T 0711/99 (Transfert de l'opposition/L'OREAL) 21-10-2003
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I. L'opposant ne peut disposer librement de sa qualité de partie à la procédure conformément au principe général du droit selon lequel les actions en justice ne peuvent se transmettre à titre particulier gratuit ou onéreux mais seulement par voie universelle (point 2.1.5b)). Dès lors qu'il a formé opposition en remplissant les conditions pour que cette opposition soit recevable, il est opposant et le demeure jusqu'à la fin de la procédure ou de sa participation à la procédure.
II. La transmissibilité de la qualité d'opposant, admise au profit d'un ayant cause à titre particulier à l'occasion de la cession d'un département industriel, demeure une exception au principe général du droit de l'indisponibilité de l'opposition ci-dessus cité.
III. Cette exception est d'interprétation restrictive (point 2.1.5c)) et s'oppose à ce que par voie d'analogie soit reconnue à la société mère opposante, à l'occasion de la cession de la filiale qui avait elle même qualité pour former opposition dès l'origine, la faculté reconnue à un opposant de céder sa qualité d'opposant à l'occasion de la cession d'un département industriel inséparable de ladite opposition, qui, lui, n'avait pas qualité pour former opposition (point 2.1.5.f)). L'intérêt à agir, notion indifférente quant à la recevabilité de l'opposition lors de la formation de l'opposition continue à n'avoir aucune incidence par la suite sur le sort du statut de l'opposant (point 2.1.5.d).
Transfert de l'opposition (non)
Modifications - recevables (oui)
Nouveauté au vu des documents des actes d'opposition (oui)
Eléments nouveaux de preuve : utilisation antérieure publique - tardifs (oui) - pertinents (non) ; nouveau document - tardif (oui) - pertinent (oui)
Renvoi (oui)
I. La demande de brevet européen n° 94 402 525.3, déposée le 8 novembre 1994 et revendiquant la priorité de la demande nationale FR 9400700 du 24 janvier 1994, a donné lieu à la délivrance du brevet européen n° 0 665 005 sur la base de 11 revendications. Les revendications 1 et 9 à 11 s'énonçaient comme suit :
II. Trois oppositions ont été formées en vue d'obtenir la révocation du brevet sur le fondement de l'article 100a) CBE, à savoir manque de nouveauté et d'activité inventive au vu, entre autres, des documents suivants :
III. La division d'opposition a révoqué le brevet litigieux. ...
IV. Un recours a été formé par la titulaire du brevet (requérante) contre cette décision, reçu le 6 juillet 1999 ; la taxe prescrite a été payée le même jour.
VII. Par lettre du 2 avril 2002, la société Bristol-Myers Squibb Company (intimée 3) a déclaré avoir vendu, suivant acte en date du 15 novembre 2001, à la société Procter & Gamble Company, la partie de ses actifs constituée par sa filiale, la société Clairol Incorporated, dans l'intérêt de laquelle l'opposition avait été formée. En conséquence, elle a requis que soit déclaré valide le transfert de son opposition à la Société Procter & Gamble Company. Dans les lettres du 9 août 2002, en réponse à une communication de la Chambre, commune à plusieurs affaires, et du 9 mai 2003, en réponse aux arguments de la requérante, l'intimée 3 a détaillé les moyens de fait et de droit au soutien de la requête de transfert. Elle a considéré que ces moyens n'étaient pas en conflit avec la jurisprudence et qu'une saisine de la Grande Chambre de recours, évoquée par la requérante, était entièrement inappropriée.
La Chambre, dans ladite communication commune à plusieurs affaires ainsi que dans l'annexe à la citation à la procédure orale, a considéré que la requête de transfert de l'opposition ne paraissait pas fondée au vu de la jurisprudence des chambres de recours et qu'elle ne voyait pas de motif justifiant une saisine de la Grande Chambre.
VIII. La procédure orale a eu lieu le 21 octobre 2003. Au cours de l'audience, la requérante a déposé un nouveau jeu de 10 revendications à titre de requête principale, dont la revendication 1 s'énonce ainsi :
IX. La requérante a présenté les arguments suivants :
a) Concernant le transfert de l'opposition, l'opposition 3 n'avait jamais appartenu à la société Clairol Incorporated. Elle avait été formée au nom de la société Bristol-Myers Squibb Company, qui ne pouvait disposer librement de sa qualité d'opposante, conformément à la décision G 3/97. L'opposant ne devant pas justifier d'avoir un quelconque intérêt à l'annulation du brevet pour agir, les raisons pour lesquelles Bristol-Myers Squibb Company avait fait opposition n'avaient aucune importance. Par conséquent, il convenait de rejeter la requête de transfert, et la procédure devait continuer avec Bristol-Myers Squibb Company en qualité d'opposante.
X. Les arguments des intimées peuvent se résumer ainsi :
a) Selon l'intimée 3, en ce qui concerne sa requête relative au transfert de l'opposition, la société Bristol-Myers Squibb Company était titulaire de la totalité des parts de sa filiale Clairol Incorporated au moment où elle a formé opposition. Clairol exerçait son activité dans le domaine technique du brevet en litige. L'intimée avait cédé la partie de ses actifs que constituaient les parts de cette filiale à la société Procter & Gamble Company selon acte du 15 novembre 2001. Elle prétendait avoir formé l'opposition pour le compte de sa filiale de sorte que cette opposition s'était trouvée transférée à la société Procter & Gamble Company du fait de la cession de la filiale elle-même.
La Chambre, selon l'intimée 3, interprétait de façon erronée la décision G 4/88 de la Grande Chambre de recours, et en particulier la condition posée pour qu'une cession d'opposition fût possible, de "accessoire inséparable de l'élément patrimonial (cédé)" (inseparable part of those (transferred) assets).
Toujours selon l'intimée 3, le fait que l'actif cédé fût constitué d'une entité juridique distincte de celle ayant formé opposition ne saurait avoir pour effet de rendre la condition, d'"accessoire inséparable", impossible à remplir. Au contraire, les faits de la présente espèce étaient tout à fait compatibles avec les exigences de la décision G 4/88, parce que cette décision insistait sur la circonstance que l'opposition avait été intentée dans l'intérêt de l'entreprise ("instituted in the interest of the opponent's business") et que dans ce contexte le terme "entreprise" (business) devait être entendu dans un sens large comme qualifiant une activité économique exercée ou susceptible d'être exercée par l'opposante.
Dans le présent cas l'opposition devait être considérée comme un élément inséparable du patrimoine de la filiale cédée et cédée avec la filiale à la nouvelle société.
L'interprétation proposée par la Chambre risquait de conduire à des situations illogiques, tant il était vrai qu'un transfert pourrait être admis dans le cas où il était opéré par la société opposante en même temps qu'une partie de son patrimoine mais non dans le cas où la partie du patrimoine à laquelle se rapporte l'opposition était une entité juridique distincte, alors que précisément l'élément du patrimoine dans l'intérêt duquel l'opposition avait été formée devait être un élément déterminé du patrimoine de l'opposante et que rien n'était plus déterminé qu'une entité juridique définie. A la lumière de la décision G 4/88 la question pertinente n'était pas de savoir si l'entité cédée était un accessoire inséparable du patrimoine de l'opposante mais si l'opposition était inséparable de l'entité cédée.
Les conclusions de la décision G 3/97 ne changeaient pas la situation, car le point essentiel pour la décision de la chambre n'était pas de savoir au nom de qui l'opposition avait été formée mais "dans l'intérêt de qui l'opposition devait être transférée".
Lors de la procédure orale, l'intimée 3 a soumis, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Chambre ne ferait pas droit à sa demande de transfert, une requête aux fins de voir saisir la Grande Chambre de recours sur deux questions de droit.
Les deux autres intimées s'en sont rapportées sur cette question.
XI. La requérante (titulaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur le fondement des revendications 1 à 10 de la requête principale déposée à l'audience et à défaut sur le fondement de l'une des requêtes subsidiaires 1 à 12.
XII. Les intimées (opposantes) ont demandé le rejet du recours.
L'intimée 3 (Bristol-Myers Squibb Company) a requis, en outre, que soit déclaré valide le transfert de l'opposition à la société Procter & Gamble Company. À titre subsidiaire, elle a demandé que soit déclaré valide le transfert de l'opposition à la société Clairol Incorporated. A titre encore plus subsidiaire, elle a demandé que la Chambre saisisse la Grande Chambre de recours des deux questions suivantes :
"1. If an opposition is filed by a parent company solely in the interest of a wholly owned subsidiary of that company, and then that subsidiary is sold to a third party, can the opposition be assigned to the third party, and if not, can it be assigned to the subsidiary?
2. What evidence is necessary to show that the opposition was filed by the parent company "solely in the interest of" the wholly owned subsidiary?"
1. Le recours est recevable puisque les conditions des articles 106 à 108 CBE en combinaison avec les règles 1(1) et 64 CBE sont satisfaites.
2. Questions de procédure
2.1 Transfert de l'opposition
L'argument majeur de l'opposante 3 (intimée 3) procède d'un raisonnement par analogie et ce, à partir du cas T 349/86 (JO OEB 1988, 345) à l'origine de la décision G 4/88 (JO OEB 1989, 480) de la Grande chambre de recours. Il convient dès lors d'analyser la portée de cette décision puis de considérer si l'intimée 3 est fondée à raisonner par analogie avec ce cas.
2.1.1 Dans l'instance T 349/86 la chambre était saisie d'une demande de transfert de la qualité d'opposant formée par l'ayant cause à titre universel de l'opposant originaire au profit du cessionnaire à titre particulier de partie de son activité industrielle et commerciale.
En effet la société M.A.N. Maschinenfabrik Augsburg-Nürnberg Aktiengesellschaft avait cédé courant 1985 à la société MAN Nutzfahrzeuge GmbH son activité d'entreprise dans le domaine des véhicules utilitaires, puis avait ultérieurement fusionné l'ensemble de ses actifs restants avec ceux de la société Gutehoffnungshütte Aktienverein Aktiengesellschaft, pour former par la suite leur ayant droit et successeur universel la société MAN Aktiengesellschaft. A la suite de la décision de rejet par la division compétente de l'opposition originairement formée par la société M.A.N. Maschinenfabrik Augsburg-Nürnberg Aktiengesellschaft pour le compte de son département "véhicules utilitaires", la société MAN Aktiengesellschaft ayant droit universel de l'opposant a formé recours en cette qualité et simultanément demandé le transfert de l'opposition à la société MAN Nutzfahrzeuge GmbH, cessionnaire à titre particulier du département "véhicules utilitaires" intéressé par l'opposition.
La question de droit ayant abouti à la décision G 4/88 était ainsi formulée :
"Une procédure d'opposition engagée devant l'Office européen des brevets est-elle seulement transmissible aux héritiers de l'opposant ou peut-elle être cédée librement ou avec l'entreprise ou une partie de l'entreprise de l'opposant exerçant dans un domaine technique dans lequel l'invention objet du brevet contesté peut être exploitée?"
2.1.2 Dans les motifs de sa décision la Grande Chambre pose en liminaire le principe implicitement reconnu par la règle 60(2) CBE, selon lequel la qualité d'opposant est transmise de droit aux héritiers et par analogie à l'ayant droit, successeur universel de l'opposant (cf. point 4 des motifs de G 4/88).
Ensuite, la Grande Chambre considère qu'en cas de cession de l'élément particulier du patrimoine que constitue une partie de l'entreprise de l'opposant originaire, dans le cas de l'espèce son département de véhicules utilitaires, l'action en opposition peut être transmise en vertu du principe selon lequel "l'accessoire suit le principal" dès lors que l'opposition a été intentée dans l'intérêt de la partie de cette entreprise, correspondant ainsi nécessairement à l'activité industrielle cédée (cf. point 6 des motifs de G 4/88).
2.1.3 Les faits de l'espèce pendante devant cette Chambre diffèrent de ceux ayant abouti à la décision G 4/88 essentiellement en ce que la société Bristol-Myers Squibb Company, possédant une filiale, la société Clairol Incorporated, active dans le domaine des teintures capillaires qui est celui du brevet contesté, a néanmoins choisi d'exercer personnellement l'action en opposition. Ultérieurement elle a cédé à titre onéreux et particulier cette filiale à la société Procter & Gamble Company au profit de laquelle elle requiert aujourd'hui le transfert de la qualité d'opposante.
Les faits diffèrent donc en ce que dans l'instance ayant abouti à la décision G 4/88 le département "véhicules utilitaires" de la société M.A.N. Maschinenfabrik Augsburg- Nürnberg Aktiengesellschaft n'était point constitué en société filiale mais demeurait un département industriel particulier : il ne disposait pas d'une personnalité juridique propre lui conférant la qualité de "personne" au sens de l'article 99(1) CBE, seule propre à lui permettre de former opposition.
Force est de constater dans la présente espèce que la société Bristol-Myers Squibb Company a délibérément agi en son nom propre lorsqu'elle a formé opposition au brevet contesté, sans préciser à aucun moment agir pour le compte de sa filiale (à supposer qu'une telle mention puisse avoir une quelconque portée), alors même que cette filiale dotée de l'entière capacité juridique et comme telle constitutive d'une "personne" au sens de l'article 99(1) CBE se trouvait parfaitement en droit d'agir en opposition en son nom propre, fût-ce pour déférer aux instructions de sa société mère.
2.1.4 Il est donc établi :
a) d'une part que dans un cas la société M.A.N. Maschinenfabrik Augsburg-Nürnberg Aktiengesellschaft était seule en droit de former opposition dès lors que son département "véhicules utilitaires" ultérieurement cédé, ne disposant pas de personnalité juridique, ne pouvait pas agir,
b) d'autre part que dans le cas d'espèce la société Bristol-Myers Squibb Company, ayant un droit à former opposition comme toute personne au sens de l'article 99(1) CBE, a choisi d'exercer ce droit à titre personnel, alors que de son côté la société Clairol Incorporated, entité juridique distincte possédant la capacité de former opposition, active dans le domaine du brevet contesté, disposait de la pleine capacité juridique et avait donc qualité à agir et exercer personnellement le droit de former opposition, dont ne dispose pas un simple département industriel.
2.1.5 Les conséquences de cette différence de circonstances quant à la transmission de la qualité d'opposant sont à tirer à la lumière de la décision de la Grande Chambre de recours, G 3/97 (JO OEB 1999, 245) :
a) Les deux décisions de saisine respectivement T 301/95 (JO OEB 1997, 519) et T 649/92 (JO OEB 1998, 97) posaient pour l'essentiel la question de savoir si une opposition est irrecevable du seul fait que l'opposant agit pour le compte d'un tiers.
b) La décision G 3/97 indique que : "L'opposant ne peut disposer librement de sa qualité de partie à la procédure. S'il a rempli les conditions pour que l'opposition soit recevable, il est opposant et le reste jusqu'à ce que prenne fin la procédure ou sa participation à la procédure. Il ne peut pas transmettre sa qualité à un tiers" (cf. point 2.2 des motifs).
Ce motif, correspondant au principe général du droit selon lequel les actions en justice ne peuvent se transmettre à titre particulier gratuit ou onéreux mais seulement par voie universelle, quelle qu'en soit la nature à l'occasion, par exemple, d'une succession, reprend et confirme une jurisprudence constante des chambres de recours (T 659/92, JO 1995, 519, points 3, 3.1 à 3.3 des motifs ; T 670/95 du 09.06.98, non publiée dans le JO OEB ; T 298/97, JO 2002, 83).
c) Il s'ensuit que l'exception à ce principe, telle que définie dans la décision G 4/88 considérée ensemble avec la décision G 3/97, doit être interprétée restrictivement.
En effet les décisions G 4/88 et G 3/97 sont complémentaires, elles doivent se lire comme traitant chacune un aspect particulier de l'opposition : G 4/88 dégage les conditions auxquelles la transmission de la qualité dopposant est possible, G 3/97 définit les conditions nécessaires et suffisantes pour obtenir et conserver la qualité dopposant.
d) En insistant sur l'intérêt qu'avait la société mère en faisant opposition tant qu'elle détenait la filiale active dans le domaine du brevet contesté et qu'elle a perdu en même temps qu'elle a cédé cette filiale, pour soutenir qu'elle a agi pour le compte de sa filiale, l'opposante subordonne en réalité le droit d'agir en opposition - et par la suite la qualité d'opposant - à l'existence d'un intérêt.
Or la notion d'intérêt à agir qui fait référence à des conditions subjectives liées à la personne qui initie une procédure, en l'occurrence l'opposant, exigées par certaines législations nationales, est en tant que telle étrangère à la procédure d'opposition régie par la CBE, le législateur de la CBE ayant expressément aménagé l'opposition comme un moyen de recours destiné au public ouvert par l'article 99(1) CBE à toute personne, sans exiger d'intérêt personnel à agir (cf. point 3.2.1 des motifs de G 3/97).
Dès lors que selon la décision G 3/97, "il ne saurait y avoir de "véritable" opposant à côté de l'opposant qui remplit les conditions de forme prévues" (cf. point 2.2 des motifs de G 3/97), la circonstance que la société mère ait agi pour le compte de sa filiale est indifférente. D'ailleurs, sauf raisons particulières faisant suspecter un abus, il n'y a pas lieu de vérifier pour le compte de qui agit celui qui a engagé la procédure en bonne et due forme (cf. point 3 des motifs de G 3/97). Celui qui a rempli en son nom propre les conditions requises pour la recevabilité de l'opposition n'est pas traité comme présumé opposant mais comme opposant.
Même si l'on admettait que l'opposante avait en l'espèce un intérêt à former opposition du temps où elle détenait sa filiale à 100%, cette circonstance indifférente quant à la recevabilité de l'opposition à l'origine, continue, lorsqu'elle disparaît, à n'avoir aucune incidence sur le sort de l'opposition ou la qualité d'opposante.
e) En cela, tous les développements sur la preuve à rapporter sur le fait que l'opposante aurait agi dans l'unique intérêt de sa filiale sont hors sujet. Le lien juridique entre l'opposante et des tiers (ici avec sa filiale) est juridiquement sans importance pour l'OEB (cf. point 3.2.2 des motifs de G 3/97).
f) La justification du principe de l'indisponibilité de l'opposition, indépendamment du principe général rappelé ci-dessus (point 2.1.2b) et du souci d'éviter un commerce des oppositions (T 298/97, précitée, cf. point 7.1 des motifs), réside dans la nature de la procédure d'opposition et son objectif qui est de permettre au public de contester la validité d'un brevet. Ce doit être une procédure simple et rapide que ne doivent pas entraver des considérations d'intérêt privé entre une partie et des tiers telles par exemple que celles liées à la transmission de la qualité d'opposant, l'OEB n'étant pas en outre, par sa finalité et ses moyens, l'organisme le mieux placé pour connaître de ces questions.
Ainsi donc la qualité d'opposant ne peut se transmettre qu'avec la cession d'une partie de l'activité économique d'un opposant ayant seul qualité pour agir en justice, dès lors que la division ou le département d'entreprise cédés ne disposent point de telle qualité qui est un attribut de la personnalité morale.
Tel n'est point le cas en l'espèce, où même si la société Clairol Incorporated était une filiale de Bristol-Myers Squibb Company à 100%, elle n'en disposait pas moins personnellement du droit d'agir en opposition, dès lors qu'elle était dotée de la pleine capacité civile, attribut de la personnalité juridique.
2.2 La saisine de la Grande Chambre de recours
2.2.1 Les développements ci-dessus démontrent que la question de la validité de la transmission de l'opposition à trancher ne ressortait pas d'un des deux cas de saisine de la Grande Chambre de recours (article 112(1) CBE) pour les raisons suivantes :
- la décision de la chambre en réponse à la question posée ne va pas à l'encontre de la jurisprudence établie, puisqu'il n'y a pas de jurisprudence divergente, mais elle applique le principe posé par G 4/88 et complété par G 3/97 : il n'y avait donc aucun impératif d'harmonisation du droit ;
- cette réponse ne supposait pas de trancher un important point de droit puisqu'il ne s'agissait que de tirer les conséquences de deux principes établis précédemment par les deux décisions précitées.
2.2.2 La question de la nature des preuves à fournir ne se pose finalement pas dans ce cas puisque l'objet de la preuve concerné à savoir que l'opposant avait agi dans l'unique intérêt de la filiale détenue à 100%, ne joue aucun rôle quant à la décision prise.
2.3 Par conséquent, le transfert ne peut être valable et la requête de l'intimée 3 est refusée.
2.4 Pour les raisons exposées ci-dessus, la requête subsidiaire de transfert à la société Clairol Incorporated doit également être rejetée.
2.5 La chambre ne reconnaissant pas la validité des transferts de l'opposition, les sociétés Procter & Gamble Company et Clairol Incorporated ne peuvent être considérées comme parties à la procédure de recours.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. Le transfert de l'opposition est refusé.
3. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré pour suite à donner.