnage testés dans le brevet, ce qui est particulièrement surprenant pour un verre au borosilicate à base d'alcalins, puisque D18 montre que de tels verres, par exemple le verre Pyrex, ne résistent que très peu à la fissuration par chocs ou impacts.
1.4.8 La chambre note qu'en outre, aucun des autres documents mentionnés par la requérante, en particulier D1, D2 ou D7, ne divulgue l'utilisation d'un verre au borosilicate à base d'alcalins et de composition chimique telle que requise à la revendication 1 dans un vitrage similaire à celui de D18 pour résoudre le problème spécifique du gravillonnage, si bien que l'homme du métier en charge du problème sous-tendant l'invention ne parviendrait à l'objet de la revendication 1 sauf à avoir recours à une analyse ex post facto qui suppose une connaissance préalable de la solution revendiquée.
1.4.9 Il suit de ce qui précède que l'objet de la revendication 1 (et donc celui des revendications 2 à 9 qui en dépendent) ne peut être considéré comme découlant de manière évidente pour l'homme du métier de l'état de la technique connu de ce dernier, et repose par conséquent sur une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
2. La chambre n'ayant aucun doute doute que l'objet des revendications 1 à 9 présente une base dans les documents tels que déposés à l'origine, et aucune autre objection n'ayant été soulevée par la requérante, l'objet ainsi revendiqué satisfait aux exigences de la CBE.
3. La question de la recevabilité des documents D21 à D23 peut rester ouverte, les documents D21 et D22 n'ayant pas été utilisés à la procédure orale et la composition du verre Pyrex, telle qu'elle ressort du document D23, étant d'une part publique et d'autre part, non contestée.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition avec ordre de maintenir le brevet sous forme modifiée sur la base des revendications 1 à 9 selon la requête subsidiaire 8 déposée avec la réponse au mémoire de recours du 6 décembre 2021, et d'une description encore à adapter.