J 0006/79 (Restitutio in integrum/Demande Euro-PCT) 13-06-1980
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1. La restitutio in integrum n'est pas exclue en ce qui concerne le délai prescrit pour présenter la requête en examen dans le cas d'une demande internationale transmise à l'Office européen des brevets.
2. Une information erronée donné par l'Office européen des brevets au déposant peut être considérée, le cas échéant comme vice substantiel de procédure justifiant le remboursement de la taxe de recours.
Demandes internationales
Non respect du délai pour présenter la requête en examen
Restitutio in integrum
Remboursement de la taxe de recours
I. Le 2 juin 1978 la requérante a déposé en France la demande internationale PCT-FR n° 78/00001 indiquant, entre autres, la France (brevet européen) comme Etat désigné et revendiquant la priorité de sa demande de brevet national déposée en France le 8 juin 1977.
II. Le Bureau international de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle a publié ladite demande internationale, avec en annexe le rapport de recherche internationale, le 21 décembre 1978.
III. La demande internationale a été reçue par l'Office européen des brevets le 16 juin 1978. Sur requête explicite de la requérante, envoyée par télex le 10 janvier 1979, l'Office européen des brevets lui a adressé une communication en date du 16 février 1979 l'informant, dans tous les détails, sur la procédure qui devait être suivie près de l'Office européen des brevets. Entre autres, l'Office précisait que "le délai imparti pour présenter la requête en examen et acquitter la taxe d'examen ne commençait cependant en aucun cas à courir avant que 20 mois ne se soient écoulés à compter de la date de "priorité". Cette information, qui était erronée puisqu'il ressort clairement de l'article 150, paragraphe 2 de la CBE que le délai de 20 mois ne constitue pas le commencement du délai pour la présentation de la requête en examen, a aussi été reproduite dans le texte français de l' "Avis aux déposants PCT", Journal officiel OEB, n° 3/1979, pages 110 à 112, paragraphe 5.
IV. Le 3 août 1979, la section de dépôt de l'Office européen des brevets avait adressé une communication à la requérante pour lui faire savoir que ladite demande était "réputée retirée", étant donné que la requête en examen n'était pas parvenue avant l'expiration du délai de six mois à compter de la date de la publication du rapport de recherche internationale (article 94, paragraphes 2 et 3, et article 157, paragraphe 1 de la CBE).
V. La requérante, en date du 6 août 1979, protestait contre les conclusions de l'Office, exposant aussi qu'elle disposait, pour présenter la requête en examen, d'un délai expirant le 21 septembre 1979, et demandait expressément une décision sur cette question. Par lettre du 7 août 1979 elle a présenté la requête en examen et a payé la taxe d'examen le 17 octobre 1979.
VI. Par décision du 30 août 1979 la section de dépôt a statué que la demande de brevet européen devait être réputée retirée car la requête en examen n'avait pas été présentée avant la date limite du 21 juin 1979. En effet, elle pouvait être formulée jusqu'à l'expiration du délai de six mois à compter de la date de la publication du rapport de recherche internationale (articles 150, paragraphe 2, et 157, paragraphe 1 de la CBE).
VII. Le 19 septembre 1979 la requérante a formé un recours motivé contre cette décision et a dûment acquitté la taxe de recours.
VIII. Par lettre du 18 janvier 1980, la requérante a été informée par la chambre de recours juridique que la communication du 16 février 1979 et la version française de l'avis aux déposants PCT, mentionnées ci-dessus, ne correspondaient pas aux textes en allemand et en anglais du même avis et ne reproduisaient pas les dispositions de l'article 150, paragraphe 2 de la Convention et que, pour cette raison, un corrigendum avait été publié dans le Journal officiel OEB n° 10/1979, page 443. La requérante a été aussi informée que - malgré que l'Office, par sa lettre du 3 août 1979, l'eût informée que la "restitutio in integrum" pour le délai en cause, était exclue, et que la même information ait été publiée dans le Journal officiel OEB n° 11-12/1979 page 483 - la question du rétablissement des droits n'aurait pas encore fait l'objet d'une décision de la chambre de recours juridique et que cette question ne pouvait être prise en considération que sur requête spéciale, fondée sur l'article 122, paragraphe 2, de la CBE.
IX. Par sa lettre du 13 février 1980, la requérante a demandé à être rétablie dans ses droits conformément à l'article 122 de la CBE. La taxe de "restitutio in integrum" a été payée le 22 février 1980.
1. Le recours étant conforme aux articles 106 à 108 et aux règles 1, paragraphe 1 et 64 de la CBE, est recevable.
2. Il est exact que la requête en examen n'a pas été présentée dans le délai prescrit par l'article 150, paragraphe 2 de la CBE. Par conséquent, la section de dépôt a constaté à juste titre que la demande de brevet, en application de l'article 94, paragraphe 3 de la CBE était réputée retirée.
3. Mais, vu que la requérante a présenté une requête en restitutio in integrum et que, conformément à l'article 111, paragraphe 1 de la CBE, la chambre de recours juridique peut exercer les compétences de l'instance qui a pris la décision attaquée, il convient d'examiner si la requérante peut être rétablie dans ses droits. A ce sujet, l'article 122 de la CBE prévoit comme principe général que le demandeur ou le titulaire d'un brevet européen peut obtenir la restitutio in integrum s'il n'a pas été en mesure d'observer un délai à l'égard de l'Office européen des brevets "bien qu'ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances".
Dans ce cas particulier, il faut reconnaître que la requérante a expressément demandé à l'Office d'être informée à l'égard de la procédure à suivre, une procédure nouvelle, qui à cause de l'application de deux conventions internationales récentes n'est pas simple. La requérante a fait preuve d'une grande attention et de la vigilance nécessaire pour respecter la procédure. Les conditions prévues par l'article 122, paragraphe 1, ainsi que les formalités prescrites par le paragraphe 2 du même article de la CBE sont donc remplies.
4. Il convient maintenant d'examiner si la restitutio in integrum n'est pas exclue par l'article 122, paragraphe 5 de la CBE. Cette disposition prévoit expressément que le rétablissement dans les droits est exclu si on n'a pas respecté, entre autres, le délai prévu à l'article 94, paragraphe 2 de la CBE pour formuler la requête en examen.
En effet, en ce qui concerne les demandes internationales transmises à l'Office européen des brevets, l'article 150, paragraphe 2, quatrième phrase, de la CBE mentionne le délai de l'article 94, paragraphe 2 de la CBE; mais c'est en réalité un délai spécial qui a été fixé par l'article 150 de la CBE pour la présentation de la requête en examen. Ce délai résulte de la combinaison de l'article 22 du PCT avec les articles 94, paragraphe 2, et 157, paragraphe 1, de la CBE et ne peut être identifié avec le délai de l'article 94, paragraphe 2 de la CBE qui concerne seulement les demandes de brevet européen. P. Mathély paraît être de la même opinion ("Le droit européen des brevets d'invention", Librairie du Journal des Notaires et des Avocats, Paris 1978, page 435). Il résulte de cette interprétation que l'application du bénéfice de la restitutio in integrum n'est pas exclue dans ce cas.
5. En outre, même la Convention traite les déposants de manière différente dans le cas d'une demande européenne et dans le cas d'une demande Euro-PCT. Dans le cas d'une demande européenne, l'Office européen des brevets est tenu, d'après la règle 50 de la CBE, de notifier au demandeur le commencement du délai et de lui adresser le texte des dispositions légales (cette obligation a été insérée dans la Convention sur demande expresse des cercles intéressés pour éviter une perte du droit). Les règles applicables aux demandes Euro-PCT ne contiennent pas de dispositions correspondantes et en conséquence la requérante n'a pas été avisée par l'Office européen des brevets à quelle date le délai pour présenter la requête en examen expire.
6. L'interprétation que la restitutio in integrum dans de tels cas est possible est, en outre, conforme avec celle concernant les autres délais qui sont à respecter lors de la transformation de demandes internationales en demandes européennes. Nous reconnaissons que le demandeur peut être rétabli dans ses droits dans le délai d'un mois mentionné dans la règle 104 ter, alinéa 1 de la CBE, pour payer la taxe nationale, la taxe de recherche et les taxes de désignation.
En outre, l'article 79, paragraphe 2 de la CBE est expressément mentionné dans cette disposition bien que le rétablissement dans ce délai soit aussi exclu d'après l'article 122, paragraphe 5 de la CBE. Mais il est évident que, aussi pour des raisons d'harmonie du système et d'équité, le non-paiement des taxes de désignation doit être traité de la même manière que celui des autres taxes mentionnées.
7. En conclusion, vu que l'alinéa 5 de l'article 122 de la CBE n'exclut pas l'application de la restitutio in integrum, qui est un principe général de la procédure fixé par la Convention, dans le présent cas la requérante doit être restaurée dans ses droits et la demande de brevet n'est donc plus réputée retirée.
8. Puisqu'il est fait droit au recours, il convient d'examiner si la taxe de recours est à rembourser d'après la règle 67. Le but de cette règle est de permettre d'éviter de punir le déposant pour une faute évidente commise par l'OEB et ne pouvant être corrigée que par l'introduction d'un recours. Une des conditions pour le remboursement est, d'après la règle 67, l'existence d'un vice substantiel de procédure. Sous le terme "vice de procédure" on comprend, en principe, que des règles de procédure n'aient pas été appliquées comme prescrit par la Convention, mais on peut y inclure aussi une information erronée, donnée par l'OEB, sur l'application de règles de procédure et qui, suivie par le déposant, peut aboutir aux mêmes conséquences que la fausse application de ces règles.
Dans le cas d'espèce, vu la complexité des règles des deux conventions et le manque d'expérience sur leur application, l'information erronée concernant l'imbrication de ces deux conventions doit être considérée comme vice substantiel de procédure. Compte tenu de l'effort que s'est donné la requérante pour bien appliquer ces règles nouvelles, il est équitable de lui rembourser la taxe de recours.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit:
1. La requérante est rétablie dans ses droits en ce qui concerne la présentation de la requête en examen dans le délai.
2. La décision de la section de dépôt de l'Office européen des brevets du 30 août 1979 est annulée.
3. Le remboursement de la taxe de recours est ordonné.