T 0024/81 (Valorisation des métaux) 13-10-1982
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1. On rend objective l'appréciation de l'activité inventive en partant de l'état de la technique considéré, en déterminant en conséquence selon des critères objectifs le problème qui est posé et résolu conformément à l'invention, et en considérant la question de l'évidence de la solution donnée par la demande à ce problème en se plaçant du point de vue de l'homme du métier possédant les qualifications que l'on peut objectivement attendre de lui. Un simple examen des indices de la présence d'une activité inventive ne remplace pas l'appréciation technique selon l'article 56 de la CBE que porte l'homme du métier sur l'invention par rapport à l'état de la technique. S'il existe de tels indices, l'activité inventive peut, mais ne doit pas nécessairement, se dégager d'une vue d'ensemble de l'état de la technique, compte dûment tenu de tous les faits déterminants. Un procédé qui a été conçu pour répondre à un besoin qui est apparu assez peu de temps avant la date de la demande, n'est pas considéré comme impliquant une activité inventive lorsque ce besoin pouvait être immédiatement satisfait par une combinaison évidente d'enseignements tirés de l'état de la technique.
2. Lors de l'examen de l'activité inventive, il convient d'évaluer l'état de la technique du point de vue de l'homme du métier à la date de priorité qui s'applique pour la demande. Il s'ensuit qu'il faut faire appel à toutes les formes de réalisation publiées auparavant qui pouvaient suggérer à l'homme du métier une solution au problème posé, et cela même si elles n'étaient pas particulièrement mises en relief.
I. La demande de brevet européen n° 79 101 414 5 déposée le 9 mai 1979 et publiée le 28 novembre 1979 (numéro de publication 0 000 506), pour laquelle est revendiquée la priorité de la demande antérieure allemande du 11 mai 1978, a été rejetée par décision de la Division d'examen de l'Office européen des brevets en date du 17 février 1981, sur la base des huit revendications initiales, compte tenu de la suppression dans la revendication 2 qui avait été demandé par lettre du 26 novembre 1980. La teneur de la revendication 1 est la suivante:
Procédé de traitement de masses fondues ou d'alliages en fonte ou en acier dans un convertisseur, un creuset ou tout autre récipient, caractérisé en ce qu'on réalise l'ensemble du procédé d'affinage et de traitement avec de l'acide carbonique (Kohlensäure) dans un récipient, en continu et jusqu'à obtention de l'acier fini.
II. Le rejet était fondé sur ce que l'objet de la revendication 1 n'impliquerait pas une activité inventive. En effet, d'après le document DD-A-103 266, on connaît un procédé de traitement de masses fondues de fonte dans un convertisseur, dans lequel l'ensemble de l'affinage et de l'opération de balayage est réalisé en continu dans un convertisseur. On utilise de l'oxygène comme gaz d'affinage, et entre autres du bioxyde de carbone comme gaz de balayage.
Le procédé selon l'invention ne se distingue de ce procédé connu qu'en ce que l'affinage et le balayage sont tous deux effectués avec du gaz contenant du bioxyde de carbone. Les avantages du balayage de masses fondues d'acier avec du bioxyde de carbone sont déjà connus d'après les documents GB-A-869 953 et 1 258 451. L'utilisation d'un tel traitement de balayage pour la procédé connu d'après le document DD-A- susmentionné serait donc évidente pour l'homme du métier, d'autant plus que, dans cette antériorité, l'utilisation possible de bioxyde de carbone comme gaz de balayage est déjà indiquée.
En outre, il est connu d'après le document DE-C-934 772 qu'on peut utiliser avantageusement du bioxyde de carbone et des mélanges bioxyde de carbone-oxygène comme agents d'affinage dans la préparation de l'acier. Contrairement à l'hypothèse de la demanderesse, selon laquelle le bioxyde de carbone est alors fourni pour l'essentiel sous forme solide par de la chaux, ce brevet a trait principalement à l'utilisation de bioxyde de carbone à l'état gazeux, liquide ou solide et ne mentionne l'introduction de chaux que pour les procédés dans lesquels il faudrait de grandes quantités de chaux pour la constitution de laitier. L'utilisation de bioxyde de carbone comme agent d'affinage dans le procédé connu d'après le document DD-A- susdit ne reposerait donc pas sur une activité inventive.
L'argument de la demanderesse selon lequel la combinaison des enseignements tirés des publications mentionnées ne peut pas avoir été évidente pour l'homme du métier car sinon l'idée du procédé selon l'invention serait venue de l'industrie de l'acier, paraît incompréhensible à la Division d'examen. Le fait que la demanderesse s'occupe normalement d'autres domaines de la technique que celui dont relève la présente demande ne constitue pas, selon la Division d'examen, un indice de l'existence d'une activité inventive.
III. La demanderesse a formé un recours contre cette décision le 31 mars 1981 et déposé un mémoire exposant les motifs du recours le 6 juin 1981. Elle a requis l'annulation de la décision attaquée et la délivrance du brevet recherché sur la base des revendications déposées le 19 avril 1982. Ces revendications s'énoncent comme suit:
"1. Procédé de traitement de masses fondues ou d'alliages de fonte et d'acier par affinage et balayage dans un seul et même convertisseur, creuset ou autre récipient, caractérisé en ce qu'on affine la masse fondue de fonte avec environ 100 à 250 kg de CO2/t d'acier et qu'on la traite ensuite jusqu'à obtention de l'acier avec environ 0,25 à 50,0 kg de CO2/t d'acier, la totalité du processus d'affinage et du traitement consécutif étant réalisée avec de l'acide carbonique, dans un seul et même récipient, en continu et jusqu'à obtention de l'acier.
2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on insuffle de l'acide carbonique liquide sous une pression de 4,0 à 20,0 bars, de préférence sous une pression de 4 à 15 bars, dans la masse fondue de fonte.
3. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'on insuffle, dans la masse fondue de fonte, de l'acide carbonique gazeux ou liquide par des buses séparées, sous une pression de 0,2 à 20,0 bars, de préférence sous une pression de 2 à 15 bars.
4. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que, pendant l'affinage ou pendant le traitement consécutif de la masse fondue ou au cours des deux processus, on insuffle avec de l'acide carbonique un autre gaz oxydant à différentes concentrations et pendant différentes durées.
5. Procédé selon la revendication 4, caractérisé en ce qu'on utilise de l'oxygène comme autre gaz oxydant.
6. Procédé selon les revendications 1 à 4, caractérisé en ce que, pendant l'affinage ou pendant le traitement consécutif de la masse fondue ou au cours des deux processus, on insuffle avec l'acide carbonique un gaz additionnel de type inerte ou réducteur, en différentes quantités et pendant différentes durées.
7. Procédé selon la revendication 6, caractérisé en ce qu'on utilise, comme gaz additionnel de type inerte ou réducteur, de l'argon, de l'azote et/ou du monoxyde de carbone."
Subsidiairement, la requérante a demandé une procédure orale. Celle-ci a eu lieu le 13 octobre 1982.
IV. Le recours est pour l'essentiel motivé comme suit:
Les faits objectifs que sont la nouveauté et l'effet technique ne sont pas contestés. Par contre, l'activité inventive ne peut être appréciée que de manière subjective. C'est ainsi qu'on peut toujours, en combinant des éléments de l'état de la technique à la façon d'une mosaïque et rétrospectivement, c'est-à-dire en connaissance de l'invention, prétendre que la combinaison des différentes caractéristiques mène à l'objet de la demande sans le secours de l'esprit inventif. Dans le cas présent, on ne serait cependant pas parvenu au procédé revendiqué, même par un assemblage judicieux d'éléments de l'état de la technique.
L'idée inventive essentielle de la présente demande résiderait en ce que le traitement de masses fondues de fonte et d'acier, qui comprend l'affinage et le balayage subséquent, est réalisé par introduction d'acide carbonique comme moyen d'affinage et de balayage, en continu, dans un récipient unique, jusqu'à obtention de l'acier. Le document DD-A décrit certes un procédé pour le traitement de masses fondues de fonte dans le convertisseur, dans lequel l'affinage et l'opération de balayage sont réalisés en continu dans un récipient, mais dans lequel on utilise comme gaz d'affinage de l'oxygène et comme gaz de balayage, parmi de nombreuses possibilités, également du bioxyde de carbone. Il s'agit là du procédé classique d'affinage par l'oxygène, dans lequel on peut diminuer les teneurs en gaz non souhaitées par un balayage par impulsions avec de l'azote, de l'argon ou du bioxyde de carbone.
Le procédé selon l'invention se distinguerait du précédent en ce qu'aussi bien l'affinage que le balayage se font avec du bioxyde de carbone. Les autres antériorités ne concerneraient pas l'ensemble du procédé métallurgique, mais seulement des aspects partiels de celui-ci et ne pouvaient par conséquent fournir aucun enseignement technique pour le procédé d'ensemble revendiqué.
Dans le document DE-C-934 772, il est indiqué qu'on peut également utiliser de l'acide carbonique lors de l'affinage de masses fondues d'acier, tandis qu'on ajoute de la chaux non calcinée (CaCO2). Un tel procédé, qui utilise du bioxyde de carbone sous la forme liée du CaCO2, se distinguerait fondamentalement de l'affinage selon l'invention en ce que la libération du bioxyde de carbone à partir de CaCO2 entraîne un déficit thermique élevé, qui doit être compensé par un apport de chaleur. Il n'est pas contesté que, dans ce brevet, est également décrite l'utilisation de bioxyde de carbone gazeux; l'homme du métier n'aurait cependant pas pris en considération cette forme de réalisation, car elle n'est pas soulignée comme avantageuse.
Le document FR-A-1 058 181 décrit purement et simplement l'utilisation simultanée d'oxygène et de bioxyde de carbone dans l'enrichissement du fer et ne fournirait aucune suggestion pour le procédé selon l'invention.
Le fait que l'invention, qui apporte une contribution essentielle et économiquement simple à la solution des problèmes liés à l'environnement qui se posent à l'industrie de l'acier, n'ait pas été décelée par les spécialistes de ce secteur, fournirait un indice supplémentaire de l'existence d'une activité inventive.
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 et à la règle 65 de la CBE; il est donc recevable.
2. La version actuelle des revendications ne soulève aucune objection du point de vue formel. La revendication 1 résulte de la combinaison des revendications initiales 1 et 2. Les revendications 2 à 7 correspondent aux revendications 3 à 8 de la version antérieure.
3. Le procédé objet de la revendication principale dans sa version actuelle, telle que limitée au cours de la procédure de recours, concerne pour l'essentiel le traitement en continu de masses fondues de fonte et d'acier par affinage et balayage subséquent dans un récipient unique par introduction de différentes quantités d'acide carbonique comme agent d'affinage et de balayage. Un tel procédé ne saurait se déduire des publications soumises à la Chambre; il est donc considéré comme nouveau.
4. S'agissant d'apprécier l'activité inventive qu'implique ce procédé, la performance subjective de l'inventeur importe peu, de sorte que les antécédents de l'invention relatés lors de la procédure orale n'entrent pas en ligne de compte. Il convient bien plutôt d'évaluer la performance objective, car comme la nouveauté, l'activité inventive est une notion objective. L'appréciation de l'activité inventive est rendue objective par le fait que, partant de l'état de la technique considéré, on détermine selon des critères objectifs le problème qui est posé et résolu conformément à l'invention (voir la décision "Papier copiant sans carbone" JO n° 7/1981 p. 206, sommaire I), et l'on considère la question de l'évidence de la solution donnée par l'invention à ce problème en se plaçant du point de vue de l'homme du métier possédant les qualifications que l'on peut objectivement attendre de lui. On évite par là de considérer les choses rétrospectivement, en se prévalant de la connaissance de l'invention, ce qui est inadmissible.
5. Si l'on applique ce critère à la présente espèce, il faut considérer l'activité inventive du point de vue de l'homme du métier dans le domaine de la sidérurgie, qui était censé connaître parfaitement les publications déjà citées dans l'instance précédente, ainsi que le procédé de soufflage d'oxygène, qui, selon les indications de la requérante, avait été introduit dans la technique 30 ans auparavant. Il faut considérer comme un inconvénient dans ce procédé la forte surchauffe de la masse fondue lors de l'affinage, ce qui endommage le revêtement du convertisseur, d'où une contamination de la masse d'acier fondue par des particules provenant du revêtement (voir l'introduction de la description de la présente demande, page 1, lignes 12 à 16).
Une proposition de solution pour éviter ces inconvénients est déjà décrite dans le document DD-A-103 266. On affine, entre autres pour augmenter la puissance de refroidissement des gaz et donc pour accroître la tenue du revêtement du convertisseur (voir page 8, lignes 20 à 26), la masse fondue de fonte avec un jet pulsant d'oxygène, qui est entouré d'un milieu enveloppe, en particulier de la vapeur d'eau (revendications 1 à 10); ensuite on balaye la masse fondue d'acier, pour abaisser les teneurs en gaz parasites, en envoyant un jet de gaz pulsant inerte ou non-réactif, avec un milieu enveloppe qui l'entoure (revendication 14). On utilise comme gaz de balayage l'azote, l'argon, le bioxyde de carbone ou le gaz brûlé (revendication 15).
6. A la recherche d'une autre solution au problème connu, la requérante s'est proposé à la fois a) d'éviter une surchauffe de la masse fondue conduisant inévitablement à l'abaissement de la longévité du revêtement du convertisseur et à la contamination de la masse fondue par des particules du convertisseur, et b) d'empêcher la formation de fumées d'oxyde de fer rouge dans le processus d'affinage, pour rendre par là- même superflue l'utilisation d'installations filtrantes coûteuses. Le problème ainsi défini a été objectivement circonscrit au vu du résultat recherché et effectivement atteint selon l'invention (voir, dans la présente demande, page 2, dernière ligne, page 3, lignes 2 à 5, page 4, ligne 1 et page 8, lignes 24 à 26) (voir également à ce sujet "Aryloxybenzaldéhyde", JO n° 6/1982, page 217).
7. Pour résoudre ce problème selon la demande il est proposé essentiellement d'utiliser de l'acide carbonique comme agent d'affinage et de balayage.
8. L'homme du métier qui cherchait une nouvelle solution à ce problème dans l'état de la technique savait que des masses fondues de fonte se refroidissent lors de l'affinage avec de l'acide carbonique (voir le document DE-C-934 772, revendication 1 et page 2. lignes 24, 25 et 81, 82). Le refroidissement provient de la réaction endothermique du carbone contenu dans la fonte avec l'acide carbonique agent d'affinage, qui le transforme en monoxyde de carbone (voir également page 1, lignes 17 à 24, et page 2, lignes 34 à 36 de cette antériorité). La possibilité d'utiliser du bioxyde de carbone comme agent d'affinage s'offrait donc, à l'homme du métier pour la résolution du problème partiel a).
9. Pour la résolution du problème partiel b), le document FR-A-1 058 181 pouvait fournir la suggestion nécessaire. En effet, cette publication enseigne que la formation des fumées d'oxyde de fer rouge redoutées lors du traitement de masses fondues de fonte avec de l'oxygène peut être considérablement atténuée si l'on ajoute au gaz de balayage fait d'oxygène un composé qui donne par dissociation ou réduction une réaction endothermique (résumé 1°), par exemple de l'acide carbonique gazeux (résumé 2°b). Sur la base de cet enseignement, on pouvait prévoir que le passage - proposé en vue de la résolution du problème partiel a) - à du bioxyde de carbone comme agent d'affinage conduirait à la suppression totale de la fumée rouge. L'étroite relation entre les deux problèmes partiels ressort au reste déjà du document FR-A- susmentionné (voir page 2, colonne de gauche, lignes 1 à 5).
10. Si l'on combine ces enseignements selon l'état de la technique considéré, il devait apparaître à l'homme du métier que l'on pouvait résoudre le double problème posé en utilisant du bioxyde de carbone comme agent d'affinage. En outre, il était clair que - alors que ce n'était pas le cas pour les procédés en une seule étape selon les documents DT-C et FR-A- susmentionnés ayant fait l'objet d'une demande de brevet respectivement en 1938 et en 1951, les exigences en ce qui concerne le haut degré de pureté de l'acier à la date de priorité (11 mai 1978), en particulier en ce qui concerne des teneurs parasites en gaz, ne pouvaient être satisfaites que par balayage supplémentaire subséquent de la masse fondue d'acier avec un gaz de balayage, sur le modèle du document DD-A-103 266 susmentionné. Comme la résolution du problème global posé nécessitait l'addition de bioxyde de carbone lors de l'affinage, il était évident, pour des raisons de simplification du procédé, d'utiliser le même gaz, peu onéreux, également comme gaz de balayage.
11. Etant donné que la conception d'un procédé d'amélioration de la fonte par affinage et balayage subséquent de la masse fondue au moyen de bioxyde de carbone comme agent d'affinage et de balayage dans un convertisseur unique apparaissait comme évidente, la détermination des quantités de bioxyde de carbone nécessaires n'était qu'une question d'expérimentation de routine.
12. Il se révèle superflu d'aborder ici les publications citées par la requérante et les extraits de la littérature auxquels s'est référée la Chambre, la requérante ayant exposé lors de la procédure orale qu'elle n'entend pas en tirer argument pour établir l'existence de l'activité inventive qu'impliquerait sa demande.
13. La requérante allègue en revanche qu'en combinant ces publications, l'homme du métier ne serait pas parvenu au procédé revendiqué sans faire preuve d'activité inventive, faute de quoi il n'aurait pris en considération que les formes de réalisation qui y étaient particulièrement mises en relief. Le document DE-C- mentionné plus haut doit par conséquent s'interpréter comme ayant éventuellement suggéré l'utilisation de l'agent d'affinage spécialement mis en évidence, à savoir la chaux non calcinée (revendication 2). Parmi les agents de balayage cités conjointement sur un pied d'égalité dans le document DD-A- susdit (revendication 15), l'homme du métier aurait plutôt eu recours à de l'azote ou à de l'argon qu'au bioxyde de carbone. Il convient d'observer en premier lieu que l'argumentation de la demanderesse relative au document DE-C susdit repose sur une interprétation erronée. D'après la revendication principale qu'il contient, il faut utiliser comme agent d'affinage de l'acide carbonique. Même dans la terminologie de 1938, année du dépôt, cette expression désigne du bioxyde de carbone, parce que l'acide carbonique (H2CO2) n'existe pas. La requérante a elle-même désigné dans sa demande par le terme "acide carbonique" (voir la revendication 1 initiale) du bioxyde de carbone sous forme gazeuse, liquide ou solide (voir page 1, paragraphe 2 et les équations des pages 2 et 3 en liaison avec la page 3, lignes 20 à 23), et non pas le sel de potassium de l'acide carbonique. La revendication 2 de l'antériorité mentionne, comme solution de rechange, du bioxyde de carbone à utiliser en premier lieu d'après la revendication 1, "du bioxyde de carbone lié chimiquement à de la chaux". Cela ressort également sans ambiguïté de la description (voir page 2, lignes 67 à 71). Il faut alors considérer le bioxyde de carbone comme l'agent d'affinage mis en évidence dans cette antériorité. L'utilisation de chaux n'est recommandée que pour le procédé basique de préparation de l'acier (page 2, lignes 72 à 78).
14. Indépendamment de ce qui précède, la Chambre ne partage pas l'opinion de la requérante, selon laquelle on ne pourrait prendre en compte, pour l'appréciation de l'activité inventive, que les formes de réalisation préférées décrites dans une antériorité. Il convient au contraire, lors de l'étude de l'activité inventive, d'examiner l'état de la technique du point de vue de l'homme du métier à la date de priorité déterminante pour la demande. Il s'ensuit qu'il faut faire intervenir toutes les formes de réalisation publiées auparavant, qui pouvaient suggérer à l'homme du métier une idée pour résoudre le problème posé, et cela même lorsque les formes de réalisation n'étaient pas particulièrement soulignées. Peu importe donc ce qui était alors considéré comme avantageux dans les publications constituant l'état de la technique. A la date de priorité déterminante en l'espèce, l'homme du métier aurait, en remplaçant l'oxygène comme gaz d'affinage par de l'"acide carbonique", donné au bioxyde de carbone la préférence par rapport au "bioxyde de carbone chimiquement lié à de la chaux", et cela non seulement parce qu'il est technologiquement particulièrement avantageux d'utiliser des gaz lors de la fabrication de l'acier, mais parce que déjà le balayage subséquent avec du bioxyde de carbone gazeux faisait apparaître appropriée, d'après l'exemple du document DD-A- susmentionné (revendication 15), l'utilisation de bioxyde de carbone dans le même état physique lors de l'étape préalable (l'affinage).
Lorsque la requérante affirme que l'utilisation d'azote ou d'argon était plus évidente que celle de bioxyde de carbone, il lui échappe que, d'après le document DE-C, l'action néfaste de l'azote sur la qualité de l'acier était connue (page 1, lignes 4 à 9). En outre, l'homme du métier aurait certainement préféré le bioxyde de carbone, peu onéreux, à ce gaz rare et coûteux qu'est l'argon.
La résolution du problème exigeant l'utilisation de bioxyde de carbone comme agent d'affinage, il était évident également d'utiliser le même composé lors de l'opération de balayage pour des raisons de rentabilité du procédé.
15. La requérante voit un signe de l'existence d'une activité inventive dans le fait que le procédé selon la demande ait échappé à l'industrie de l'acier bien qu'il apportât une contribution importante du point de vue économique à la résolution des problèmes de pollution dans ce secteur. La Chambre est d'avis que, à côté de l'appréciation de l'activité inventive d'un point de vue objectif - comme exposé sous 4 - un simple examen des indices de l'existence d'une activité inventive ne remplace pas l'appréciation technique, selon l'article 56 de la CBE, que porte l'homme du métier sur l'invention par rapport à l'état de la technique. S'il existe de tels indices, l'activité inventive peut se dégager d'une vue d'ensemble de l'état de la technique, compte dûment tenu de tous les faits déterminants, sans qu'on puisse en conclure pour autant avec certitude que l'activité inventive en découle normalement. L'effet technique important que fait valoir la requérante ne fournit donc aucun indice de la présence d'une activité inventive, car loin d'être inattendu pour l'homme du métier, il découlait au contraire à l'évidence des données du problème.
16. Le fait que le procédé selon la demande ait échappé à l'industrie de l'acier paraît compréhensible lorsqu'on se demande si un besoin urgent s'est fait sentir en ce qui concerne ce procédé et, dans l'affirmative, à quel moment. La requérante a elle-même exposé que le procédé de soufflage d'oxygène, tel qu'il avait été introduit 30 ans auparavant dans la technique, était rationnel et attractif d'un point de vue économique mais que, du fait de la mise en place et surtout du renforcement des lois sur l'environnement ces dernières années, les coûts d'investissement pour des installations de dépoussiérage et de filtration s'étaient accrus d'environ 25, ce qui a entraîné un renchérissement de l'acier de 5 à 10 DM/t. Cela montre, selon la Chambre, que pendant toute une longue période il n'y avait pas de raison de s'écarter du procédé de soufflage à l'oxygène qui avait été introduit avec succès et fonctionnait en outre avec des appareils coûteux ayant une longue durée de vie, et que le besoin concernant le procédé de la requérante, qui respecte l'environnement conformément à la tendance actuelle, s'est fait sentir assez peu de temps avant la date de priorité de la présente demande. Un procédé qui a été conçu en vue de satisfaire un besoin apparu assez peu de temps avant la date de priorité revendiquée pour la demande ne peut pas être considéré comme impliquant une activité inventive dès lors que ce besoin pouvait être immédiatement satisfait par la combinaison évidente d'enseignements tirés de l'état de la technique.
17. Ces considérations ne s'appliquent pas seulement à la revendication 1, mais aussi aux sous-revendications 2 à 7. Celles-ci se réfèrent à la revendication principale et ne constituent que des formes préférées de réalisation du procédé selon la revendication 1: elle ne sont donc pas non plus admissibles.
18. ... la Chambre considère le recours comme non fondé.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit:
Le recours dirigé contre la décision de la Division d'examen de l'Office européen des brevets en date du 17 février 1981 est rejeté.