T 0019/87 (Procédure orale) 16-04-1987
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1. Si une notification émanant d'une partie constitue proprement une requête en procédure orale, il n'est pas permis de rendre une décision défavorable sans avoir eu préalablement recours à la procédure orale.
2. Le fait d'avoir constaté dans une décision, alors que c'était à tort, qu'il n'avait pas été formulé de requête en procédure orale ne constituait ni a) un motif ayant servi de fondement à la décision de rejet, par conséquent il n'y a pas eu violation de l'article 113(1) CBE ni b) un vice substantiel de procédure aus sens de la règle 67 CBE.
Demande d'une entrevue comme étape préalable à la procédure orale
Décision de rejet prise sans recours à une procédure orale
Décision rapportée et nulle ab initio
Demande renvoyée devant la Division d'examen pour procédure orale
Vice substantiel de procédure (non)
I. La demande de brevet européen en cause a été déposée le 25 août 1982. Dans une notification émise le 21 janvier 1985 conformément à l'article 96(2) CBE, la Division d'examen a invité le requérant à lui présenter ses observations, ce qu'il a fait en réponse dans sa lettre du 31 juillet 1985, où il déclarait en conclusion : "Si l'examinateur devait encore avoir des objections à formuler à l'encontre de la présente demande, je demande à pouvoir en discuter lors d'un entretien téléphonique ou d'une entrevue avant qu'une notification défavorable ne soit émise". Dans une nouvelle notification émise le 15 octobre 1985 conformément à l'article 96(2) CBE, la Division d'examen a fait savoir au requérant, en l'invitant de nouveau à présenter ses observations, qu'aucune des revendications de sa demande ne comportait d'objet impliquant une activité inventive. Ladite notification se terminait sur cette phrase : "Dans ces conditions, une entrevue ne paraît pas utile. Si toutefois le demandeur formulait une requête en procédure orale conformément à l'article 116 CBE, il serait recouru à une telle procédure". Le requérant a présenté ses observations dans une lettre datée du 23 avril 1986, reçue à l'Office le 25 avril 1986, à la fin de laquelle il déclarait :
"Pour le cas où l'examinateur n'admettrait pas mes conclusions, je réitère ma demande d'entrevue comme étape préalable à la procédure orale, avant qu'une décision de rejet de la demande de brevet ne soit rendue".
Le 4 août 1986 a été rendue une décision de rejet, dans laquelle il était constaté que la revendication 1 n'était "pas admissible, faute d'activité inventive" et que "l'existence d'un objet impliquant une activité inventive ne [ressortait] ni des revendications dépendantes ni de la description". Il était également précisé dans la décision que "dans ces conditions, l'entrevue sollicitée par le demandeur n'a pas été jugée utile.
Or, même après que la Division d'examen en eut informé le demandeur, en lui signalant qu'il avait la possibilité de demander une procédure orale conformément à l'article 116 CBE (notification en date du 15 octobre 1985, p. 2), celui-ci n'a pas présenté de requête en procédure orale, mais a maintenu sa demande d'entrevue". La demande de brevet a en conséquence été rejetée.
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Il s'agit essentiellement de savoir si, replacée dans son contexte tel qu'il a été reconstitué au point I ci-dessus, la dernière phrase de la lettre du requérant en date du 23 avril 1986 doit ou non être considérée comme une requête en procédure orale au sens de l'article 116 CBE. Pour la Chambre, cette phrase contenait à vrai dire une double requête, à savoir une demande d'entrevue et une requête en procédure orale.
3. Il est évident qu'une demande d'entrevue n'est pas en soi une requête en procédure orale. Il est tout aussi évident que si la division d'examen reçoit une demande d'entrevue, elle n'est pas tenue de l'accorder. La pratique suivie est exposée dans les "Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets", point C-VI, 6.1 : "Si le demandeur ou son mandataire demande une entrevue, celle-ci devrait être accordée à moins que l'examinateur n'estime que cela ne serait d'aucune utilité". Dans la présente espèce, l'examinateur avait fait savoir dans la notification du 15 octobre 1985 que selon lui une entrevue ne paraissait pas utile. En conséquence, lorsque le requérant a réitéré sa demande d'entrevue dans sa lettre du 23 avril 1986, il devait savoir que sa demande risquait de ne pas être accordée. La Chambre estime que la demande d'"entrevue comme étape préalable à la procédure orale" formulée dans cette lettre ne peut être interprétée que comme une requête par laquelle le demandeur sollicite à la fois une entrevue (susceptible d'être accordée ou non) et la tenue d'une procédure orale. En pareil cas, aux termes de l'article 116 CBE, "il est recouru [obligatoirement] à la procédure orale" devant la division d'examen. Celle-ci n'était pas habilitée à rendre une décision sans citer d'abord le requérant à une procédure orale, et sa décision est donc nulle ab initio. Il est fait droit au recours, et la demande doit être renvoyée devant la Division d'examen afin que celle-ci tienne une procédure orale conformément à la requête qui avait déjà été formulée avant qu'elle n'ait statué sur la demande de brevet.
4. En ce qui concerne l'allégation du requérant selon laquelle la décision de rejet a été rendue en violation de l'article 113(1) CBE, il s'agit de savoir si ladite décision se fonde ou non sur "des motifs" au sujet desquels le requérant n'a pas pu prendre position. Or c'est l'absence d'activité inventive et la preuve de cette absence qui ont servi de fondement à la décision de rejet. La Chambre estime que le fait d'avoir constaté dans une décision, alors que c'était à tort, qu'il n'avait pas été formulé de requête en procédure orale ne constituait pas un "motif" ayant servi de fondement à la décision de rejet de la demande de brevet européen. Il n'y a donc pas eu violation de l'article 113(1) CBE.
5. Etant donné qu'il a été fait droit au recours, il convient d'examiner la requête présentée par le requérant en vue d'obtenir le remboursement de la taxe de recours visé à la règle 67 CBE.
La Chambre estime que le droit à la tenue d'une procédure orale prévu à l'article 116 CBE est un droit très important en matière de procédure. Dans la présente espèce, la dernière phrase de la lettre du requérant en date du 23 avril 1986 aurait dû normalement être interprétée comme pouvant constituer une demande de procédure orale. Si, dans un cas particulier, il y a doute en ce qui concerne l'existence d'une demande de procédure orale, il va de soi qu'il convient, dans la pratique, de demander à la partie intéressée de préciser sans équivoque son intention.
Dans la présente espèce toutefois, la Division d'examen a constaté dans sa décision que le requérant n'avait pas demandé de procédure orale. Pour les motifs ci-dessus énoncés, la Chambre estime que, bien qu'il s'agisse d'une constatation erronée, l'erreur commise par la Division d'examen constituait une erreur de jugement, et non pas un vice de procédure. La Chambre considère en outre que le fait de ne pas avoir demandé au requérant de préciser son intention ne constitue pas un vice de procédure. Il n'y a donc pas lieu d'accorder le remboursement de la taxe de recours prévu par la règle 67 CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision de la Division d'examen en date du 4 août 1986 est annulée.
2. La demande est renvoyée devant la Division d'examen pour que celle-ci tienne une procédure orale, conformément à l'article 116 CBE, avant de décider de rejeter la demande ou de délivrer le brevet européen n° 82 304 491.2 en vertu de l'article 97 CBE.
3. La requête en remboursement de la taxe de recours est rejetée.