2.7. Le droit d'être entendu pendant la procédure orale
2.7.2 Introduction de nouveaux arguments
Dans l’affaire T 248/92, la division d'examen avait fondé sa décision sur des arguments présentés pour la première fois lors de la procédure orale. La chambre a déclaré que la décision de la division d'examen n'était pas contraire à l'art. 113(1) CBE, estimant que, bien que la procédure orale vise notamment à régler dans toute la mesure du possible l'ensemble des questions qui se posent aux fins de la décision à rendre, il n'est aucunement obligatoire de rendre une décision dès la fin de cette procédure. Si le requérant avait jugé nécessaire de disposer d'un temps de réflexion, il aurait pu demander une suspension de la procédure orale ou la poursuite de la procédure par écrit de manière à pouvoir étudier en détail les nouveaux arguments présentés, dont l'importance était manifestement déterminante pour la décision. Dans l'affaire T 390/20, le requérant a affirmé avoir été "piégé" par une objection au titre de l’art. 83 CBE, qui avait été motivée par la division d’examen pour la première fois durant la procédure orale. Cependant, selon la chambre, la décision attaquée était fondée uniquement sur l’art. 56 CBE. En conséquence, toute autre objection soulevée durant la procédure orale était sans pertinence pour déterminer si le droit d’être entendu avait été accordé au requérant et n’avait pas conduit à une violation de l’art. 113 CBE.
Dans l'affaire T 623/12, la division d'opposition, s'appuyant sur un argument invoqué pour la première fois pendant la procédure orale par l'opposant, avait conclu que plusieurs requêtes subsidiaires n'étaient pas conformes à l'art. 123(2) CBE. La division d'opposition avait donné au titulaire du brevet une seule possibilité de déposer une nouvelle revendication, sur la base de l'une des requêtes subsidiaires antérieures, et l'avait averti que "d'autres requêtes étaient susceptibles d'être entachées d'autres irrégularités en vertu de l'art. 123(2) CBE". Elle avait ensuite jugé que la nouvelle requête subsidiaire ne satisfaisait toujours pas à l'art. 123(2) CBE. De l'avis de la chambre, l'avertissement de la division d'opposition n'avait pas permis au titulaire du brevet d'effectuer un choix en connaissance de cause, puisque aucune précision n'avait été donnée au sujet des objections et des requêtes visées. Ce faisant, la division d'opposition n'avait pas exercé son pouvoir d'appréciation concernant la recevabilité de la requête présentée tardivement par le titulaire du brevet, mais avait décidé arbitrairement de ne pas l'admettre. Cette décision arbitraire avait privé le titulaire du brevet d'une réelle possibilité de prendre position sur la recevabilité de sa requête supplémentaire et de répondre aux objections formulées par la partie adverse.
Dans l'affaire T 1014/10, le requérant (titulaire du brevet) avait fait valoir qu'au cours de la procédure d'opposition, il n'avait pas eu la possibilité d'étudier les moyens produits par l'opposant, ceux-ci n'étant parvenus à son bureau que le jour même de la procédure orale. La chambre a fait observer qu'il incombait aux parties – et à la chambre – de vérifier le contenu du dossier électronique pour s'assurer qu'aucun moyen supplémentaire n'y avait été ajouté dans les jours qui avaient précédé la procédure orale. En outre, le titulaire du brevet aurait pu requérir une interruption de la procédure orale pour étudier le contenu desdits moyens ou même demander à la division d'opposition de ne pas les admettre dans la procédure. Comme il ressort du procès-verbal, il n'a pas fait usage de ces options de procédure. Dans ces conditions, les moyens produits tardivement, qui ne présentaient du reste aucun fait nouveau, devaient être assimilés à de nouveaux arguments qui, en tout état de cause, auraient pu être avancés et examinés pendant la procédure orale. De l'avis de la chambre, il n'a pas été contrevenu à l'art. 113 CBE.
Dans l’affaire T 776/17, la division d’opposition avait rejeté la demande d’ajournement de la procédure orale par le requérant. La chambre a estimé que ne pas accorder au requérant (titulaire du brevet) suffisamment de temps pour réagir à une attaque contre l’activité inventive présentée par l’opposant pour la première fois durant la procédure orale devant la division d’opposition constituait une violation du droit du requérant d’être entendu.