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G 0006/91 (Réduction de la taxe) 06-03-1992
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1. Le droit à la réduction du montant des taxes prévue à la règle 6(3) CBE est acquis aux personnes visées à l'article 14(2) CBE qui déposent la pièce essentielle du premier acte de la procédure de dépôt, d'examen, d'opposition ou de recours dans une langue officielle de l'Etat en question autre que l'allemand, l'anglais ou le français et en fournissant la traduction requise au plus tôt simultanément.
2. La pièce essentielle du premier acte de la procédure de recours étant l'acte de recours, il suffit que cette pièce soit déposée dans une langue officielle d'un Etat contractant qui n'est pas l'une des langues officielles de l'OEB et traduite dans l'une de ces dernières pour que le bénéfice de la réduction du montant de la taxe de recours soit acquis même si les pièces ultérieures, telles que le mémoire exposant les motifs du recours, sont déposées uniquement dans une langue officielle de l'Office européen des brevets.
Résumé de la procédure
I. Par décision intermédiaire du 2 juillet 1991 dans l'affaire T 367/90 ASULAB S.A./NV Philips' Gloeilampenfabrieken, la chambre de recours "Physique" 3.4.1 a posé à la Grande Chambre de recours les questions suivantes :
(1) Quand devrait être déposé le document pertinent rédigé dans une langue autorisée non officielle pour que soit acquis le droit à la réduction de taxe visée à la règle 6(3) CBE ?
(2) Est-il en particulier possible de déposer un tel document le même jour que sa traduction dans une langue officielle de l'OEB sans pour autant perdre le droit à la réduction de la taxe correspondante ?
(3) Dans le cas d'un recours, pour acquérir le droit à la réduction de taxe visée à la règle 6(3) CBE, est-il nécessaire que le mémoire exposant les motifs du recours soit déposé dans une langue autorisée non officielle ?
(4) Si une réponse affirmative est donnée à la troisième question et, si dans le délai prévu à l'article 108 CBE, il n'est pas satisfait à l'exigence résultant de cette réponse, convient-il de considérer vingt pour cent de la taxe de recours comme une "partie minime non encore payée" au sens de l'article 9(1) du règlement relatif aux taxes ?
En outre, le recours est-il recevable si le montant impayé est versé après expiration du délai de paiement prévu à l'article 108 CBE ?
II. En l'espèce, la requérante (opposante) qui est une société de droit néerlandais a formé un recours par un écrit rédigé en néerlandais auquel était jointe une traduction en anglais et payé simultanément une taxe de recours réduite en invoquant les dispositions de l'article 14(4) et de la règle 6(3) CBE ainsi que celles de l'article 12 du règlement relatif aux taxes.
III. La requérante a ultérieurement, toutefois dans le délai prévu à l'article 108 CBE dernière phrase, déposé un mémoire exposant les motifs du recours rédigé uniquement en anglais.
IV. La chambre de recours 3.4.1 a fait état d'un manque de clarté des dispositions de la CBE en ce qui concerne l'ordre chronologique dans lequel la pièce originale produite dans une langue officielle d'un Etat contractant qui n'est pas l'une des langues officielles de l'Office européen des brevets (appelée ci-après langue "autorisée" non officielle) et sa traduction dans une langue officielle de l'OEB devaient être déposées pour que l'on puisse considérer qu'il a été fait usage des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(2) et (4) CBE au sens de la règle 6(3) CBE. La chambre de recours a estimé à ce sujet que si la décision J 4/88 (JO OEB 1989, 483) avait admis que le dépôt simultané d'une pièce originale et de sa traduction ouvrait le droit à la réduction de taxe prévue par la règle 6(3) CBE, cette décision n'avait pas vraiment examiné si une telle réduction était légitime en de telles circonstances. Considérant, par conséquent, qu'il n'y avait pas de jurisprudence établie sur ce point, la chambre a ainsi posé les deux premières questions à la Grande Chambre de recours.
V. La chambre de recours 3.4.1 a, en outre, posé la troisième question estimant que s'il résultait de la jurisprudence des chambres de recours, à savoir la décision J 4/88 citée ci-dessus et la décision T 290/90 du 9 octobre 1990 (JO OEB 1992, 368) que, pour que le droit à la réduction de taxe soit acquis, il était nécessaire que l'élément de l'acte accompli ayant trait à la substance soit déposé dans une langue "autorisée" non officielle dans le cas du dépôt de la demande et de l'opposition, il n'apparaissait pas que cette jurisprudence soit applicable au recours du fait que l'article 108 CBE prévoit deux délais distincts l'un pour le dépôt de l'acte de recours et l'autre pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours.
VI. La chambre de recours 3.4.1 a motivé sa quatrième question, posée à titre subsidiaire, par la nécessité d'une interprétation de l'article 9(1) du règlement relatif aux taxes pour décider, dans le cas où la Grande Chambre de recours déciderait que le mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé dans une langue "autorisée" non officielle pour que le bénéfice de la réduction de taxe soit acquis, s'il était alors possible de considérer la différence de taxe, volontairement non réglée, comme une partie minime dont l'Office peut ne pas tenir compte.
VII. Considérant que sur la question des langues des documents et des problèmes relatifs aux taxes, il était utile d'entendre le Président de l'OEB, la Grande Chambre l'a invité à présenter ses commentaires et observations sur les questions posées par la chambre de recours 3.4.1.
VIII. Les parties ont été également invitées à présenter leurs observations.
IX. Par lettre reçue à l'OEB le 17 septembre 1991, la requérante a exposé que, selon elle, l'objet de la réduction de taxe prévue à la règle 6(3) CBE était de compenser au moins en partie les inconvénients qui résultent pour les personnes visées à l'article 14(2) CBE d'avoir à déposer les pièces qui doivent être produites au cours de la procédure devant l'OEB dans une langue autre que leur propre langue, inconvénients qui subsistent même lorsque le rédacteur possède suffisamment de connaissances dans l'une des langues officielles de l'OEB pour pouvoir écrire directement dans cette langue.
X. Invoquant sur ce point certaines opinions de la doctrine qui estiment que, compte tenu de son but, la règle 6(3) CBE ne devrait pas être interprétée de façon restrictive, la requérante a soutenu qu'il était justifié d'accorder la réduction de taxe dès lors que la personne concernée a manifesté l'intention d'en bénéficier en déposant l'acte de procédure initial - qui peut être suffisamment court pour qu'une traduction puisse en être fournie simultanément - dans une langue "autorisée" non officielle.
XI. La requérante a fait observer que cette interprétation était en accord avec la pratique de l'OEB qui exige seulement pour accorder la réduction de la taxe d'examen que la requête en examen ait été présentée par écrit dans une langue "autorisée" non officielle et traduite.
XII. La requérante reconnaît certes que la jurisprudence (décisions J 7/80, JO OEB 1981, 137 et T 290/90 déjà citée) a décidé que pour qu'une personne visée à l'article 14(2) CBE soit considérée comme ayant usé des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14 CBE paragraphes 2 et 4 et bénéficie, de ce fait, de la réduction de taxe prévue à la règle 6(3) CBE, il était nécessaire que les éléments essentiels du dépôt, à savoir, la description et les revendications et, respectivement, les motifs d'opposition soient déposés dans la langue "autorisée" non officielle. Cependant, la requérante fait observer qu'il s'agit, dans ces deux cas, de pièces comportant différents éléments (description, revendications, requête, etc., ou acte d'opposition, mémoire d'opposition) qui doivent être produits dans un seul et même délai, leur dépôt constituant un acte de procédure unique. Cette situation n'est donc pas comparable à celle du recours car le dépôt de l'acte de recours est un acte de procédure distinct soumis à un délai différent et ayant des effets différents de ceux du dépôt du mémoire exposant les motifs du recours (dénommé ci-après mémoire de recours).
XIII. La requérante a considéré, en conséquence, qu'il n'y avait pas lieu pour la Grande Chambre de recours de répondre à la quatrième question de la chambre de recours auteur de la saisine. Toutefois, dans le cas où la Grande Chambre de recours estimerait ne pas pouvoir suivre l'argumentation qu'elle a présentée, la requérante a estimé qu'une réponse affirmative devrait être donnée à cette quatrième question en application du principe de la bonne foi et du fait du manque de clarté de la situation juridique.
XIV. Dans sa réponse, le Président de l'Office a essentiellement présenté les observations suivantes :
L'intention des auteurs de la Convention en inscrivant dans la CBE l'article 14 et la règle 6 a été d'éviter ou à tout le moins d'atténuer les conséquences discriminatoires de la limitation à trois langues officielles de la Convention pour les ressortissants des Etats membres dont la langue officielle n'est pas une langue officielle de la CBE, comme l'indiquent les travaux préparatoires de la CBE.
Etant donné ce but, il convient de ne pas interpréter restrictivement les dispositions correspondantes de la CBE, ce qui a toujours été la politique et la pratique de l'Office.
Par conséquent, la réduction de taxe a toujours été accordée, quel que soit l'ordre dans lequel le document original et sa traduction parvenaient à l'OEB.
Cependant, la réduction de la taxe selon la règle 6(3) CBE se justifie uniquement par le fait que la personne concernée a dû supporter des frais de traduction.
En ce sens, la décision T 290/90 citée par la chambre de recours qui a rendu la présente décision de saisine a estimé que, pour pouvoir bénéficier de la réduction de taxe prévue à la règle 6(3), l'opposant devait avoir déposé dans la langue "autorisée" non officielle le mémoire d'opposition qui est l'élément essentiel de l'opposition qui nécessite une traduction. Dans le cas du recours, il devrait être, par conséquent, nécessaire que le mémoire de recours, qui est l'élément essentiel du recours qui nécessite une traduction, laquelle est la justification de la réduction de taxe, soit produit dans la langue "autorisée" et traduit pour que la réduction de taxe puisse être accordée.
On ne saurait tirer argument du fait que l'OEB considère suffisant, pour accorder une réduction de la taxe d'examen, que la requête en examen ait été formulée simultanément dans une langue "autorisée" non officielle et dans une langue officielle de l'OEB.
En effet, il s'agit, dans ce dernier cas, d'une déclaration qui se suffit à elle seule tandis que le recours n'est complet et recevable qu'une fois le mémoire déposé, les délais différents pour le dépôt de l'acte de recours et celui du mémoire étant dus à la nécessité de laisser au requérant une période de temps suffisante pour la préparation du mémoire de recours mais ne constituant pas une raison suffisante pour que des conditions différentes soient appliquées pour l'obtention d'une réduction de taxe en opposition et en recours.
Enfin, concernant l'application de l'article 9(1) du règlement relatif aux taxes, le Président de l'OEB a fait observer que cet article vise seulement à éviter des pertes de droit dans le cas où, par suite d'une erreur quelconque, une partie minime de la somme due fait défaut. Cette disposition n'est pas destinée à remédier aux cas où le demandeur, titulaire, opposant ou requérant ne paie délibérément qu'une taxe réduite alors qu'il n'a pas droit à la réduction.
XV. L'intimée dans l'affaire T 367/90 n'a pas pris position.
Questions 1 et 2
1. Il convient tout d'abord d'examiner les dispositions de l'article 14 et de la règle 6 de la CBE.
2. L'article 14(2) CBE prévoit que les personnes physiques et morales ayant leur domicile ou siège sur le territoire d'un Etat contractant ayant une langue autre que l'allemand, l'anglais ou le français comme langue officielle, et les nationaux de cet Etat ayant leur domicile à l'étranger peuvent déposer des demandes de brevet dans une langue officielle de cet Etat.
De même, l'article 14(4) CBE permet aux personnes visées au paragraphe 2 de déposer "dans une langue officielle de l'Etat contractant en question des pièces devant être produites dans un délai déterminé".
3. Toutefois, ces personnes sont tenues, lorsqu'elles font usage des dispositions des paragraphes 2 et 4 de l'article 14 CBE, de produire une traduction en anglais, allemand ou français dans le délai prévu par le règlement d'exécution, faute de quoi la demande de brevet est réputée retirée (article 90(3) CBE) ou la pièce originale est réputée ne pas avoir été reçue ainsi que le dispose le paragraphe 5 de l'article 14 CBE, comme le rappelle la décision T 193/87 du 13 juin 1991, Alfa Laval AB/Otto Tuchenhagen GmbH & Co KG et Appendage Fabriek Hoogoven BV.
4. Ce délai est fixé respectivement à la règle 6(1) CBE pour le dépôt des demandes de brevet et à la règle 6(2) CBE pour le dépôt des autres pièces. Il est de trois mois à compter du dépôt de la demande de brevet sans pouvoir cependant excéder treize mois à compter de la date de priorité, d'un mois à compter du dépôt d'une demande de brevet divisionnaire et également d'un mois à compter du dépôt d'une nouvelle demande de brevet par la personne autre que le demandeur à qui a été reconnu le droit à l'obtention du brevet européen par une décision passée en force de chose jugée. Il est d'un mois à compter du dépôt des autres pièces. Cependant, si la pièce en cause est un acte d'opposition ou un recours, le délai est prolongé, s'il y a lieu, jusqu'au terme du délai d'opposition ou de recours (voir la règle 6(2) CBE).
5. Enfin, le paragraphe 3 de la règle 6 CBE prévoit que :
"une réduction du montant des taxes de dépôt, d'examen, d'opposition ou de recours est accordée, selon le cas, au demandeur, au titulaire ou à l'opposant qui use des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14, paragraphes 2 et 4...".
6. Il résulte des dispositions du paragraphe 4 de l'article 14 CBE qu'aucun délai particulier n'a été créé pour le dépôt des documents en cause dans la langue "autorisée" non officielle. Ces documents doivent donc être déposés dans les mêmes délais que ceux prévus pour le dépôt des documents rédigés dans une langue officielle de l'OEB lorsqu'il n'est pas fait usage des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(4) CBE.
7. La possible interprétation envisagée par la chambre de recours 3.4.1 au point 4 des motifs de sa décision de saisine, selon laquelle le demandeur, titulaire ou opposant ne ferait pas usage des dispositions du paragraphe 4 de l'article 14 CBE dans le cas où il déposerait la traduction de la pièce originale en même temps que ladite pièce, serait justifiée, selon la chambre de recours, par le fait que l'objet essentiel de l'article 14(4) CBE et de la règle 6(2) CBE serait de donner à la personne concernée la faculté de déposer la pièce en cause dans une langue "autorisée" non officielle avant l'expiration du délai déterminé. Dans le cas où cette personne fournit la traduction simultanément, elle n'a manifestement pas eu besoin du délai prévu à l'article 14(4) CBE dont la durée est fixée à la règle 6(2) CBE et ne devrait donc pas être considérée comme ayant fait usage des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(4) au sens de la règle 6(3) CBE.
8. La Grande Chambre de recours ne saurait retenir cette interprétation qui est contraire tant au texte qu'à l'esprit des dispositions pertinentes de la Convention.
9. Comme rappelé au point 4 ci-dessus, le délai prévu pour le dépôt de la traduction commence à courir, selon les paragraphes 1 et 2 de la règle 6 CBE, à compter du dépôt de la demande de brevet ou de la pièce originale, ce qui couvre sans aucune ambiguïté le dépôt simultané de la traduction. Certes, la règle 83(2) CBE qui détermine le mode de calcul des délais indique que "le délai part du jour suivant celui où a eu lieu l'événement par référence auquel son point de départ est fixé". Cependant, il est évident que cette disposition ne concerne que le calcul de la durée du délai mais non son point de départ qui est l'événement en cause.
Cette interprétation correspond d'ailleurs à celle de la jurisprudence des chambres de recours en ce qui concerne le dépôt simultané d'une demande de brevet dans une langue "autorisée" non officielle et de sa traduction dans une langue officielle de l'OEB (voir la décision J 4/88, JO OEB 1989, 483 citée dans la décision de saisine) et à la pratique de l'OEB, officialisée en ce qui concerne la requête en examen par les formulaires de requête en délivrance et d'entrée dans la phase nationale établis par l'OEB auxquels la requérante s'est référée dans son mémoire.
10. Il n'apparaît, au surplus, pas possible de soutenir, comme l'a envisagé la chambre de recours 3.4.1, que l'OEB puisse, en cas de dépôt de la traduction en même temps que le document original, considérer que la traduction est "l'acte officiel" et, au motif qu'il est superflu et sans objet, ne pas tenir compte du document original. En effet, une traduction ne peut se transformer en original et reste une traduction quelle que soit la date à laquelle elle est déposée avec les conséquences juridiques qui en découlent, notamment la possibilité de la corriger pour la rendre conforme au texte original. Une telle possibilité est prévue expressément à l'article 14(2) CBE pour les pièces de la demande de brevet et résulte, pour les pièces déposées ultérieurement de l'application des dispositions de la règle 88 CBE.
11. Il y a lieu enfin de noter que les dispositions de l'article 14(2) et (4) et de la règle 6(1) et (2) CBE ont été prévues, comme il résulte clairement des travaux préparatoires de la Convention cités par le Président de l'OEB et mentionnés au point XIV ci-dessus, pour compenser, au moins en partie, les inconvénients qui résultent pour les ressortissants des Etats contractants dont les langues officielles ne sont pas celles de l'OEB d'avoir à effectuer une traduction de leur langue dans une langue officielle de l'OEB. L'article 14 et la règle 6 de la CBE ont ainsi essentiellement pour objet de permettre à ces personnes de bénéficier de la totalité des délais de la CBE pour le dépôt des demandes de brevet et des pièces ultérieures et de disposer d'un délai minimal d'un mois pour en effectuer la traduction. Elles ont, en outre, la garantie de pouvoir corriger ultérieurement les erreurs de traduction.
12. Encore faut-il que la traduction soit déposée en tant que telle et qu'elle ne puisse en aucun cas être confondue avec le document original ou lui être substitué.
De ce fait, la Grande Chambre de recours considère qu'une traduction ne pouvant être reconnue comme telle que si le texte original est disponible au moment où elle est reçue, les traductions parvenues à l'OEB antérieurement au dépôt de l'original ne sauraient être reconnues comme valablement déposées au sens de l'article 14(2) et (4) et de la règle 6(1) et (2) CBE. Il appartient à la personne qui veut bénéficier des dispositions de cet article ou de cette règle de déposer la "traduction" au plus tôt simultanément au dépôt de l'original. Dans le cas contraire, le document présenté en premier lieu doit être réputé comme étant l'original, avec les conséquences juridiques qui en découlent, notamment en ce qui concerne le montant des taxes qui doivent être payées.
La Grande Chambre ne peut donc faire sienne l'opinion exprimée par le Président de l'OEB selon laquelle les personnes visées à l'article 14(2) pourraient bénéficier de la réduction du montant des taxes prévue à la règle 6(3) CBE même si la traduction est déposée avant le document original. Elle considère au contraire que les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets (partie A, chapitre XI, 9.2.1 § 3) ont fait une interprétation correcte des dispositions de l'article 14 et de la règle 6 CBE en indiquant que : "...si la demande de brevet européen ou une pièce devant être produite dans un délai déterminé est produite en premier lieu dans la langue de la procédure et seulement ensuite dans la langue non officielle autorisée, le demandeur n'est pas réputé avoir utilisé cette langue au sens de l'article 14, et il n'est pas accordé de réduction... de la taxe en question".
13. Les procédures de dépôt, d'examen, d'opposition et de recours nécessitent, cependant, la production de nombreuses pièces à des moments divers et il est donc nécessaire de définir quelles sont les pièces pour lesquelles l'usage des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(2) et (4) ouvre le droit à la réduction de taxe prévue à la règle 6(3) CBE.
14. Une interprétation littérale des dispositions de la règle 6(3) CBE pourrait conduire à exiger que toutes les pièces produites au cours de la procédure correspondante soient déposées dans une langue "autorisée" non officielle et traduites pour que la personne concernée puisse bénéficier de la réduction des taxes. Ce ne serait donc qu'à la fin de la procédure en cause que le montant de la réduction pourrait être remboursé au bénéficiaire.
15. La Grande Chambre de recours juge qu'une telle interprétation littérale doit être écartée car elle est contraire à l'esprit de la règle 6(3) et conduit à des résultats inacceptables.
16. Sur le plan formel, il y a tout d'abord lieu de noter que la règle 6(3) prévoit une réduction du montant des taxes (Ermäßigung, reduction of fees) et non un remboursement des taxes comme prévu, par exemple, aux articles 10, 10bis et 10ter du Règlement relatif aux taxes. Dans ce dernier cas, la taxe initiale doit être versée dans son intégralité et est ensuite remboursée en totalité ou en partie si les conditions prévues sont remplies. Par contre, la réduction de taxe prévue à la règle 6(3) est directement liée à l'acte à accomplir (dépôt d'une demande de brevet, d'une requête en examen, d'un acte d'opposition ou d'un recours). Il s'agit ainsi d'un droit qui naît avec l'acte à accomplir. Le bénéficiaire est donc en droit de ne payer que la taxe réduite de sorte que les événements postérieurs à l'exécution de cet acte ne sauraient avoir d'influence sur la validité du règlement.
17. Sur la question de savoir ce qui constitue l'acte ouvrant le droit à la réduction du montant des taxes, il serait contraire à l'objectif d'équité de la règle 6(3) CBE de l'interpréter d'une façon restrictive, comme la doctrine l'a souligné.
18. Dans cet esprit, la jurisprudence citée par la chambre de recours a estimé que, pour que le demandeur, titulaire ou opposant puisse bénéficier des dispositions de la règle 6(3), il était suffisant que les éléments essentiels des pièces de la demande de brevet (voir les décisions J 7/80 et J 4/88, déjà citées) ou de l'acte d'opposition (voir la décision T 290/90, déjà citée) soient déposés dans une langue "autorisée" non officielle.
19. La pratique de l'Office, notamment en ce qui concerne la requête en examen, admet également que le droit à la réduction de la taxe d'examen est acquis dès que la requête est formulée dans une langue "autorisée" non officielle, les pièces produites ultérieurement pouvant être déposées uniquement dans une langue officielle de l'OEB sans qu'il en résulte une perte du bénéfice de la réduction du montant de la taxe.
20. La jurisprudence et la pratique ci-dessus rappelées considèrent donc qu'il suffit, pour que le bénéfice de la réduction du montant des taxes soit acquis, que l'élément essentiel du premier acte de la procédure en cause soit produit dans une langue "autorisée" non officielle.
21. La Grande Chambre de recours considère comme correcte cette interprétation des dispositions de la règle 6(3) CBE. En effet, le fondement du droit à la réduction de taxe selon cette règle est l'exécution d'un acte spécifique, à savoir le dépôt d'une demande de brevet, d'une requête en examen, d'un acte d'opposition ou d'un recours. Il n'existe, par contre, aucun texte de la CBE prévoyant ou autorisant le remboursement partiel des taxes si un document est produit ultérieurement dans une langue "autorisée" non officielle et traduit. La Grande Chambre de recours observe donc que tant la décision J 4/88 (JO OEB 1989, 483) qui a considéré qu'il suffisait que le demandeur ait usé des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(2) CBE pour le dépôt de sa demande de brevet pour qu'il bénéficie de la réduction de la taxe d'examen même si sa requête en examen n'était pas présentée dans une langue "autorisée" non officielle, que les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets (partie A, chapitre XI, 9.2.3.1 et 9.2.5.1) qui prévoient que la réduction de la taxe de dépôt entraîne automatiquement une réduction de la taxe d'examen et de la taxe de recours ont fait une interprétation erronée des dispositions de la règle 6(3) CBE. La Grande Chambre considère, au contraire, que la réduction de taxe ne doit être accordée que lorsque le demandeur ou le requérant a usé des facultés ouvertes par les dispositions de l'article 14(2) et (4) pour l'acte correspondant, à savoir, la requête en examen ou le recours. Ceci est confirmé par le fait que, par exemple, la propriété de la demande de brevet peut avoir, entre temps, été transférée à une autre personne qui ne remplit pas nécessairement les conditions prévues au paragraphe 2 de l'article 14 CBE. Bien que cette situation n'ait pas été envisagée par les Directives, il est évident que les mêmes considérations s'appliquent par analogie au cas du titulaire de brevet ou de l'opposant qui forme un recours contre la décision de la division d'opposition.
22. Par conséquent, la Grande Chambre de recours retient que le droit à la réduction du montant des taxes prévue à la règle 6(3) CBE est acquis aux personnes visées à l'article 14(2) CBE qui déposent une pièce constituant l'élément essentiel du premier acte de la procédure de dépôt, d'examen, d'opposition ou de recours dans une langue officielle de l'Etat en question autre que l'allemand, l'anglais ou le français et en fournissent la traduction requise au plus tôt simultanément.
Question 3
23. L'application des principes énoncés ci-dessus à la procédure de recours conduit aux conclusions suivantes.
24. L'article 108 CBE a prévu deux délais distincts, l'un pour le dépôt de l'acte de recours, l'autre pour le dépôt du mémoire exposant les motifs du recours. De ce fait, il apparaît suffisant pour que le bénéfice de la réduction de la taxe de recours puisse être accordé que l'acte de recours soit déposé dans une langue "autorisée" non officielle, le mémoire de recours déposé ultérieurement constituant un acte de procédure distinct qui peut donc être produit uniquement dans une langue officielle de l'OEB sans perte du droit à la réduction qui est acquis dès le dépôt de l'acte de recours, lequel n'est d'ailleurs considéré comme formé qu'après le paiement de la taxe de recours.
25. La Grande Chambre de recours a examiné avec attention les observations du Président de l'OEB qui, sur ce point, aboutissent à une conclusion opposée. Le Président a fondé son opinion, d'une part, sur la décision T 290/90 déjà citée, suivant laquelle le mémoire d'opposition, élément essentiel des pièces d'opposition dont la traduction entraîne des frais élevés, doit être produit dans la langue "autorisée" non officielle pour que l'opposant bénéficie de la réduction du montant de la taxe d'opposition. Il a, d'autre part, considéré que le mémoire de recours correspondait, en substance, au mémoire d'opposition et constituait l'élément essentiel du recours justifiant la réduction du montant de la taxe du fait de la traduction nécessaire. Le Président a, en conséquence, émis l'opinion que le bénéfice des dispositions de la règle 6(3) CBE ne devrait être accordé que lorsque le mémoire de recours est produit dans une langue "autorisée" non officielle et traduit.
La différence entre les délais pour la formation du recours et pour le dépôt du mémoire de recours, due à la nécessité d'accorder au requérant le temps nécessaire pour la préparation de son argumentation ne constituerait pas, de l'avis du Président de l'OEB, une raison suffisante pour traiter différemment les conditions pour l'obtention d'une réduction de taxe en opposition et en recours. Certes, en matière d'examen, la pratique de l'Office était de n'exiger que la production de la requête formelle dans la langue "autorisée" non officielle, mais il s'agissait dans ce cas d'un acte formel qui se suffisait à lui-même à l'inverse du recours qui n'était complet qu'après le dépôt du mémoire de recours.
26. La Grande Chambre de recours ne peut se rallier à cette interprétation. Sur le plan formel, elle observe que l'acte de recours, de même que la requête en examen, est un acte de procédure autonome qui a des conséquences juridiques propres, à savoir, la contribution avec le paiement de la taxe de recours à la formation du recours et à la saisine de la chambre de recours compétente. Ces conséquences sont distinctes de celles de la production du mémoire de recours qui constitue l'une des conditions de recevabilité du recours. Etant donné que la règle 6(3) lie sans aucune ambiguïté la réduction de taxe à l'acte spécifiquement mentionné, à savoir, dans le présent cas, l'acte qui contribue à la formation du recours, c'est cette interprétation qui doit prévaloir compte tenu également de la finalité du système.
27. On ne saurait, non plus, retenir le motif de fond invoqué suivant lequel le mémoire de recours serait la seule pièce dont la traduction justifierait l'accord d'une réduction du montant de la taxe parce que, comme indiqué plus haut, quelle que soit la langue dans laquelle un tel mémoire est déposé, le fait d'avoir à produire cette pièce ou sa traduction dans l'une des langues officielles de l'OEB entraîne pour les personnes concernées des frais de traduction, d'adaptation ou de rédaction dans une langue autre que la leur que l'intention des auteurs de la Convention était de compenser, au moins en partie.
28. Dans ces conditions, la Grande Chambre de recours juge qu'il y a lieu d'interpréter les dispositions de la règle 6(3) CBE de la même manière pour le recours que pour le dépôt de la requête en examen et de retenir, en conséquence, qu'il suffit du dépôt de l'acte de recours dans une langue "autorisée" non officielle pour que le bénéfice de la réduction de taxe prévue à la règle 6(3) CBE soit acquis.
Question 4
29. Compte-tenu de la réponse qui doit ainsi être apportée à la troisième question posée par la chambre de recours 3.4.1, il n'apparaît pas nécessaire de répondre à la quatrième question qui n'a été posée qu'à titre subsidiaire.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est décidé comme suit :
Les questions de droit posées à la Grande Chambre de recours doivent recevoir les réponses ci-après :
Questions 1 et 2
Le droit à la réduction du montant des taxes prévues à la règle 6(3) CBE est acquis aux personnes visées à l'article 14(2) CBE qui déposent la pièce essentielle du premier acte de la procédure de dépôt, d'examen, d'opposition ou de recours dans une langue officielle de l'Etat en question autre que l'allemand, l'anglais ou le français et en fournissent la traduction requise au plus tôt simultanément.
Question 3
La pièce essentielle du premier acte de la procédure de recours étant l'acte de recours, il suffit que cette pièce soit déposée dans une langue officielle d'un Etat contractant qui n'est pas l'une des langues officielles de l'OEB et traduite dans l'une de ces dernières pour que le bénéfice de la réduction du montant de la taxe de recours soit acquis même si les pièces ultérieures, telles que le mémoire exposant les motifs du recours, sont déposées uniquement dans une langue officielle de l'Office européen des brevets.