Information
Cette décision n'est disponible qu'en Anglais.
T 0273/84 (Silico-aluminate) 21-03-1986
Téléchargement et informations complémentaires:
Examen d'office
Nouveaux documents en procédure de recours sur opposition
I. La demande de brevet européen n° 79 400 119.8, déposée le 27 février 1979, pour laquelle a été revendiquée la priorité d'une demande antérieure française du 2 mars 1978, a donné lieu le 14 juillet 1982 à la délivrance du brevet européen n° 0 004 225, sur la base des quatre revendications suivantes :
1. Procédé de fabrication d'un silico-aluminate alcalin de type 4A par mélange, à chaud, d'au moins une source renfermant de la silice et de l'alumine avec un hydroxyde alcalin et de l'eau, l'un au moins des réactifs étant alimenté sous forme solide, et la cristallisation au moins partielle se produisant simultanément au mélange, caractérisé en ce qu'on mélange les réactifs en proportions telles que le milieu initial a la composition suivante exprimée en rapports molaires :
SiO2/Al2O3 compris entre 1,5 et 2,5
Na2O/SiO2 compris entre 0,8 et 1,20
H2O/Na2O compris entre 7 et 15
et prend l'aspect d'un mélange solide, puis on laisse évoluer ce mélange solide jusqu'à sa redispersion sous forme d'une suspension de silico-aluminate que l'on filtre, lave et sèche.
2. Procédé selon la revendication 1 caractérisé en ce que les conditions opératoires sont réglées de manière à atteindre l'état de mélange solide entre 1 minute et 30 minutes.
3. Procédé selon l'une des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que l'on introduit un réactif lors de l'opération de mélange et de cristallisation.
4. Procédé de fabrication d'un silico-aluminate de type Na-P par mélange, à chaud, d'au moins une source renfermant de la silice et de l'alumine avec un hydroxyde alcalin et de l'eau, l'un au moins des réactifs étant alimenté sous forme solide, caractérisé en ce qu'on mélange les réactifs en proportions telles que le milieu initial a la composition suivante exprimée en rapports molaires :
SiO2/Al2O3 compris entre 2,5 et 5
Na2O/SiO2 compris entre 0,6 et 1
H2O/Na2O compris entre 12 et 30
et prend l'aspect d'un mélange solide, une cristallisation au moins partielle se produisant simultanément au mélange, puis on laisse évoluer ce mélange solide à chaud jusqu'à redispersion sous forme d'une suspension de silico-aluminate que l'on filtre, lave et sèche.
II. La requérante (opposante) a formé opposition au brevet européen et requis sa révocation pour défaut d'activité inventive, par télex du 13 avril 1983 confirmé par lettre reçue le 15 avril 1983.
Les motifs de l'opposition s'appuyaient sur le document (1) DE-C-1 038 017 et étaient exclusivement dirigés contre la revendication 1 du brevet attaqué.
III. Par décision du 24 septembre 1984, la Division d'opposition a rejeté l'opposition en faisant valoir que le procédé, objet de la revendication 1 du brevet attaqué, différait essentiellement de cet art antérieur, d'une part par des rapports molaire se trouvant dans des domaines très étroits situés à l'intérieur des domaines indiqués dans le document (1), d'autre part par l'apport d'au moins l'un des réactifs directement sous forme solide dans le réacteur. Considérant que l'enseignement du document (1) ne pouvait suggérer à l'homme du métier les conditions opératoires revendiquées dans le brevet attaqué, la Division d'opposition a conclu que l'objet de la revendication 1 satisfaisait aux conditions de nouveauté et d'activité inventive.
IV. La requérante (opposante) a introduit contre cette décision un recours et acquitté simultanément la taxe de recours prescrite.
L'acte de recours accompagné des motifs a été reçu le 20 novembre 1984.
V. Dans son mémoire, la requérante (opposante) sollicite la révocation du brevet attaqué pour les motifs d'absence de nouveauté et d'activité inventive, aussi bien dans le cas des revendications 1 à 3 que de la revendication indépendante 4. A l'appui de ses motifs, la requérante cite quatre documents nouveaux. Le premier d'entre eux correspond toutefois au document FR-E-83 942 déjà considéré dans la procédure d'examen.
Ces documents sont les suivants :
(2) DE-A-1 467 051
(3) DE-B-2 725 496
(4) FR-A-1 213 628
(5) US-A-3 008 803
VI. Dans ses observations faisant suite au mémoire d'appel et reçues le 11 mars 1985, l'intimée (titulaire du brevet) réfute les raisonnements de la requérante et met en avant les aspects caractéristiques du procédé revendiqué, l'aspect solide du mélange, l'apport d'un réactif à l'état solide, la contrainte concernant les rapports molaires.
L'intimée demande le rejet intégral du recours, ce qui revient à demander le maintien du brevet sans modifications.
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108 ainsi qu'à la règle 64 de la CBE ; il est donc recevable.
2. Au titre de la règle 66(1) de la CBE, à moins qu'il n'en soit disposé autrement, les chambres de recours examinent le recours en appliquant les dispositions relatives à la procédure devant l'instance qui a rendu la décision faisant l'objet du recours.
Or, selon la règle 55c) de la CBE, l'acte d'opposition doit contenir une déclaration précisant la mesure dans laquelle le brevet européen est mis en cause par l'opposition, les motifs sur lesquels l'opposition se fonde ainsi que les faits et justifications invoqués à l'appui de ces motifs. Le délai d'opposition est de neuf mois (article 99(1) de la CBE).
Cependant, au-delà du délai d'opposition, c'est avec le mémoire exposant les motifs du recours contre la décision de la Division d'opposition que la requérante a produit quatre nouveaux documents à l'appui de ses motifs.
La question se pose donc de savoir si, dans une procédure de recours faisant suite à une procédure d'opposition, la Chambre peut admettre de nouveaux documents, ou si la Chambre doit s'en tenir aux délais d'opposition imposé par l'article 99 de la CBE.
L'article 114(2) de la CBE prévoit que l'Office européen des brevets peut ne pas tenir compte des faits que les parties n'ont pas invoqués ou des preuves qu'elles n'ont pas produites en temps utile.
Toutefois, cette latitude est implicitement conditionnelle et n'est évidemment laissée aux instances de l'OEB que pour permettre un découlement normal de la procédure en prévenant des abus tactiques. Il est à noter que les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB insistent sur l'urgence qu'il y a à produire les pièces justifiant une opposition et sur les délais imposés (Directives D-IV, 1.2.2.1 f, dernier paragraphe, D-V 2, E-VI 2 et J.o. n° 9/1985, p. 272, 277 et 278.
Il n'en reste pas moins que l'article 114(1) de la CBE énonce un principe qui doit être observé par l'instance compétente de l'OEB dans toute procédure qui se déroule devant elle. Il s'agit de l'examen d'office : "Au cours de la procédure, l'Office européen des brevets procède à l'examen d'office des faits ; cet examen n'est limité ni aux moyens invoqués ni aux demandes présentées par les parties."
Il ressort donc de cet article que si l'examen n'est pas limité aux moyens présentés par les parties, il les inclut cependant.
En outre, cet examen d'office constitue une obligation dans chaque procédure. Dans le cas présent, le document (3), en tout cas, ne peut pas être négligé. Ce document met déjà en question la nouveauté de l'objet du brevet et, par là même, la validité de la décision attaquée. L'appréciation de la recevabilité des trois autres documents nouveaux est laissée à la discrétion de la première instance.
3. L'objet du brevet attaqué est un procédé de fabrication d'un silico-aluminate alcalin comportant le mélange, à chaud, d'au moins une source renfermant de la silice et de l'alumine avec un hydroxide alcalin et de l'eau, l'un au moins des réactifs étant alimenté sous forme solide, l'évolution du mélange jusqu'à l'obtention d'une suspension de silico-aluminate, la filtration, le lavage et le séchage.
Selon les proportions des réactifs dans le mélange, le silico-aluminate obtenu est du type 4A ou du type Na-P.
Dans le premier cas (revendication 1), le milieu initial doit avoir la composition suivante exprimée en rapports molaires :
SiO2/Al2O3 compris entre 1,5 et 2,5
Na2O/SiO2 compris entre 0,8 et 1,2
H2O/Na2O compris entre 7 et 15
Dans le deuxième cas (revendication 4), le milieu initial doit avoir la composition suivante :
SiO2/Al2O3 compris entre 2,5 et 5
Na2O/SiO2 compris entre 0,6 et 1
H2O/Na2O compris entre 12 et 30
4. Parmi les documents cités par la requérante (opposante), le document (3) est retenu par la Chambre comme étant le plus pertinent de l'état de la technique. Ce document décrit un procédé de préparation de zéolite A en une étape et selon lequel du métakaolin est ajouté à de la soude et à de l'eau dans un mélangeur de façon que le rapport molaire H2O/Na2O soit compris entre 15 et 100. Tous les exemples 1 à 13 du document (3) sont réalisés avec du métakaolin, ce qui implique des rapports molaires Na2O/SiO2 et SiO2/Al2O3 constants qui tombent dans les intervalles revendiqués dans le brevet attaqué. L'ensemble est mélangé à température élevée (85° C), puis filtré et le filtrat est lavé et séché. Selon ce document, il est possible d'obtenir une zéolite A avec une pureté de 90 % ou même 95 % (voir revendication unique ; colonne 1, lignes 44 à 47 et 62 à 68 ; colonne 2, lignes 4 à 9 et 31 à 35 ; exemple 1 et tableau des colonnes 3 et 4).
5. Dans sa note d'observations consécutive au mémoire de recours, l'intimée (titulaire du brevet) reconnaît la divulgation du rapport molaire H2O/Na2O = 15, mais elle estime que le procédé décrit dans le document (3) est contraire à l'enseignement du brevet attaqué qui implique une condition de mélange à l'état solide et, qu'en conséquence, la revendication 1 est nouvelle.
Cet argument peut être mis en question. En effet, la revendication 1 du brevet attaqué précise seulement que l'un au moins des réactifs est alimenté sous forme solide. Celà est bien le cas selon le document (3) (voir exemple 1).
En outre, une délimitation, qui apparaît immédiatement réalisable sur une valeur limite du rapport molaire H2O/Na2O, par rapport au document (3) ne lèverait pas le doute quant à l'activité inventive de ce qui en résulterait dans la revendication.
6. Au vu de ce nouvel état de la technique le plus pertinent, la décision attaquée de la première instance ne peut être maintenue, sans même qu'il soit nécessaire de poursuivre plus loin les investigations. L'examen de brevetabilité doit être repris sur des bases nouvelles car le problème technique sous-jacent à l'invention doit être déterminé à partir d'un nouveau document. Cette tâche incombe, en premier lieu à la première instance.
Un examen effectué par la chambre, de son propre mouvement, sur ces nouvelles bases et tenant compte du nouvel ensemble de l'état de la technique conduirait nécessairement à une perte d'instance, ce qui serait contraire aux principes d'équité suivis par la Chambre.
La tolérance de l'admissibilité de documents produits hors des délais d'opposition pourrait ainsi être une source d'abus difficilement contrôlables.
La Chambre reconnaît que l'acceptation de tels documents conduit nécessairement à une prolongation considérable de la procédure et que des limites doivent être fixées à de tels procédés. Ces limites ne sont pas dépassées dans le cas présent, de l'avis de la chambre, pour les raisons précédemment citées (points 2, 4 et 5 des motifs). L'inconvénient résultant de la prolongation de procédure est contrebalancé ici par l'obligation d'examen d'office imposée par l'article 114(a) de la CBE à toutes les instances de l'Office européen des brevets.
7. La Chambre doit donc annuler la décision de la première instance sans juger de la pertinence des motifs de cette décision. En conséquence, la chambre fait usage du pouvoir qui lui est conféré par l'article 111(1) de la CBE de renvoyer l'affaire à la Division d'opposition pour un nouvel examen de la nouveauté et de l'activité inventive relatives aux revendications 1 à 4 du brevet attaqué.
DISPOSITIF
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la nouvelle instance pour la reprise de l'examen d'opposition en tenant particulièrement compte du nouveau document 3 produit avec le mémoire de recours reçu le 20 novembre 1984.