T 0245/10 (Composition de teinture/L'OREAL) 17-10-2012
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Composition de teinture d'oxydation des fibres kératiniques et procédé de teinture mettant en oeuvre cette composition
Essais comparatifs déposés avec le mémoire de recours - admission dans la procédure (oui)
Essais comparatifs déposés après la citation à la procédure orale - admission dans la procédure (non)
Requête principale - activité inventive (non)
Requête subsidiaire 1 - modifications - recevable (oui) - caractéristiques divulguées en combinaison dans la demande telle que déposée (oui) - activité inventive (oui) - essais comparatifs probants - amélioration surprenante
Exposé des faits et conclusions
I. Le requérant (propriétaire du brevet) a introduit un recours contre la décision de révocation du brevet européen nº 1 274 393.
II. Une opposition avait été formée par l'intimé (opposant) en vue d'obtenir l'entière révocation du brevet pour manque de nouveauté et d'activité inventive sur la base des documents
(1) DE-U-299 09 427,
(2) DE-U-299 11 819 et
(3) DE-A-31 32 885.
III. La division d'opposition a considéré que les revendications selon la requête principale et la requête subsidiaire alors pendantes étaient conformes aux exigences de l'Article 123(2) CBE, que leur objet était nouveau mais manquait d'activité inventive. Les compositions revendiquées, en particulier celles mises en oeuvre dans les essais comparatifs fournis par l'opposant, ne possédaient pas l'effet technique allégué par le propriétaire du brevet, à savoir de conférer aux colorations une amélioration de la résistance au lavage. Le problème technique à résoudre par rapport au document (3) qui représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention, devait donc être reformulé en la simple mise à disposition de compositions de teinture de fibres kératiniques alternatives. En suivant l'enseignement du document (3) qui décrivait des compositions de teinture comprenant un coupleur de formule (I) et une base d'oxydation, par exemple la para-phénylènediamine, et qui suggérait d'y associer un méta-diphénol comme la 4-chloro résorcine ou la 2-méthyl résorcine, l'homme du métier serait parvenu sans effort inventif aux compositions revendiquées. L'objet des revendications des requêtes alors pendantes manquait donc d'activité inventive.
IV. Lors de la procédure orale tenue devant la Chambre le 17 octobre 2012, le requérant a défendu son brevet sur la base d'une requête principale déposée avec le mémoire de recours du 18 février 2010, identique à la requête principale de la décision contestée, et sur la base d'une unique requête subsidiaire 1 déposée au cours de ladite procédure orale, se substituant aux requêtes subsidiaires 1 à 4 déposées avec le mémoire de recours.
La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit :
"1. Composition pour la teinture d'oxydation des fibres kératiniques et en particulier des fibres kératiniques humaines telles que les cheveux, caractérisée par le fait qu'elle comprend, dans un milieu approprié pour la teinture:
- à titre de premier coupleur, au moins un dérivé de 3, 5-diamino pyridine répondant à la formule générale suivante (I) :
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
dans laquelle:
- R1 et R2, identiques ou différents, représentent un radical alkyle en C1-C4, monohydroxyalkyle en C1-C4, ou polyhydroxyalkyle en C2-C4,
- R3 représente un atome d'hydrogène, un radical alkyle en C1-C4, monohydroxyalkyle en C1-C4 ou polyhydroxyalkyle en C2-C4 et/ou l'un de ses sels d'addition avec un acide;
- et à titre de second coupleur au moins un méta-diphénol substitué et/ou l'un de ses sels d'addition avec un acide;
- et au moins une base d'oxydation du type para-phénylènediamine et/ou l'un de ses sels d'addition avec un acide de formule III suivante:
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
dans laquelle:
- R6 représente un atome d'hydrogène, un radical alkyle en C1-C4, polyhydroxyalkyle en C2-C4, alcoxy(C1-C4)alkyle(C1-C4), alkyle en C1-C4 substitué par un groupement azoté, phényle ou 4'-aminophényle;
- R7 représente un atome d'hydrogène, un radical alkyle en C1-C4, polyhydroxyalkyle en C2-C4, alcoxy(C1-C4)alkyle(C1-C4) ou alkyle en C1-C4 substitué par un groupement azoté;
- R8 représente un atome d'hydrogène, un atome d'halogène tel qu'un atome de chlore, de brome, d'iode ou de fluor, un radical alkyle en C1-C4, monohydroxyalkyle en C1-C4, hydroxyalcoxy en C1-C4, acétylaminoalcoxy en C1-C4, mésylaminoalcoxy en C1-C4 ou carbamoylaminoalcoxy en C1-C4,
- R9 représente un atome d'hydrogène, d'halogène ou un radical alkyle en C1-C4 et leurs sels d'addition avec un acide."
La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 diffère de la revendication de la requête principale en ce que le dérivé de 3,5-diamino pyridine de formule (I) est la 2,6-diméthoxy-3,5-diaminopyridine ou l'un de ses sels d'addition avec un acide, en ce que le méta-diphénol substitué et/ou l'un de ses sels d'addition avec un acide est choisi parmi le 2-méthyl 1,3-dihydroxy benzène, le 4-chloro 1,3-dihydroxy benzène, le 2-chloro 1,3-dihydroxybenzène et leurs sels d'addition avec un acide et en ce que la base d'oxydation de formule III est la para-phénylènediamine et/ou l'un de ses sels d'addition avec un acide.
V. Selon le requérant la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 provenait de la combinaison des revendications 1, 3, 6 et 9 de la demande telle que déposée, la liste des para-phénylènediamines de la revendication 9 étant réduite à la seule para-phénylènediamine. La revendication 1 modifiée était donc conforme aux exigences de l'Article 123(2) CBE.
Le document (3) représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention pour l'appréciation de l'activité inventive. En ce qui concernait la requête principale, le requérant a concédé lors de la procédure orale devant la Chambre que le problème technique à résoudre par rapport au document (3) ne pouvait pas être plus ambitieux que celui de la mise à disposition de compositions de teintures d'oxydation alternatives. Cependant, en ce qui concernait la requête subsidiaire 1, le problème technique à résoudre était la mise à disposition de composition de teinture aboutissant à des colorations plus homogènes. Ce problème était résolu par le remplacement de la résorcine par la 2- ou 4-chloro résorcine ou par la 2-methyl résorcine. Les essais comparatifs déposés avec une lettre datée du 11 août 2009 et ceux déposés avec une lettre datée du 18 février 2010 montraient une amélioration en terme de sélectivité pour les compositions selon l'invention comprenant la 4-chloro résorcine et la 2-methyl résorcine par rapport à celles de l'état de la technique comprenant la résorcine. Ces résultats pouvait être extrapolés à la 2-chloro résorcine. Bien que l'aspect statistique n'ait pas été abordé, ces essais étaient effectués dans les règles de l'art.
Les essais fournis le 17 septembre 2012 par l'intimé ne devaient pas être admis dans la procédure, et cela indépendamment de leur pertinence. Ils avaient été fournis plus de deux ans après le mémoire de recours et seulement un mois avant la date de procédure orale devant la Chambre. Les introduire à ce stade de la procédure privait le requérant de la possibilité d'y répondre. Les essais n'indiquaient pas de ratio colorant/bain, ni la méthode utilisée pour permanenter les cheveux. Les résultats de ces essais étaient donc contestables, cependant la tardivité de leur dépôt ne permettait pas la production de contre-essais. Si ces essais de l'intimé étaient admis dans la procédure de recours, un ajournement de la procédure orale était requis. Le document (3) n'abordait pas l'aspect de l'homogénéité des coloration et n'incitait donc pas l'homme du métier à remplacer la résorcine non substituée de l'exemple 3 du document (3) par la 2- ou 4-chloro résorcine ou par la 2-méthyl résorcine pour diminuer la sélectivité de la coloration. L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 impliquait par conséquent une activité inventive.
VI. Lors de la procédure orale devant la Chambre, l'intimé n'a plus contesté la recevabilité du recours. Les essais fournis le 17 septembre 2012 devaient être admis dans la procédure car ils étaient très pertinents pour l'évaluation de l'activité inventive puisqu'ils démontraient qu'en partant de l'exemple 3 du document (3) il n'y avait pas d'amélioration de la sélectivité des colorations obtenues à l'aide des compositions revendiquées. Le dépôt des résultats de ces essais comparatifs avait été annoncé dans la réponse au mémoire de recours. Ce dépôt n'était donc pas surprenant pour le requérant. Il avait eu suffisamment de temps pour effectuer des contre-essais, un mois étant suffisant à cet effet.
La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ne satisfaisait pas les exigences de l'Article 123(2) CBE car les modifications opérées avaient pour effet d'individualiser des combinaisons particulières de composants qui n'étaient pas divulguées dans la demande telle que déposée. Les essais comparatifs du requérant n'étaient pas pertinents car ne mettant pas en oeuvre la composition de l'exemple 3 du document (3). Les compositions comparées comprenaient un support de teinture différent. Or, dans la décision contestée, la division d'opposition avait considéré que le support de teinture avait une influence sur la coloration. La charge de la preuve incombait donc au requérant de prouver que le support de teinture n'avait pas cet effet. D'autre part, les résultats de ces essais n'étaient pas crédibles car la coloration obtenue à l'aide de la composition C1 était plus intense sur des cheveux naturels que sur des cheveux permanentés, ce qui était contraire à toutes attentes. En outre aucune analyse statistique des résultats n'avait été effectuée. De plus, les essais comparatifs ne permettaient pas de démontrer une amélioration sur l'ensemble des compositions revendiquées car ils mettaient en oeuvre uniquement des compositions comprenant la 4-chloro résorcine et la 2-méthyl résorcine, alors que la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 prévoyait aussi la présence de la 2-chloro résorcine, pour laquelle aucun essai n'avait été fourni.
La solution revendiquée découlait de manière évidente de l'état de la technique puisque le document (3) envisageait clairement le remplacement de la résorcine par la 4-chloro résorcine et la 2-méthyl résorcine. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 manquait d'activité inventive.
VII. Le requérant a requis l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de sa requête principale déposée avec le mémoire de recours du 18 février 2010, ou subsidiairement, sur la base de la requête subsidiaire RS1 déposée pendant la procédure orale devant la Chambre.
L'intimé a requis le rejet du recours.
VIII. La Chambre a rendu sa décision à l'issue de la procédure orale.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Recevabilité des essais comparatifs déposés le 18 février 2010
Les résultats d'essais comparatifs ont été déposés avec le mémoire de recours du requérant. L'intimé s'est opposé à l'admission de ces essais tardifs dans la procédure puisque ces derniers créaient un nouveau cadre factuel au stade du recours, ce qui équivalait à redémarrer la procédure d'opposition.
Dans l'évaluation de l'activité inventive dans la décision contestée, la division d'opposition n'a pas reconnu d'amélioration de la coloration obtenue à l'aide des compositions revendiquées. Le problème technique à résoudre par l'invention a donc été défini comme la mise à disposition de compositions tinctoriales alternatives. Le requérant a déposé ces essais avec son mémoire de recours en réponse aux conclusions négatives de la division d'opposition au sujet de la pertinence des essais soumis devant elle dans le but de démontrer une amélioration d'un aspect de la coloration indiquée dans le brevet litigieux, à savoir sa sélectivité (voir paragraphe [0010]). Ces essais ont donc été déposés en réponse directe à la décision faisant grief au requérant. De plus le dépôt de ces essais avec le mémoire de recours laissait suffisamment de temps à l'intimé pour les prendre en considération déjà dans sa réponse au mémoire de recours. Dans ces circonstances, la chambre décide d'admettre ces essais dans la procédure de recours.
3. Recevabilité des essais comparatifs du 17 septembre 2012
3.1 Selon le Règlement de Procédure des Chambres de Recours (RPCR) la procédure de recours se fonde lorsqu'il y a plusieurs parties sur le mémoire exposant les motifs de recours et la réponse à ce dernier qui doit être produite dans un délai de quatre mois à compter de leur notification. Le mémoire de recours et la réponse doivent contenir l'ensemble des moyens invoqués par les parties (Article 12 (1) et (2) RPCR). L'admission et l'examen de toute modification présentée par une partie après que celle-ci a déposé son mémoire de recours ou sa réponse sont laissés à l'appréciation de la Chambre. La Chambre exerce son pouvoir d'appréciation en tenant compte, entre autres, de la complexité du nouvel objet, de l'état de la procédure et du principe de l'économie de la procédure (Article 13 (1) RPCR). Ce dernier principe s'applique tout particulièrement à la période postérieure à la convocation à la procédure orale puisque les modifications demandées après que cette date a été fixée ne sont pas admises si elles soulèvent des questions que la Chambre et/ou les autres parties ne peuvent raisonnablement traiter sans renvoi de la procédure orale (Article 13 (3) RPCR).
Ces dispositions codifient la jurisprudence constante des Chambres de Recours en matière de recevabilité de données expérimentales tardives. Dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire d'admettre ou de rejeter des moyens non présentés en temps utile, les critères établis par la jurisprudence imposent entre autres que la production tardive de données expérimentales ne constitue pas un abus processuel tactique et respecte l'équité de la procédure et que leur admission dans la procédure respecte le droit à être entendu de l'autre partie (T 270/90, JO OEB 1993, 725; point 2.2 des motifs).
3.2 Dans le cas d'espèce les essais comparatifs de l'intimé ont été déposés le 17 septembre 2012, soit près de deux ans après l'expiration du délai de réponse au mémoire exposant les motifs du recours, plus de deux mois après la citation à la procédure orale et à seulement un mois de la date fixée pour la procédure orale.
3.2.1 Il est donc incontestable que le rapport d'essais comparatifs de l'intimé est tardif. L'admission de ces essais dans la procédure de recours relève donc du pouvoir discrétionnaire de la Chambre en vertu de l'Article 13 (1) RPCR. Il convient donc de déterminer en premier lieu si le dépôt tardif de ces essais est justifié et si ce nouveau moyen de preuves peut raisonnablement être traité sans que la procédure orale soit renvoyée.
3.2.2 Les nouveaux essais de l'intimé visent à montrer que la sélectivité de coloration obtenue à l'aide des compositions revendiquées est moins favorable que celle obtenue avec la composition selon le document (3).
Selon l'intimé ces essais étaient pertinents et constituaient une réponse à la ligne d'argumentation du requérant basée sur l'amélioration de la sélectivité présentée pour la première fois dans la procédure de recours. Ils devaient en cela être admis dans la procédure.
Cependant, cette ligne d'argumentation du requérant a été produite dans son mémoire de recours daté du 18 février 2010 et ne peut donc justifier le dépôt tardif des essais le 17 septembre 2012. Le requérant a contesté la validité des résultats présentés dans ces essais en demandant la possibilité d'effectuer des contre-essais nécessaires selon lui pour apporter une réponse appropriée. Puisque les essais de l'intimé n'ont été déposés qu'un mois avant la procédure orale, leur admission dans la procédure de recours aurait pour conséquence un ajournement de la procédure orale pour permettre au requérant d'effectuer des contre-essais, ce que l'Article 13(3) RPCR tend à interdire.
Par conséquent, la Chambre décide de ne pas admettre les essais comparatifs du 17 septembre 2012 dans la procédure de recours (Article 114(2) CBE).
3.2.3 Selon l'intimé, le requérant ne pouvait pas être surpris par ces tests comparatifs car ils avaient été annoncés dans la réponse au mémoire de recours du 15 septembre 2010 et une durée d'un mois suffisait à la production de contre-essais. Le requérant quant à lui a réfuté cet argument en avançant que la réalisation d'essais comparatifs nécessitait bien plus qu'un mois.
L'intimé avait bien annoncé dans cette lettre du 15 septembre 2010 qu'il allait commenter les essais comparatifs du requérant déposés avec le mémoire de recours et/ou présenter des contre-essais à condition que la Chambre émette au préalable un avis sur la recevabilité des essais du requérant (voir point 3.1 de la lettre). Cependant, si une partie à la procédure désire obtenir une décision en sa faveur, elle doit être active dans la procédure et soumettre de sa propre initiative et en temps utile les moyens de preuves et arguments qu'elle juge utiles en support de son cas. Dans le cas d'espèce, l'intimé a choisi délibérément de retarder le dépôt de ses essais. Cependant, une décision de la Chambre sur la recevabilité des essais du requérant ne pouvait pas survenir avant la procédure orale puisque cette dernière était requise par les deux parties, et que, par conséquent, cette décision ne pouvait pas être prise en dehors d'une procédure orale. En agissant de la sorte, l'intimé a pris le risque de compromettre la recevabilité de ses propres essais dans la procédure puisqu'une décision doit normalement être prise à la fin de la procédure orale, un saucissonnage de l'affaire donnant lieu à plusieurs procédures orales uniquement pour discuter la recevabilité de moyens de preuve tardifs n'étant pas approprié pour des raisons d'économie de procédure (Article 15(6) RPCR).
Il ne peut pas non plus être exigé du requérant d'effectuer de nouveaux essais à un mois de la date fixée pour la procédure orale devant la Chambre, ces essais nécessitant entre autres la préparation de compositions cosmétiques, leur mise en oeuvre dans des tests de coloration, l'évaluation des résultats obtenus et leur impact sur la brevetabilité des revendications (voir T 2415/09; point 3.4 des motifs).
Selon l'intimé, d'après la jurisprudence des chambres de recours, en particulier d'après les décisions T 235/04, T 334/02, T 421/02 et T 1098/05, un délai d'un mois suffisait à la réalisation d'essais comparatifs.
Cependant cet argument n'est pas soutenu par les décisions citées qui ne traitent en aucune façon du temps nécessaire à la réalisation d'essais comparatifs. Certes, dans ces affaires, des essais comparatifs déposés un mois environ avant la procédure orale avaient été admis dans la procédure. Cependant, ces nouveaux moyens de preuves avaient pu être traités pendant la procédure orale puisque il n'apparaît nulle part de ces décisions que les parties adverses avaient demandé un ajournement de la procédure orale afin de réaliser leurs propres contre-essais. Cet argument de l'intimé doit donc être rejeté.
4. Requête principale
La requête principale a été rejetée par la division d'opposition pour un défaut d'activité inventive fondé sur le document (3).
Le requérant n'a pas contesté le fait que le document (3) représentait l'état de la technique le plus proche. Pendant la procédure orale devant la Chambre, il a concédé lors de la discussion des essais comparatifs fournis au soutien d'une amélioration de la coloration que le problème technique à résoudre par rapport au document (3) était celui retenu dans l'évaluation de l'activité inventive par la division d'opposition, à savoir celui de la mise à disposition de compositions de teintures d'oxydation alternatives. Partant donc de ce problème technique, le requérant n'a pas fourni d'argument contestant le raisonnement de la division d'opposition selon lequel les compositions revendiquées étaient des alternatives évidentes aux compositions du document (3).
Dans ses conditions, la Chambre n'ayant aucune raison d'adopter une autre position sur l'analyse de l'activité inventive que celle prise dans la décision contestée fait siennes des conclusions de la division d'opposition selon lesquelles l'objet des revendications de la requête principale n'implique pas d'activité inventive eu égard au document (3). La requête principale est donc rejetée.
Requête subsidiaire 1
5. Modifications
Les revendications 1 à 20 du brevet tel que délivré sont identiques aux revendications 1 à 20 de la demande originale. La revendication 1 modifiée résulte de l'incorporation des caractéristiques des revendications dépendantes 3 et 6 dans la revendication 1. De plus la base d'oxydation du type para-phénylènediamine a été restreinte à la para-phénylènediamine sur la base de la revendication dépendante 9.
Les revendications dépendantes 2, 3 et 4 à 14 correspondent aux revendications originales 4, 7 et 10 à 20 renumérotés pour tenir compte de la suppression des revendications superflues.
Selon l'intimé les modifications entreprises dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ont pour effet d'individualiser des combinaisons particulières de composants qui n'étaient pas divulguées dans la demande telle que déposée. Au soutien de son argumentation, il se réfère à la décision T 714/08 arrivant à cette conclusion dans un cas similaire.
Cependant dans le cas d'espèce contrairement au cas sous-jacent la décision T 714/08 la combinaison des composants de la composition selon la revendication 1 amendée est divulguée dans la demande telle que déposée par l'intermédiaire de la dépendance des revendications. En effet, la revendication originale 9 énumère une liste de para-phénylènediamines individualisées pouvant être choisies en tant que base d'oxydation du type para-phénylènediamine, dont la para-phénylènediamine. La para-phénylènediamine est divulguée en combinaison avec les caractéristiques des revendications dont dépend la revendication 9, notamment des revendications 3 et 6, donc en combinaison avec la 2,6-diméthoxy-3,5-diaminopyridine ou l'un de ses sels d'addition avec un acide, objet de la revendication 3 et un méta-diphénol substitué choisi parmi le 2-méthyl 1,3-dihydroxy benzène, le 4-chloro 1,3-dihydroxybenzène, le 2-chloro 1,3-dihydroxybenzène et leurs sels d'addition avec un acide, objet de la revendication 6.
La Chambre arrive donc à la conclusion que les composants de la composition objet de la revendication 1 modifiée sont divulgués en combinaison par la demande telle que déposée. Par tant les exigences de l'Article 123(2) CBE sont satisfaites. Il n'a pas été contesté que les modifications limitent la protection conférée par le brevet tel que délivré.
Par conséquent, les revendications satisfont aux exigences de l'Article 123 (2) et (3) de la CBE.
6. Activité inventive
6.1 Art antérieur le plus proche
En accord avec les Parties et la division d'opposition, la Chambre considère que l'exemple 3 du document (3) constitue l'état de la technique le plus proche et donc le point de départ pour l'évaluation de l'activité inventive.
Ce document concerne des compositions pour la teinture d'oxydation des fibres kératiniques conduisant à des colorations de bonne intensité et résistantes. Les compositions y décrites comprennent en tant que coupleur un dérivé de 3,5-diaminopyridine (voir revendication 1), éventuellement un coupleur additionnel tel la résorcine (1,3-dihydroxybenzène), la 4-chlororésorcine ou la 2-methylrésorcine (revendication 4) et une base d'oxydation, entre autres la paraphénylène diamine ou la paratoluène diamine (revendication 5). L'exemple 3 du document (3) concerne tout particulièrement une composition d'oxydation comprenant le dichlorhydrate de la 3,5-diamino-2,6-dimethoxypyridine, la paraphénylènediamine et la résorcine (1,3-dihydroybenzène) et constitue ainsi le point de départ pour l'évaluation de l'activité inventive.
6.2 Problème technique à résoudre
Le requérant a fait valoir que le problème technique à résoudre par rapport à la composition de l'exemple 3 du document (3) était celui de la mise à disposition de compositions tinctoriales d'oxydation aboutissant à des colorations plus homogènes sur des fibres kératiniques, donc de sélectivité réduite.
6.3 Solution
La solution proposée par le brevet litigieux est la composition selon la revendication 1 caractérisée en ce que la résorcine est substituée par un groupement méthyle ou chloro en position 2 ou un groupement chloro en position 4.
6.4 Succès
Le requérant s'est référé aux résultats des essais comparatifs déposés avec une lettre datée du 11 août 2009 et ceux déposés avec une lettre datée du 18 février 2010.
Dans les essais du 11 août 2009, les colorations sur des cheveux naturels et permanentés obtenues à l'aide d'une composition A dite comparative représentant l'état de la technique, contenant donc dans un support de teinture la 2,6-diméthoxy 3,5-diamino pyridine, la para phénylènediamine et la résorcine ont été respectivement comparées à celles obtenues à l'aide d'une composition B selon l'invention, se différenciant de la composition A uniquement par le remplacement équimolaire de la résorcine par la 4-chloro résorcine.
La comparaison des colorations obtenues avant épreuve de lavage fait apparaître une diminution de la sélectivité DeltaE pour la composition B selon l'invention (4,08 contre 4,43).
Cette amélioration en terme de sélectivité est confirmée par les essais comparatifs déposés avec la lettre datée du 18 février 2010.
Dans ces essais les colorations sur des cheveux naturels et permanentés obtenues à l'aide d'une composition A1 dite comparative représentant l'état de la technique, contenant dans un support de teinture la 2,6-diméthoxy 3,5-diamino pyridine, la para phénylènediamine et la résorcine ont été comparées à celles obtenues à l'aide des compositions B1 et C1 selon l'invention, se différenciant respectivement de la composition A par le remplacement équimolaire de la résorcine par la 4-chloro résorcine et la 2-methyl résorcine.
Les résultats font apparaître que les compositions B1 et C1 selon l'invention conduisent à une sélectivité plus faible (DeltaE = 1,02 et 0.61 respectivement) que celle observée avec composition A1 représentant l'état de la technique (Delta= 3,16). Les compositions revendiquées engendrent donc des colorations plus homogènes.
Ces rapport d'essais démontrent donc de façon convaincante que la caractéristique distinguant les compositions revendiquées de celle de l'état de la technique le plus proche de l'invention, à savoir la présence d'une résorcine substitué par un groupement méthyle ou chloro, entraîne une diminution de la sélectivité de la coloration.
6.4.1 Selon l'intimé, il n'était pas crédible que la puissance de la coloration de la composition C1 sur les mèches naturelles indiquée dans ces essais, à savoir L = 18,24, fût supérieure à celle observée sur les cheveux permanentés (L = 18,41). De plus, en l'absence de calcul statistique établissant la déviation standard de la mesure des valeurs des colorations, la différence de sélectivité calculée à l'aide de ces valeurs n'était pas significative.
Cependant, les valeurs des colorations rapportées dans les résultats d'essais comparatifs, dont l'intensité L de coloration, ont été mesurées expérimentalement à l'aide d'un spectrophotomètre. Ces valeurs ont donc été mesurées objectivement. En outre, la différence de puissance de coloration entre cheveux permanentés et naturels est faible et donc en l'absence de preuve du contraire incombant à la partie contestant les résultats des essais, ici l'intimé, reste crédible. En outre, les Chambres de Recours tranchent les affaires d'après les preuves apportées par les parties et qu'elles soumettent à leur appréciation (voir T 270/90, loc. cit., point 2.1 des raisons). Le niveau de preuve ne requiert pas que les Chambres arrivent à une conviction absolue, mais uniquement qu'une série de faits soit plus susceptible d'être vraie que fausse, en d'autres termes soit crédible. Ainsi, dans le cas d'espèce il serait exagéré d'écarter les résultats crédibles des essais soumis par le requérant sur la base d'une affirmation non prouvée de l'intimé.
Cet argument non fondé de l'intimé doit par tant être rejeté.
6.4.2 D'autre part, selon l'intimé, ces essais comparatifs ne seraient pas pertinents puisque ne reproduisant pas exactement la composition de l'exemple 3 du document (3) en raison notamment d'un support de teinture différent et d'autres proportions de colorants d'oxydation.
Cependant, les essais comparatifs réalisés par le requérant sont suffisants puisqu'ils démontrent de façon convaincante que l'amélioration de la sélectivité trouve son origine dans la caractéristique distinctive de l'invention, à savoir la substitution de la résorcine par un groupement méthyle ou chloro (voir décision T 197/86, JO OEB 1989, 371, point 6.1.3). Point n'est besoin à cet effet de reproduire exactement l'art antérieur.
Selon l'intimé, l'amélioration montrée pour une composition comprenant la 2-methyl résorcine et la 4-chloro résorcine n'est pas extrapolable à une composition comprenant la 2-chloro résorcine.
Il est cependant bien connu que les substitutions en positions ortho et para ont des effets électroniques équivalents sur le noyau phényle. Dans le cas d'espèce, l'effet a été démontré sur la substitution d'une résorcine par un radical chloro en position 4 (para). Il faut donc s'attendre à un effet similaire pour une substitution de la résorcine par un groupe chloro en position 2 (ortho). De plus, il a été montré que l'effet était présent pour une substitution en position 2 par un groupe méthyle. Dans ces circonstances et en l'absence de preuves contraires incombant à l'intimé, la Chambre ne voit aucune raison s'opposant à ce que l'amélioration observée ne soit plausible pour l'ensemble des compositions couvertes par la revendication 1 litigieuse.
Ainsi, au vu des résultats des essais comparatifs présentés par le requérant avec les lettres du 11 août 2009 et du 18 février 2010, la Chambre considère que le problème technique tel que défini ci-dessus (point 6.2) a bien été résolu par les compositions faisant l'objet de la revendication 1.
6.5 Evidence
Par conséquent, la seule question en suspens est de savoir si la solution proposée par le brevet litigieux au problème posé découlait de façon évidente de l'état de la technique disponible, en d'autres termes, s'il était évident pour l'homme du métier de substituer la résorcine par un groupement chloro en position 2 ou 4 ou méthyle en position 2 en vue de diminuer la sélectivité des colorations et donc d'en accroitre l'homogénéité.
Le document (3) décrit la 4-chlororésorcine et la 2-methylrésorcine comme des coupleurs alternatifs à la résorcine (voir page 6, ligne 25 à 27). Cependant le document (3) ne traite pas de l'homogénéité des colorations, et n'aborde pas le problème de l'invention de baisse de la sélectivité. Pour cette raison, le document (3) ne saurait inciter l'homme du métier à faire au sein de l'ensemble des coupleurs envisagés par ce document le remplacement ciblé de la résorcine par la 2- ou la 4-chloro résorcine, ou bien par la 2-méthyl résorcine, en vue d'obtenir une baisse de la sélectivité de la coloration.
Par conséquent, l'homme du métier ne peut déduire du document (3) que les compositions selon la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 comprenant la 2- ou 4- chloro résorcine ou la 2-methyl résorcine à titre de coupleur permettent de résoudre le problème à la base du brevet contesté, à savoir celui de diminuer la sélectivité des colorations.
6.6 L'intimé n'a fourni aucun autre document qui vînt suggérer la solution proposée.
7. Ainsi, les compositions selon la revendication 1, et pour les mêmes raisons celles selon les revendications dépendantes 2 à 11 impliquent une activité inventive (article 56 CBE).
Les revendications 12 à 14 concernent un procédé de teinture mettant en oeuvre les compositions revendiqués et un dispositif à plusieurs compartiments ou "kit" de teinture comprenant ces compositions. L'objet de ces revendications implique donc une activité inventive pour les mêmes raisons que l'objet de la revendication 1.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sur la base de la requête subsidiaire RS1 déposée pendant la procédure orale devant la Chambre et une description à adapter.