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J 0014/87 (Mention de la délivrance du brevet) 20-05-1987
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1. Les erreurs commises lors de la publication au Bulletin européen des brevets de la mention de la délivrance d'un brevet européen ne font pas nécessairement obstacle à la prise d'effet de la décision relative à la délivrance du brevet, au sens où l'entend l'article 97(4) CBE.
2. Une chambre de recours n'a pas compétence pour statuer sur des demandes en indemnisation de dommages qui auraient été causés par l'OEB au cours de la mise en oeuvre d'une procédure du délivrance de brevet.
Mention de la délivrance du brevet dans le Bulletin européen des brevets prenant effet en dépit d'indications incomplètes
Remboursement de la taxe annuelle (oui)
Taxe annuelle/remboursement (oui)
Responsabilité - dommages causés au cours de la mise en oeuvre de la procédure de délivrance du brevet
I. Le 20 février 1986, l'OEB a décidé, conformément à l'article 97(2) CBE, de délivrer sur la base de la demande de brevet européen n° 83 105 017.4 un brevet européen prenant effet dans six Etats désignés, dont la Suède. Il était prévu de publier la mention de la délivrance de ce brevet au Bulletin européen des brevets n° 86/14 du 2 avril 1986, conformément aux dispositions de l'article 97(4) CBE.
II. Dans ce Bulletin, différentes indications concernant ce brevet ont été fournies aux sections II.2 à II.4. Par contre, toutes les indications figurant normalement à la section II.1 manquaient, à la suite (apparemment) d'une erreur d'impression.
III. Par une lettre en date du 21 novembre 1986, la titulaire du brevet a avisé l'OEB que, selon l'Office suédois des brevets, il n'avait pas en l'occurrence été délivré de brevet européen. Toutefois, à titre subsidiaire, elle a simultanément acquitté la taxe pour la quatrième année ainsi que la surtaxe qui, selon les dispositions de l'article 86 et de la règle 37 CBE, devenaient exigibles respectivement le 31 mai et le 30 novembre 1986.
IV. Le chef de la Section des formalités de la Division d'examen de l'OEB a alors constaté dans sa notification du 9 décembre 1986 que la mention de la délivrance du brevet, publiée le 2 avril 1986, devait être considérée comme "nulle et non avenue", et qu'une nouvelle mention serait publiée dans le Bulletin européen des brevets n° 87/04 du 21 janvier 1987. Il confirmait en outre dans cette notification que la taxe pour la quatrième année avait été acquittée dans les délais.
V. Le 11 décembre 1986, l'OEB a rendu conformément à l'article 97(2) CBE une deuxième décision relative à la délivrance d'un brevet européen sur la base de la demande précitée (cf. point I).
VI. Dans sa lettre du 12 décembre 1986, la titulaire du brevet a sollicité :
- le remboursement de la taxe pour la quatrième année
- la renonciation à la publication au Bulletin européen des brevets d'une nouvelle mention de la délivrance
- une décision susceptible de recours.
VII. Dans sa décision du 2 janvier 1987, le chef de la Section des formalités de la Division d'examen de l'OEB a rejeté la requête en remboursement de la taxe pour la quatrième année, en faisant valoir notamment que :
- eu égard à la pratique suivie par l'OEB, qui consiste à publier dans la section II.1 du Bulletin européen des brevets toutes les indications afférentes au brevet délivré, le public considère que les demandes pour lesquelles il n'a pas été fourni d'indications dans cette section n'ont pas encore donné lieu à la délivrance d'un brevet. Dans la présente espèce, il n'est donc pas exclu que les personnes susceptibles de s'intéresser à ce brevet européen aient ignoré les indications contenues dans les autres sections. La mention de la délivrance de ce brevet n'a donc pas été publiée conformément aux prescriptions de l'article 97(4) CBE.
- La décision relative à la délivrance du brevet européen ne prend effet qu'au jour de la publication, en bonne et due forme, au Bulletin européen des brevets, de la mention de cette délivrance (articles 64(1) et 97(4) CBE). La demande précitée (cf. point I) est donc encore en instance à l'OEB, et la taxe pour la quatrième année, venue à échéance avant la date à laquelle a été valablement publiée la mention de la délivrance du brevet (à savoir le 21 janvier 1987), est due à l'OEB (article 86(1) ensemble la règle 37(1) CBE).
- La mention de la délivrance d'un brevet européen n'est publiée que sur la base de la décision qui a été rendue au sujet de la délivrance de ce brevet. Il n'est pas prévu que la date de la publication doive faire l'objet d'une décision distincte. Par ailleurs, dans la présente espèce, les Etats contractants désignés ont déjà été informés que la nouvelle publication aurait lieu le 21 janvier 1987. Pour des raisons de sécurité juridique, les intérêts de ces Etats doivent primer l'intérêt de la demanderesse à la clarification préalable de la situation du point de vue juridique. Le fait qu'il ait été formulé une requête en décision susceptible de recours n'est donc pas une raison pour ne pas procéder à la publication, ou pour la reporter à une date ultérieure, d'autant que cette publication ne lèse en rien la titulaire du brevet. En effet, si pour qu'un effet juridique précis puisse se produire (comme en l'espèce la non-exigibilité de la taxe pour la quatrième année), il importe par exemple que la publication ait été valablement effectuée dès le 2 avril 1986, rien n'interdit à la titulaire du brevet de se prévaloir à tout moment de cette date de publication.
VIII. Les indications relatives au brevet européen délivré ont alors été publiées au Bulletin européen des brevets n° 87/04 du 21 janvier 1987, page 205 (section II.1), ainsi que pages 268, 272, 277, 288, 290, 292, 293, 296 et 298 (sections II.2 à II.4).
IX. Le 25 février 1987, la titulaire du brevet (la requérante) a formé un recours contre cette décision et acquitté la taxe de recours. Elle a demandé :
1. L'annulation dans sa totalité de la décision du 2 janvier 1987,
2. le remboursement de la taxe pour la quatrième année, surtaxe comprise,
3. le remboursement de la taxe de recours et
4. le remboursement des frais que lui a occasionnés la deuxième mention de la délivrance du brevet.
A titre subsidiaire, elle a également conclu au :
a) remboursement de la surtaxe afférente à la taxe pour la quatrième année
b) remboursement des frais que lui a occasionnés la première mention de la délivrance du brevet.
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. L'article 129 a) CBE stipule que l'Office européen des brevets doit publier périodiquement un Bulletin européen des brevets contenant les inscriptions portées au Registre européen des brevets, ainsi que "toutes les autres indications dont la publication est prescrite par la présente Convention". La mention de la délivrance du brevet européen fait partie de ces autres indications : cf. article 97(4) CBE. Il ressort de ces dispositions que cette mention est publiée au plus tôt trois mois à compter du point de départ du délai de paiement de la taxe de délivrance et de la taxe d'impression.
3. Etant donné qu'en vertu de l'article 97(4) CBE la décision relative à la délivrance du brevet européen ne prend effet qu'au jour de la publication au Bulletin européen des brevets de la mention de cette délivrance, cette mention revêt à l'évidence une importance fondamentale. En outre, aux termes de l'article 64(1) CBE, ce n'est qu'à compter de cette date que le brevet européen confère à son titulaire, dans chacun des Etats contractants pour lesquels il a été délivré, les mêmes droits que ceux que lui conférerait un brevet national délivré dans cet Etat (rappelons toutefois à ce propos qu'il convient en outre, dans certains cas, de se conformer aux prescriptions particulières de l'article 65 CBE concernant la traduction du fascicule de brevet). Enfin, c'est à partir de la publication de la mention de la délivrance du brevet européen que commence à courir le délai de neuf mois pour former opposition, prévu à l'article 99 CBE.
4. La requérante fait observer à juste titre que la CBE ne comporte aucune disposition précisant les conditions à respecter en ce qui concerne la forme et le contenu de la mention dans le Bulletin européen des brevets de la délivrance du brevet européen. C'est donc à l'OEB de fixer en pratique les modalités applicables dans tous les cas pour la publication de cette mention au Bulletin européen des brevets.
5. Selon la pratique constante de l'OEB, le Bulletin européen des brevets comporte deux grandes parties, l'une (la partie I), contenant les indications relatives aux demandes publiées et l'autre (la partie II) les indications relatives aux brevets délivrés. Chacune de ces parties se subdivise à son tour en un certain nombre de sections et de sous-sections contenant chacune différentes indications, présentées dans un ordre précis. Dans les sections I.1 et II.1, les demandes ou les brevets sont classés selon la classification internationale des brevets. Ces deux sections diffèrent des sections suivantes des parties I et II en ce qu'elles regroupent toutes les indications afférentes aux demandes et aux brevets mentionnés dans le numéro concerné du Bulletin européen des brevets, alors que, dans les sections suivantes, ne figurent que quelques-unes de ces indications (telles que le numéro de la publication, la date de dépôt, le nom du demandeur ou du titulaire), énumérées sous des sous-titres.
6. Dans la présente espèce, la demande a été publiée dans le Bulletin européen des brevets n° 83/49 du 7 décembre 1983. Cette publication était tout à fait conforme à la pratique constante de l'OEB (telle qu'elle vient d'être décrite ci-dessus au point 5). Toutes les indications relatives à la demande figurent effectivement à la section I.1 de ce Bulletin (y compris la date du dépôt, la date de priorité et le titre de l'invention). Par contre (ainsi que cela a déjà été signalé ci-dessus au point II), la mention de la délivrance du brevet européen, publiée au Bulletin européen des brevets n° 86/14 du 2 avril 1986, est incomplète dans la mesure où il y manque certaines indications qui devraient figurer à la section II.1, ce qui est manifestement dû à une erreur commise lors de l'impression du Bulletin.
7. Cette omission constitue sans aucun doute une erreur grave, et il est permis de se demander si la mention de la délivrance du brevet en question dans ce Bulletin remplit vraiment les conditions requises pour que le brevet européen produise des effets juridiques, conformément à l'article 97(4) CBE (et pour que, conformément à l'article 64(1) CBE, il confère à son titulaire les mêmes droits que ceux que lui conférerait un brevet national). Il est donc compréhensible que la Section des formalités de la Division d'examen de l'OEB ait tenté de remédier à cette irrégularité après avoir été avisée de l'erreur.
8. Si l'on réfléchit à ce qu'il aurait convenu de faire dans cette situation, il faut tout d'abord s'interroger sur l'objectif que poursuit la publication au Bulletin européen des brevets de la mention de la délivrance du brevet européen. La mention de la délivrance du brevet européen, outre qu'elle détermine le moment où le brevet commence à produire des effets dans les Etats contractants désignés, mettant ainsi fin à la protection provisoirement conférée au demandeur en vertu de l'article 67 CBE, a pour but essentiel d'informer le public, c'est-à-dire avant tout les concurrents du titulaire du brevet, et de leur donner ainsi les moyens de décider, dans le délai de neuf mois fixé à l'article 99 CBE, s'ils veulent faire opposition au brevet européen qui a été délivré. Toutefois, la requérante allègue, non sans raison, que la décision de faire opposition à un brevet européen ne peut raisonnablement être prise sur la seule base des indications fournies dans le Bulletin européen des brevets. Normalement, une telle décision suppose bien au contraire que l'étendue de la protection conférée par le brevet européen qui a été délivré ait au préalable fait l'objet d'une analyse approfondie. Cette analyse ne peut être effectuée dans de parfaites conditions que si elle se fonde sur le fascicule du brevet qui, conformément à l'article 98 CBE, est publié par l'OEB en même temps que la mention de la délivrance du brevet européen. Par conséquent, la mention de la délivrance du brevet européen dans le Bulletin européen des brevets vise essentiellement à signaler qu'un brevet a été délivré. Ceci peut le cas échéant inciter les milieux intéressés à étudier soigneusement le fascicule du brevet, afin de rechercher s'il existe des possibilités concrètes de faire opposition.
9. Il est incontestable que, dans la présente espèce, l'omission de l'ensemble des indications devant figurer à la section II.1 du Bulletin européen des brevets a compliqué outre mesure l'appréhension des faits. Pour cette raison, il n'est pas impossible que, du fait de cette erreur, certaines personnes susceptibles d'être intéressées n'aient pas accordé à la délivrance dudit brevet européen toute l'attention habituelle. Cependant, étant donné que, en règle générale, les milieux intéressés suivent d'assez près la procédure de publication des demandes de brevet européen, la Chambre estime que l'on peut considérer que la grande majorité des personnes appartenant à ces milieux intéressés ont consulté, outre les indications figurant à la section II.1, celles fournies dans les autres sections, et qu'en ce qui concerne l'objectif essentiel de la mention de la délivrance du brevet, tel qu'il vient d'être rappelé, les indications mises en relation avec le classement selon la classification internationale des brevets qui ont été données aux sections II.2, II.3 et II.4 du Bulletin européen des brevets n° 86/14 (dont le numéro exact de la publication et du dépôt, ainsi que le nom du titulaire), peuvent être considérées comme suffisantes. En outre, il convient également d'observer, dans le même ordre d'idées, qu'une personne qui n'aurait pas fait opposition à un brevet européen dans le délai fixé à l'article 99 CBE, parce qu'elle n'aurait pas pris garde à la mention de la délivrance de ce brevet, aurait toujours la possibilité d'intenter une action en nullité conformément aux dispositions de la législation nationale des Etats contractants désignés (cf. article 138 CBE).
10. Dans ces conditions, et compte tenu du fait qu'il est de l'intérêt légitime du titulaire du brevet de ne pas renoncer à des droits que, pour de solides raisons, il pouvait supposer exister, la Chambre décide que, dans la présente espèce, la publication au Bulletin européen des brevets n° 86/14 du 2 avril 1986 de la mention de la délivrance du brevet européen remplissait les conditions énoncées à l'article 97(4) CBE et que donc, la décision du 20 février 1986 relative à la délivrance du brevet européen a pris elle aussi effet le 2 avril 1986. Il s'ensuit que, en déclarant cette publication comme "nulle et non avenue", le chef de la Section des formalités de la Division d'examen de l'OEB a pris manifestement une mesure excessive, qui ne peut être considérée comme valable d'un point de vue juridique. Il en va de même pour ce qui est de la nouvelle décision, relative à la délivrance du brevet européen, émise ultérieurement, et de la nouvelle publication de la mention de la délivrance du brevet. Selon la Chambre, il aurait été raisonnable de se borner à publier à la section II.12 du Bulletin européen des brevets un rectificatif comportant les indications qui manquaient à la section II.1.
11. Toutefois, pour prévenir tout malentendu, la Chambre tient à préciser clairement ici qu'en dépit de ce qu'elle vient d'affirmer, il n'y a pas lieu de conclure que la pratique actuelle de l'OEB en matière de publication doive être modifiée. Selon la Chambre, cette pratique vise en effet à fournir au public des informations claires et exhaustives, et l'on ne peut assurément qu'approuver cet objectif. Ayant fait ses preuves, elle convient d'ailleurs tout à fait à cette fin, pour autant qu'on puisse en juger, et il n'y a donc pas de raison sérieuse de la modifier. Il est tout à fait possible au demeurant que dans certains cas la publication de la mention de la délivrance du brevet comporte des irrégularités telles qu'elle doit être considérée comme dénuée de toute valeur juridique, si bien qu'une nouvelle publication devient indispensable. Cela devrait notamment toujours être le cas lorsque les indications fournies lors de la publication sont manifestement entachées d'erreurs sur des points importants. Aussi, la seule solution est-elle d'apprécier individuellement cas par cas au regard du droit.
12. La Chambre ayant décidé au point 10 ci-dessus que, dans la présente espèce, le 2 avril 1986 doit être considéré comme étant la date correcte de la publication de la mention de la délivrance du brevet européen, l'obligation de payer à l'OEB les taxes annuelles a pris fin avant le 31 mai 1986, date à laquelle la taxe pour la quatrième année est devenue exigible (article 86 et règle 37 CBE). La taxe et la surtaxe que la requérante a acquittées à l'OEB au titre de cette année doivent donc lui être remboursées, comme elle l'a demandé.
13. Ni dans la CBE, ni dans quelque autre texte que ce soit, il n'existe de dispositions autorisant une chambre de recours à statuer sur des demandes en réparation de dommages causés par l'OEB au cours du déroulement de la procédure de délivrance de brevet (cf. article 9 CBE). La requête formulée à ce propos par la requérante (remboursement des frais supplémentaires engendrés par les deux mentions de la délivrance du brevet) doit donc être rejetée, sans que la Chambre puisse en outre porter une appréciation d'ordre juridique sur les faits.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. Il convient de signaler dans le Bulletin européen des brevets que la décision relative à la délivrance du présent brevet européen a pris effet le 2 avril 1986, et que la deuxième décision, en date du 11 décembre 1986, concernant la délivrance du même brevet, n'a pas produit effet.
3. La requête en réparation du dommage est rejetée.