J 0034/90 26-11-1991
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Preuve d'un ordre de paiement en bonne et due forme
Rules relating to fees - date to be considered as the date on which payment is made - evidence
I. La requérante, ayant un mandataire agréé auprès de l'OEB, comme représentant, a déposé le 22.01.87 une demande de brevet européen n° 87 400 148.0, sous priorité japonaise du 23.01.86.
II. Le rapport de recherche a été publié le 19 octobre 1988, et notification de cette publication a été faite par l'OEB au mandataire le 25 octobre 1988 avec rappel des dispositions de l'article 94(2) CBE, notamment quant au délai imparti impératif de six mois à compter de la publication du rapport de recherche pour s'acquitter du paiement de la taxe d'examen sans quoi la requête serait réputée n'avoir pas été déposée.
III. Au 19 avril 1989 date d'expiration de ce délai, l'OEB n'avait toujours pas été crédité du montant de la taxe d'examen. En conséquence, l'Office a, le 16 mai 1989, suivant les dispositions de la règle 85bis CBE, notifié au mandataire le défaut de paiement de la taxe d'examen et lui a signalé qu'il avait la possibilité de s'en acquitter avec surcharge dans un délai d'un mois à compter de ladite notification.
IV. Ce délai ayant expiré le 26 juin 1989 sans que la taxe d'examen avec surcharge n'ait été payée, l'Office a notifié au mandataire la perte de droit selon la règle 69(1) CBE, le 12 juillet 1989. La mandataire s'est acquitté de la taxe d'examen avec surcharge le 14 août 1989 et a formulé une requête en décision selon les dispositions de la règle 69(2) CBE, le 24 août 1989.
V. Suivant décision du 26 juillet 1990, la section de dépôt de l'Office a rejeté les arguments du mandataire et maintenu que la demande de brevet était réputée retirée depuis le 27 juin 1989.
VI. Le mandataire a fait appel de cette décision le 13 septembre 1990, payé la taxe de recours le 20 septembre 1990 et fourni le mémoire contenant les moyens et arguments au soutien de son recours le 22 novembre 1990.
VII. La décision attaquée considère que le représentant, dûment mis en demeure par notification selon la règle 85bis CBE en date du 16 mai 1989, et qui avait jusqu'au 26 juin 1989 pour payer la taxe d'examen avec surcharge, ne serait-ce qu'à titre conservatoire, n'a pas jugé utile d'agir pendant ce délai de grâce, alors même que les faits de grève postale, allégués comme cause du défaut de paiement, avaient cessé depuis déjà trois mois à ce moment là.
Elle fait grief au mandataire de n'avoir pas, alors même que la grève postale affectait la distribution du courrier en France lors du paiement prétendu, vérifié la réalité de l'affectation de l'ordre de virement d'une taxe conditionnant la poursuite de la procédure de délivrance du brevet demandé.
Elle considère enfin qu'en tout état de cause les preuves de l'envoi en temps opportun d'un ordre de virement à la banque, prétendu fait le 19 janvier 1989 et donc en temps utile, et du bordereau y correspondant à l'OEB, demeurent en l'état insuffisantes, en particulier en raison de la cessation des perturbations postales au 15 février 1989. Le mandataire disposait de plus de deux mois pour vérifier le sort de ses envois et donc de la réalité du paiement.
VIII. La requérante prétend apporter la preuve qu'elle a bien donné l'ordre de paiement en bonne et due forme à un établissement bancaire, en produisant :
- d'une part, les copies d'un ordre de paiement à la Banque Neuflize Mallet Schlumberger au profit de l'OEB, et du bordereau de paiement y correspondant à la caisse dudit Office, tous deux en date du 19 janvier 1989 et,
- d'autre part, une lettre datée du 20 septembre 1989 de la Banque Neuflize Schlumberger et Mallet selon laquelle celle-ci n'aurait "semble-t-il" (!) jamais reçu l'ordre de virement du 19.01.89 en considération de la grève postale sévissant alors en France (communication du Président de l'OEB JO OEB 7/1989, 315).
Elle ajoute qu'à réception de la notification du 16 mai 1989 selon la règle 85ter CBE, ses services comptables avaient pris contact téléphonique avec la banque destinataire de l'ordre de virement du 19 janvier 1989 afin qu'elle en confirme la réception et que, dans le cas contraire, elle prenne les mesures nécessaires. Etant donné que la banque ne s'est par la suite plus manifestée, la mandataire a supposé que celle-ci avait réglé la question.
Etant donné qu'elle se trouve actuellement dans l'impossibilité d'obtenir de la banque une preuve explicite de sa défaillance, elle affirme sa bonne foi et demande que la décision dont appel soit révoquée, ainsi que l'admission du déposant à poursuivre la procédure de délivrance.
IX. La Requérante a donné son accord exprès quant à l'usage de la langue française comme langue de rédaction de la décision (cf. décision J 18/90 du 22 mars 1991, motif n° 1).
1. Le recours répond en la forme aux conditions des Articles 106 à 108 et de la Règle 64 CBE ; il est donc recevable.
3. Quant au fond, l'Article 8(3)a ii) nouveau du Règlement relatif aux taxes, tel que modifié par décision du 7 décembre 1990 et entré en vigueur le 3 janvier 1991 (JO OEB 1er février 1991), applicable dans tous les cas où la perte d'un droit n'est pas définitivement établie à la date de son entrée en vigueur, comme en l'espèce, égards pris du caractère suspensif de l'appel, dispose que : "Le paiement d'une taxe est considéré comme effectué dans le délai, si le demandeur apporte la preuve d'avoir dans le délai, donné un ordre de virement en bonne et due forme de ce paiement à un établissement bancaire."
4. La requérante considère qu'elle apporte suffisamment cette preuve.
4.1 Toutefois, la Chambre considère que la preuve satisfactoire d'un ordre de paiement opéré en bonne et due forme ne saurait avoir une nature purement potestative, ainsi qu'il en serait par l'effet de la considération de la seule bonne foi de l'auteur du recours.
On ne peut pas considérer comme preuve les copies de deux lettres simples jamais reçues par leurs destinataires respectifs : un ordre de virement à la banque d'une part et, d'autre part, une communication d'un bordereau de paiement à l'OEB, toutes deux en date du 19.01.89.
4.2 Certes, il est avéré qu'à pareille époque, une grève postale sévissait sur l'ensemble du territoire français ; il n'en demeure pas moins que cette perturbation générale a pris fin le 15.02.89 (communication du Président de l'OEB JO OEB 7/1989, 315) et qu'à cette date le délai prévu à l'Article 94(2) CBE pour le paiement de la taxe d'examen était loin d'être expiré puisqu'à échéance du 19 avril 1989.
4.3 De plus, eu égard à l'importance qui s'attache à un paiement en "bonne et due forme", celle de la lettre simple, dont la preuve de la réception demeure aléatoire, n'est point celle qui ménage le mieux une preuve préconstitutée.
4.4 La Chambre considère à ce propos qu'à tout le moins le mandataire aurait dû être conscient du sort hasardeux de courriers importants postés en période de grève et vérifier leur bonne arrivée, ainsi que la bonne excécution de l'ordre de paiement et l'information qu'ils contenaient.
4.5 Au lieu de mettre en pratique cette diligence élémentaire, le mandataire dûment mis en demeure par les services de l'OEB suivant notification du 16 mai 1989 et qui disposait d'un délai de grâce jusqu'au 26 juin 1989 pour s'acquitter du paiement de la taxe et de sa surcharge, n'a pas mis à profit ce délai pour l'exécution d'un paiement en temps utile ; il s'est borné à se mettre en rapport téléphonique avec la banque, ce qui demeure d'ailleurs impossible à prouver.
4.6 La lettre de la banque de Neuflize Schlumberger et Mallet en date du 20 septembre 1989 dénie sans équivoque la réception d'un ordre de paiement qu'elle aurait omis fautivement d'exécuter, dès lors qu'il y est dit liminairement que les recherches sont demeurées vaines, quand même qu'elle comporte la mention dubitative "semble- t-il" constitutive d'une explication probable de la non réception due aux grèves postales ; et rien dans les déclarations écrites du banquier dans le document précité ne vient corroborer la réalité d'une conversation téléphonique ci-dessus évoquée.
4.7 Force est donc à la Chambre de constater que les exigences de preuves requises à l'article 8(3) a ii) du règlement de taxe de la CBE, ne sont pas remplies et qu'en conséquence le recours doit être rejeté.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.