T 0022/85 (Résumé et recherche de documents) 05-10-1988
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1. Une méthode permettant de résumer un document, de mémoriser le résumé obtenu, puis de le retrouver en interrogeant un ordinateur relève en tant que telle de la catégorie des plans, principes et méthodes dans l'exercice d'activités intellectuelles ; elle n'est donc pas brevetable, en vertu de l'article 52, paragraphes (2)c) et (3) CBE.
2. A elle seule, l'indication de la marche à suivre pour effectuer une activité exclue en tant que telle de la brevetabilité en application de l'article 52, paragraphes 2 et 3 CBE, et ceci en termes de fonctions ou de moyens relatifs à des fonctions à réaliser à l'aide de composants matériels classiques d'un ordinateur, ne fait pas intervenir d'éléments techniques et ne peut donc conférer à cette activité un caractère technique qui lui permettrait de ne pas être exclue de la brevetabilité.
Plans, principes et méthodes dans l'exercice d'activités intellectuelles" -
Caractère technique (non)
Marche à suivre décrite en termes de fonctions ou de moyens relatifs à des fonctions"
I. La demande de brevet européen n° 80 107 625.8, déposée le 4 décembre 1980 et publiée sous le n° 0 032 194, revendiquant la priorité d'une demande déposée aux Etats-Unis le 28 décembre 1979, a été rejetée par décision de la division d'examen en date du 30 août 1984. Cette décision a été rendue sur la base des revendications 1 à 6 déposées le 31 décembre 1983.
II. La demande a été rejetée au motif que le seul apport en matière technique réside dans un programme d'ordinateur considéré en tant que tel, au sens de l'article 52, paragraphes (2)c) et (3) CBE. Il ne s'agit donc pas d'une invention brevetable au sens de l'article 52(1) CBE, quelle que soit la formulation des revendications s'y rapportant.
III. La division d'examen a pris cette décision au motif que l'objet des revendications 1 et 2 est une méthode permettant de résumer et d'enregistrer automatiquement un document d'entrée dans un système de stockage et de recherche de l'information, les revendications 3 à 6 portant sur une méthode correspondante permettant de retrouver un document dans le système. Dans les revendications, il est fait spécialement référence à un dictionnaire mis en mémoire, à des moyens d'entrée, à une mémoire centrale et à un processeur. Tous ces composants matériels sont des composants classiques d'un système de stockage et de recherche de l'information (tel que celui décrit notamment par Hillman dans les "Proceedings of the Spring Joint Computer Conference, 1969, p. 447 à 455), et ils appellent des objections au titre de l'article 54(2) CBE, en raison de leur absence de nouveauté.
Il ressort du texte actuel de la description (de la ligne 26, page 4, à la ligne 4, page 5, de la ligne 22 à la ligne 28, page 5, et de la ligne 15, page 6, à la ligne 19, page 8), que cette méthode est mise en oeuvre à ses différentes étapes grâce à la programmation d'un système classique de ce genre.
Selon la division d'examen, la combinaison d'étapes revendiquée n'implique pas une utilisation inhabituelle des différents composants matériels mis en oeuvre. Les revendications définissent uniquement l'agrégation d'un matériel connu et d'un logiciel nouveau permettant de mémoriser l'information contenue dans un document ; elle ne portent pas sur un mode d'exploitation inattendu ou inhabituel du matériel connu. Les différences existant entre l'objet de la présente demande et l'état de la technique sont définies comme tenant aux fonctions que doit réaliser un programme d'ordinateur utilisé pour la mise en oeuvre d'un algorithme donné ou d'une méthode mathématique déterminée, en vue d'analyser un document. En d'autres termes, les étapes successives de la méthode correspondent à des opérations qui s'effectuent en fonction du contenu de l'information et ne dépendent pas du matériel particulier utilisé.
IV. La requérante a formé un recours contre cette décision le 8 novembre 1984. La taxe prescrite a été acquittée le 9 novembre 1984, et le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 23 novembre 1984.
V. Par une notification en date du 18 mars 1987, le rapporteur a avisé la requérante que, selon l'avis préliminaire émis par la Chambre, les méthodes revendiquées n'avaient pas le caractère technique que doit présenter une invention, et ne permettaient pas d'obtenir un résultat susceptible d'être qualifié de technique, même si, pour appliquer ces méthodes, l'on avait recours à un moyen technique, en l'occurrence un ordinateur chargé avec le programme ad hoc.
Les revendications figurant alors au dossier visaient effectivement à faire protéger par un brevet des méthodes permettant, en chargeant le programme ad hoc sur un ordinateur classique, de résumer, de mémoriser ou de retrouver des documents d'après un ensemble de règles déterminées pour ces diverses activités. Dans la présente espèce toutefois, il est clair que l'apport nouveau en matière technique réside pour l'essentiel dans l'indication de cet ensemble de règles. Il convient donc de considérer l'objet des revendications comme exclu en tant que tel de la brevetabilité, en vertu de l'article 52(2) et (3) CBE.
VI. Dans le mémoire exposant les motifs de son recours, ainsi que dans la lettre qu'elle a envoyée le 5 novembre 1987 en réponse à la notification précitée, la requérante a essentiellement développé les arguments suivants :
L'article 52(2)c) CBE exclut les programmes d'ordinateurs de la brevetabilité, sans toutefois en donner la définition. Si l'on se réfère à la définition fournie par l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), un programme d'ordinateur est "un ensemble d'instructions pouvant, une fois transposé sur un support déchiffrable par machine, faire indiquer, faire accomplir ou faire obtenir une fonction, une tâche ou un résultat particuliers par une machine capable de faire du traitement de l'information". L'objet de la demande n'est pas un ensemble d'instructions répondant à cette définition, mais plutôt un mode nouveau d'exploitation d'un ordinateur.
De plus, la mise en oeuvre de la nouvelle méthode exige l'utilisation de composants matériels connus d'un système de stockage et de recherche de l'information, mentionnés dans le préambule des revendications. Même si cette méthode était assimilée à un programme d'ordinateur, les revendications n'en demeureraient pas moins admissibles, puisqu'il est stipulé que les programmes d'ordinateurs au sens de l'article 52(2)c CBE ne sont exclus de la brevetabilité que dans la mesure où l'objet de l'invention est un programme en tant que tel (article 52(3) CBE). La requérante n'a jamais nié que les composants matériels cités dans le préambule soient des composants connus d'un système de stockage et de recherche de l'information. Cela n'enlève rien cependant aux mérites de l'invention. En fait, la combinaison qui est revendiquée implique une utilisation inhabituelle des composants matériels en question, dans la mesure où, du fait que le mode d'exploitation est nouveau, "la combinaison" de ces éléments ou la relation fonctionnelle existant entre eux est différente. De plus, apprécier le "caractère inattendu" d'une invention revient à apprécier l'activité inventive au sens de l'article 56 CBE , ce qui ne devrait pas servir de critère pour l'examen de la brevetabilité au regard de l'article 52(2)c) CBE, et d'ailleurs, la question de l'activité inventive n'a pas été abordée dans la décision prononçant le rejet de la demande.
De surcroît, bien que le seul mode de réalisation décrit en détail dans la demande soit un logiciel chargé sur un système programmable de stockage et de recherche de l'information, les revendications fournissent des explications suffisamment claires et complètes pour permettre à un homme du métier de réaliser l'invention en faisant appel à des moyens logiques se trouvant entre eux dans un agencement spécifique.
La requérante considère que l'invention revendiquée consitue une solution technique à un problème technique ; cette solution est nouvelle, elle implique une activité inventive et est susceptible d'application industrielle. Dans toutes les techniques de mémorisation et de recherche de documents existant auparavant, c'est à l'utilisateur qu'incombe la majeure partie du travail intellectuel. Certains systèmes peuvent certes fournir une aide pour l'élaboration de résumés, mais ils impliquent en contrepartie des procédures extrêmement volumineuses de comparaison avec un thésaurus, nécessitant le traitement d'une masse considérable de données. Le problème technique qui se posait était donc de prévoir un système capable de reconnaître et de répertorier les termes de la langue qui peuvent être pertinents pour la recherche de documents. Autrement dit, il fallait trouver un moyen d'accomplir automatiquement, sans avoir à traiter un volume considérable de données, une tâche qui présente des difficultés, même pour un être humain. Techniquement, la solution consiste à avoir en mémoire un dictionnaire contenant un vocabulaire courant de base, à marquer comme pertinents certains mots, tels que substantifs et termes utilisés essentiellement comme adjectifs, à comparer les termes de la langue figurant dans le document d'entrée avec ceux inscrits dans le dictionnaire de manière à ne retenir que les mots marqués, puis à faire un résumé composé de ces mots et de mots qui n'apparaissent pas dans le dictionnaire, comme les sigles, les chiffres et les noms propres.
Les revendications portent sur une activité qui introduit incontestablement un changement dans l'environnement physique dans la mesure où, lorsqu'un résumé une fois réalisé est entré en mémoire, le stockage de nouvelles informations (le nouveau résumé) modifie le système. En d'autres termes, la mise en oeuvre du système revendiqué a pour résultat la modification d'une entité physique, en l'occurrence l'information enregistrée sous forme de signaux électriques.
En fait, ce que les revendications cherchent à protéger, ce n'est pas le contenu de l'information (en l'espèce, le résumé lui-même en tant que tel), mais un système permettant de créer cette information et une méthode d'exploitation de ce système. Peu importe que le mode de réalisation décrit dans la demande fasse intervenir un logiciel chargé sur un ordinateur classique, du moment que l'invention a un caractère technique.
La requérante considère en somme que l'invention revendiquée est nouvelle et qu'elle implique une activité inventive par rapport à l'état de la technique.
L'article de Hillman, dans les "Proceedings of the Spring Joint Computer Conference", décrit une méthode d'établissement automatique de résumés de documents, totalement différente de celle définie dans les revendications. Dans la demande dont il est question ici, il y a traitement sémantique des termes de la langue par comparaison avec les termes de la langue contenus dans le dictionnaire mis en mémoire. La méthode décrite par Hillman repose au contraire sur une approche syntaxique : chaque phrase du document est réduite à une chaîne de catégories syntaxiques, avant d'être décomposée en sous-chaînes de catégories se présentant sous forme de phrases exprimant une relation logique ; dans cette méthode, il n'est pas prévu de comparaison avec des termes figurant dans un dictionnaire.
VII. Dans sa lettre de réponse datée du 5 novembre 1987, la requérante a déposé un jeu de revendications modifiées (1 à 10), sur la base desquelles elle sollicite la délivrance d'un brevet européen. La nouvelle revendication 1 et les revendications dépendantes 2 à 4 ont pour objet un système permettant de résumer un document et d'enregistrer le résumé obtenu. La revendication 5 porte sur une méthode permettant d'exploiter le système selon les revendications 1 à 4. La revendication 6 et les revendications dépendantes 7 à 9 concernent un système permettant, en interrogeant l'ordinateur, de retrouver automatiquement le résumé d'un document obtenu selon la méthode définie dans la revendication 5. La revendication 10 a pour objet une méthode permettant d'exploiter le système selon les revendications 6 à 9.
Dans ce jeu de revendications, la revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Système permettant de résumer automatiquement un document et d'enregistrer le résumé obtenu, comprenant : une mémoire (8) dans laquelle est enregistré un dictionnaire de termes de la langue couramment utilisés dans la préparation de documents, avec une entrée pour chaque terme de la langue, un moyen d'entrée (16) pouvant accepter le document présenté sous une forme lisible par machine, une mémoire centrale (12) et un processeur (10) relié à la fois à la mémoire contenant le dictionnaire et au moyen d'entrée, ledit système étant caractérisé en ce que le processeur comporte :
un moyen permettant de comparer les termes de la langue du document d'entrée avec les entrées du dictionnaire mis en mémoire,
un premier moyen pour sélectionner dans le document d'entrée les termes de la langue ne correspondant pas à des entrées du dictionnaire mis en mémoire, et qui sont donc des termes spéciaux propres au message en question, tels que les noms propres, les sigles et les nombres,
un deuxième moyen pour sélectionner dans le document d'entrée les termes de la langue correspondant à des entrées dudit dictionnaire, lesquelles sont assorties d'un code identifiant certains de ces termes comme des éléments sélectionnés du language, un premier moyen pour enregistrer dans la mémoire centrale un résumé du document d'entrée rédigé avec des termes de la langue correspondant ou non à une entrée du dictionnaire, tous les autres termes de ce document ayant été éliminés, et
un deuxième moyen pour enregistrer dans un fichier de la mémoire centrale tous les termes sélectionnés, avec pour chacun différents paramètres établissant une relation entre le document et le terme en question, ledit fichier servant à retrouver ce document à partir des termes-clés figurant dans la question posée lors de l'interrogation du système."
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Il convient tout d'abord d'examiner si l'activité consistant à résumer un document, à enregistrer ce résumé puis à le retrouver en interrogeant l'ordinateur peut être considérée comme brevetable au sens de l'article 52 CBE. En vertu de l'article 52(2) CBE, certains objets ou certaines activités ne sont pas considérés comme des inventions au sens du paragraphe 1 de ce même article. Les exemples d'exclusion cités dans l'article 52(2)c) CBE semblent particulièrement intéressants en l'occurrence. Tout différents qu'ils soient, ces exemples ont tous en commun de se référer à des activités qui ne visent pas à obtenir directement un effet technique, mais qui ont plutôt un caractère abstrait et intellectuel.
3. Dans la jurisprudence constante de la majorité au moins des Etats contractants de la OEB, l'exigence selon laquelle, pour être brevetable, une invention doit avoir un caractère technique, c'est à dire, en d'autres termes, qu'elle doit constituer un apport d'ordre technique, a un caractère fondamental. Rien, que ce soit dans le texte même de l'article 52 CBE ou dans les documents préparatoires, qui permettent d'en retracer la genèse, n'autorise à penser que les Etats contractants aient voulu à cet égard s'écarter de leurs législations nationales et de leurs jurisprudences en la matière. La liste des inventions exclues de la brevetabilité donnée à l'article 52(2)a) à (d) CBE semble au contraire confirmer que telle n'était pas leur intention.
4. La Chambre considère que les dispositions des règles 27 et 29 CBE confirment elles aussi son point de vue. La règle 29(1)b) stipule en effet que la partie caractérisante d'une revendication doit exposer les caractéristiques techniques qui, en liaison avec l'état de la technique, exposé dans le préambule, sont celles pour lesquelles la protection est recherchée. Les paragraphes 6 et 7 de cette même règle mentionnent eux aussiles caractéristiques techniques de l'invention. Le sens implicite de la règle 29 CBE semble donc être que, dans le système prévu par de la CBE, une invention doit présenter des caractéristiques techniques, lesquelles doivent être mentionnées dans la (les) revendication(s) de la demande de brevet européen (au moins dans la partie caractérisante).
La règle 27(1)b) signifie implicitement que, dans le système prévu par de la CBE, l'invention doit se rapporter à un domaine technique qui doit être défini dans la description. Il ressort de la règle 27(1)d que l'invention consiste fondamentalement en la résolution d'un problème, et que ce problème doit être d'ordre technique. D'autre part, selon la règle 27(1)d), la description doit être formulée en des termes permettant la compréhension de ce problème technique. Il va de soi que la solution de ce problème technique, mentionnée elle aussi dans la règle 27(1)d), doit elle aussi présenter un caractère technique. C'est également ce que sous-entend la règle 29(1)b) lorsqu'elle stipule que les caractéristiques techniques de l'invention (c'est à dire, en fait, celles de la solution apportée au problème) doivent être exposées dans la partie caractérisante.
5. La Chambre est d'avis que l'objet de la présente demande peut être assimilé aux activités citées à l'article 52(2)c) CBE ; plus précisément, elle tend à considérer qu'il relève de la catégorie des plans, principes et méthodes dans l'exercice d'activités intellectuelles. Il n'a donc pas le caractère technique que doit présenter une invention brevetable, et le résultat qu'il permet d'obtenir ne peut être qualifié de technique.
6. Si la présente demande expose une idée nouvelle, il ne peut s'agir que des règles définies pour l'établissement du résumé, la mémorisation et la recherche de documents, règles destinées à instaurer une procédure de recherche d'information dont les résultats peuvent être jugés satisfaisants, si on en juge sur la base de critères essentiellement administratifs. L'on ne peut considérer que de telles règles, purement intellectuelles, présentent un caractère technique.
7. Les revendications visent effectivement à la délivrance d'un brevet pour des systèmes et des méthodes faisant intervenir un ordinateur classique commandé par un programme, en vue de résumer, de mémoriser ou de retrouver des documents conformément aux règles précitées. Il est clair toutefois que, dans la présente espèce, c'est essentiellement cet ensemble de règles qui constitue un apport nouveau en matière technique. Dans ces conditions, force est de considérer que l'objet des revendications est exclu en tant que tel de la brevetabilité en vertu de l'article 52(2) et (3) CBE.
8. Dans l'exercice d'une activité exclue en tant que telle de la brevetabilité par l'article 52(2)c) CBE, il se peut que l'on mette en oeuvre des moyens qui pourraient par eux- mêmes être qualifiés de techniques, par exemple un ordinateur commandé par un logiciel approprié. Une revendication ayant pour objet une activité exclue de la brevetabilité, bien que comportant ce genre de caractéristiques techniques, ne paraît pas devoir être exclue de la brevetabilité en toutes circonstances. Toutefois, à elle seule, l'indication, comme dans le cas présent, de la marche à suivre pour effectuer l'activité, et ceci en termes de fonctions ou de moyens relatifs à des fonctions à réaliser à l'aide de composants matériels classiques d'un ordinateur, ne fait pas intervenir d'éléments techniques et ne peut donc conférer un caractère technique à cette activité ni à l'objet revendiqué considéré dans son ensemble, pas plus que le fait de résoudre une équation mathématique ne pourrait, en cas d'utilisation d'un ordinateur classique, être considéré comme une activité technique, qui ne serait donc pas exclue de la brevetabilité.
9. L'apport en matière technique, ainsi que les effets obtenus, relèvent exclusivement du domaine des activités non-brevetables, et la véritable nature de l'invention reste la même, qu'elle soit ou non présentée en termes techniques.
10. Selon la Chambre, il ne pouvait être dans les intentions des Etats contractants de la CBE de permettre que, suivant la manière dont les revendications sont formulées, des inventions expressément exclues de la brevetabilité puissent devenir brevetables.
11. La requérante a prétendu que la combinaison des composants matériels mentionnés dans les revendications constitue une utilisation inhabituelle de ces composants, dans la mesure où les relations fonctionnelles qui s'instaurent entre eux sont différentes de celles connues auparavant. La Chambre, bien que ne niant pas cette différence, n'est pas convaincue par cet argument : en effet, les relations fonctionnelles revendiquées ne définissent pas un mode d'exploitation techniquement nouveau d'un ordinateur. En fait, ces relations fonctionnelles découlent logiquement des règles adoptées pour effectuer le résumé/la mémorisation et la recherche de documents ; elles ne sont rien d'autre que l'expression de l'algorithme qui sous-tend le programme permettant à l'ordinateur classique de fonctionner selon ces règles.
12. La requérante a allégué par ailleurs que le problème technique qui se posait était de concevoir un système capable de reconnaître et de répertorier automatiquement les termes de la langue qui peuvent être pertinents pour la recherche d'un document, sans avoir à traiter un volume considérable de données. La solution technique de ce problème consisterait à exposer des caractéristiques présentées soit comme des moyens d'obtenir l'exécution de fonctions à remplir (comme dans les revendications relatives au système), soit comme ces fonctions elles-mêmes (comme dans les revendications de méthode).
En réponse à cet argument, la Chambre déclare qu'en réalité, le problème qui se posait était d'instaurer des règles pour la réalisation de résumés de documents et pour leur recherche, en partant des caractéristiques rédactionnelles des documents à traiter, problème qui ne peut pas être qualifié de technique. On ne peut à proprement parler dire que les moyens et/ou fonctions mentionnés dans les revendications constituent une solution technique, puisque, comme la Chambre l'a déjà noté plus haut, ils ne sont que l'expression des règles en question, en des termes ayant une connotation technique.
13. La requérante a prétendu enfin que l'activité visée dans les revendications entraîne un changement au niveau de l'environnement physique, dans la mesure où une entité physique (l'information enregistrée sous forme de signaux électriques) est modifiée. Elle semble puiser cet argument dans une remarque figurant au point 5 des motifs de la décision T 208/84 (VICOM, JO OEB 1987, 14), rendue par la Chambre : "..., si l'on utilise une méthode mathématique dans un procédé technique, ce procédé s'applique à une entité physique (qui peut être un objet matériel mais également une image mémorisée sous forme de signal électrique) par quelque moyen technique... et il en résulte une certaine modification de cette entité". Si l'on replace cette citation dans son contexte, il est clair que l'expression "entité physique" se réfère à un objet réel, par exemple une image, même si l'objet en question est représenté par un signal électrique. Les signaux électriques traités selon la présente demande ne sont pas de ce type, mais représentent (une partie de) l'information contenue dans un document, qui peut être de n'importe quelle nature. L'activité revendiquée ne produit pas de modification de l'objet sur lequel elle s'exerce (à savoir le document à résumer), mais elle en extrait une nouvelle information à mémoriser. Cela mis à part, l'on ne peut conclure du passage cité que tout procédé de modification d'une entité physique puisse de ce fait même être qualifié de technique.
14. Dans les considérations qui précèdent, l'idée fondamentale est que les systèmes et procédés revendiqués font intervenir un ordinateur classique commandé par un logiciel. Dans la demande, ceci est présenté comme le mode de réalisation préféré de l'invention, et il n'est pas divulgué expressément de mode de réalisation différent. La Chambre aurait toutefois tenu le même raisonnement dans le cas d'un ordinateur commandé par un matériel (circuits logiques spécialement conçus à cet effet), solution également envisageable dans le cadre des revendications ; en effet, le choix entre ces deux variantes possibles n'a rien d'essentiel, dans la mesure où il relève de considérations techniques et économiques sans rapport avec l'idée inventive en tant que telle. Dans la présente espèce, la Chambre n'a pas à trancher la question de savoir si la demande telle que déposée contient suffisamment d'informations pour permettre à un homme du métier de concevoir un tel matériel.
15. Compte tenu de ce qui précède, la Chambre est d'avis que l'objet revendiqué est exclu de la brevetabilité en vertu de l'article 52(2) et (3) CBE. Le recours doit donc être rejeté.
Par conséquent, la Chambre ne peut que confirmer la décision de la division d'examen, même si, ce faisant, elle se fonde sur une interpétation quelque peu différente de l'article 52(2) et (3) CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.