T 0428/98 (Restitutio in integrum/KLIMA) 23-02-2001
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I. Si un demandeur est averti par une notification de l'Office qu'il n'a pas observé un délai, l'empêchement au sens de l'article 122(2), première phrase CBE qui a fait qu'il n'a pu accomplir l'acte requis cesse généralement dès la réception effective de la notification l'avertissant de cette inobservation, lorsque celle-ci est due uniquement à ce qu'il ne savait pas jusque là que cet acte de procédure n'avait pas été accompli. La disposition de la règle 78(3) CBE (dans la version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998) qui prévoit que la signification est réputée remise au destinataire le dixième jour après la remise à la poste n'est pas applicable pour la détermination de la date de cessation de l'empêchement, même si cela joue en défaveur du demandeur, car la date effective de réception de la notification est dans ce cas antérieure à la date qui serait calculée conformément à la règle 78(3) CBE (2.2).
II. Dans le cas où la question de droit sur laquelle porte le renseignement n'a pas encore à cette date été tranchée par la jurisprudence des chambres de recours, un requérant peut se fier à un renseignement téléphonique que lui a effectivement fourni le greffier de la Chambre au sujet du mode de calcul d'un délai qu'il doit respecter dans la procédure devant la Chambre (2.2).
III. En général, pour qu'il puisse être considéré que le système de surveillance des délais d'un cabinet de mandataires permet de faire preuve de toute la vigilance nécessaire, la mise en oeuvre dans ce cabinet d'un système de suivi des délais ne doit pas être confiée à une seule personne, mais doit faire intervenir au moins un mécanisme efficace de contre-vérification (confirmation de la jurisprudence existante, 3.5).
IV. Le fait qu'un demandeur se soit abstenu de produire des moyens de preuve en dépit de l'invitation que lui avait adressée la Chambre peut être considéré comme un indice qui tendrait à montrer que ces moyens n'auraient peut-être pas confirmé la version des faits qui avait été donnée (3.6).
Restitutio in integrum quant au délai prévu pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours
Requête présentée à temps (oui)
Confiance légitime dans les renseignements fournis
Démonstration convaincante qu'il a été fait preuve de toute la vigilance nécessaire (non)
Preuve insuffisante de l'existence d'un système en soi efficace de suivi des délais
Pas de production de moyens de preuves existants en dépit de l'invitation de la Chambre
Indice conduisant à douter de la véracité des allégations.
Exposé des faits et conclusions
I. Le recours dont a été saisie la Chambre a été formé contre la décision de la division d'opposition en date du 9 mars 1988 portant maintien en vigueur sous une forme modifiée du brevet européen n° 0 563 508, délivré sur la base de la demande déposée sous le n 92 890 079.4.
II. C'est l'opposant qui est requérant en l'espèce. Le 23 avril 1998, il a formé recours contre la décision de la division d'opposition, en acquittant simultanément la taxe de recours.
III. Par lettre en date du 21 août 1998, le greffe de la Chambre a fait savoir au requérant que le recours qu'il avait formé contre la décision de la division d'opposition n'était pas motivé et qu'il devrait donc probablement être rejeté comme non recevable en vertu de l'article 108 ensemble la règle 65 (1) CBE. Il était fait référence dans cette notification à la possibilité pour le demandeur de faire jouer l'article 122 CBE (octroi de la restitutio in integrum). Il ressort du dossier de recours que cette notification est parvenue aux mandataires du requérant le 24 août 1998.
IV. Par lettre en date du 27 octobre 1998, reçue par l'Office européen des brevets le 28 octobre 1998, le requérant a demandé, en acquittant la taxe correspondante, l'octroi de la restitutio in integrum quant au délai prévu pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, et a déposé ledit mémoire ainsi qu'un exposé des motifs de sa requête en restitutio in integrum. Pour prouver qu'il avait présenté cette requête dans les délais, le requérant a invoqué la règle 78 (3) CBE (dans la version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998).
V. Dans l'avis provisoire émis dans sa première notification, la Chambre a fait savoir que pour la détermination de la date à laquelle commence à courir le délai de présentation de la requête en restitutio in integrum, qui est de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement en vertu de l'article 122(2), première phrase CBE, il importait de savoir jusqu'à quand le demandeur ou le titulaire du brevet avait été effectivement empêché d'accomplir l'acte qui avait été omis. La disposition de la règle 78(3) CBE relative à la date à laquelle la signification est réputée avoir été remise n'était pas applicable en l'espèce. Dans la mesure où un opposant pouvait être rétabli dans ses droits conformément à la décision G 1/86, JO OEB 1987, 447, il y avait lieu d'appliquer pour l'interprétation de l'article 122 CBE les principes qui avaient été élaborés pour les demandeurs et les titulaires de brevet. En l'espèce, l'empêchement qui avait entraîné l'inobservation du délai fixé pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours avait donc cessé le jour où il avait été signalé aux mandataires du requérant que le délai n'avait pas été respecté, à savoir le 24 août 1998, date à laquelle la notification du greffe en date du 21 août 1998 avait été signifiée.
VI. Le requérant a protesté contre cet avis juridique en invoquant la décision J 29/94, JO OEB 1998, 147. Il a affirmé par ailleurs qu'un conseil en brevets du cabinet qui le représentait en l'espèce avait, sur instruction de ses mandataires agréés, téléphoné à la greffière de la Chambre le 13 octobre 1998, et que même si la Chambre décidait de ne pas appliquer la règle 78(3) CBE relative à la date à laquelle la signification est réputée avoir été remise, il devait être considéré que cet entretien avait eu lieu avant l'expiration du délai imparti pour la présentation de la requête en restitutio in integrum. La greffière de la Chambre avait confirmé qu'il y avait lieu d'appliquer la règle 78(3) CBE pour le calcul du délai de deux mois prévu à l'article 122(2) CBE. Le requérant a produit une attestation sous serment du conseil en brevets confirmant ces déclarations.
VII. A la demande de la Chambre, la greffière de la Chambre a fait officiellement une déclaration concernant les faits qui avaient été allégués.
VIII. Le requérant a motivé comme suit sa requête en restitutio in integrum :
Après avoir reçu la signification de la décision de la division d'opposition, la chef de bureau qui avait été chargée de tenir le calendrier des délais du cabinet des mandataires avait pris note du délai de recours et du délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, en retenant comme date d'expiration de ce dernier délai le 9 juillet 1998. Il n'est plus possible de reconstituer très précisément ce qui s'était passé le 2 juillet 1998. Néanmoins, cette chef de bureau, pour des raisons qu'elle n'était pas elle-même en mesure d'expliquer et sans avoir reçu d'instruction directe ni indirecte en ce sens, avait rayé du calendrier le délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours alors que ce mémoire n'avait pas encore été déposé. Elle avait souffert toute la semaine de violents maux de tête, tout particulièrement le 2 juillet. Si elle avait biffé ce délai, avait-elle expliqué, ce ne pouvait être que parce qu'étant souffrante, elle avait sans doute fait une confusion avec une procédure de recours devant le tribunal fédéral allemand des brevets, lequel n'exige pas que les recours soient accompagnés d'un exposé des motifs. Travaillant depuis 33 ans dans le cabinet de brevets du mandataire du requérant et connue pour son extrême fiabilité, cette chef de bureau n'avait jusque là laissé passer aucun délai. A intervalles réguliers, les conseils en brevets du cabinet se réunissaient pour des entretiens, auxquels elle prenait part elle aussi : il leur était donné à cette occasion des instructions concernant la vigilance dont ils devaient faire preuve, et il leur était rappelé les différentes exigences à respecter pour ce qui est des actes à accomplir dans un délai déterminé, ainsi que les conséquences juridiques d'une inobservation des délais. A l'appui de ses dires, le requérant a produit des déclarations sous serment en ce sens de la chef de bureau et des mandataires agréés qui le représentaient dans cette affaire.
IX. Dans une autre notification, la Chambre a indiqué à ce sujet que la jurisprudence des chambres n'ayant pas encore expressément tranché la question de savoir dans quelle mesure il est possible pour la détermination de la date de cessation de l'empêchement d'appliquer la règle 78(3) CBE relative à la date à laquelle la signification par lettre recommandée est réputée parvenue à son destinataire, elle considérait provisoirement que pour calculer jusqu'à quelle date il devait présenter sa requête en restitutio in integrum, le requérant était en droit de se fonder sur les renseignements que lui avait donnés par téléphone la greffière de la Chambre, et qu'il devait donc être considéré en l'occurrence que cette requête avait été formulée dans les délais.
Quant à la question de savoir s'il était possible de conclure de l'exposé des faits par le requérant que celui-ci, bien qu'ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances, n'avait pas été en mesure d'observer le délai imparti pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, il était fait les déclarations suivantes dans la notification :
Il est vrai que l'inobservation par une employée souffrant d'un malaise passager, mais qui avait sinon toujours été fiable, du délai prévu pour le dépôt d'un mémoire exposant les motifs du recours pouvait être considérée comme une erreur isolée à laquelle il était possible de remédier par le biais de la restitutio in integrum. Toutefois, il fallait également prouver dans ce cas que le cabinet de brevets était bien équipé d'un système efficace de surveillance des délais qui ne s'était révélé défaillant que dans les circonstances particulières propres à ce cas précis. Dans la jurisprudence des chambres de recours, il est considéré en général que pour qu'il puisse être admis qu'il a été fait preuve de toute la vigilance nécessaire, il doit entre autres avoir été mis en place un système de suivi des délais dont la mise en oeuvre ne soit pas confiée à une seule personne, et qui au contraire comporte au moins un mécanisme efficace de contre-vérification. Le requérant n'a jusqu'ici donné aucune précision à ce sujet. Le fait que les conseils en brevets de ce cabinet, comme l'avait expliqué le requérant en produisant à l'appui de ses dires une déclaration sous serment de ses conseils en brevets, MM. Hafner et Stippl, aient régulièrement tenu des réunions auxquelles prenait part la chef de bureau, au cours desquelles il était insisté sur la vigilance dont il convenait de faire preuve dans le travail et il leur était rappelé les exigences à respecter d'une manière générale dans le cas des actes à accomplir dans un délai déterminé, ne nous apprend rien sur la manière dont s'effectuait concrètement le contrôle du suivi des délais et du travail du personnel, et ne permet même pas de conclure à l'existence d'un tel contrôle. La Chambre estime également qu'il est normal et habituel de produire tous les moyens de preuve existants au sujet des faits qui ont été allégués, à savoir en l'occurrence non seulement une déclaration sous serment de l'employée concernée, mais par exemple aussi l'extrait du calendrier des délais tenu par les mandataires du requérant, calendrier dont le requérant avait mentionné l'existence.
X. Le requérant a répondu comme suit à ces critiques :
Le cabinet de brevets de ses mandataires emploie actuellement deux conseils en brevets, deux avocats, une "Patentassessorin"(conseil en brevets n'ayant pas une qualification complète) et une juriste qualifiée ainsi qu'une chef de bureau ; deux assistants sont également employés en permanence. Les personnes chargées du suivi des délais étaient donc des spécialistes expérimentés, ayant reçu une formation ad hoc.
Lorsqu'un délai est à respecter, non seulement il en est pris note dans le calendrier principal, mais encore une marque spéciale établie systématiquement en double est apposée bien en évidence sur le dossier, si bien qu'il suffit de voir le dossier pour s'apercevoir qu'il a été pris note d'un délai à observer. Peu après qu'il a été pris note pour la première fois de ce délai, le dossier est présenté à la personne qui en a la charge - le conseil en brevets ou l'"Assessor" - pour qu'il vérifie à son tour le délai dont il a été pris note. En outre, toutes les personnes travaillant dans le cabinet ont pour consigne stricte de vérifier elles aussi, à chaque mouvement important du dossier, si le délai a bien été respecté. De plus, il est rappelé chaque jour aux assistants des conseils en brevets, que ce soit dans des conversations ou à propos de certaines affaires, toute l'importance que revêt le suivi minutieux des délais et le respect scrupuleux des mécanismes de contrôle qui ont été prévus.
Le requérant n'a pas produit d'autres moyens de preuves.
XI. L'intimé a déclaré que le recours devait être rejeté comme irrecevable en raison du dépôt tardif du mémoire exposant les motifs du recours. Le requérant n'avait pas prouvé que ses mandataires avaient fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances. Il ne suffisait pas de rappeler leurs obligations aux employés. Le mandataire devait veiller à ce que ses employés s'acquittent effectivement de leurs obligations et ne les négligent pas gravement du seul fait que l'un d'entre eux était atteint d'une migraine.
XII. Requêtes du requérant :
Le requérant demande à bénéficier de la restitutio in integrum quant au délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, et conclut à la révocation du brevet.
Requêtes de l'intimé :
L'intimé demande que le recours soit déclaré irrecevable ou, à titre subsidiaire, qu'il soit rejeté.
Motifs de la décision
1. En vertu de l'article 108, troisième phrase et des règles 78(3) (version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998), 83(4) et 85(1) CBE, le délai à respecter pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours formé contre la décision de la division d'opposition en date du 9 mars 1998 expirait le 20 juillet 1998. Le dépôt de ce mémoire le 28 octobre 1998 était donc trop tardif. Or en vertu de la règle 65(1) CBE, tout recours qui n'est pas motivé dans le délai fixé à l'article 108, troisième phrase CBE, doit être rejeté comme irrecevable.
Recevabilité de la requête en restitutio in integrum quant au délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours
2. Par lettre en date du 27 octobre 1998, reçue par l'Office européen des brevets le 28 octobre 1998, le requérant, qui était auparavant l'opposant dans la procédure conduite devant la division d'opposition, a demandé à bénéficier de la restitutio in integrum quant au délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours.
2.1 Aux termes de la décision G 1/86, JO OEB 1987, 447 de la Grande Chambre de recours, un requérant qui est également opposant peut être rétabli dans ses droits au titre de l'article 122 CBE s'il n'a pas déposé dans les délais le mémoire exposant les motifs du recours. Il convient en l'occurrence d'appliquer les principes posés pour l'interprétation de l'article 122 CBE dans le cas du demandeur et du titulaire du brevet.
2.2 L'article 122(2), première phrase CBE dispose que la requête en restitutio in integrum doit être présentée dans un délai de deux mois à compter de la cessation de l'empêchement.
Selon le requérant, ses mandataires n'ont pas été en mesure de respecter ledit délai parce que le 2 juillet 1998, la chef de bureau du cabinet de brevets avait par inadvertance rayé du calendrier la date limite du "9 juillet" fixée pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, comme si ce délai avait été respecté. La Chambre considère donc que le requérant entend faire valoir par là que du fait de cette bévue, ses mandataires ne savaient pas que le mémoire exposant les motifs du recours n'avait pas été déposé.
Pourtant, ils avaient été informés de cet oubli le 24 août 1998 au plus tard, date à laquelle ils ont reçu la notification du greffe. Or leur requête en rstitutio in integrum quant au délai fixé pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours n'est parvenue à l'Office européen des brevets que le 28 octobre 1998, c'est-à-dire plus de deux mois à compter du 24 août.
Pour prouver que sa requête en restitutio in integrum avait été présentée en temps utile, le requérant a invoqué la règle 78(3) CBE, dans sa version applicable jusqu'au 31 décembre 1998, qui prévoit que toute lettre signifiée par envoi recommandé, en l'occurrence la notification du greffe en date du 21 août 1998, est réputée remise à son destinataire le dixième jour après la remise à la poste.
Or, comme elle l'a indiqué aux parties dans sa première notification, La Chambre estime que la règle 78(3) CBE relative à la date à laquelle la signification est réputée remise à son destinataire n'est pas applicable lorsqu'il s'agit de savoir à partir de quand a cessé l'empêchement dans le cas de l'inobservation du délai dans lequel doit être accompli l'acte qui n'avait pas été accompli, au sens de l'article 122(2), première phrase CBE. Selon la jurisprudence constante des chambres de recours, la question de savoir quand a cessé un empêchement est une question de fait. Il s'agit de savoir jusqu'à quelle date le demandeur a véritablement été empêché d'accomplir l'acte qu'il avait omis d'accomplir. Par conséquent, la règle 78 CBE qui prévoit qu'une notification est réputée remise le dixième jour après sa remise à la poste ne saurait être appliquée pour la détermination de la date de cessation de l'empêchement dans le cas d'une notification émanant de l'Office. En fait, l'empêchement à l'origine de l'omission d'un acte cesse généralement dès la réception effective de la notification avertissant le demandeur de cette omission, lorsque cette omission est due uniquement au fait que le demandeur ignorait qu'un acte de procédure n'avait pas été accompli (jurisprudence constante des chambres de recours dans la ligne de la décision J 7/82, JO OEB 1982, 391, points 3 et 4 des motifs, cf. notamment la décision J 27/90, JO OEB 1993, 422, point III de l'exposé des faits, et premiers paragraphes des points 2.3, 2.4 et 2.5 des motifs).
C'est le point de vue qui a été adopté dans les décisions des chambres de recours, qu'il s'agisse de l'application de la règle 78(2), première phrase ou de la règle 78(3) CBE dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998, dans la mesure où il était avantageux pour les parties que ces dispositions relatives à la date à laquelle une signification est réputée faite ou remise à la poste ne leur soient pas appliquées, du fait qu'en réalité la notification de l'Office leur était parvenue après la date de réception telle qu'elle aurait été calculée en application de la règle 78 CBE, ou qu'il ne pouvait pas être prouvé que cette notification avait été reçue (pour ce qui est de la règle 78(2) CBE, cf. la décision J 7/82, loc. cit. et point I du sommaire ainsi que la décision J 22/92 par ex. en date du 15 décembre 1994, point 3.3.2 des motifs ; pour ce qui est de la règle 78(3) CBE, cf. la décision J 15/84 en date du 4 juin 1985, points 2 s. des motifs).
Certes, la Chambre estime que par principe, pour la détermination de la date de la cessation de l'empêchement au sens de l'article 122(2) CBE, il importe de savoir à partir de quand le demandeur ou son mandataire ont effectivement eu connaissance, ou dû avoir connaissance de l'inobservation du délai, et que ce principe doit s'appliquer de manière uniforme, si bien qu'il doit être valable même dans le cas où il joue en défaveur du demandeur. C'est d'ailleurs le point de vue qui avait déjà été adopté par la jurisprudence dans d'autres contextes. C'est ainsi que pour la détermination de la date de cessation de l'empêchement, le demandeur ne peut pas non plus se fonder sur la date de la notification de l'Office l'avertissant de l'inobservation d'un délai, s'il s'avère par ailleurs pour d'autres raisons que lui-même ou son mandataire avaient déjà eu connaissance à une date antérieure de l'inobservation de ce délai (cf. décisions J 17/89 en date du 9 janvier 1990, points 4 et 5 des motifs, et T 900/90 en date du 9 janvier 1990, point 2.2 des motifs).
Toutefois, dans la jurisprudence des chambres de recours, il n'a pas encore été étudié expressément la question de savoir s'il convient de ne pas appliquer la règle 78(3) CBE pour la détermination de la date de cessation de l'empêchement au sens de l'article 122(2) CBE, même dans le cas où le demandeur se verrait désavantagé de ce fait, bien qu'il semble ressortir de certaines décisions, dont justement la décision J 29/94 (JO OEB 1998, 147) que le requérant avait invoquée pour défendre la thèse contraire, que là encore, c'est sur la date effective de réception de la notification qu'il convient de se fonder. C'est ainsi qu'au point 3 des motifs de la décision précitée, il est expliqué que le requérant avait eu connaissance de l'inobservation du délai au plus tard à la date à laquelle il avait reçu effectivement la notification de l'OEB, et il a été simplement admis alors, en faveur du requérant, que la notification ne lui est parvenue qu'après le dixième jour suivant sa remise à la poste (règle 78(3) CBE). Néanmoins, il semble que jusqu'à présent, aucune chambre de recours n'ait invoqué le point de vue adopté dans cette décision pour trancher une affaire.
La Chambre estime que dans ces conditions, pour la détermination de la date d'expiration du délai à respecter pour la présentation de leur requête en restitutio in integrum, les mandataires du requérant étaient en droit de se fier au renseignement que leur avait communiqué par téléphone la greffière de la Chambre, qui leur avait expliqué que c'était la règle 78(3) CBE qui était applicable pour la détermination de cette date. Vu la déclaration faite officiellement par la greffière de la Chambre, la Chambre considère comme prouvé que les mandataires du requérant avaient effectivement reçu un tel renseignement, même si la greffière ne se souvient plus de la date précise de l'entretien téléphonique, qui selon elle avait eu lieu en octobre 1998. Toutefois, comme elle a signalé par ailleurs que depuis son entrée en fonctions le 1er mars 1998, une telle question ne lui avait été posée que cette seule fois, et comme un mandataire demande normalement un tel renseignement lorsqu'il peut encore le cas échéant réagir à temps même en cas de réponse négative, la Chambre peut admettre que, comme l'avait affirmé le conseil en brevets du cabinet des mandataires du requérant dans sa déclaration sous serment, cet entretien téléphonique de ce conseil en brevets avec le greffe avait eu lieu le 13 octobre 1998, c'est-à-dire, même en retenant le 24 août 1998 comme date de cessation de l'empêchement, avant l'expiration du délai de présentation de la requête en restitutio in integrum. L'intimé n'a pas contesté cette thèse que la Chambre avait déjà avancée à titre d'avis provisoire dans sa deuxième notification.
La requête en restitutio in integrum doit donc être considérée comme ayant été présentée dans les délais.
2.3 En même temps qu'il présentait sa requête en restitutio in integrum, le requérant a acquitté la taxe correspondante et déposé un exposé des motifs de son recours et de sa requête en restitutio in integrum. Il a donc satisfait aux dispositions de l'article 122, paragraphe 2, deuxième phrase et paragraphe 3 CBE, et sa requête en restitutio in integrum est par conséquent recevable.
Bien-fondé de la requête en restitutio in integrum
3. Le requérant n'a toutefois pas montré de façon convaincante que, bien qu'ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l'article 122(1) CBE, il n'avait pas été en mesure d'observer le délai à respecter pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours.
3.1 Le requérant a fait valoir que l'inobservation de ce délai était due à une erreur isolée commise par une chef de bureau sinon fiable et expérimentée du cabinet de brevets de ses mandataires. Cette chef de bureau qui avait été chargée de tenir le calendrier des délais du cabinet des conseils en brevets avait, le 2 juillet 1998, rayé par inadvertance de ce calendrier le délai de dépôt du mémoire dont il avait été noté qu'il devait expirer le 9 juillet 1998.
3.2 Selon la jurisprudence constante des chambres de recours allant dans le sens de la décision J 5/80, JO OEB 1981, 343, lorsque le demandeur est représenté par un mandataire agréé, il ne peut être fait droit à une demande de restitutio in integrum que si le mandataire lui-même a fait preuve de la vigilance exigée du demandeur ou du titulaire du brevet par l'article 122(1) CBE. Certes, pour l'exécution de tâches de routine, le mandataire peut se faire aider par des assistants, qu'il peut en général charger entre autres de noter et de suivre les délais. La jurisprudence a également estimé qu'on ne pouvait attendre des assistants qu'ils fassent preuve de la même vigilance et d'autant de rigueur que le demandeur ou son mandataire (cf. décision J 5/80, loc. cit., point 6 des motifs).
3.3 Selon la jurisprudence constante des chambres de recours, la restitutio in integrum a été instituée pour éviter qu'à elle seule une erreur isolée commise dans le cadre d'un système fonctionnant par ailleurs de manière satisfaisante puisse entraîner une perte de droits définitive (cf. les décisions citées dans le recueil "La jurisprudence des Chambres de recours de l'Office européen des brevets" (Jurisprudence), 3ème édition 1989, VI-E, 9.2.2).
3.4 Le fait pour une employée atteinte d'un malaise passager, mais jugée fiable par ailleurs, d'avoir par inadvertance rayé du calendrier le délai de dépôt du mémoire exposant les motifs d'un recours peut être considéré comme une erreur isolée.
3.5 Néanmoins, selon la jurisprudence constante des chambres de recours, il convient en pareil cas de prouver également qu'un système efficace de suivi des délais avait été mis en place dans le cabinet des conseils en brevets (cf. les décisions citées dans le recueil de jurisprudence, loc.cit.), et que ce n'est qu'en raison de ces circonstances particulières que le système avait connu une défaillance. Il est considéré généralement dans la jurisprudence que pour qu'un tel système permette de satisfaire à l'exigence de vigilance, il est nécessaire que le suivi des délais ne soit pas confié à une seule personne, mais que le système comporte au moins un mécanisme de vérification efficace du suivi des délais (Recueil de jurisprudence, VI-E, 9.2.3, cf. aussi par ex. la décision T 828/94 en date du 18 octobre 1996, points 2 et suivants des motifs, ainsi que les autres décisions citées).
Les mandataires du requérant n'ont toutefois pas pris position à ce sujet, bien que la Chambre ait expressément évoqué cette situation juridique. En réponse à la notification que la Chambre leur avait adressée, ils se sont contentés de déclarer que dans leur cabinet, leurs employés non seulement prenaient note des délais dans le calendrier des délais, mais en plus les signalaient à l'aide d'une marque en double apposée bien en évidence sur le dossier, lequel était alors transmis dans les meilleurs délais à la personne compétente qui devait alors procéder à une contre-vérification. Toutefois les mandataires n'avaient pas apporté d'autres précisions au sujet de la manière dont ils s'assuraient que les délais dont il avait été pris note étaient effectivement respectés. Or pour qu'un dispositif de suivi des délais soit efficace, il ne suffit pas de prendre note des délais. Il doit également exister un mécanisme de rappel des délais ou de nouvelle présentation du dossier qui permet de faire en sorte que l'employé chargé du dossier reçoive celui-ci suffisamment de temps avant l'expiration du délai pour pouvoir prendre les mesures nécessaires. Or les mandataires du requérant n'ont donné aucune précision au sujet de l'organisation des travaux de bureau et du traitement des dossiers. Ils n'ont notamment pas mentionné l'existence d'un quelconque mécanisme de contrôle, qu'il s'agisse par exemple d'une contre-vérification par une autre personne du suivi des délais ou d'autres mesures telles qu'un rappel des délais effectué automatiquement par ordinateur. Les mandataires du requérant ont fait valoir que les employés du cabinet de brevets avaient tous reçu comme consigne stricte de vérifier le respect du délai à chaque "mouvement important" du dossier. Mais cela ne suffit pas, car c'est un pur hasard si des "mouvements importants" interviennent pour d'autres raisons au niveau d'un dossier avant l'expiration des délais dont il a été pris note dans ce dossier, dans le cas par exemple où le client demande un renseignement ou donne certaines instructions. Une telle consigne ne suffit donc pas pour permettre de faire en sorte dans des circonstances normales que lorsque la personne chargée du suivi des délais a commis une erreur, les dossiers comportant des délais à respecter soient néanmoins présentés à l'employé compétent avant l'expiration de ces délais. Ajoutons que l'expression "mouvement important" manque totalement de clarté. De toute façon, il n'y a manifestement pas eu en l'occurrence de "mouvement important" du dossier puisqu'il a fallu attendre l'envoi par la greffière de la Chambre de la notification annonçant la perte de droits pour que les mandataires du requérant s'aperçoivent qu'ils avaient laissé passer le délai.
Il y a donc lieu de considérer dans cette affaire que, comme l'ont expliqué les mandataires du requérant, l'inobservation du délai est due au fait que la chef de bureau avait rayé par inadvertance du calendrier des délais le délai prévu pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours et que, puisqu'il n'avait pas été signalé l'existence d'autres mécanismes systématiques (pour chaque délai) de suivi des délais et de contre-vérification, bien que la Chambre ait rappelé qu'il était nécessaire de donner ces précisions, une erreur commise par la chef de bureau devait forcément entraîner une inobservation du délai, à moins qu'une autre personne dans le cabinet des mandataires n'ait par hasard consulté le dossier et ne se soit aperçue avant l'expiration du délai que ce délai avait été rayé du calendrier des délais alors qu'il était toujours noté dans le dossier que des mesures restaient à prendre pour respecter ce délai.
Ce n'est que dans des cas très particuliers, lorsque le cabinet du mandataire constituait une petite unité dans laquelle le mandataire était pratiquement le seul responsable du traitement des dossiers et n'avait en conséquence à suivre qu'un nombre limité de délais, et où il effectuait ce suivi en collaboration étroite avec son assistant, que les chambres de recours ont considéré que le mandataire avait fait preuve de toute la vigilance nécessaire, bien qu'il n'ait pas été prévu de mécanisme général permettant de contrôler de manière indépendante le travail de la personne chargée du suivi des délais (cf. p.ex. les décisions J 31/90 en date du 10 juillet 1992, points 4 et suivants des motifs, et T 166/87 en date du 16 mai 1988, point 2 des motifs). Le caractère exceptionnel de la position qui avait été adoptée dans ces cas a été souligné, et l'on n'a pas affaire à un cas comparable dans la présente espèce. D'après ce qu'a expliqué le requérant, le cabinet de ses mandataires comptait deux mandataires agréés et deux avocats, ainsi qu'un "Patentassessor" et un juriste, soit six personnes travaillant à plein temps sur des dossiers relatifs à la protection de droits de propriété industrielle. Pour le traitement de ces dossiers, il existe normalement des délais à observer, avec des pertes de droits immédiates pour le client lorsque ces délais ne sont pas respectés. Dans un tel cabinet, le suivi des délais revêt donc une grande importance et constitue une partie importante du travail.
3.6 En outre, vu le comportement adopté par les mandataires du requérant au cours de la procédure, la Chambre, même compte tenu de la déclaration sous serment faite par la chef de bureau, estime qu'il subsiste quelques doutes pour ce qui est de la question de savoir si les faits se sont bien déroulés dans le cabinet des mandataires comme l'avait exposé le requérant lorsqu'il a expliqué qu'il avait été pris note du délai de présentation du mémoire exposant les motifs du recours, mais que ce délai avait été biffé dans le calendrier des délais. En l'espèce, il aurait été facile pour les mandataires du requérant de fournir les preuves écrites de leurs dires, p.ex. une copie des inscriptions portées dans le calendrier des délais et de la marque apposée sur le dossier qui permettraient de corroborer la version donnée par la chef de bureau dans sa déclaration sous serment et que la Chambre peut sinon difficilement apprécier. Dans sa deuxième notification, la Chambre a d'ailleurs expressément demandé aux mandataires du requérant de produire toutes les preuves écrites dont ils disposaient au sujet des faits qu'ils avaient allégués, et notamment un extrait du calendrier des délais mentionné par le requérant. Comme malgré cette invitation les mandataires n'ont pas produit de preuves écrites alors que celles-ci auraient dû exister si l'on en croit l'exposé du requérant, et qu'il n'a pas non plus été expliqué pourquoi ces preuves n'avaient pas été produites, la Chambre tend à penser que lesdites preuves auraient peut-être pu ne pas confirmer la version des faits présentée par le requérant.
4. Il ne peut donc être fait droit à la requête en restitutio in integrum quant au délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours, et le recours doit être rejeté comme irrecevable en vertu de l'article 108, troisième phrase et de la règle 65(1) CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. Il ne peut être fait droit à la requête présentée par le requérant en vue d'obtenir la restitutio in integrum quant au délai de dépôt du mémoire exposant les motifs du recours.
2. Le recours est rejeté comme irrecevable.