T 0028/91 20-10-1992
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Procédé simplifié de filage de polyamide à grande vitesse
1. Metallgesellschaft AG
2. Didier Engineering GmbH
Activité inventive (confirmée)
Inventive step (yes)
Amendments - added subject matter (no)
Late submitted material - document admitted (no)
Apportionment of costs (no)
I. La demande de brevet européen n° 84 420 026.1 déposée le 13 février 1984, pour laquelle a été revendiquée la priorité du 16 février 1983 fondée sur un dépôt antérieur en France, a donné lieu le 3 septembre 1986 à la délivrance du brevet européen n° 118 375 sur la base de trois revendications.
La revendication principale s'énonce comme suit :
"Procédé de filage à vitesse élevée de filaments à base de polyhexaméthylène adipamide avec appel direct de ces derniers sur le bobinoir, les filaments étant après la sortie de la filière, refroidis au moyen d'un fluide gazeux, regroupés et ensimés simultanément en un point de convergence, caractérisé par le fait que les filaments sont :
- refroidis au moyen d'un fluide gazeux ayant un degré d'humidité (relative) d'environ 75 % soufflé transversalement au faisceau de filaments ;
- regroupés et ensimés en un point de convergence situé à une distance de la filière comprise entre 55 et 70 cm ;
- renvidés à une vitesse égale ou supérieure à 5 000 m/min sous une tension inférieure ou égale à 0,20 cN/dtex, la distance maximale entre la filière et le point de dépôt des filaments sur la bobine de renvidage étant comprise entre 130 et 200 cm."
La revendication 2 est une revendication dépendante visant une modalité de mise en oeuvre particulière du procédé selon la revendication 1 ; quant à la revendication 3, elle a trait aux fils, tissus et tricots obtenus à partir des filaments issus du procédé selon la revendication 1.
II. Le 27 mai 1987, l'opposante 1 a fait opposition à ce brevet et a requis sa révocation en totalité aux motifs, d'une part, que l'objet du brevet en litige n'impliquait pas d'activité inventive (article 100a) CBE), et, d'autre part, que certaines caractéristiques de la mise en oeuvre du procédé revendiqué n'étaient pas expressément divulguées (article 100b) CBE).
Le 28 mai 1987, l'opposante 2 a également formé une opposition contre le brevet européen tel que délivré, en invoquant le défaut de nouveauté et d'activité inventive de l'objet revendiqué ainsi qu'un libellé incohérent de la revendication 1, dont la partie caractérisante ne contenait aucune véritable caractéristique de procédé.
Ces diverses objections s'appuyaient sur les quatre documents suivants
(1) DE-A-2 445 477
(2) DE-A-2 530 618
(3) FR-A-2 277 913
(4) US-A-4 247 505
ainsi que sur cinq autres documents non produits en temps utile.
III. Par décision signifiée le 8 novembre 1990, la division d'opposition a rejeté les oppositions en constatant que les exigences de nouveauté et d'activité inventive étaient satisfaites et que les autres objections n'étaient pas fondées.
Plus spécifiquement, il était d'abord indiqué que les documents produits tardivement n'étaient pas susceptibles d'étayer valablement l'objection soulevée au titre de l'article 100 a) CBE et qu'ils avaient donc été écartés en application des dispositions de l'article 114(2) CBE.
L'objection d'insuffisance de l'exposé selon l'article 100 b) CBE n'était pas soutenable, puisque la description du brevet attaqué donnait les informations nécessaires à la mise en oeuvre du procédé. L'objection quant à la forme de la revendication principale n'était pas non plus acceptable, car il s'agissait tout au plus d'une objection de défaut de clarté qui n'était pas un motif d'opposition. L'exigence de nouveauté était satisfaite, car rien dans l'enseignement du document (3) n'indiquait que la borne supérieure de la vitesse de renvidage, 5000 m/min, applicable à la famille des polyesters fibrogènes et des polyamides fibrogènes se couplait à la sélection de l'espèce, à savoir le polyhexaméthylène adipamide, à l'intérieur du genre, à savoir les polyamides fibrogènes. Enfin, l'objet du brevet attaqué impliquait une activité inventive. D'une part, le document (3) ne contenait pas d'information conduisant à choisir une humidité relative d'environ 75 % pour le gaz de refroidissement ; d'autre part, ce document enseignait des distances filière-point de convergence et filière-point de dépôt sur le bobinoir bien supérieures aux distances requises dans le brevet attaqué. Quant aux autres documents produits en temps utile, ils illustraient tout au plus dans un contexte différent des caractéristiques isolées du procédé revendiqué.
IV. Le 7 janvier 1991, la requérante (opposante 2) a formé un recours à l'encontre de cette décision, en acquittant simultanément la taxe prescrite et en exposant les motifs du recours dans un mémoire de recours déposé le 1er mars 1991. Ces motifs, qui ont été repris dans une lettre parvenue le 15 avril 1992 à la suite d'une notification intermédiaire de la chambre, faisaient référence au document (3) et à certains des documents produits tardivement en procédure d'opposition.
L'objection quant à la forme de la revendication principale y était maintenue, dans la mesure où cette revendication associait des caractéristiques de procédé et des caractéristiques de dispositif, dont il résultait une formulation hétérogène. Quant au fond, un degré d'humidité du fluide gazeux de l'ordre de 75 % ne faisait que correspondre à l'humidité naturelle de l'air. Par ailleurs, les distances filière-point de convergence et filière-point de dépôt sur le bobinoir pouvaient être simplement déterminées à partir d'essais systématiques ; aucune de ces deux caractéristiques ne pouvait donc conférer une activité inventive au procédé revendiqué. De plus, il était encore souligné que le préambule de la revendication principale ne faisait que correspondre à l'enseignement du document (3) et que la plupart des caractéristiques selon la partie caractérisante étaient illustrées dans trois des documents produits tardivement.
V. Dans son mémoire de réponse déposé le 22 juin 1991 l'intimée (titulaire du brevet) s'est d'abord attachée à démontrer que la division d'opposition avait décidé à juste titre de ne pas tenir compte des documents produits tardivement. Quant au fond, elle a fait valoir que les caractéristiques de procédé décrites dans ces trois documents n'étaient pas susceptibles, prises isolément ou en combinaison, de conduire au procédé revendiqué dont le mérite était d'associer une simplicité de mise en oeuvre et des faibles tensions de renvidage permettant d'obtenir à des vitesses élevées et sans rouleau de reprise une bonne montée des bobines.
VI. La requérante conclut à l'annulation de la décision attaquée et à la révocation du brevet dans sa totalité.
L'opposante 1, qui n'a pas pris part à la procédure de recours, n'a présenté aucune requête.
L'intimée conclut au rejet du recours et requiert le remboursement des frais occasionnés par la réponse au recours qui a nécessité l'examen de divers documents non produits en temps utile.
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est recevable.
2. Conformément aux dispositions de l'article 114(1) CBE, la chambre a examiné les documents cités tardivement en procédure d'opposition, c'est-à-dire en dehors du délai de 9 mois normalement imparti aux opposantes pour invoquer des faits ou produire des preuves à l'encontre d'un brevet délivré (article 99(1) CBE), et repris dans le mémoire de recours. Tout comme la division d'opposition, la chambre estime que le contenu de ces documents n'est pas de nature à influencer l'issue de recours, autrement dit que l'issue du recours ne dépend pas de la prise en compte de ces documents ; en conséquence, la chambre, en application des dispositions de l'article 114(2) CBE, a décidé d'écarter ces documents de la procédure.
3. L'objet du brevet tel que défini par les revendications 1 à 3, lesquelles n'ont pas été modifiées au cours de la procédure d'opposition (article 123(3) CBE), ne s'étend pas au-delà du contenu de la demande telle que déposée, de sorte que les dispositions de l'article 123(2) CBE sont également satisfaites.
La revendication 1 diffère pour l'essentiel de la revendication principale telle que déposée, d'une part, par une articulation différente entre le préambule et la partie caractérisante, et, d'autre part, par l'incorporation de diverses caractéristiques provenant de revendications dépendantes et de la description. Plus spécifiquement, le refroidissement des filaments à la sortie de la filière au moyen d'un fluide gazeux et leur regroupement et ensimage simultanés en un point de convergence sont deux caractéristiques transférées de la partie caractérisante dans le préambule. La distance de 55 à 70 cm séparant la filière du point de convergence et la vitesse de renvidage égale ou supérieure à 5000 m/min constituaient les caractéristiques des revendications 2 et 3 d'origine. Le renvidage des fils à une tension égale ou inférieure à 0,20 cN/dtex est mentionné à la page 4, lignes 10 à 13 de la demande telle que déposée. Enfin, la suppression du mot "simplifié" dans l'expression d'origine "procédé de filage simplifié" et de "à grande vitesse" dans l'expression d'origine "bobinoir à grande vitesse", ainsi que les changements "directement" en "direct" et "un" en "le" dans le préambule ne sont pas de nature à affecter la définition du procédé revendiqué.
Quant aux revendications dépendantes 2 et 3, elles correspondent aux revendications 4 et 5 telles que déposées.
4. Le brevet attaqué concerne un procédé simplifié de filage de polyamide à grande vitesse. Un procédé analogue applicable à la production d'un fil de multifilaments en une matière polymère synthétique est décrit dans le document (3). Dans ce procédé, les filaments traversent après la sortie de la filière d'abord une zone de refroidissement balayée par de l'air, puis sont mis en faisceau par un guide réunisseur, ensuite dirigés successivement vers un guide d'appui et un guide-fil animé d'un mouvement de va-et-vient se déplaçant le long de l'axe longitudinal d'une bobine, sur laquelle ils sont finalement renvidés à une vitesse pouvant atteindre 5000 m/min (revendications 1 et 11 ; figure 1). La distance L entre le guide réunisseur et l'extrémité d'écoulement de la filière est définie par un système d'inéquations où interviennent la distance de solidification X, le titre du filament individuel et la vitesse de renvidage ; la longueur de convergence, qui est en théorie supérieure d'au moins 25 cm à la distance de solidification (page 4, ligne 29 à page 5, ligne 3), est en pratique comprise entre 140 et 220 cm pour une configuration optimale des bobines de renvidage (tableaux I et II ; figure 2). La distance entre la filière et le point de dépôt des filaments sur la bobine de renvidage, dont le calcul à partir de ses trois composantes sera donné en détail ci-dessous, est au minimum 215 cm. Ce procédé est applicable à la production d'un fil de multifilaments en polyamide, en particulier en polyhexaméthylène adipamide (page 5, lignes 4 à 6 et 23 à 27).
A la lumière de cet art antérieur le problème technique à résoudre peut être vu dans la mise à disposition d'un procédé permettant à partir d'un dispositif moins encombrant le filage de polyhexaméthylène adipamide à des vitesses encore plus élevées.
Selon le brevet attaqué ce problème est résolu, d'une part,
(i) en refroidissant les filaments après la sortie de la filière au moyen d'un fluide gazeux ayant un degré d'humidité relative d'environ 75 %,
et, d'autre part, en utilisant un métier dans lequel
(ii) la distance de la filière au point de convergence est comprise entre 55 et 70 cm,
(iii) la distance entre la filière et le point de dépôt des filaments sur la bobine de renvidage est comprise entre 130 et 200 cm, et
(iv) en limitant la tension au renvidage à 0,20 cN/dtex.
Les données expérimentales dans le brevet attaqué montrent clairement, selon la chambre, que cette combinaison de caractéristiques (i) à (iv) permet effectivement de résoudre le problème technique ci-dessus, en particulier d'atteindre des vitesses de renvidage largement supérieures à 5000 m/min. Cet avantage n'a pas été mis en doute par la requérante.
5. Ladite combinaison de caractéristiques n'étant pas divulguée dans le document (3), la chambre conclut que l'exigence de nouveauté est donc satisfaite. L'objection de défaut de la nouveauté initialement soulevée en procédure d'opposition n'ayant pas été maintenue en procédure de recours, il n'y a pas lieu d'approfondir cette question.
6. Comme l'a démontré l'intimée aussi bien en procédure d'examen (réponse reçue le 28 septembre 1985) qu'en procédure d'opposition (mémoire de réponse déposé le 21 novembre 1987), l'enseignement du document (3) n'est pas susceptible de conduire l'homme du métier à une telle combinaison de caractéristiques.
6.1. Bien que le procédé décrit dans ce document soit en principe applicable à des polyesters fibrogènes et des polyamides fibrogènes et mentionne même le polyhexaméthylène adipamide, il est évident qu'il s'adresse plus particulièrement au téréphtalate de polyéthylène de viscosité intrinsèque comprise entre 0,5 et 0,8 (page 5, lignes 19 à 22), qui est d'ailleurs mis en oeuvre dans tous les exemples. En réalité, en raison du comportement différent du polyhexaméthylène adipamide et du téréphtalate de polyéthylène, il est douteux que l'homme du métier transpose au contexte du polyamide un enseignement manifestement orienté vers le polyester. Le polyamide ayant en particulier un pouvoir d'échange thermique et une reprise à l'humidité moins élevés que le polyester, l'homme du métier serait plutôt enclin, comme dans les procédés conventionnels, à mettre en oeuvre un conditionneur de manière à stabiliser la structure du polyamide qu'à recourir à un refroidissement par fluide gazeux comportant un taux d'humidité relative d'environ 75 %. Outre sa compatibilité avec des vitesses de renvidage largement supérieures à 5000 m/min et sa simplicité de réalisation, cette caractéristique (i) permet de limiter dans tous les exemples du brevet attaqué à 1 % ou moins les variations de la masse le long du fil.
6.2. La figure 2 du document considéré montre que la distance de solidification X est une fonction de la vitesse d'appel au renvidage et du titre des différents filaments constitutifs du fil de multifilaments. Même pour les titres les plus fins, de l'ordre de 2 à 6 deniers, la longueur X est supérieure à 100 cm pour une vitesse de renvidage de 5000 m/min ; il en résulte que la distance L filière-point de convergence est elle-même supérieure à 125 cm. Il s'agit là d'une limite impérative en deçà de laquelle "les filaments entrent en contact avec eux à une température relativement élevée. Ce contact, à une température élevée, abaisse la régularité de la qualité, particulièrement l'aptitude tinctoriale du fil de multifilaments formé et élève le taux de casses des filaments. Les casses de filaments sont imputables à la formation de duvet à la surface du fil et à des difficultés qui en résultent dans l'opération de renvidage" (page 9, lignes 5 à 15).
En pratique, les valeurs de L permettant d'obtenir une configuration optimale de la bobine sont comprises dans une plage située entre 140 (tableau 1, passage 2) et 220 (tableau 2, passage 29). Les longueurs inférieures conduisent à des bobines de qualité moindre (tableau 1, passage 1 et tableau 2, passage 25).
De plus, on constate dans ces tableaux que les distances minimales de L correspondant à une configuration optimale de la bobine augmentent avec la vitesse de renvidage ; ainsi, la distance minimale est de 120 à 125 cm à 2000 m/min, 130 à 140 cm à 3000 m/min, 140 cm à 4000 m/min et 140 à 150 cm à 5000 m/min. Dans le brevet attaqué, au contraire, on observe l'effet inverse, puisqu'aux distances filière-point de convergence de 59,5 cm (exemples 1 à 3), 60 cm (exemple 4), 60 cm (exemple 5), 70 cm (exemple 6) et 76 cm (exemple 7) correspondent des vitesses de renvidage de respectivement 5800, 5640, 6000, 5250 et 4200 m/min.
Le document (3) enseigne donc qu'il y a incompatibilité entre la convergence des filaments à faible distance et une grande vitesse de renvidage ; de plus, l'obtention de bobines de bonne qualité semble exclue pour des distances L de l'ordre de 55 à 70 cm. La caractéristique (ii), qui va á l'encontre de ces conclusions, doit donc être considérée comme inventive.
6.3. La figure 2 du document (3) met en évidence que la distance filière-point de dépôt sur la bobine ou caractéristique (iii) est en fait la résultante de trois composantes, la longueur L entre la filière et le point de convergence, la distance A entre le point de convergence et le guide d'appui, et la distance entre le guide d'appui et le point de dépôt sur la bobine.
Comme établi ci-dessus, la longueur L correspondant à la caractéristique (ii) est toujours supérieure à 125 cm. Par ailleurs, pour des raisons liées à la nécessité de maintenir à une faible valeur constante la tension du faisceau de filaments, la distance A doit être comprise entre 30 et 300 cm (page 8, lignes 4 à 8). Enfin, en l'absence de toute indication dans le document relative à la distance entre le guide de triangulation et le point de dépôt sur la bobine, la chambre ne peut qu'accepter l'information fournie par l'intimée, selon laquelle cette distance est généralement comprise entre 60 et 80 cm ; selon l'intimée, une telle longueur est en effet nécessaire pour que l'angle de triangulation ne soit pas trop élevé et que, au contraire, les deux angles entre le fil et la surface de la bobine soient les plus grands possibles afin d'éviter, d'une part, des frottements trop grands au niveau du guide de triangulation et, d'autre part, des frottements lors du dépôt du fil entre le fil lui-même et les fils déjà déposés sur la bobine. Cet argument n'a pas été contesté par la requérante. Il en résulte que, même sur la base des limites inférieures de ces trois composantes, la distance globale est en théorie supérieure à 215 cm.
En pratique, cependant, on constate que pour sept des huit passages réalisés dans les exemples 1 et 2 du document (3) dans des conditions correspondant à celles requises selon le brevet attaqué, la somme L + A vaut à elle seule 390 ou 400 cm, et que pour le passage 6 cette somme vaut encore 200 cm. Ceci démontre que, quelle que soit la valeur finalement attribuée à la longueur de la troisième composante, la distance entre la filière et le point de dépôt est toujours largement supérieure à la distance imposée dans le brevet attaqué et qu'une réduction de cette distance dans le sens de la caractéristique (iii) n'est pas suggérée par l'enseignement du document (3).
6.4. Bien que le document considéré ne mentionne aucune valeur de la tension exercée sur les filaments lors du renvidage, l'intérêt d'opérer à une faible tension y est maintes fois souligné. Ainsi, les valeurs imposées à la distance entre le guide réunisseur et le guide de triangulation ainsi qu'à la distance entre la filière et le point de convergence sont choisies de manière à assurer à la fois un enfilage régulier du filament sur la bobine et une qualité constante du fil de multifilaments (page 8, lignes 4 à 25 et page 9, lignes 16 à 24). La référence à une faible tension est donc à apprécier dans le contexte des caractéristiques d'un tel dispositif, en particulier des valeurs effectives de L et de A.
Même si l'on admet au bénéfice de la requérante que l'expression "faible tension" dans le document (3) recouvre une plage de valeurs comparables à celles envisagées dans le brevet attaqué, la seule connaissance d'un domaine inférieur ou égal à 0,20 cN/dtex serait sans intérêt pratique pour l'homme de l'art en raison de l'interdépendance des divers paramètres du métier, notamment de l'influence des caractéristiques (ii) et (iii) sur la tension de renvidage. Alors que l'art antérieur met l'homme du métier en garde contre le choix de distances A trop faibles, la variation de tension entre le guide de triangulation et le guide-fil étant en effet susceptible de faire varier la tension des filaments au cours de leur déplacement entre le guide réunisseur et le guide de triangulation, le brevet attaqué préconise au contraire un dispositif compact en combinaison avec une vitesse périphérique supérieure à 5000 m/min et une tension de renvidage strictement limitée. Bien qu'une faible tension de renvidage soit une caractéristique souhaitable en soi, son obtention dans le cadre d'une combinaison de caractéristiques de procédé et de dispositif qui va à l'encontre de l'enseignement du document (3) doit donc être considérée comme inventive.
6.5. Pour ces diverses raisons la chambre conclut que les caractéristiques du procédé revendiqué, aussi bien isolément qu'en combinaison, ne se déduisent pas de manière évidente de l'art antérieur et que l'objet de la revendication 1 du brevet attaqué implique par conséquent une activité inventive.
7. L'objection quant à la forme de la revendication principale soulevée par la requérante en marge de l'objection quant au fond n'est pas davantage acceptable (mémoire de recours, point II).
D'abord, la requérante n'a fait aucune référence à la CBE au support de son argumentation ; de plus, une telle objection n'entre pas dans la catégorie des motifs d'opposition mentionnés à l'article 100 CBE.
Quant au fond, la présence simultanée de caractéristiques de procédé et de caractéristiques de dispositif dans le libellé de la revendication principale n'est pas une source d'obscurité ou un facteur d'ambiguïté, dans la mesure où ces diverses caractéristiques définissent toutes des éléments techniques dont l'association permet l'obtention de filaments à base de polyhexaméthylène adipamide. Chacune de ces caractéristiques est en soi bien définie et ne pose aucun problème à l'homme du métier pour sa mise en oeuvre ou sa réalisation. De plus, de telles combinaisons hétérogènes de caractéristiques sont tout à faits courantes, comme l'attestent les nombreux brevets européens délivrés sur la base de revendications formulées en tant que "produit par procédé", dans lesquelles un polymère est défini à la fois par ses unités récurrentes et par son procédé de préparation.
8. La revendication 1 étant acceptable, il en est de même des revendications dépendantes 2 et 3, qui concernent respectivement une modalité particulière de mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1 et divers articles textiles obtenus à partir des filaments issus du procédé selon la revendication 1 et bénéficient à ce titre de la brevetabilité de l'objet de la revendication principale.
9. En ce qui concerne la requête en remboursement des frais occasionnés par la réponse au mémoire de recours présentée par l'intimée, la chambre ne voit pas de raison de s'écarter du principe de l'article 104(1) CBE, qui prévoit que "chacune des parties à la procédure d'opposition supporte les frais qu'elle a exposés". D'une part, les trois documents invoqués en plus du document (3) avaient déjà été produits en procédure d'opposition et commentés par l'intimée le 16 novembre 1987 dans sa "réponse à la lettre complémentaire" de la requérante ; d'autre part, l'objection de défaut d'activité inventive s'appuie, comme en procédure d'opposition, principalement sur l'enseignement du document (3), de sorte que la procédure de recours s'inscrit dans la même ligne que la procédure d'opposition. Dans ces conditions, la chambre estime que le réexamen des trois documents produits tardivement n'a pas dépassé la contribution que l'on est normalement en droit d'attendre de la part d'un titulaire assurant la défense de son brevet.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. Le recours est rejeté.
2. La requête de l'intimée visant au remboursement des frais occasionnés par la réponse au mémoire de recours dûs à l'examen des documents non produits en temps utile est rejetée.