T 0389/86 (Délai de recours) 31-03-1987
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Activité inventive/deux problèmes partiels et leur solutions resp.
Absence d'effet combiné
Recevabilité d'un recours formé avant que ne commence à courir le délai de deux mois visé à l'article 108, prmière phrase CBE
I. La demande de brevet européen n° 83 111 212.3, déposée le 10 novembre 1983 et publiée le 11 juillet 1984 sous le numéro 0 113 003, a été rejetée le 10 décembre 1985 par décision de la division d'examen ; le rejet de la demande avait déjà été prononcé devant la demanderesse au cours de la procédure orale qui s'est tenue le 16 octobre 1985. Le procès-verbal de cette procédure a été remis à la demanderesse par notification en date du 24 octobre 1985.
La décision a été rendue sur la base des revendications 1 à 13 telles que déposées par lettre du 25 avril 1985, ainsi que des modifications linguistiques de la revendication 1 apportées lors de la procédure orale devant la division d'examen.
II. Dans sa décision, la division d'examen a conclu que, bien que nouveau, l'objet de la revendication 1 n'implique pas d'activité inventive par rapport à l'état de la technique constitué par le document DE-A-2 125 671, par la revue "Plastics Engineering" aux pages 33 à 35 du n° de juillet 1976 ainsi que par le document GB-A-1 445 598.
Le procédé selon la revendication 12 découle lui aussi à l'évidence de l'article publié dans la revue "Plastics Engineering", et la revendication 12 n'est par conséquent pas admissible.
III. La requérante a formé un recours contre cette décision le 28 novembre 1985 et déposé le même jour un mémoire exposant les motifs du recours. La taxe correspondante a également été acquittée le 28 novembre 1985. Dans son mémoire, la requérante déclare que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale de son acte de recours ne découle pas à l'évidence de l'état de la technique.
A titre subsidiaire, elle a soumis une revendication 1 délimitée par rapport à une demande de brevet européen antérieure.
IV. Dans une notification jointe à la citation à la procédure orale, le rapporteur a signalé que la Chambre considérait provisoirement que ni l'objet de la revendication 1 selon la requête principale, ni l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire n'impliquaient d'activité inventive.
V. Par communication du 13 mars 1987, la requérante a présenté des observations en réponse à la notification de la Chambre et déposé de nouvelles revendications de brevet et de nouveaux passages de la description.
VI. Au cours de la procédure orale du 31 mars 1987, la requérante a demandé la délivrance du brevet sur la base des pièces déposées pendant la procédure orale, c'est-à-dire des revendications 1 à 10, des pages 1 à 12 de la description et des figures 1 à 9. Elle a abandonné les revendications de procédé 12 et 13 antérieurement déposées.
VII. La nouvelle version de la revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Echangeur de chaleur (1), se composant d'un bloc d'échangeur de chaleur (4) comportant un grand nombre de tubes (2) et d'ailettes (3) disposées perpendiculairement à ceux-ci, et d'au moins un collecteur d'eau (6) et d'un fond à tubes (5) se composant de matière plastique, le collecteur d'eau (6) étant fixé de façon étanche aux liquides sur le fond (5) et ce fond (5) comportant d'un côté des surépaisseurs de forme conique (9), dans lesquelles sont ménagées les ouvertures (7) destinées à recevoir les extrémités (8) des tubes, et le fond (5) comportant dans sa zone marginale une surface plane continue et le bord (12) du collecteur d'eau, relié à cette surface, étant également plan et continu, caractérisé en ce que les extrémités (8) des tubes sont fixées dans le fond (5) par expansion de leur zone située à l'intérieur du fond (5) dans une direction radiale ou bien par compression dans une direction axiale, en ce que le fond (5) est relié au collecteur d'eau (6) par soudage par vibrations sur les surfaces planes (13, 14), en ce qu'il est prévu le long d'une ou plusieurs desdites surfaces (13, 14) au moins des rainures (15, 16) servant d'un côté d'accumulateur de déchets de soudure et en ce que le fond (5) comporte sur ses côtés longs un épaulement (17) qui, pendant le soudage par vibrations, sert au guidage du collecteur d'eau (6) le long du fond (5)." (Ndt : Texte de la traduction de la revendication 1 fournie par la demanderesse).
1. La Chambre doit tout d'abord se prononcer sur le point de savoir s'il y a lieu de considérer comme recevable un recours formé contre une décision de la division d'examen avant même que n'ait été notifié le texte de la décision, avec exposé par écrit des motifs.
1.1. Il y a lieu de répondre par l'affirmative à cette question, étant donné qu'il n'est pas nécessaire que la décision attaquée soit motivée pour qu'un recours puise être formé ; un recours peut donc être formé dès qu'il existe une décision, ce qui est le cas en l'occurrence, puisque la décision du 10 octobre 1985 a été prononcée lors de la procédure orale.
1.2. Un recours qui a été formé avant que ne commence à courir le délai de deux mois prévu à l'article 108 CBE, première phrase, respecte ce délai. De l'avis de la Chambre, l'article 108 CBE n'interdit nullement la formation d'un recours avant même la signification de la décision attaquée, mais prévoit seulement que le recours ne doit pas être formé au delà du délai de deux mois prévu pour la signification de cette décision.
1.3. Le recours répond par conséquent aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Le texte actuel de la revendication 1 est pour l'essentiel une récapitulation des caractéristiques mentionnées dans les revendications initiales 1, 5 et 6, complétées par une caractéristique supplémentaire, à savoir qu'il y a expansion de la zone des extrémités des tubes située à l'intérieur du fond à tubes. Cette dernière caractéristique découle implicitement des indications données à la page 3, lignes 9 à 11, et au dernier paragraphe de la page 8 de la description. L'objet de la revendication 1 ne s'étend donc pas au-delà du contenu de la divulgation initiale.
3. L'objet de la revendication 1 est nouveau par rapport à l'état de la technique tel qu'il était connu, du simple fait qu'aucun des documents cités au cours de la procédure ne divulgue d'échangeur de chaleur dont le fonds à tubes et le collecteur d'eau soient reliés par soudage par vibrations. Aucun de ces documents ne divulgue non plus les caractéristiques selon lesquelles les extrémités des tubes sont reliées à un fond à tubes en matière plastique par expansion de la zone située à l'intérieur de celui-ci ou par compression dans une direction axiale. Enfin, on ne peut trouver dans l'état de la technique d'information sur la présence sur les côtés longs du fond d'un épaulement servant au guidage du collecteur d'eau. Etant donné que la nouveauté n'a pas non plus été contestée par la division d'examen, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant la question de la nouveauté.
4. La question qui se pose dès lors est celle de savoir si l'objet de la revendication 1 implique également une activité inventive. A cet égard, il y a lieu tout d'abord de faire les constatations suivantes :
4.1. Partant d'un échangeur de chaleur correspondant à celui visé dans le préambule de la revendication 1, tel qu'il ressort de la figure 10 ainsi que de la page 3, lignes 111 à 126 du document DE-C-956 820 (le document DE-A-2 125 671 étant plus éloigné, puisque le fond à tubes ne présente pas d'ouvertures préformées ni de surépaisseurs de forme conique et que le bord du collecteur d'eau qui lui est relié n'est pas plan au début, mais comporte au moins une ailette en saillie), il convient de considérer que le problème résolu par la revendication 1 demeure celui de la liaison à établir entre le collecteur d'eau et le fond à tubes, d'une part, et entre le fond à tubes et les tubes d'autre part, cette liaison devant être conçue de la manière la plus simple possible, être parfaitement étanche et présenter toute la résistance voulue aux sollicitations mécaniques.
4.2. Ce problème se décompose donc en deux sous-problèmes, concernant l'un la liaison entre le collecteur d'eau et le fond à tubes, et l'autre la liaison entre les tubes et le fond à tubes. La partie caractérisante de la revendication 1 comprend par conséquent elle aussi deux groupes de caractéristiques dont chacun se rapporte à la résolution de l'un ou de l'autre des sous-problèmes. Comme l'a fait observer à juste titre la division d'examen dans sa décision, les caractéristiques de ces deux groupes n'influent pas les unes sur les autres de manière à produire un effet technique dépassant la somme des effets produits par chaque groupe, elles sont simplement juxtaposées. La requérante a certes raison lorsqu'elle affirme à cet égard que les deux sous-problèmes susmentionnés ont une base commune, dans la mesure où ils découlent de la décision de la demanderesse d'utiliser un fond à tubes en matière plastique, mais il n'en demeure pas moins qu'il n'y a pas d'interaction fonctionnelle entre les deux groupes de caractéristiques revendiquées pour la résolution des deux sous-problèmes précités.
4.3. Dans ces conditions, il n'est pas possible de faire valoir un effet combinatoire pour prouver l'existence d'une activité inventive. Il convient bien plutôt d'examiner si chacun de ces deux groupes de caractéristiques découle à l'évidence de l'état de la technique. Pour prouver que l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive, il suffit de montrer que l'un de ces groupes implique quelque activité inventive.
4.4. Les deux méthodes pouvant être utilisées pour relier les tubes au fond à tubes, à savoir l'expansion radiale des extrémités des tubes à l'intérieur du fond à tubes d'une part et la compression axiale d'autre part, ne peuvent être considérées comme appartenant à l'état de la technique relatif aux fonds à tubes en matière plastique. De plus, dans aucun document appartenant à l'état de la technique, il n'est divulgué de telles techniques pour relier un élément en forme de tube ou de barre à un élément en plastique plat et relativement mince.
4.5. Comme le montre la figure 10 du document DE-C-956 820, le procédé d'expansion radiale des extrémités des tubes en vue de les fixer à un fond en matière plastique est un procédé connu, mais cette expansion ne se situe pas à l'intérieur de l'épaisseur du fond à tubes, mais à une extrémité libre du tube dépassant du fond. Elle sert en premier lieu à assurer la mise en place correcte d'un cordon de soudure en forme d'anneau. Sur la face du fond à tubes tournée vers le bloc d'échangeur de chaleur se trouve également une telle soudure. Les renflements des tubes logés à l'intérieur du fond à tubes, tels qu'il sont représentés à la figure 11 de cette antériorité, ne sont pas des moyens de fixation par expansion radiale, mais servent à loger une extrémité de tube déjà préformée à cet effet. La fixation des tubes qui a été revendiquée ne ressort donc pas à l'évidence des deux modèles de réalisation sumentionnés.
4.6. Par ailleurs, le document GB-A-1 445 598 enseigne déjà comment fixer les tubes d'un échangeur de chaleur à un fond à tubes en métal par expansion des extrémités des tubes, ledit fond à tubes étant muni sur un côté d'un rebord en forme de collet, ceci afin de créer une liaison étanche qui rende inutile le cas échéant le placement d'un joint supplémentaire. Pour l'homme du métier, l'application directe de cet enseignement technique à un fond à tubes en plastique est exclue, la résistance de ce matériau étant considérablement plus faible. Vu les problèmes spécifiques que pose l'utilisation de ce matériau, la Chambre doute que ce document puisse donner à l'homme du métier l'idée de fixer les tubes dans un fond en plastique par expansion radiale, et même si c'était le cas, il n'est pas certain que ce même homme du métier penserait à réaliser cette expansion exclusivement à l'intérieur du fond à tubes, à des endroits comportant des surépaisseurs coniques, et non également à l'extérieur de l'épaisseur du fond par exemple - solution proposée dans la figure 10 du document DE-C-956 820, en renonçant à d'autres mesures de sécurité (cordons de soudure).
4.7. En ce qui concerne la deuxième solution proposée dans la revendication 1 pour la fixation des tubes dans le fond à tubes, à savoir la compression axiale, il y a lieu d'observer que si cette technique a été divulguée dans son principe par les deux documents FR-A-2 371 662 et FR-A-1 089 816, le contexte était toutefois différent. Dans ces documents, il est proposé en effet d'enfoncer les tubes dans les ouvertures du fond après avoir inséré dans ces ouvertures une douille d'étanchéité souple présentant un bourrelet interne d'enclenchement (FR-A-2 371 662), ou encore de les fixer dans le fond lui-même, fait d'un matériau élastique souple analogue au caoutchouc assurant par compression axiale une étanchéité suffisante et un encastrement solide des tubes (FR-A-1 089 816). La Chambre estime comme la requérante que la solution dans laquelle les tubes sont insérés directement, c'est-à-dire sans joint intermédiaire, par compression axiale dans un fond en plastique, c'est-à-dire dans un matériau relativement peu élastique, afin d'assurer un ancrage suffisamment étanche et solide des tubes, ne ressort pas à l'évidence de cet état de la technique.
4.8. Les caractéristiques du deuxième groupe de caractéristiques figurant dans la partie caractérisante de la revendication 1 consistent en ce que le fond à tubes est relié au collecteur d'eau par soudage par vibrations, qu'au moins l'une des surfaces de contact présente une rainure servant d'accumulateur de déchets de soudure et que le fond comporte sur ses côtés longs un épaulement servant au guidage du collecteur d'eau pendant l'opération de soudage.
4.9. Compte tenu de l'enseignement technique contenu dans l'article de la revue "Plastics Engineering" de juillet 1976, pages 33 à 35, dans lequel il était indiqué que le soudage par vibrations se prête avantageusement à l'assemblage étanche d'éléments en plastique de grandes dimensions (voir page 33, colonne de gauche, dernier paragraphe et page 35, dernier paragraphe), et où il était conseillé de prévoir une ou plusieurs rainures destinées à recueillir les déchets de soudure le long des surfaces à souder (voir page 34, colonne de droite, avant- dernier paragraphe et figure 5), il était évident pour l'homme du métier spécialiste du soudage que dans la présente invention ces mesures devaient elles aussi être considérées comme appropriées ; par conséquent, il ne peut être considéré que les deux premières caractéristiques qui viennent d'être mentionnées impliquent une activité inventive.
4.10. En revanche, les antériorités citées au cours de la procédure ne sauraient suggérer la troisième caractéristique, à savoir le placement d'un épaulement de guidage sur les côtés longs du fond à tubes. Comme la requérante l'a exposé de manière convaincante pendant la procédure orale devant la Chambre de recours, c'est là une mesure particulièrement importante pour la résolution du problème posé lorsque l'on veut construire des échangeurs de chaleur de de grande longueur. Dans ce cas, les côtés longs du collecteur d'eau ont tendance à "s'effondrer latéralement" en raison de phénomènes de resserrement, c'est-à- dire qu'ils se bombent, ce qui fait que les côtés longs libres de la partie centrale se rapprochent, tandis qu'aux extrémités, leur écartement est maintenu par les parois latérales du collecteur d'eau, ce qui dans la pratique, du fait du trop faible recouvrement mutuel des surfaces à souder, peut nuire à la résistance et à l'étanchéité des soudures, et donc entraîner des déchets. La caractéristique revendiquée permet de remédier de manière simple à cet inconvénient sans qu'une modification de l'outil ne soit nécessaire.
4.11. Etant donné que les problèmes susmentionnés n'ont pas été abordés dans les documents correspondant à l'état de la technique, dont aucun ne mentionne un fond à tubes comportant un épaulement servant au guidage, cette caractéristique ne ressort pas à l'évidence des antériorités. La Chambre considère par ailleurs qu'elle ne fait pas partie non plus des connaissances générales de l'homme du métier. Si l'homme du métier sait que lorsque l'on effectue un soudage par vibrations, il est nécessaire de guider d'une manière ou d'une autre les pièces qui doivent se mouvoir les unes par rapport aux autres, il n'en est pas pour autant amené directement à la solution spécifique revendiquée. Toutes sortes d'autres solutions se présenteraient, il pourrait avant tout agir sur l'outil, par exemple prévoir des saillies de guidage sur le couvercle du collecteur d'eau concourant avec les rainures extérieures collectrices de déchets de soudure de ce collecteur, ou placer des entretoises entre les côtés longs du collecteur d'eau pour en maintenir l'écartement.
4.12. Tout ceci montre que dans ces deux groupes de caractéristiques, il existe certaines sous-caractéristiques qui ne ressortent pas à l'évidence de l'état de la technique accessible. L'objet de la revendication 1 implique donc également une activité inventive au sens des articles 52 (1) et 56 CBE.
5. L'objet de la revendication 1 est par conséquent admissible.
6. Les revendications 2 à 10 concernent d'autres modes de réalisation de l'objet de la revendication 1 dont elles dépendent (règle 29 (3) CBE). Elles sont donc elles aussi admissibles.
7. Le texte actuel de la description, qui répond aux exigences énoncées à la règle 27 (1) c et d CBE, n'appelle pas d'objections lui non plus.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la première instance, à charge pour elle de délivrer un brevet européen sur la base des pièces suivantes :
revendications 1 à 10, description, pages 1 à 12, et figures 1 à 9, telles que produites lors de la procédure orale du 31 mars 1987.